Socialistes,
pour réussir à gauche
Volonté - Vérité - Unité



 Motion présentée par François Hollande au congrès national du Mans du Parti socialiste (novembre 2005)

Les enjeux du congrès

 
Notre congrès doit être utile aux Français. Dès lors ses enjeux sont clairs :
     Répondre aux impatiences des Français qui souffrent des conséquences de l’une des politiques les plus réactionnaires que la droite ait conduite depuis le début de la Vème République, et qui attendent de nous une opposition forte et crédible.

     Rassembler les socialistes autour d’un projet ouvrant les voies d’un changement durable à gauche en 2007 permettant de répondre concrètement aux problèmes de nos concitoyens en matière d’emploi, de pouvoir d’achat, de services publics, d’éducation, de logement...

     Vaincre les doutes sur notre capacité à résoudre durablement la question du chômage, à maintenir nos solidarités dans un monde en mutation, à donner à chacun un espoir, une perspective, une chance sans céder à la tentation du grand écart entre les paroles dans l’opposition et les actes en responsabilité.

     Restaurer l’unité des socialistes pour unir la gauche, ce qui suppose de dépasser la controverse du débat sur le traité constitutionnel. Au PS, il n’y a pas des socialistes du « oui » et des socialistes du « non », il n’y a que des socialistes.
Notre congrès est donc l’occasion pour les militants de prendre la parole pour décider librement de l’orientation de leur parti, de sa stratégie de rassemblement, des conditions de l’alternative. Notre congrès est celui du projet. Et en aucune façon celui de la désignation de notre candidat(e) à l’élection présidentielle. Le temps viendra à la fin de l’année 2006 et nous en connaissons les règles.

Enfin, notre congrès du Mans doit être un moment refondateur pour le Parti de militants que nous sommes en rappelant également la force qui s’attache au respect du vote et de la démocratie interne. Notre identité politique comme notre crédibilité devant les Français en dépendent.

La France va mal. Le monde aussi. L’injustice est partout. La loi du plus fort imposée par le libéralisme provoque la colère, le désespoir ou le repli sur soi. L’accumulation de désordres sociaux, économiques, écologiques nourrit des inquiétudes et des peurs légitimes mais aussi une contestation nouvelle où s’affirme la recherche d’un autre monde et d’un autre avenir.

Ici, la droite applique avec cynisme et brutalité une politique aussi inefficace économiquement qu’injuste socialement et dangereuse pour notre pacte républicain. La solution serait, nous dit-on, dans la suppression des règles et des protections, dans la liquidation de notre « modèle social ».

Les Français ont exprimé à plusieurs reprises leur rejet de ces choix, que ce soit au travers des mouvements sociaux, ou lors des élections régionales et européennes de 2004. Le référendum du 29 mai a aussi été l’expression de cette exaspération et de ce refus d’un système où le capitalisme financier impose ses normes.

Dépasser le 29 mai, c’est bien sûr trouver ensemble des solutions à la crise actuelle de l’Europe, mais c’est surtout apporter des réponses à ceux qui ont exprimé leur souffrance.

Au-delà de nos propositions concrètes, il nous faut offrir un projet porteur d’un nouveau modèle de développement. Nous voulons bâtir une société juste et solidaire, contribuer à l’émancipation de chacun préparer l’avenir des générations futures. Nous devons donner du sens, fournir une perspective, donner confiance.

Notre responsabilité est claire : réussir le changement

Une course de vitesse est désormais engagée entre une alternative progressiste et d’autres formes de réponses - nationalistes ou ultra-libérales - à la crise économique, sociale et morale que connaît notre pays.

Dans la perspective de cette confrontation, une différence fondamentale oppose les deux visions qui seront proposés aux Français :
     D’un côté le modèle libéral décliné par tous les leaders de la droite avec pour point commun le fait que les impôts, les cotisations sociales, le droit du travail seraient à la source de tous les blocages du pays. Derrière les mots, les formules, les postures, c’est la poursuite de la politique menée depuis 2002 : dure avec les pauvres, douce pour les plus favorisés, cette voie est non seulement incapable d’assurer la croissance, mais surtout elle produit le délitement social et territorial porteur de toutes les formes de violences sur lesquelles la droite s’appuie d’ailleurs pour mieux exploiter les peurs et les désordres.

     De l’autre, le projet socialiste qui se fonde sur la conviction que la justice sociale est la solution et non le problème, que la richesse réelle d’une société se fonde sur l’égalité des destins, que la reconnaissance du rôle des acteurs publics et des forces sociales est le moyen de mettre en œuvre des réformes durables. Cette voie part des atouts de la France pour retrouver une ambition collective. Elle ne défend pas ce qui est, elle construit ce qui sera.
Forts du chemin parcouru depuis 2002 et tirant toutes les leçons du 29 mai, nous avons un devoir collectif : réussir en 2007. Nous devons avoir des principes pour agir, un projet pour changer, un parti pour rassembler la gauche et la mettre en mouvement.



Des principes pour agir

 
Être socialiste, c’est vouloir changer le monde. Nous devons être fiers de notre histoire. Nous devons tirer de nos succès comme de nos échecs passés une méthodologie utile pour l’avenir.

Face au désespoir semé par la politique de la droite, nous devons porter l’espoir d’un vrai changement, c’est-à-dire non pas une simple alternance, mais une alternative crédible et durable.

Notre démarche doit donc être guidée par des principes d’action : la volonté, la vérité, l’unité.

La volonté, c’est de déplacer les frontières du possible

Le Parti socialiste est le parti du mouvement. Il ne peut accepter l’ordre des choses comme le désordre des injustices. A chaque période correspond une somme de défis qui appellent, de notre part, des solutions nouvelles fondées sur les valeurs que nous portons. Nous devons montrer la voie d’une alternative réelle au libéralisme. Tout, dans la situation de la planète, la panne actuelle de l’Europe, l’état alarmant de la société française, appelle cet effort.

Pour donner de la lisibilité à nos propositions, nous devons les inscrire dans un modèle de développement, qui porte une exigence de maîtrise de l’économie, de redistribution plus ample et plus juste des richesses produites, de préservation des biens publics fondamentaux et qui fait toute sa part au non-marchand, à la gratuité, à l’activité créatrice.

C’est à partir de là que nous devons fixer de grands objectifs pour les années qui viennent : une société de plein emploi, de la connaissance partagée, du développement durable et de la démocratie jusqu’au bout.

« Changer la vie », disions-nous au lendemain d’Epinay. Ce slogan n’a rien perdu de sa force et de son actualité. C’est la finalité de notre volontarisme politique. Le gouvernement de Lionel Jospin avait su renouer avec lui lorsque, entre 1997 et 2000, nous avons réduit le chômage et conduit des réformes qui étaient autant de ruptures avec le libéralisme (35 h, emplois jeunes, CMU, APA…). Mais, nous avons sous-estimé le désarroi de ceux qui se sentaient oubliés ou même abandonnés alors que la situation s’améliorait autour d’eux : les salariés sous-payés et précarisés, les habitants de certains quartiers aux conditions de vie dégradées… Nous n’avons pas mesuré suffisamment l’éclatement de la société : pas seulement en deux mondes (la fracture sociale entre riches et pauvres), mais en de multiples mondes qui s’ignorent, se craignent et ne forment plus, ensemble, une société forte de valeurs communes. Nous devons désormais inventer de nouveaux instruments pour ouvrir la voie à de nouvelles conquêtes.

Nous savons que, pour réussir, nous aurons besoin d’une puissance publique qui puisse faire face aux attentes du pays. Nous voulons l’organiser autour de trois principes : prévenir, promouvoir, prévoir.
     Prévenir, pour s’attaquer à la racine des inégalités et non plus simplement, réparer les dégâts causés par le marché. L’État préventif prend ici tout son sens. Dans de nombreux domaines, comme la santé, l’éducation, la sécurité, la protection de l’environnement, une telle politique est plus juste et plus efficace.

     Promouvoir, pour donner toutes les chances à tous les citoyens. Dans une société fragmentée, les politiques publiques doivent prendre en compte la spécificité des situations individuelles. Qu’il s’agisse de chômage, d’échec scolaire, d’exclusion sociale, de comportements délinquants, le traitement des difficultés rencontrées implique de la part de l’Etat une nouvelle approche : l’accompagnement personnel, l’évaluation régulière des situations et la fin du cloisonnement des administrations. Chaque citoyen n’est plus seulement un assuré social, un prestataire, un usager, mais un citoyen qui doit être reconnu dans sa situation particulière avec ses droits et ses devoirs.

     Prévoir, pour renouer avec le progrès. Le rôle de l’Etat est de répondre aux urgences, mais aussi de bâtir les politiques d’avenir. Celles qui demandent du temps, de l’investissement, de la persévérance, mais qui permettent de redonner confiance, parce qu’elles répondent à des aspirations individuelles, à la réussite des générations futures et à une ambition collective. La société de la connaissance est une réponse majeure à la mondialisation. Une telle démarche exige un effort considérable en faveur de la recherche, de l’enseignement supérieur, de la formation, de l’aménagement du territoire.

La vérité, c’est de la dire pour mieux agir

Elle est la clé pour rétablir la confiance indispensable entre les militants et les dirigeants, les électeurs et leur parti. Voilà notre conception de la politique. Rien de durable ne se construit sur l’illusion ou, pire, sur le mensonge ! Nos actes doivent être conformes à nos paroles. C’est une exigence morale : être un peu moins révolutionnaire quand on est dans l’opposition et un peu plus quand on est au gouvernement. Nous avons tout à gagner à cette cohérence. Elle nous donne les moyens de réformer réellement et durablement, au-delà même d’une législature. Nous devons aussi dire la vérité aux Français sur trois points fondamentaux.

Dire la vérité sur l’économie

Evitons les faux débats entre nous. Il y a belle lurette que les socialistes considèrent que l’intégration de notre économie dans l’Europe et dans le monde est un fait définitif. Mais, nous combattons le libéralisme économique et son cortège de dérégulations, déréglementations, libéralisations, privatisations, précarisation qui expriment, au quotidien, l’avènement de valeurs que nous combattons : l’individualisme, le chacun pour soi, l’éphémère et le spectaculaire.

Toute notre démarche consiste à maîtriser, réguler, encadrer le marché pour faire valoir l’intérêt général. C’est notamment le rôle que nous attribuons au service public. C’est vrai à l’échelle de la France, de l’Europe et du monde.

L’enjeu c’est donc de prendre les mesures concrètes et utiles pour combattre la marchandisation. C’est d’apporter, par la fiscalité, le droit social et les services publics, protection et correction.

Nous le ferons en tirant les leçons de nos expériences gouvernementales, de nos réussites et de nos échecs.

Dire la vérité sur l’impôt

L’héritage de la droite sera lourd : des promesses fiscales coûteuses, injustes et inconsidérées ont fait perdre des recettes précieuses pour l’action publique ; les déficits de l’Etat et de la Sécurité Sociale se sont accumulés à des niveaux vertigineux ; l’assurance maladie est financée à crédit et l’UNEDIC est en faillite. Quant à l’endettement public, il atteindra en 2007 près de 70 % du PIB.

Dans un tel contexte, il faut dire la vérité aux Français : les annonces de baisse d’impôts pour 2007 seront remises en cause et le redressement de nos finances publiques et sociales sera engagé, même s’il y faudra du temps, et s’il faudra revoir les critères du pacte de stabilité.

Mais, il faut se dire aussi la vérité entre socialistes. Nous ne pouvons plus être les champions de la réforme fiscale dans l’opposition (progressivité de l’impôt direct, baisse de la fiscalité indirecte et refonte des prélèvements locaux) et les gestionnaires des archaïsmes fiscaux au pouvoir, quand certains d’entre nous ne se font pas les chantres de la baisse de l’impôt. Le courage, aujourd’hui consiste à dire quels seront nos choix et comment nous les financerons, à définir le niveau de présence et de qualité des services publics pour justifier celui des prélèvements obligatoires. La réforme fiscale revêt aujourd’hui une double nécessité : elle doit être mieux assise sur la richesse réelle pour gagner en simplicité, en solidarité et en rendement ; elle doit aussi favoriser plus clairement la croissance et l’emploi. Des choix audacieux sont donc à faire.

Dire la vérité sur l’État

Nous voulons un État présent et puissant, mais qui sache faire leur part aux partenaires sociaux, aux collectivités locales, aux associations et, tout simplement, aux citoyens... Il faut arrêter de tenir le discours justifié sur ce que doit être le rôle des syndicats, sans en tirer les conséquences ! Le renouvellement des règles de notre démocratie sociale fera autant pour remédier à la crise démocratique qu’une réforme des institutions. Face aux dérégulations menées par le libéralisme, il faut conjuguer la loi et la recherche de compromis entre les acteurs sociaux, qui passe d’abord par leur reconnaissance. On ne peut pas se référer aux succès des pays sociaux-démocrates du Nord de l’Europe, sans voir les conditions de leurs succès.

C’est cette démarche qui permet de lever les difficultés, de dépasser les contraintes, de dégager les marges de manœuvre nouvelles. Sans elle, les socialistes seront toujours conduits - peu ou prou - à la pause ou au renoncement.

L’unité des socialistes, c’est la force de la gauche

Le libre débat est constitutif du Parti socialiste. Les convictions doivent être toujours respectées. Mais, il n’y a plus de parti digne de ce nom si les votes ne comptent pour rien. Lorsque certains de nos camarades se sont affranchis de notre règle commune, nous avons fait le choix de l’unité, quel qu’en ait été le coût sur le moment. Nous ne le regrettons pas pour les socialistes et pour les Français. Maintenant, notre Congrès doit rappeler la nécessité de règles respectées par tous, fondées sur le vote. L’amitié existe entre socialistes. Mais, c’est comme dans la vie, les règles de civilité la confortent !

Notre motion sera ouverte à la synthèse sur notre projet sur la seule base des choix militants. Ainsi l’orientation majoritaire qui sortira de notre Congrès, relèvera de la seule responsabilité des adhérents et non d’arrangements au sein (ou à côté) de la Commission des résolutions. Cette ligne sera celle de tout le parti socialiste. La direction issue du Congrès aura en effet besoin d’une pleine légitimité démocratique.

L’unité, c’est aussi le rassemblement de la gauche dans sa diversité. Il doit se faire dans la clarté et dans le respect. Ce respect, les socialistes y ont droit. Nous acceptons les critiques et les confrontations, mais nous ne pouvons accepter de faire acte de contrition à chaque débat. Au contraire, nous devons assumer fièrement notre identité car, sans gouvernement socialiste, quelles réformes majeures auraient vu le jour ? Quelles conquêtes sociales seraient devenues réalité ? Nous proposerons donc un contrat de législature à la gauche, celle qui aspire avec nous à gouverner la France. Gouverner pour changer.

C’est un des enjeux essentiels de notre Congrès que de réaffirmer l’unité des socialistes. D’elle dépend le rassemblement de la gauche et donc nos chances de battre la droite.

L’unité des socialistes doit être fondée sur la démocratie militante.



Un projet pour changer

 

I - Changer le monde

Notre monde a connu bien des phases d’internationalisation de l’économie. Mais, la mondialisation d’aujourd’hui a des traits nouveaux. Elle n'est pas seulement le résultat de l'essor des technologies de la communication, de l’ouverture générale des échanges et de l'abaissement du coût des transports. Elle a aussi été façonnée par des choix politiques : la libéralisation des mouvements de capitaux, les politiques d'ajustement structurel prônées par le FMI, la limitation de l'intervention de l'Etat dans l'économie.

Cette conception libérale a été soutenue par la première puissance mondiale, les Etats-Unis, devenue sans rivale après l'effondrement du système soviétique. La voie a ainsi été ouverte à la domination du capitalisme financier, à ses exigences de rendement à court terme, à la course à la marchandisation de toutes les activités, à la mise en concurrence des systèmes sociaux et fiscaux à l'échelle planétaire.

Cette mondialisation crée des richesses, mais les affecte de façon aveugle au regard des besoins humains. Elle aggrave les inégalités à l'échelle planétaire comme à l'intérieur des pays. Elle pousse à l'utilisation sans freins des ressources naturelles. Elle crée une extrême pauvreté.

Ainsi, près de cinquante-quatre pays sont plus pauvres qu’ils ne l’étaient dans les années 1990. Plus de 800 millions de personnes dans le monde souffrent de la faim, 1,3 milliards d’hommes n’ont pas accès à l’eau potable, 4 milliards d’êtres humains vivent avec moins de deux dollars par jour, et des millions, faute d'accès aux médicaments, sont décimés par des maladies que l'on pourrait soigner.

C'est une nouvelle géopolitique du monde qui se dessine. Elle inquiète. Les Etats semblent impuissants, les institutions internationales indifférentes et vouées aux seuls intérêts du marché tandis que l'ONU -pourtant indispensable- est dépassée et paralysée. Cette nouvelle donne met l'Europe au défi de s'unir pour préserver son modèle et peser sur le cours du monde.

Le monde est marqué par les guerres civiles, les conflits impliquant des grandes puissances occidentales (en particulier en Irak) et un terrorisme qui a changé d’échelle avec le 11 septembre, les attentats de Madrid et de Londres. La lutte contre ce fléau demande un engagement résolu et une coopération étroite entre les pays.

Mais elle ne justifie pas de renoncer aux libertés publiques, ni au respect de l'Etat de droit. Elle n’implique pas davantage de se fourvoyer dans des guerres unilatérales sans lien avec les menaces réelles, qui ne créent que de nouveaux foyers de tension et de recrutement pour le terrorisme. Elle doit s'inscrire dans une réponse globale.

Face à la mondialisation libérale, nous voulons promouvoir un nouvel âge du socialisme : la mondialisation solidaire.

Notre action s'inscrit dans cette démarche internationaliste, universaliste, humaniste qui vise non pas au repli de chaque pays derrière ses frontières, mais au développement de nouveaux échanges économiques, politiques, culturels. C'est la seule réponse progressiste, tant à l'impérialisme qu'au fanatisme identitaire et religieux.

Il nous revient d’agir dans le cadre de l’Internationale Socialiste qui, pour faible qu’elle soit, a au moins le mérite de pouvoir intégrer les différences d’approches qui caractérisent les pays riches, les pays émergents et les pays pauvres, pour dégager des accords, des compromis, un intérêt commun de l'humanité.

Les socialistes doivent dialoguer avec tous ceux qui ont animé la contestation de la mondialisation libérale, en confrontant leurs propres analyses et propositions avec celle des Forums Sociaux, des syndicats, du mouvement altermondialiste. Il faut maintenant dégager des solutions concrètes.

Face aux défis à relever, nous devons mettre en avant deux principes : faire vivre une communauté internationale rassemblée autour de valeurs démocratiques, favoriser le développement par une redistribution à l’échelle de la planète.

A - Pour une gouvernance mondiale

    Nous proposons de renforcer l’autorité de l’ONU en donnant davantage de pouvoir au Secrétaire général des Nations-Unies et en augmentant la contribution financière des Etats pour permettre la constitution de forces humanitaires.

    Le Conseil de Sécurité doit être élargi aux nouvelles puissances, à l’Afrique et au continent latino-américain. L’exercice du droit de veto doit être encadré. Le droit d’ingérence, précisé.

    Parallèlement, le Conseil économique et Social de l’ONU doit devenir un Conseil du développement humain doté de nouvelles compétences, les pouvoirs de la Commission des droits de l’Homme doivent être étendus, une assemblée interparlementaire de l’ONU doit être créée.

    Mais la réforme de la gouvernance mondiale doit aussi concerner les organes internes du FMI et de la Banque Mondiale. La représentation et le poids des pays en développement doivent être accrus. L’Union européenne doit y regrouper sa propre représentation. Elle aurait alors un poids supérieur à celui des États-Unis.

B - Pour un développement partagé

    Le principe directeur de la gouvernance économique mondiale est aujourd’hui le libre- échange et la libéralisation de toutes les activités.

    Le monde a besoin d'un renversement de perspective. Les socialistes doivent le promouvoir.

    Il s'agit de mettre réellement l'action du FMI, de la Banque mondiale, de l'OMC, au service du développement, de passer des grandes déclarations de générosité des Chefs d'Etat dans les sommets internationaux aux actes. On ne construira pas une société mondiale sur le seul marché mondial.

    1) Respecter les objectifs du « millénaire » : l'indispensable redistribution mondiale
    Une telle ambition suppose des moyens nouveaux. De premiers fonds, comme le fonds « Onusida », préfigurent ce que pourraient être de futurs « fonds structurels mondiaux ».

    La première des priorités doit être de sauver les objectifs du « Millénaire » définis en 2000 (diminution de moitié de la pauvreté et de la faim d’ici 2015, éradication des principales maladies infectieuses, accès à l’éducation, égalité homme/femme, etc...).

    Les montants actuels de l’aide publique au développement ne suffiront pas à financer ces objectifs de la communauté internationale. L’Aide Publique au Développement est aujourd’hui d’environ 0,25 % du PIB des pays de l’OCDE alors qu’un objectif de 0,7 % avait été fixé, il y a trente ans. 50 milliards de dollars supplémentaires par an sont nécessaires immédiatement et 70 milliards dès 2010, dont la moitié pour l’Afrique, pour répondre aux besoins les plus élémentaires.

    La recherche de ressources assises sur les richesses créées en permanence par la mondialisation est indispensable. Il peut s’agir de taxes sur les transactions financières (type Tobin), sur les émissions de gaz carbonique, sur le transport maritime ou aérien, ou encore d'un prélèvement supplémentaire sur l’impôt sur les sociétés dépassant un certain chiffre d’affaires. La véritable question est désormais celle de la mise en œuvre concrète de ces mesures, par ceux des pays qui se sont engagés sans attendre un hypothétique consensus international. La France pourrait saisir le Conseil européen et la Commission d’une proposition à l’échelle de l’Union et engager avec les pays volontaires une coopération renforcée pour commencer à appliquer l’une au moins de ces taxes. Le débat serait relancé dans les autres pays.
    2) Annuler réellement la dette
    L’Afrique subsaharienne reste encore débitrice de 210 milliards aujourd’hui et des pays remboursent encore annuellement des montants plus importants qu’ils n’en peuvent consacrer à l’éducation ou à la santé. Les décisions du dernier G8 sont un pas, mais ne concernent qu'une annulation partielle et étalée de la dette pour 18 pays. La dette des pays pauvres doit être totalement annulé sans affecter les montants de l'Aide au développement.

    Le FMI doit également lutter contre les risques de crise monétaire qui déstabilisent les pays émergents en établissant une réglementation plus rigoureuse des mouvements de capitaux, en luttant contre les paradis fiscaux et en définissant une politique monétaire mondiale, fondée sur des marges de fluctuation prédéfinies entre les principales devises internationales.
    3) Réformer les institutions économiques internationales
    Nous proposons de placer le FMI, la Banque Mondiale et l’OMC sous la tutelle d’un organe des Nations-Unies : le conseil de développement humain.

    Il serait composé d’une représentation équitable de tous les continents, assurerait la tutelle des agences internationales, et devrait veiller au respect d’une hiérarchie des normes qui placerait les droits sociaux, la santé, la culture, l’environnement au-dessus des règles commerciales. Il pourrait renforcer les pouvoirs de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), et créer une Organisation Mondiale de l'Environnement chargée de la mise en œuvre du protocole de Kyoto, de la protection de la biodiversité et de la prévention des catastrophes naturelles.

    Ces agences multilatérales pourraient être dotées du pouvoir de prendre des sanctions contre les États qui ne respectent pas les conventions internationales et d’un organe de règlement des différends qui, comme celui de l’OMC, serait habilité à rendre des jugements contraignants.
    4) Mettre l'OMC au service du développement
    L'échec des conférences de Cancún et de Seattle, a mis en évidence la nécessité d’une profonde réforme de l’OMC, de ses règles et de ses priorités. La première des exigences est de prouver que le commerce peut réellement être mis au service du développement.

       Changer les règles de l’OMC

    Plutôt que la libéralisation des échanges à tout prix, c’est le soutien à la diversification économique, la prise en compte des différences de niveau de développement, et l'aide à la création de grands ensembles régionaux qu’il faut promouvoir.

    Quant au maintien de dispositions différentes entre pays industrialisés et pays émergents, il doit être considéré comme indispensable tant qu’existent de tels écarts entre les uns et les autres.

    Il en est ainsi pour l’agriculture qui est vitale pour les pays en développement. Une grande partie de leurs économies, leurs emplois et leurs exportations en dépendent. Les subventions des pays riches ont des effets dévastateurs pour les pays du Sud comme l'a montré l'affaire du coton. Si l’Union européenne veut promouvoir une agriculture respectueuse de l’environnement, intégrant des normes sanitaires élevées, elle doit convaincre de sa bonne foi en commençant par s’engager sur une date de suppression des subventions aux exportations. L’Europe doit par ailleurs proposer une assistance permettant aux pays en développement de répondre aux normes sanitaires de plus en plus élevées qu’elle a édictées et qui n’ont pas à devenir des obstacles à l’exportation. Mais elle devrait aussi plaider pour que la dimension commerciale de l’agriculture n’occulte pas d’autres objectifs, comme la souveraineté alimentaire et la sécurité alimentaire.

    De même, la promotion du travail décent doit devenir une règle de l’OMC.
    Il ne s’agit pas d’établir de nouvelles barrières protectionnistes liées aux différences de salaires entre le Nord et le Sud, mais de faire respecter des principes reconnus par chaque État en tant que membre de l’OIT. La communauté internationale ne doit pas accepter que le commerce se développe au prix du dumping social, du travail forcé ou celui de des enfants, mais utiliser le commerce comme levier pour accroître le niveau social des pays du Sud. C’est pourquoi il est légitime de demander que l’ouverture commerciale s’accompagne de standards plus forts en matière de droits sociaux et syndicaux.

    Enfin, les services publics, en particulier l’Education, la santé, l’eau, l’énergie, mais aussi la culture, doivent être tenus à l’écart des négociations en cours dans le cadre de l’AGCS. Les règles de l’OMC sur le commerce des services ne doivent pas mettre en danger le droit de chaque pays à organiser librement ses services publics.

       Changer le fonctionnement de l'OMC

    Il convient d’abord d’assurer les conditions d’une réelle participation de tous les pays membres, en particulier les plus pauvres, au suivi des négociations.

    Il faut également accroître la transparence des négociations. L’établissement d’une assemblée parlementaire consultative auprès de l’OMC renforcerait ce contrôle et faciliterait les échanges entre législateurs du Nord et du Sud sur les questions les plus difficiles comme l’agriculture ou les normes sociales.

    La politique commerciale commune de l’Union européenne doit elle aussi être davantage débattue et contrôlée au sein des parlements nationaux et au Parlement européen. Celui-ci devrait voter sur le mandat de négociation des représentants de l’Union dans les organisations multilatérales. Transparence et débat public mettront davantage la politique extérieure de l’Europe au service du développement.

C - Pour un développement durable

    Nous allons, à très court terme vers un monde de plus en plus inégalitaire et conflictuel, à moyen terme nous préparons un avenir incertain aux générations futures.

    En effet, alors que la population mondiale approchera 8 milliards d’habitants à l’horizon 2025, que les ressources fossiles seront épuisées à moyen terme, les enjeux énergétiques et alimentaires sont majeurs. Cette poussée démographique aggravera des dérèglements déjà à l’œuvre : raréfaction de l’eau douce, épuisement des ressources halieutiques, déforestation, pollution des mers, des sols et de l’air, atteintes à la biodiversité.

    Il est également prévisible que le nombre de pays riches aura augmenté dans une quarantaine d’années. À situation inchangée, on estime déjà que dans 30 ans, l’humanité devrait disposer de l’équivalent de 3 planètes Terre pour faire face à ses besoins.

    Le monde est confronté à deux priorités : la lutte contre le réchauffement climatique et la sauvegarde des ressources naturelles planétaires.

    1) Lutter contre le réchauffement climatique
    Il est scientifiquement reconnu que le mode de croissance participe au réchauffement climatique. La multiplicité des catastrophes naturelles lui est directement liée. Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixés par le protocole de Kyoto ne parviendront, au mieux, qu’à stabiliser cette situation et encore faudrait-il que les principaux pollueurs de la planète - notamment les Etats-Unis - acceptent de s’y conformer et qu’à l’avenir, les puissances industrielles émergentes (Chine, Inde, Brésil) optent pour un mode de développement différent.

       Par une politique énergétique diversifiée

      L’épuisement annoncé à l’horizon 2050 du pétrole rend nécessaire le développement d’autres sources énergétiques au niveau mondial. Dans une approche écologique, il n’est pas envisageable d’accepter le tout nucléaire dès lors que la question de ses déchets n’a pas encore trouvé de solutions définitives et satisfaisantes.

      Il convient de diversifier les sources d’énergie et de développer des technologies « propres ».

      Au plan national, le doublement de la part des énergies renouvelables dans le bilan énergétique est un objectif indispensable, ainsi que le rééquilibrage des investissements de la recherche publique pour atteindre à moyen terme une égalité entre le nucléaire et les énergies renouvelables.

      Le recours à diverses sources d’énergie en fonction des lieux et des usages doit être encouragé. Il doit s’accompagner d’une incitation aux économies d’énergie ou plus exactement d’une utilisation raisonnée de l’énergie. Les avancées technologiques dans les domaines du bâtiment combinées à l’obligation de respecter des normes de haute qualité environnementale s’inscrivent dans cette logique.

       Par une autre politique d’urbanisme et de transports

      La responsabilité des déplacements routiers dans la pollution atmosphérique et l’émission de gaz à effet de serre est connue.

      L’étalement urbain encourage le recours aux déplacements automobiles. La gestion à flux tendu des entreprises cause une multiplication des transports de marchandises par camions. C’est pourquoi le développement des transports en commun, la production de voitures propres, la densification des villes sont des outils indispensables pour lutter contre la pollution et le gaspillage énergétique.

      Dans le secteur du transport de marchandises, nous voulons développer le ferroutage, au plan européen comme au plan national, diversifier les modes de transports (voie fluviale, fret ferroviaire) et favoriser le rapprochement entre les lieux de production et de consommation.

    2) Préserver les ressources naturelles
    15 % des habitants de la planète consomment 85 % des ressources, 1,3 milliard d’êtres humains n’ont pas accès à l’eau potable.

    Ce constat nous renforce dans la conviction que la reconnaissance internationale des ressources naturelles non-renouvelables est indissociable des politiques de co-développement. Ainsi, l’eau, l’air, la biodiversité, la santé, l’éducation, les possibilités de commercer équitablement, l’accès à l’énergie, doivent être reconnus comme biens publics mondiaux et leur accès doit être garanti par les institutions internationales.

II - Changer l'Europe

L’Europe est en panne. Et la crise n’a rien de salutaire.

Comment en sortir ? Ce n’est certes pas la droite qui y parviendra. Fondamentalement, elle n’est pas favorable à la poursuite de l’intégration européenne. Elle le démontre aujourd’hui : les chefs d’Etat conservateurs, largement majoritaires au sein du Conseil européen, ont de fait abandonné toute idée de relance européenne.

C’est la gauche européenne qui a les clés de l’avenir de l’Europe. Dans ce cadre, nous avons une responsabilité particulière dans la sortie de crise, pour répondre aux attentes, aux exigences et aux insatisfactions de nos concitoyens telles qu’elles se sont exprimées le 29 mai.

Pour la surmonter, nous devons dépasser le oui et le non, avoir une vision claire de notre projet pour l’Europe, et nous accorder sur la méthode pour le mettre en œuvre. Il y a certes eu un « non » de gauche, authentiquement européen. Mais il n’a pas provoqué le choc annoncé, ni la renégociation du texte : l’idée constitutionnelle est en sommeil pour longtemps. Pire, des forces centrifuges se sont mises en route : remise en cause de l’euro, volonté de démanteler la politique agricole commune, refus de financer les nouveaux pays, rejet du budget européen. C’est l’Europe qui menace de se défaire, le détricotage de la construction européenne qui peut commencer.

Pour autant, le « oui » de gauche n’a ni su ni pu convaincre les Français que le Traité constitutionnel représentait un progrès. Certes, les causes du « non » sont aussi nationales : beaucoup d’électeurs, ont d’abord voulu sanctionner une politique injuste, inefficace et mensongère. Ils ont d’abord dit « non » à Jacques Chirac. Mais soyons lucides, ils ont aussi voté « non » pour sanctionner les dérives de l’Europe actuelle : une Europe trop technocratique, sur laquelle les citoyens ont le sentiment de ne pas avoir de prise, une Europe trop libérale, dont le projet de directive Bolkestein est le symbole, une Europe inefficace pour créer de la croissance et combattre le chômage, une Europe dont les frontières et le projet demeurent flous. Pour dépasser le « oui » et le « non », nous devons nous accorder sur la finalité de la construction européenne : quelle Europe voulons-nous ?

A - Notre horizon : l'Europe démocratique

    L’Europe politique passe par deux avancées majeures : les institutions et la citoyenneté.

    Nous défendons la création d’une véritable démocratie parlementaire européenne. La Commission est, aujourd’hui, un exécutif coupé des citoyens, privé de légitimité. Elle doit l’acquérir. Le Président de la Commission doit être élu par le Parlement et issu de la majorité politique sortie des urnes. À côté de ce gouvernement politique : le Parlement européen, qui représente les citoyens, doit exercer les pleins pouvoirs législatifs et budgétaires et un Conseil des ministres, représentant les États, doit voter à la majorité.

    Au sommet de l’édifice, se trouve le Conseil européen qui réunit les chefs d’Etat européens, avec à sa tête un Président de l’Europe.

    Au-delà des institutions, il est nécessaire de faire vivre la démocratie européenne.

    Nous faisons en ce sens plusieurs propositions : placer le choix du Président de la Commission au cœur des élections européennes ; choisir les Commissaires parmi les députés européens ; réserver une fraction des sièges du Parlement européen (par exemple 20 %) à des parlementaires élus sur des listes paneuropéennes.

    Nous souhaitons aussi développer la citoyenneté européenne.

    L’Europe politique passe par la création du sentiment d’appartenance européen. De nombreuses pistes peuvent être explorées pour développer cette conscience européenne : généraliser le programme Erasmus en introduisant dans les cursus universitaires l’obligation d’accomplir au moins une année d’étude dans l’Union hors du pays d’origine ; compléter avec un volet européen l’éducation civique nationale dispensée à l’école ; créer un enseignement de l’histoire européenne sur la base d’un programme et d’un livre d’histoire communs pour toute l’Europe ; créer un grand média audiovisuel public à vocation européenne, sur le modèle d’Arte ; développer le débat public en France avec la création d’un forum permanent de débat sur l’Europe.

B - Notre volonté : l'Europe sociale

    L’Europe sociale est, naturellement, la priorité des socialistes. Le message du 29 mai, et sur un continent qui compte 20 millions de chômeurs, est une demande de protection sociale. Il faut l’entendre. C’est une étape supplémentaire qu’il faut construire. D’ores et déjà, nous faisons trois propositions en ce sens :

       Introduire un revenu minimum européen, qui traduirait les droits économiques du citoyen européen - le droit à un niveau de vie minimum ;

       Créer un fonds européen de soutien aux salariés victimes des restructurations ;

       Faire de la sécurité sociale professionnelle le premier droit social européen.

    Une autre clé sera l’accroissement du budget européen, dont l’insignifiance empêche toute action financière sérieuse. La politique de Jacques Chirac visant à limiter le budget européen à 1 % du PIB est le plus sûr garant d’une Europe impuissante.

    Nous nous fixons comme objectif de moyen terme de doubler le budget européen, à 2 % du PIB. Pour financer cet accroissement budgétaire, l’Union doit désormais avoir la possibilité d’emprunter mais aussi se doter d’un impôt européen qui pourrait être une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés.

C - L'Europe au service de la croissance et de l'emploi

    L’Europe économique et monétaire est une construction inachevée. Pour avancer, trois réformes sont nécessaires :

       Créer le gouvernement économique européen. Aujourd’hui, la zone euro fonctionne sans autre direction que les règles du pacte de stabilité. Il faut mettre un pilote dans l’avion. Les solutions sont connues : institutionnaliser l’Eurogroupe - la réunion des ministres des finances de la zone euro - lui donner les pleines compétences juridiques pour arrêter la politique économique de la zone euro, et y élire un président stable, qui sera le Ministre des finances de l’Europe.

       Réviser les statuts de la Banque centrale européenne (BCE). Du fait de son attention trop exclusive à la stabilité des prix, la politique monétaire de la BCE est un frein à la croissance. Il ne s’agit pas de revenir sur l’indépendance de la banque centrale, systématique dans toutes les grandes démocraties, mais d’obliger à la prise en compte de l’objectif de croissance et d’emploi.

       Donner à l’Europe la capacité d’investir dans l’avenir. L’économie européenne souffre d’un mal bien identifié : elle n’a pas franchi la frontière technologique qui la sépare de l’économie de la connaissance. Cela passe par la réorientation du budget européen vers ces dépenses d’avenir : à terme, la recherche doit devenir le premier budget de l’Union.

D - La relance européenne

    L’échec du traité constitutionnel nous rappelle combien la voie vers la construction européenne doit être partagée par les citoyens.

    Il faut faire l’Europe avec les peuples. C’est pourquoi nous proposerons de reprendre, le moment venu, le débat institutionnel sous une forme associant pleinement le Parlement européen et les parlements nationaux.

    Dans l’attente, il faut porter des projets concrets de l’Europe, et notamment les initiatives qui doivent partir de la coopération renforcée que représente d’abord la zone euro : c’est le cadre qui permet d’aller plus loin vers l’harmonisation fiscale, les grands travaux et les initiatives technologiques.

    Nous voulons aussi garantir la sécurité à l’intérieur de l’Europe et dans le monde. La construction d’une défense européenne est, dans cette perspective, le grand chantier de la prochaine décennie et un objectif prioritaire pour les socialistes.

    En outre, l’Union européenne doit se faire le champion du développement de l’ensemble de l’Afrique. La France a en la matière une responsabilité particulière.

    Nous devons, en rupture avec des pratiques de clientélisme et de paternalisme, redéfinir notre politique africaine pour qu’elle soit plus exigeante sur la démocratie et les droits de l’Homme et plus généreuse sur l’ouverture de nos marchés et l’aide au développement.

    Enfin, l’Europe doit délimiter ses frontières. Cette question doit être abordée sans tabou ni hypocrisie. Elle exige une réflexion de fond sur l’identité de l’Europe, sa géographie, son histoire, sa culture. Si nous sommes favorables à l’ouverture des négociations d’adhésion avec la Turquie, nous ne pouvons préjuger de leurs résultats. Celles-ci ne peuvent se conclure sans que soient acquis le plein respect des libertés démocratiques, des droits des minorités, la reconnaissance du génocide arménien et la reconnaissance de Chypre.

    Nous avons également l’ambition d’affirmer la vocation méditerranéenne de l’Europe, en renforçant le processus euro-méditerranéen. À cet égard, nous proposons la création d’une banque de développement euro-méditerranéenne, la réalisation de la Charte de paix et de stabilité et le lancement d’un programme de dépollution de la mer Méditerranée.

    Nous ne nous résignons pas. Nous voulons toujours, comme le disait Léon Blum, « faire l’Europe en pensant le monde ». Le débat sur le traité constitutionnel a au moins permis un grand débat démocratique. C’est à partir de cette prise de conscience que nous voulons relancer la construction européenne.

    Nous y travaillerons avec tous ceux qui, en France et en Europe, partagent notre idéal. Nous proposerons dans ce but la convocation, au premier semestre 2006, une convention du Parti Socialiste Européen (PSE) pour doter les socialistes européens d’une plateforme commune.

III - Changer la France

La France doute d’elle-même. De sa place dans le monde, de sa vocation européenne, de son modèle républicain, de son système social, et même de ses réussites ou de ses performances. C’est l’idée même de progrès qui est atteinte. La droite veut installer la normalisation et l’uniformisation comme une fatalité. Elle utilise ses échecs - faible croissance, chômage élevé, compétitivité altérée - comme autant de prétextes pour appeler à la fin d’un « modèle français » qui, comme un baudet sur lequel il faudrait faire haro, est devenu la victime expiatoire qu’il faudrait sacrifier sur l’autel de la mondialisation. L’Etat serait devenu trop lourd, les services publics trop chers, la protection sociale trop généreuse, le droit du travail trop rigide.

Le thème du déclin de la France, vieille rengaine des réactionnaires, est également entonné pour justifier, au nom du « sursaut », de nouvelles largesses aux plus favorisés et des flexibilités supplémentaires au plus grand nombre.

Pour nous, si la France va mal, c’est d’abord parce qu’elle est mal dirigée, mal conduite, mal gouvernée.

Le premier devoir des socialistes, dans cette crise de confiance, est de redonner une perspective, un sens, une espérance dans le progrès, la République, la Démocratie et donc dans la France.

Les atouts de notre pays sont nombreux : vitalité de sa démographie, diversité de sa population et de ses territoires, succès technologique de ses entreprises, qualité de ses services publics, foisonnement des initiatives à travers la multiplication des associations de toute nature...

La France porte toujours des valeurs universelles qui mobilisent au-delà même de ses frontières. Elle reste une référence pour l’expression d’un mode de vie et d’une identité culturelle particulièrement forte.

Les socialistes, avec la gauche, ont depuis un siècle, contribué à cette « construction française ». Il ne s’agit pas aujourd’hui d’en être seulement les défenseurs scrupuleux et intransigeants. En effet, chacun voit les défauts de notre organisation collective, les lacunes de notre modèle républicain, les handicaps de notre système productif, les faiblesses de notre appareil de redistribution. Dès lors, la gauche doit apporter de nouvelles réponses en ouvrant de nouvelles conquêtes, en permettant de futurs progrès. Tel est le nouvel âge du socialisme français : répondre aux grandes questions qui sont posées à notre société et réussir le changement dans la durée.

Nous proposons un contrat aux Français. Un contrat social organisant un nouveau modèle de développement, de solidarité et une société du plein emploi ; un contrat républicain garantissant l’égalité devant l’Education, le logement, la culture, le développement des territoires ; un contrat citoyen fondé sur les droits et devoirs et un contrat écologique préservant l’environnement et les générations futures. Bref, il s’agit de répondre à l’urgence et préparer l’avenir.

A - Un contrat social


    1) Un nouveau modèle de développement
    La France est en manque de croissance. Elle en paie le tribut en termes de chômage et de précarité. Elle n’est pas la seule en Europe à se languir, faute notamment d’une coordination des politiques économiques et à cause d’un euro trop fort ; mais, depuis plus de trois ans, notre pays crée moins de richesse en moyenne que le Royaume-Uni, l’Espagne et les pays scandinaves.

    Certes, la croissance ne se décrète pas. Mais, l’expérience prouve que l’on peut la raffermir (comme de 1997 à 2002) ou l’étouffer (c’est le cas depuis 2002).

    Aujourd’hui, l’économie française souffre d’une mollesse de la consommation, mais aussi d’une détérioration de notre capacité productive dont le déficit record de notre commerce extérieur est une illustration. La demande des ménages comme l’offre des entreprises sont donc atteintes. Mais, au-delà du secteur marchand, le vaste domaine du non-marchand comme de l’économie sociale et solidaire est à la peine.

    Or, en termes de création de valeurs, d’initiatives utiles et de création d’emplois dans des domaines tels que l’Education, la Santé, le sport, les services aux personnes, ces activités produisent incontestablement de la richesse, même si elle n’est pas toujours traduite dans les chiffres de la comptabilité nationale.

    Dès lors, nous devons proposer plus qu’une relance de la croissance, mais les conditions d’un développement économique et social durable.

    a) Relancer la croissance

    C’est une condition nécessaire à la création d’emplois, à la redistribution des revenus et au financement de la protection sociale.

    Elle passe aujourd’hui par la réorientation de la politique économique européenne. La création d’un véritable gouvernement économique de la zone euro permettra la coordination de la politique budgétaire, par-delà les règles désormais dépassées du pacte de stabilité, et la définition d’une politique de change susceptible de fixer le rapport euro/dollar à un niveau conforme à l’état réel des économies concernées et de peser sur les décisions de la Banque Centrale Européenne.

    Mais, le niveau de la croissance, comme son rythme, relève de nos propres choix :

       Augmenter le pouvoir d’achat : c’est à la fois un impératif économique et une exigence sociale. Nous agirons dans plusieurs directions :

         Convoquer une conférence annuelle sur les revenus qui réunira l’ensemble des partenaires sociaux. Elle ouvrira des négociations dans les branches et évaluera leurs résultats.

         Ouvrir une négociation dans la fonction publique pour définir une politique pluriannuelle des salaires intégrant les différents éléments de la carrière professionnelle.

         Conditionner les exonérations de cotisations sociales (20 milliards d’euros financés par le budget de l’Etat) à des contreparties en matière de progression salariale et de création d’emplois.

         Transformer la prime pour l’emploi en allègement de cotisations sociales payées par les salariés. Ce qui augmentera d’autant leur salaire net. L’Etat remboursant à la Sécurité Sociale ce manque à gagner. L’incitation peut être d’autant plus forte que les salaires sont bas.

         Relever les prestations familiales les plus favorables à une relance rapide de la consommation. Ces mesures seront financées par un plafonnement du quotient familial dans le calcul de l’impôt sur le revenu.

       Favoriser l’investissement productif : L’intensité de la croissance dépend de la capacité d’innovation et de renouvellement de notre appareil de production comme de la vitalité des services de l’économie.

      Le souci exclusif de rendements élevés à court terme comme la financiarisation de l’économie ne contribuent pas à cet objectif.

      Il revient donc à l’Et at d’intervenir sous différentes formes :

         D’abord, fiscale par la modulation de l’impôt sur les sociétés, selon l’ampleur des bénéfices mis en réserve pour l’investissement et la mise en place d’une fiscalité écologique juste et efficace ;

         Ensuite budgétaire : les aides à l’innovation doivent être simplifiées pour être massives pour les secteurs d’avenir et concentrées sur les PME ;

         Enfin stratégique, à travers la définition d’une politique industrielle fondée sur les grands projets technologiques (énergie, informatique, biotechnologie…) et sur la mutation des industries traditionnelles pour relever les défis de la compétition des pays à bas coûts de main d’œuvre. Il sera créé au sein de l’Etat une fonction de prospective et de stratégie industrielle, à laquelle les régions seront associées. La Caisse de Dépôts pourrait devenir le levier et l’instrument des interventions financières de l’Etat par la voie de la participation en capital au nom de l’intérêt stratégique des secteurs ou des entreprises concernés.


    b) Donner la priorité à la Recherche

    Dans la mondialisation et la concurrence effrénée qu’elle provoque, la France doit refuser la « sortie par le bas » qui lui est proposée par les libéraux : la baisse des coûts salariaux et le dumping fiscal. C’est une sortie par le haut qu’elle doit emprunter : la recherche-développement en est la clé.

    C’est aussi une condition du progrès social, médical, humain. Or, le cri d’alarme lancé par une grande partie des scientifiques a révélé les menaces qui pèsent sur l’avenir de la Recherche : faiblesse des crédits, précarisation des statuts, démotivation des jeunes générations, fuite des cerveaux…

    Un temps précieux a été perdu et la France est aujourd’hui à la traîne par rapport au nombre de brevets déposés et à l’effort consacré à la Recherche (2 % du PIB contre 2,7 % aux Etats-Unis et 3 % au Japon).

    Nous proposons donc :

       Une loi programme fixant à au moins 3 % l’investissement de la richesse nationale dans la Recherche-développement ;

       L’Agence pour la Recherche et l’Innovation devra disposer de recettes pérennes à travers une cotisation versée par les entreprises qui ne consacrent pas un niveau minimal de dépenses de Recherche ou d’innovation ;

       Le crédit d’impôt pour la Recherche sera concentré sur les petites et moyennes entreprises ;

       Un fonds de capital risque public sera créé pour prendre des participations publiques dans le capital des jeunes entreprises innovantes pour leur apporter les financements nécessaires à leur croissance


    c) Soutenir l'économie sociale et solidaire

    La création de richesses ne se mesure pas aux seules activités de marché ou à la seule organisation d’entreprise capitaliste. Il y a de nombreux domaines de l’économie nationale qui contribuent au développement et à l’emploi dans les domaines de l’Education, de la santé, des loisirs, de l’action sociale... Près de 2 millions de salariés travaillent aujourd’hui au sein de 140 000 entreprises de l’économie sociale (association, mutuelles, coopératives…) pour la plupart administrées par plusieurs centaines de milliers de bénévoles. C’est un modèle alternatif. Il doit être favorisé pour protéger cette forme de gestion non lucrative et pour élargir sa capacité d’initiative.

    Nous proposons une vaste adaptation des règles fiscales, du droit des sociétés et du code des marchés publics pour faciliter le développement de l’économie sociale et solidaire.
    2) Une société du plein emploi
    Notre objectif doit être de diminuer non seulement de moitié le taux de chômage d’ici 2012, mais de réduire également de moitié la durée moyenne du chômage. Il faut donc créer plus d’emplois et favoriser plus de mobilité professionnelle.

    Au-delà de la croissance, la perspective du plein emploi exige un volontarisme dont nous avons montré, de 1997 à 2002, qu’il pouvait produire ses effets, dès lors qu’il conjuguait incitation à l’embauche et traitement social du chômage.

    a) Faire le choix du travail et de l'emploi

     Changer le mode de calcul des cotisations sociales : Aujourd’hui assises sur les seuls salaires, les cotisations patronales sont donc d’autant plus lourdes que les entreprises embauchent et augmentent leur masse salariale. C’est pourquoi, dans la volonté de favoriser les activités de main d’œuvre, nous proposons de :

       transférer une partie des cotisations patronales, qui aujourd’hui pèsent sur les seuls salaires, sur l’ensemble de la richesse produite par l’entreprise (la valeur ajoutée), qu’elle rémunère le travail ou le profit ;

       moduler les cotisations UNEDIC en fonction de la durée des contrats de travail ou du nombre de formules précaires dans l’entreprise.

     Généraliser la réduction du temps de travail : Les 35 heures ont été à l’origine de la création de plus de 400 000 emplois et ont contribué, dans la plupart des cas, à une meilleure organisation du travail et à une qualité de vie quotidienne pour les bénéficiaires. La droite a non seulement cassé le processus, mais remis en cause les règles mêmes de la durée du travail, en relevant massivement les contingents d’heures supplémentaires et en multipliant les dérogations à la durée légale de travail.

    Nous nous engageons à appliquer à tous la réduction du temps de travail et à multiplier les formules de temps choisi. Pour cela, sera engagé un vaste débat avec les entreprises et les syndicats pour mesurer les points forts, mais aussi les difficultés d’application qui ont pu apparaître pour les salariés de certaines entreprises comme pour les PME. Ce débat débouchera sur une grande négociation interprofessionnelle ayant pour objectif d’aboutir à des accords majoritaires dans l’ensemble des entreprises.

     Garantir un haut niveau d’emploi des jeunes et des seniors : Le taux d’emploi en France est particulièrement faible aux deux âges extrêmes de la vie active. Les jeunes accèdent tardivement au marché du travail quand les plus anciens en sortent prématurément. C’est une perte de richesses pour l’économie, c’est un aléa considérable pour le financement des retraites et c’est une exclusion inacceptable pour ceux qui espèrent dans la société ou qui l’ont vaillamment servie.

    Nous proposons :

       Pour les jeunes : dans le secteur privé, un « contrat unique d’insertion dans la vie professionnelle » : à chaque jeune en sortie d’études sera proposée une activité y compris un service civil social, une insertion, une formation ou un emploi. La généralisation des formations en alternance, en lien avec les partenaires sociaux et sur la base des besoins des bassins d’emploi et des débouchés professionnels qu’ils offrent sera de nature à replacer durablement les jeunes dans l’emploi. Dans le secteur public et associatif, la politique des emplois jeunes sera réactivée en relation avec les dispositifs d’emplois tremplins lancés dans les régions.

       Pour les seniors : tout salarié de plus de 45 ans se verra offrir, sans être nécessairement au chômage, un « contrat seconde chance » qui comportera un bilan de compétences, une qualification adaptée à ses aspirations et aux besoins des entreprises, une valorisation des acquis professionnels, un congé de formation d’autant plus long que la durée des études a été courte : c’est le droit à la formation tout au long de la vie.


    b) Sécuriser les parcours professionnels

    Nous proposons donc l’introduction d’une « sécurisation des parcours professionnels ». Il s’agit de permettre des transitions pour chaque salarié durant toute sa vie active entre les temps de formation, d’emploi et de reconversion.

    Cette avancée sociale suppose la conjugaison de plusieurs dispositifs :

       Les premiers s’appliquent aux entreprises : les employeurs doivent explorer les évolutions alternatives aux licenciements : formation, mobilité interne, reclassements. La négociation collective interprofessionnelle doit en fixer les règles.

       Les seconds doivent permettre aux salariés de maîtriser les étapes successives de leur carrière professionnelle.
      Nous ouvrirons un droit individuel à la formation tout au long de la vie qui sera d’autant plus élevé que la formation initiale aura été brève et non diplômante. En cas de rupture brutale (plans sociaux, licenciements collectifs), le salarié se verra proposer un contrat de reclassement pour une durée d’un an, dont la vocation sera de lui garantir le maintien de son salaire et de ses droits sociaux en contrepartie du suivi d’une formation qualifiante.

       Les troisièmes doivent concerner les bassins d’emplois. Face aux restructurations et aux délocalisations, c’est à ce niveau que s’opèrent le plus fortement les mobilisations et que s’expriment concrètement les solidarités.

    Des outils nouveaux doivent être fournis à cette fin. Nous proposons la création d’une Agence Nationale de ré-industrialisation financée pour l’essentiel par un fonds de mutualisation abondé par les entreprises. Elle regroupera tous les moyens de l’Etat qui agissent, aujourd’hui, de manière dispersée. Elle aura pour mission de répondre à l’urgence, en cas de fermeture brutale d’une entreprise, et d’agir sur les sites touchés par les restructurations.

    Elle pourra intervenir, en liaison avec les régions, pour soutenir - dans certaines circonstances - les entreprises dépourvues de ressources propres.

    Pour les entreprises qui ont disparu après leur fermeture, la loi permettra au juge de donner le terrain et les bâtiments à des collectivités locales s’engageant sur la réindustrialisation.

    Nous créerons des « contrats de progression professionnelle ». Ces contrats ont pour objectif de permettre aux salariés la reprise d’études ou d’une formation en vue d’obtenir un diplôme ou une qualification qui leur permettra de progresser professionnellement. Les acquis de l’expérience seront validés et le programme de formation défini. Les salariés resteront liés par leur contrat de travail à l’entreprise et bénéficieront d’une rémunération qui pourra, sous certaines conditions, être financée en partie par l’Etat. Les personnes qui ont quitté le système scolaire de façon précoce seront prioritaires pour ce dispositif et pourront bénéficier d’une durée de formation supérieure à un an.
    3) Une nouvelle solidarité
    La protection sociale est un droit fondamental, aujourd’hui remis en cause par la droite. Les inégalités devant l’accès aux soins se sont creusées. L’avenir de la retraite par répartition est menacé. La conception de la politique familiale est de nouveau fondée sur l’abandon par les femmes de leur activité professionnelle. Il nous appartient de refonder les principes d’une politique de solidarité face aux aléas de la vie : elle doit considérer notre démographie comme une chance et la qualité de notre système de soins comme un atout : vivre plus nombreux et plus longtemps.

    a) Mieux prévenir et guérir la maladie

    Notre système de soins a été considéré comme le plus performant du monde et l’espérance de vie dans notre pays est la plus élevée de toute l’Union européenne. Mais, en dépit de la CMU, les inégalités devant la maladie restent fortes et la différence d’espérance de vie entre un cadre supérieur et un ouvrier est de 7 ans. Ces écarts s’expliquent par les inégalités de conditions de vie, de travail, d’éducation.

    De plus, de nouveaux problèmes de santé publique comme l’obésité émergent et frappent plus particulièrement les plus pauvres. La capacité de chacun à s’informer et s’orienter devient elle aussi un facteur discriminant faute d’information transparente et d’une politique de qualité des soins.

    Avec la loi Douste-Blazy, la politique de la droite a dressé de nouvelles barrières financières devant l’accès aux soins, notamment en renchérissant le coup de la consultation médicale pour les patients, sans réduire pour autant les déficits du système de sécurité sociale. Sous le coup de l’insuffisant recrutement des professionnels de santé et de la mauvaise organisation des soins, de nombreux territoires ruraux et quartiers défavorisés deviennent des déserts médicaux.

    L’amélioration de la santé est un progrès de civilisation, il est donc légitime que la collectivité y consacre une part de richesse importante. Notre santé publique doit désormais être à même de prévenir la maladie autant que de la guérir.

    Il s’agit donc de :

       Lancer de grands programmes pluriannuels de prévention comportant des campagnes d’information et d’éducation pour la santé : le tabac et l’alcool, la santé mentale et l’hygiène alimentaire. Nous devons être aussi en mesure de prendre en charge les maladies liées au vieillissement par des modes d’accompagnement appropriés.

       Réduire les disparités territoriales, notamment par une politique de péréquation financière entre les différents territoires.

       Engager une politique d’incitation à l’installation des médecins dans les lieux défavorisés.

       Défendre l’hôpital public : L’hôpital public doit redevenir la priorité et le cœur de notre système de santé. L’évaluation des pratiques médicales de ville comme le progrès technique renforcent encore son rôle. Il faudra permettre aux hôpitaux de remplir leurs missions, missions d’urgence qui garantissent la continuité des soins et l’accueil de tous, missions de soins, en modernisant les hôpitaux de proximité et en maintenant l’excellence des hôpitaux universitaires et régionaux. Cela suppose que les personnels hospitaliers soient recrutés en nombre suffisant et reçoivent une formation de qualité. Les moyens supplémentaires nécessaires pour l’hôpital doivent cessés d’être prélevés sur les usagers, comme c’est le cas aujourd’hui avec les hausses régulières du forfait hospitalier.

       Moderniser la médecine de ville en favorisant la mise en œuvre de réseaux et en proposant de nouvelles formes de rémunération. Un nouveau contrat avec les professions de santé sera proposé pour conforter leurs missions de service public tout en garantissant la liberté de choix d’exercice de missions de service public. De plus, l’existence de plus de trente tarifs médicaux a rendu la médecine de ville très difficile à gérer et peu transparente pour les usagers : une simplification s’imposera.

    Enfin, nous remettrons à l’ordre du jour la démocratie sanitaire au travers d’une réforme profonde de la « gouvernance » de l’assurance maladie, en mettant en œuvre les agences régionales de santé, et nous développerons les moyens en matière de recherche y compris au niveau européen sur l’ensemble des risques. L’indépendance vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques est à reconquérir : elle passe par une vraie politique du médicament.

    b) Faire de l'allongement de la durée de la vie un progrès de civilisation

    Le plan Fillon sur les retraites a aggravé les injustices sociales sans rien régler du financement des retraites. De plus, la droite, depuis la tragédie de la canicule, n’a pas pris les mesures à la hauteur des besoins en matière d’accompagnement de la dépendance. A plus long terme, notre pays n’est pas préparé au « choc » démographique lié à l’allongement de la durée de la vie et au vieillissement de la population. 7 millions de Français auront plus de 80 ans en 2040.

    Pour les socialistes, l’allongement de la durée de la vie n’est pas un « problème » mais une chance. Ce sera un progrès de société si chacun peut vivre mieux et plus longtemps. Nous voulons préparer dès à présent l’augmentation de la part des plus âgés dans la structure de la population et assurer l’avenir du système de retraite par répartition.

     Garantir à chacun une retraite fondée sur un taux de remplacement qui doit être d’autant plus élevé que le revenu d’activité est modeste. Nous ouvrirons une négociation globale dès 2007, avec l’ensemble des partenaires sociaux, pour tenir davantage compte dans le calcul des durées de cotisations de la pénibilité, des personnes qui ont commencé à travailler jeunes et des situations familiales, notamment pour les femmes. De nouvelles ressources seront mobilisées à travers notamment une contribution de solidarité sur l’ensemble des revenus.

     Développer une prise en charge globale de la dépendance fondée sur des services de soutien à domicile. L’APA sera redéfinie pour couvrir plus largement les charges des familles en fonction du revenu.

     Engager un plan de formation des salariés travaillant dans les services aux personnes âgées.

     Encourager la vie associative pour favoriser les échanges entre générations et l’utilité sociale du temps de la retraite.

    c) Promouvoir une politique progressiste de la famille

    Familles monoparentales, recomposées, éclatées… l’évolution des cellules familiales a profondément bouleversé les modes de vie. Ces changements ont générés de nouveaux besoins, notamment dans la prise en charge éducative des enfants, qui n’ont pas suffisamment été pris en compte par les politiques publiques. Surtout, les familles monoparentales, dont le chef de famille est le plus souvent une femme, affrontent des difficultés sociales inextricables. Travailleuses pauvres et familles monoparentales deviennent ainsi des réalités qui se recoupent.

    Notre objectif doit être de promouvoir toutes les formules de garde permettant la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale, de soutenir d’avantage les ménages qui en ont plus besoin en transformant les instruments de la politique familiale.

     Les gardes collectives feront l’objet d’un plan de soutien par l’Etat, et les grandes entreprises seront incitées à organiser, en leur sein, des structures d’accueil.

     Les prestations familiales seront modulées en fonction des revenus et allongées dans le temps pour tenir compte de la présence au foyer des adolescents.

     Les aides au logement seront plus directement liées au nombre d’enfants, y compris pour les revenus moyens.

     Offrir aux familles des services et des aides en nature particulièrement pour permettre aux femmes qui assurent à 80 % l’éducation des enfants et les tâches ménagères de concilier vie de famille et travail.

     Le congé paternel sera élargi et la possibilité de suspendre le contrat de travail pour l’éducation des enfants sera ouverte pour les deux parents.

B - Un contrat républicain

    Jamais les ségrégations sociales, territoriales, ethniques, n’ont été aussi profondes dans notre pays et n’ont causé autant d’injustices. Les inégalités s’additionnent et se reproduisent de génération en génération.

    Pour les socialistes, le pacte républicain reste une référence majeure. Nous voulons renouer avec le projet égalitaire et émancipateur de la République et combler le fossé qui s’est créé entre la devise « liberté, égalité, fraternité » et la réalité : face à l’échec scolaire, aux phénomènes de ségrégation, aux mutations des territoires, les instruments du modèle social républicain doivent être renforcés et rénovés.

    Voilà l’ambition d’un nouveau contrat républicain : promouvoir l’égalité réelle. Nous voulons en finir avec le déterminisme des origines, de la condition sociale, de l’habitat et du quartier où l’on vit qui écrit à l’avance le destin des enfants. Nous voulons investir massivement pour permettre l’épanouissement et la promotion sociale de tous par l’éducation, l’amélioration des conditions de logement et la valorisation de tous les territoires.
    1) Un grand projet pour l'Education
    Coupes budgétaires sans précédent, postes d’enseignants supprimés, aides-éducateurs et surveillants liquidés : depuis trois ans, la droite a massacré la priorité à l’éducation. De nouveau, elle propose de remettre en cause le service public au profit du privé et laisse s’aggraver les inégalités scolaires.

    En effet, si notre système éducatif a su relever le défi de la massification, celle-ci ne s’est pas prolongée par une véritable démocratisation : 60 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans qualification. Les enfants de famille ouvrière ne représentent que 10 % des étudiants. Les inégalités de départ (revenu, logement, santé) ont un effet direct sur les résultats scolaires.

    L’école est devenue elle aussi un point névralgique des phénomènes de ségrégation sociale et ethnique. Beaucoup de parents de toutes conditions doutent désormais des capacités de l’école et même de l’université à assurer un avenir professionnel à leurs enfants.

    Ils ne retrouveront confiance que si les voies de l’excellence se conjuguent avec la perspective d’une égalité réelle.

    a) L’école pour tous

    Jaurès disait que l’école était « le vestibule des temps nouveaux ». Cette formule reste vraie. Mais il faut prendre justement la mesure des temps nouveaux. Le progrès d’un pays va de pair avec celui de la démocratisation.

    Nous ne gagnerons pas le pari de l’efficacité, à un moment où la mondialisation demande de développer les compétences et les qualifications, sans gagner celui de la justice.

    Nous avons bien conscience de l’inquiétude qui existe aujourd’hui pour les élèves, les parents et les enseignants, tant la formation est importante. Quand tout paraît se jouer aux premiers âges de la vie, quand les différences entre les filières sont trop grandes, quand l’accès aux grandes écoles ou aux universités prestigieuses sont devenus le privilège de quelques uns.

    Aujourd’hui, le développement de l’enseignement privé et de la marchandisation de l’accompagnement scolaire menacent le principe de l’école publique. En outre, l’université française risque de se faire distancer à l’échelle européenne et internationale.

    Dans ce contexte, Il faut évidemment reprendre les politiques initiées par la gauche depuis les années 1980, une priorité budgétaire qui ne s’et jamais démentie, des mesures pour individualiser les pédagogies, la définition d’une culture commune, la valorisation de l’enseignement professionnel, avec notamment les lycées des métiers, le développement des langues vivantes, l’harmonisation européenne des diplômes de l’enseignement supérieur, etc...

    Mais, nous voulons proposer des efforts nouveaux.

       Créer un service public de la petite enfance. Les inégalités sont massives à cet âge. Investir en amont, c’est faire en sorte que la pauvreté des parents n’affecte pas de manière rédhibitoire le succès de leurs enfants. Ce service couvrirait la généralisation des crèches, les gardes d’enfants, la lutte contre la pauvreté infantile, le suivi médical et psychologique. Aujourd’hui ces politiques sont trop parcellaires et doivent être coordonnées. La pré-scolarisation à deux ans doit devenir l’objectif de la prochaine législature.

       Aller au cœur des inégalités : 15 élèves par classe en ZEP. Si les Zones d’éducation prioritaires n’ont pas eu l’impact souhaité, c’est que les moyens ont été trop saupoudrés. Le classement en ZEP donne lieu seulement à 10 % de ressources supplémentaires. Les effets de stigmatisation l’emportent alors. Nous devons au contraire faire en sorte que le label ZEP devienne un signe de dynamisme. Il faut améliorer la carrière des enseignants dans ces établissements.

       Accompagner les élèves : un grand plan périscolaire sera lancé pour combiner aides aux devoirs, activités sportives et éveil culturel en coopération avec les collectivités locales et les mouvements d’éducation populaire. Tout jeune entre 6 et 16 ans devra être pris en charge à la sortie de l’école (activités sportives, culturelles…).

       Intégrer tous les enfants : des internats seront prévus pour offrir des moyens aux élèves qui sont dans un milieu trop défavorable et la scolarité des enfants handicapés en milieu scolaire sera privilégiée.

       Promouvoir les universités françaises : il s’agit d’abord de permettre au plus grand nombre d’y accéder. Notre objectif est d’amener d’ici 10 ans, 60 % d’une classe d’âge à Bac + 3. Il n’y a pas trop d’étudiants bien au contraire. À la condition d’améliorer le taux de réussite dans les premiers cycles universitaires et d’amplifier la mobilité des étudiants dans les universités étrangères. Il s’agit ensuite d’accroître les moyens de l’enseignement supérieur et de porter sur cinq ans la dépense par étudiant au niveau de la dépense par lycéen. Il faut aussi changer radicalement les modes de recrutement des grandes écoles pour les ouvrir à toutes les catégories d’étudiants et de populations, et notamment établir un quota par lycée d’entrée en classe préparatoire. Enfin, il faudra également poursuivre l’effort de contractualisation de l’Etat avec les universités.

    Toutes ces politiques ne vaudront qu’avec le concours actif des enseignants et de toutes les équipes éducatives . Nous ouvrirons une large concertation dès avant 2007 avec les syndicats de l’Education Nationale pour faire le point sur les conditions d’exercice du travail éducatif aujourd’hui. Elles ont changé dans les dernières décennies. Nous devons en tenir compte en termes de recrutements et de pré-recrutements, de formation, d’évolutions de carrière. Nous mettrons en œuvre une loi de programmation pluriannuelle sur l’Education.

    b) L'autonomie pour les jeunes

    Les jeunes entrent plus tard qu’hier dans la vie active, par l’effet de l’allongement des études ou des difficultés d’insertion dans le monde du travail ; ils n’en ont pas moins besoin d’autonomie en atteignant l’âge adulte. Un plan pour l’autonomie des jeunes sera mis en œuvre : augmentation des bourses, garantie pour les jeunes d’obtenir les stages nécessaires dans le cadre de leur formation, amélioration des rémunérations des stagiaires et des apprentis, plan social étudiant, logement étudiant, accès aux soins, accompagnement personnalisé systématique vers l’emploi. Parallèlement, les adolescents ont changé, parce que leur découverte du monde est plus précoce et emprunte des voies plus diversifiées, mais aussi parce qu’ils sont touchés par l’angoisse du chômage, et confrontés à une société dans laquelle ils ont du mal à trouver leur place. L’école et ses partenaires doivent tenir compte de cette mutation et prendre en charge globalement les adolescents, au-delà de sa mission traditionnelle de transmission des savoirs, qu’il s’agisse d’éducation à la sexualité et à la santé, d’éducation à l’image ou de décryptage des codes sociaux.

    c) Une société de l'éducation tout au long de la vie

    Pour nous, socialistes, tout travailleur, toute personne doit pouvoir avoir accès à l’éducation et à la formation tout au long de la vie. Ce nouveau droit doit être accessible à tous et sera d’autant plus large que la formation initiale aura été courte. Nous voulons :

       Un droit universel, c’est-à-dire reconnu à tous (quels que soient son statut ou sa situation : chômeur, salarié, fonctionnaire, indépendant, jeune sans qualification) ;

       L’égalité d’accès garantie par une prise en charge financière

    Ce droit est un des piliers de la sécurisation des parcours professionnels et sociaux que les socialistes ont l’ambition de mettre en œuvre.

    d) La culture pour tous

    La culture est au cœur d’un projet de gauche, car elle permet à chacun de s’émanciper et de s’ouvrir aux autres et au monde.

    La place des artistes dans notre société est essentielle, car l’acte de création est un acte de liberté.

    La mondialisation peut produire le pire, l’uniformisation des cultures, leur réduction à une sous-culture standardisée. Elle peut produire le meilleur, le respect de la diversité, la multiplication des échanges. Sans action publique, le pire est certain.

    L’Europe doit à cet égard faire plus, non seulement pour défendre l’exception culturelle, mais aussi pour se donner les moyens d’une création vivante et forte et d’une accession de tous à celle-ci. Ce que nous avons fait au niveau français, pour le cinéma, pour le livre, doit être accompli au niveau européen.

    Notre politique culturelle permettra notamment de :

       Développer l’éducation artistique à l’école : comme fondement de la sensibilisation de la population à l’importance de la culture. L’égalité devant l’accès au savoir est essentielle ; elle doit aussi être valable pour l’éducation artistique.

       Consolider les droits des artistes en prévoyant le droit d’auteur dans l’environnement numérique et en préservant le droit des intermittents dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle ;

       Proposer une loi de programmation pour soutenir le spectacle vivant.

       Favoriser une politique culturelle européenne pour intensifier la circulation des œuvres et reconnaître la diversité culturelle.

       Dépasser la problématique habituelle de la décentralisation, en élaborant une politique culturelle publique préalable à toute répartition de compétences entre Etat et Collectivités.

       Favoriser les cultures et les langues régionales.


    e) Le Sport

    Le sport est un élément important d’éducation et de formation. Un droit au sport pour tous sur tous les territoires et dans tous les secteurs de vie doit être reconnu, ainsi que la reconnaissance de la contribution du sport aux politiques de santé publique, ce qui implique notamment une action soutenue de lutte contre le dopage.
    2) Un plan de bataille pour le logement
    Pénurie de logements, explosion des loyers, spéculation immobilière : la crise du logement atteint une gravité sans précédent et provoque des drames humains insupportables. La part du budget des ménages consacrée au logement augmente considérablement. De plus en plus de Français ne parviennent pas à accéder à un habitat correspondant à leurs moyens économiques. La mobilité résidentielle est aussi faible que la mobilité sociale. La politique de la ville n’a pas inversé la tendance à la ségrégation urbaine, pas plus qu’elle n’a empêché la constitution de ghettos.
    La politique du logement doit prendre toute la mesure de la gravité de la situation.

    Elle s’articulera autour des principes suivants :

       Une agence nationale sera créée pour mettre à la disposition des constructions des terrains propriété de l’Etat ou qui pourraient être directement préemptés en liaison avec les établissements fonciers régionaux.

       Un effort national de construction de logements sociaux avec l’objectif de construction de 120 000 logements par an en tirant les leçons des années 60 (grands ensembles), des années 70-80 (villes nouvelles). Priorité sera donnée à un plan de mobilisation contre le « mal logement » et les logements d’urgence.

       Une action sur le cadre de vie sera engagée pour retrouver de « vraies villes » et « reconstruire de la ville » dans chacun des quartiers, afin que puissent s’y trouver toutes les activités (vivre, dormir, travailler, faire ses courses, utiliser les services publics, se distraire). Nous voulons imbriquer ces fonctions, retrouver des centres de quartier où les commerces et les services publics soient présents, créer des lieux de promenade et de culture.

       Une véritable politique de mixité sociale, avec un renforcement des obligations et des sanctions pesant sur les villes en application de la loi SRU, en matière de logement HLM. La pénalité pour les communes ne respectant pas l’objectif des 20 % de logements sociaux sera triplée. Il sera appliqué le même quota de 20 % pour toutes les opérations de promotion immobilière dans les zones en pénurie de logements sociaux avec l’objectif d’opérations de logement mixant de façon équilibrée les différents types de logement (« sociaux », « intermédiaires » et « libre »).

       La révision de toutes les aides fiscales au logement - notamment la loi de Robien - pour les conditionner à la réalisation de logements conventionnés.

       Un système d’assurance logement qui limite le poids des cautions et encadre les garanties de ressources exigées par la création d’un fonds de garantie pour les propriétaires.

       Une revalorisation des aides personnelles en faveur des familles, et notamment des jeunes ménages.

       Un encadrement plus strict des loyers à partir d’un indice incontestable.

       Une lutte contre les marchands de sommeil, en instaurant un permis de louer incluant des normes de surface par personne, de sécurité et de salubrité. Le non respect de ce permis conduira à des poursuites judiciaires.

    3) Une véritable politique des territoires
    Les disparités entre régions, départements et villes se sont élargies ces 20 dernières années. Et la décentralisation, sans redistribution des moyens et des ressources, a été un facteur aggravant. D’où ce sentiment d’abandon qu’éprouvent les habitants des territoires ruraux désertifiés et les résidents des quartiers urbains dégradés. Le démantèlement progressif par la droite de la politique d’aménagement du territoire, l’effacement progressif de la présence des services publics et la fracture numérique accentuent encore la logique inégalitaire. C’est la solidarité nationale qu’il faut désormais opposer à cette dislocation locale.

    Une politique du territoire doit donc être engagée sur les principes suivants :

       La relance de l’aménagement du territoire avec une nouvelle génération de contrats de plan Etat-Région recentrés sur trois priorités : habitat et développement urbain, emploi et formation, transports et environnement.

       La refonte des dotations de l’Etat aux collectivités fondées sur des critères effectifs de richesse fiscale ; elle seront ainsi modulées, avec un effort sans précédent en faveur de la péréquation. Et une fiscalité différente, correctrice, et même discriminante, sera introduite. Pour assurer une plus grande justice fiscale,nous donnerons la possibilité aux collectivités locales de mettre en œuvre la déliaison des taux. De même, nous donnerons la possibilité aux collectivités et aux EPCI de moduler la taxe foncière, en particulier pour taxer les opérations de spéculation immobilière.

       Les espaces ruraux doivent être synonymes de dynamisme et de développement afin de répondre à des besoins nouveaux. Pour cela, le développement des moyennes, petites et très petites entreprises, la mise en réseau des services publics et l’implantation des technologies nouvelles sont des outils essentiels. En matière agricole, nous devons réorienter les politiques publiques dans une perspective de développement durable et de renforcement de la multifonctionnalité de l’agriculture. Cela passe par une meilleure répartition des aides en faveur des modèles de développement agricole (réexamen des références historiques) qui, tout en étant viables économiquement, respectent les contraintes environnementales et offrent de nouveaux débouchés aux agriculteurs (agriculture biologique, utilisation de la biomasse, des biocarburants et des produits non alimentaires). Pour les territoires en déclin démographique, un seuil minimum de présence de services publics devra être fixé par bassin de vie.

       Le numérique pour tous sera assuré au travers d’une agence nationale garantissant à tous les Français, quelle que soit leur place sur le territoire, un accès aux réseaux numériques à très haut débit.

       Un plan d’égalité pour l’Outre mer reconnaissant la diversité des situations, acceptant des évolutions institutionnelles différenciées et des politiques sectorielles spécifiques, mais exigeant un effort de la Nation et de l’Europe pour remédier aux handicaps d’un chômage massif et d’un retard de développement inacceptable (santé, Education, logement, immigration, transports). Cette politique de solidarité doit aller jusqu’à reconnaître des critères particuliers pour l’ensemble des politiques publiques pour l’Outre mer.

C - Un contrat citoyen

    Les phénomènes de violence ne peuvent être expliqués indépendamment de l’analyse des effets du libéralisme économique sur le creusement des inégalités, le développement de l’individualisme et la course à la consommation. Dans une société en quête de repères, nous voulons porter un projet de société qui fait valoir la règle collective, la justice, les droits et les devoirs de chaque citoyen.
    1) Des droits garantis
    a) La sécurité pour tous et partout

    La montée des violences contre les personnes se poursuit et s’aggrave. Trois ans après le 21 avril 2002, l’échec de la droite en matière de lutte contre l’insécurité est manifeste. Au lieu de faire reculer la violence, sa politique a instauré un partage territorial entre centres-villes protégés et quartiers abandonnés. La police de proximité a été supprimée au bénéfice d’actions spectaculaires, mais dépourvues d’efficacité à moyen terme. Les lois de programmation en matière d’effectifs de sécurité ne sont pas respectées. Les lois pénales ont été renforcées. Elles sont inappliquées car inapplicables. La machine judiciaire ne parvient plus à faire face. La prévention a été totalement abandonnée. Le tout carcéral s’est imposé.

    La sécurité est une priorité essentielle pour les socialistes. Une politique de sécurité de gauche doit être dure avec le crime et dure avec les causes du crime. L’efficacité de la lutte contre l’insécurité appelle une démarche globale fondée sur la précocité de la prévention et de la sanction.

    Nous proposons :

       Une grande politique de prévention précoce pour agir en amont des comportements violents, notamment en généralisant les cellules de veille éducatives. Notre priorité doit être de protéger la jeunesse de la délinquance.

       Un plan de lutte contre les violences familiales et de protection de l’enfance et de l’adolescence en danger afin de protéger les victimes et d’éviter la reproduction de la violence.

       Des sanctions justes, rapides et effectives.

       Une sécurité publique de proximité : l’organisation de la police nationale doit être adaptée aux nouvelles formes de criminalité en inversant la logique actuelle, c’est-à-dire en affectant les moyens en fonction du niveau de délinquance. Il s’agira d’améliorer le service rendu à la population et de donner la priorité à la lutte contre la délinquance endurcie liée à l’économie souterraine. De nouvelles unités urbaines centrales, comparables à de véritables commissariats, disposant de tous les moyens d’intervention de façon coordonnée : sécurité publique, investigation judiciaire, brigades des mineurs, renseignement, seront crées dans les endroits les plus exposés à la délinquance. Une rémunération et une évolution des carrières plus motivantes pour les policiers exerçant dans les endroits les plus durs devra permettre de fidéliser les fonctionnaires les plus expérimentés dans les zones les plus difficiles.

       Renforcer les politiques partenariales de sécurité entre les services de l’Etat et les collectivités locales.

       Une nouvelle législation doit mieux réglementer les activités des entreprises privées de sécurité
      , notamment s’agissant des conditions de recrutement et d’agrément des personnels.

       Renforcer les coopérations internationales : L´internationalisation croissante de la grande criminalité et des grands trafics (drogue, armes, contrefaçons, déchets toxiques et, de plus en plus, des êtres humains) et la menace terroriste exigent de développer de nouvelles règles de sécurité internationale et renforcer les coopérations en matière de police, de justice et de renseignement. Nous proposons, notamment, la création d’une police européenne aux frontières.

    b) Une justice efficace et indépendante

    Restaurer la confiance en la justice est d’autant plus nécessaire que la droite porte gravement atteinte à son indépendance, ne respecte pas les engagements financiers qu’elle a elle-même pris et a fait voter avec les lois Perben dont nous devrons abroger les dispositions liberticides :

       Une justice plus accessible : en multipliant les lieux d’information (maisons de la justice et des droits), en assurant un meilleur accès à l’aide juridictionnelle et en prévoyant l’exécution rapide des décisions civiles ;

       Une justice plus protectrice en développant le réseau associatif d’information et d’aide aux victimes pour le rendre plus accessible afin de rendre effective leur indemnisation.

       Une justice plus éducative pour les mineurs délinquants : la surenchère législative concernant les sanctions est une fausse solution. En conséquence, il faudra donner les moyens humains pour que les décisions des juges des enfants soient rapidement appliquées, diversifier les établissements accueillant des mineurs délinquants et prendre en charge ceux qui présentent des troubles psychologiques.

       Une justice plus soucieuse des libertés et de la présomption d’innocence : les procédures pénales d’exception seront systématiquement révisées.

       Une justice plus efficace contre la récidive : l’inexécution des peines, l’encombrement des prisons, l’incapacité à garantir la dignité des détenus et à favoriser leur réinsertion sont facteurs de récidive. Aussi, nous proposons de remettre à l’ordre du jour le projet de loi pénitentiaire préparé sous la précédente législature (et notamment une autorité indépendante des prisons), de relancer le travail d’intérêt général, d’augmenter le nombre des juges d’application des peines et d’accroître les moyens humains des services d’insertion et de probation.

       Une justice indépendante du pouvoir exécutif et responsable : la composition du Conseil Supérieur de la Magistrature sera modifiée pour garantir son pluralisme et les membres extérieurs à la magistrature y deviendront majoritaires. Les attributions du CSM seront étendues afin que tout magistrat s’estimant menacé dans son indépendance puisse le saisir. Son accord ou son avis sera nécessaire sur les aspects essentiels du fonctionnement de la Justice et il disposera de moyens en services (gestion des nominations, inspection générale) lui permettant de remplir ses missions. Aucune nomination de magistrat ne pourra intervenir sans son accord. L’amélioration du système de responsabilité des magistrats suppose la création d’un mécanisme de recours ouvert aux justiciables contre les dysfonctionnement de la Justice, ainsi qu’une saisine plus facile du CSM pour engager la responsabilité disciplinaire et une réelle indépendance de l’inspection des services judiciaires qui passe par son rattachement au CSM.

    c) Une immigration maîtrisée par un partenariat équitable

    L’immigration est une réalité incontournable compte tenu des déséquilibres mondiaux. Pour la France, c’est à la fois une richesse sociale et culturelle et un besoin économique, sous réserve qu´elle soit régulière.

    Il faut rompre avec le consensus qui s’est instauré en Europe sur le seul aspect répressif et sur la manière dont il convient de lutter contre l´immigration clandestine : contrôler, enfermer et éloigner. Cette politique n´a pas interrompu les flux. Au contraire, elle a fragilisé la situation des étrangers en situation irrégulière, renforcé la puissance des filières criminelles d´immigration clandestine et développé la traite des êtres humains et leur exploitation dans le cadre de l´économie souterraine. La droite fait également peser une menace sur le droit du sol au prétexte de la lutte contre l’immigration clandestine : nous nous opposerons avec la dernière énergie à cette remise en cause d’un principe constitutif de l’identité française.

    Nous proposons donc une politique équilibrée qui laisse une place juste et équitable aux trois voies d’immigration légale que sont l’asile politique, le lien familial et le travail. Des contrats avec les pays d’origine, permettront de mieux réguler les flux (visas, droit de séjour), les conditions d’installation dans la société française et les modalités des allers et retours. Elle s’appuiera sur la volonté des immigrants de garder des liens avec leur pays d’origine. Elle associera l’ensemble des acteurs (partenaires sociaux, associations, collectivités locales, ONG) à sa définition.

    Elle redonnera son sens à la lutte contre les filières d´immigration illégale et contre le travail clandestin. À cet égard la coopération et l’harmonisation européennes devront être renforcées. L’intégration réussie des nouveaux arrivants est absolument fondamentale. Elle nécessite des mesures garantissant à la fois les droits sociaux, économiques et politiques des immigrés.
    2) L'égalité pour toutes et pour tous
    a) L'Egalité homme / femme exige de :

     Donner aux femmes les moyens de leur autonomie en créant un véritable service public de l’enfance ; en prenant en compte leur situation dans le calcul des droits sociaux et notamment des retraites ; en adaptant les services publics aux nouveaux rythmes de vie ; en améliorant la prise en charge collective des personnes dépendantes (âgées ou handicapées, qui incombe le plus souvent aux femmes).  Promouvoir une loi anti-sexiste comparable à celle qui a été adoptée par le gouvernement espagnol. Elle donnerait notamment aux victimes de violences conjugales le droit de conserver leur domicile.  Développer des actions de prévention par l’éducation des filles et des garçons au respect des genres et à la mixité.  Valoriser les représentations positives des femmes.

    b) La lutte contre les discriminations

    Trop de Français issus de l’immigration sont traités comme des citoyens de seconde zone dans notre pays. Quel crédit un jeune peut-il porter à la République lorsqu’il se fait systématiquement rejeter lorsqu’il recherche un emploi, un logement, ou même simplement lorsqu’il sort avec des amis du simple fait de son nom, de sa couleur de peau ou de son adresse ? Face aux réponses d’inspiration anglo-saxonne, qui consistent à introduire de nouvelles « discriminations », nous devons privilégier les solutions républicaines c’est-à-dire d’abord faire appliquer la loi :

       Aucune discrimination sans sanction : actuellement, très peu de condamnations sont prononcées. Les services de police seront donc renforcés pour confondre systématiquement les comportements hors la loi et les magistrats seront formés au traitement judiciaire de ces faits.

       Un « plan pour l’égalité » doit également permettre la promotion sociale de jeunes issus de tous les lycées de métropole et d’outre-mer d’accéder aux classes préparatoires aux grandes écoles et aux établissements universitaires qui sélectionnent à l’entrée.

       Chaque année sera organisée une conférence annuelle des partenaires sociaux et acteurs de la société civile sur les questions liées aux discriminations.

       Un bilan de l’égalité des chances, à l’instar du bilan social, obligera chaque entreprise publique et privée à évaluer annuellement sa politique de recrutement.

       L’abrogation de la loi du 23 février 2005 votée par la droite soulignant les bienfaits de la colonisation et développement d’une grande politique de mémoire de l’immigration en France.

    c) Le droit pour les personnes handicapées à un projet de vie

    Les difficultés des personnes handicapées à trouver leur juste place dans la société ne sont pas tolérables. La France ne peut pas être fière de la situation actuelle, et la droite s’est contentée d’une loi alibi. Nous engagerons une politique ambitieuse dans tous les domaines, pour que toute personne handicapée puisse prétendre à un réel projet de vie.

    La première priorité est l’intégration scolaire : la règle doit être l’intégration en milieu ordinaire, les structures spécialisées l’exception, lorsque le handicap ne la rend réellement pas possible. Un effort décisif doit être engagé pour l'accessibilité environnementale ( voirie, bâtiments publics, transports, culture, sport, loisirs) car un des droits de l’homme les plus fondamentaux est la liberté d’aller et venir, ainsi que pour l’adaptabilité des logements.

    L’accès à l’emploi est bien sûr la condition de l’autonomie. Il passe par la formation tout au long de la vie, qui doit être ouverte aux personnes handicapées et le respect des obligations légales d’embauche, dans les entreprises et les administrations, qui devront accroître un effort aujourd’hui très insuffisant.

    S’agissant des revenus, nous nous fixons comme objectif la parité de l' Allocation Adulte Handicapé ( AAH ) avec le SMIC.

    Enfin, chaque loi votée devra prendre en compte la question du handicap, comme ceci est pratiqué en Suède.

    Les personnes handicapées sont des acteurs de la société. Elles doivent donc participer à toute action et décision ayant un impact sur leur vie, être intégrées à la vie publique et exercer pleinement leurs droits sociaux et politiques. A cette fin le parti socialiste promouvra les militants handicapés sur les scrutins de liste.

    d) L'égalité pour les couples de même sexe

    Pour tirer toutes les conséquences de notre refus des discriminations, le PACS sera amélioré en matière d’inscription à l’état-civil, de régime des biens, de droit de succession, de droit au logement, de droits sociaux et de droits des PACSés binationaux, et le mariage sera ouvert aux couples de même sexe.
    3) Le défi éthique
    a) L'adoption

    Le droit à l’adoption doit s’adapter aux réalités nouvelles et notamment tenir compte de l’homoparentalité.

    b) Maîtriser l'évolution des sciences de l'humain

    L’évolution prodigieuse de la génétique ne peut rester un débat de spécialistes et les questions éthiques doivent primer toute considération économique. L’avenir de l’humain est en jeu et il doit faire l’objet d’un véritable débat que nous organiserons en France, et susciterons en Europe, et dans les instances internationales compétentes.

    c) Un nouveau droit pour la fin de vie

    Nous créerons un droit à l’accompagnement de la fin de vie fondé sur les principes suivants : manifestation de la volonté du malade de manière réitérée, acte non décidé par la famille seule, prise de décision du personnel médical de manière collégiale, information faite à la famille, commission de contrôle chargé du respect de l’ensemble de la procédure.

D - Un contrat écologique

    L’équilibre de la planète est en danger, au point de remettre en cause les capacités d’existence des générations futures de manière irréversible et la fin des énergies faciles est programmée.

    C’est un modèle nouveau qu’il faut promouvoir.

    L’impératif écologique doit commander l’ensemble des politiques publiques. L’exigence de développement durable est un facteur de progrès. Elle n’est en aucun cas synonyme de retour en arrière, mais peut au contraire favoriser des activités nouvelles, des créations d’emplois, des avancées technologiques.

    Il s’agit dès aujourd’hui de prendre des engagements, chiffrés et datés, pour la recherche, la maîtrise de l’énergie, la lutte contre les pollutions (air, eau, déchets).

    Des contrats seront passés avec les collectivités locales, notamment pour la gestion des ressources naturelles.

    Nos objectifs sont les suivants :

       Organiser dès aujourd’hui la société sans pétrole en investissant massivement dans la recherche ; et en renonçant à l’usage des énergies fossiles de manière progressive, anticipée et planifiée, dans les transports, l’industrie.

       Préparer dès aujourd’hui la société du 100 % recyclable/biodégradable afin de traiter à la source le problème de la production de déchets.

       Faire nôtre le principe de précaution, en créant les conditions de véritables débats et décisions démocratiques lorsque les progrès de la science impliquent une prise de risque potentielle importante.

       Fixer un objectif chiffré transversal à moyen terme : la division par 5 de la pollution globale (eau-air-sol) sous 10 ans.

    Nous proposons :

      En matière d’énergie : :
         Le doublement de la part des énergies renouvelables dans le bilan énergétique.

         Restructuration de la recherche publique en matière d’énergie avec l’objectif, sous dix ans, d’une égalité de moyens entre le nucléaire et le couple énergies propres / procès d’économie d’énergie.

      En matière de transport : :
         Des voitures totalement propres en ville d’ici 10 ans.

         Développement d’un urbanisme qui s’appuie sur les nouveaux modes de transports collectifs (tramway…) et individuels (vélo).

         Relance des aides d’Etat à la réalisation de transport en commun en site propre.

         Priorité aux transports en commun dans le cadre d’une refonte globale des tissus urbains et interurbains (densification, rationalisation…), des procédés de transport de fret alternatifs aux camions (ferrés, fluviaux et maritimes, aériens…).

         Mise en place d’une fiscalité favorable à l’usage à l’usage des transports propres et collectifs.

      En matière d’habitat : :
         Mise en place d’un « plan habitat énergie » programmant sous 10 ans la mise aux normes haute qualité environnementale de la totalité du parc immobilier, notamment dans les logements sociaux

      En matière agricole : :
         Création des conditions d’une évolution des modèles de production agricole en faveur de pratiques économes en énergie limitant le recours aux engrais chimiques et aux pesticides.

      En matière de déchets : :
         Le traitement à la source des déchets, au travers d’une contractualisation avec les industriels, avec pour objectif une mutation technologique débouchant sur du 100% recyclable.

      En matière de gestion de l’eau : :
         Création d’une haute autorité pour l’eau chargée de coordonner les politiques de préservation de la ressource et d’harmoniser le prix de l’eau sur l’ensemble du territoire.

      En matière institutionnelle et fiscale : :
         Création d’un grand ministère au développement durable doté de compétences arbitrales transversales en matière de transport, d’aménagement du territoire, de logement…

         Formation de structures de police et de justice spécialisées aux niveaux national et européen afin de garantir le respect du droit (dégazages, marées noires, contrôle des installations classées…).

         Dans le cadre de la nouvelle donne fiscale globale que nous appelons de nos vœux, une place centrale doit être octroyée à la fiscalité écologique et au principe pollueur/payeur.




Les conditions de la réussite

 

I - Une nouvelle donne démocratique

La crise démocratique profonde dans notre pays (abstention massive, montée des extrêmes, affaiblissement de la représentativité des partis de gouvernement) s’est traduite par une distance de plus en plus grande à l’égard des politiques et même de défiance à l’égard de la politique.

Notre volonté est de faire évoluer les institutions vers une démocratie moderne basée sur la responsabilité de tous les acteurs, et la participation accrue des citoyens.

A - Démocratie politique : une nouvelle République

    Les institutions de la V ème République et la pratique qui en est faite par l’actuel Chef de l’Etat ont conduit à une véritable crise de régime : confusion dans l’exécutif, irresponsabilité des gouvernants, affaiblissement du Parlement, représentation déformée de la réalité politique et dessaisissement du citoyen.

    Plusieurs principes sont susceptibles de participer à l’indispensable évolution de nos institutions :

       La pleine souveraineté législative et le contrôle du Parlement qui retrouverait la maîtrise de son ordre du jour (article 48). Pour mettre fin à la tutelle de l’Exécutif sur l’Assemblée nationale, les contraintes du parlementarisme rationalisé doivent être levées, en restreignant notamment le champ d’application des articles 38 (ordonnances), 44 (vote bloqué) et 49-3 de la Constitution. La procédure législative doit être rénovée, allégée et recentrée sur les commissions, dont le nombre doit être accru ;

       Le mandat parlementaire unique verra le jour dès que nous aurons mis en œuvre le statut de l’élu ;

       Un véritable statut de l’opposition ;

       Le respect de la parité.

    Parallèlement, les liens de confiance entre élus et citoyens doivent être renforcés par :

       L’introduction d’une dose de proportionnelle dans le mode d’élection des députés ;

       Une réforme du mode de scrutin du Sénat, pour le rendre plus représentatif des territoires ;

       L’aménagement des modalités de représentation des Français de l’étranger (représentation à l’Assemblée nationale par des députés élus directement par eux, transformation de l’assemblée des Français de l’étranger en établissement public, organisation du vote à distance, électronique et par correspondance, rattachement aux circonscriptions métropolitaines pour les élections européennes) ;

       La fixation de la durée des mandats électifs à 5 ans, la limitation de leur renouvellement : nul ne pourra exercer le même mandat plus de trois fois successivement (deux pour le Chef de l’Etat) et l’interdiction pour un ministre d’exercer une fonction exécutive locale ;

       La parité dans tous les exécutifs (y compris le Gouvernement) et dans les candidatures à toutes les élections sous peine de suppression des financements publics ;

       Le droit de vote des résidents étrangers, en précisant les conditions de l’adoption d’une telle réforme qui suppose un vote conforme des deux assemblées ou, à défaut, un référendum.

    Pour mettre en œuvre ces réformes, indispensables à notre démocratie, nous aurons recours à l’article 11 de la Constitution en consultant les Français par référendum.
    Une décentralisation refondée
    La décentralisation : la gauche l’a voulue, la droite l’a abîmée, en la rendant confuse et injuste. Une nouvelle étape de décentralisation sera engagée par une grande consultation des collectivités locales sous la forme d’assises des territoires. La loi dite Raffarin du 13 août 2004 sera abrogée.

    La décentralisation devra être clarifiée : L’Etat se recentrera sur ses responsabilités, garantira que les transferts des compétences aux collectivités s’accompagnent vraiment des transferts financiers correspondants. La Région sera reconnue comme chef de file dans le domaine du développement économique, de l’aménagement du territoire et dans la formation professionnelle. Les structures de coopération intercommunales (EPCI) verront leurs compétences accrues dans les domaines liés aux grandes infrastructures, au transport, au logement et à la politique foncière. Les départements se verront confortés dans leur rôle de solidarité et de proximité et le mode d’élection des conseillers généraux sera modifié pour assurer une meilleure représentativité.

    La démocratie locale sera rénovée : Il s’agira d’organiser le même jour l’ensemble des élections locales, de désigner au suffrage universel les structures intercommunales et d’introduire enfin le statut de l’élu. Les Conseils de quartiers sont des lieux importants de démocratie participative. Mais, leur rôle s’exerce plus dans le registre de la concertation que de la codécision. Des évolutions devront permettre, notamment sur certains projets, de les associer plus directement encore aux choix.

B - Démocratie sociale

    La participation des citoyens à la décision ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise.

    Or, le système français a vieilli. Le paysage syndical se morcelle. Les organisations comptent peu d’adhérents. Et notre édifice juridique n’incite guère à la création d’un véritable partenariat social.

    Nous considérons que l’existence d’un syndicalisme puissant, profondément enraciné dans le salariat et disposant de pouvoirs effectifs de négociation est une condition du progrès économique. Les pays qui disposent de négociations fortes ont un taux de chômage plus faible et une progression des salaires réels plus forte.

    Quatre champs de réforme paraissent, à cet égard, essentiels à conduire sur la durée de la législature :

       La systématisation du fait majoritaire : un accord professionnel ne pourra être considéré comme valable que s’il reçoit l’accord d’une ou de plusieurs organisations majoritaires parmi les salariés.

       La définition de nouvelles règles de représentativité pour les organisations syndicales passant par des élections régulières dans les branches professionnelles.

       Le rétablissement de la hiérarchie des normes sociales : il s’agit d’une part d’établir clairement ce qui relève de la loi et ce qui relève de l’accord entre partenaires sociaux, d’autre part de revenir sur la loi Fillon qui a remis en cause la négociation de branche au profit de la négociation d’entreprise.

       La présence de représentants des salariés dans les conseils d’administration et les conseils de surveillance.

    Le Conseil Economique et Social - en tant que lieu d’expression de la société civile organisée - verra ses prérogatives largement amplifiées et sera doté des moyens nécessaires à l’accomplissement de sa mission. Il sera l’un des interlocuteurs privilégiés du gouvernement, du Parlement et de l’ensemble des pouvoirs publics pour tout ce qui touche à la vie économique, sociale et culturelle.

C - Démocratie citoyenne

    Nos concitoyens se sentent de plus en plus mal représentés par les institutions, qu’elles soient politiques, associatives ou syndicales. Et pourtant l’engagement est là, et le désir d’utilité sociale, la solidarité n’ont jamais été aussi vivants. Ce constat doit nous amener à construire l’intérêt général autrement, en associant ceux qui se sentent aujourd’hui exclus.

    Nous nous engageons à donner plus de place aux citoyens avec une loi sur « l’initiative citoyenne » qui ouvrira un droit de pétition permettant de saisir le Parlement d’une grande question d’intérêt et l’élargissement de la saisine du Conseil constitutionnel aux citoyens.

    En outre, dans la reconquête de la citoyenneté de droits et de devoirs, nous proposons des mesures fortes et solennelles :

       L’instauration d’un service civique obligatoire, afin que toutes les jeunes femmes et les jeunes hommes consacrent une période de leur vie au service de leurs concitoyens ;

       La création de « prestations de serment » solennelles dans les mairies au moment d’accéder à la majorité ou à la nationalité.

    Enfin, une démocratie moderne a besoin de médias pluriels et indépendants. Nous mettrons en œuvre une politique pour lutter contre les concentrations dans le domaine des médias et des industries culturelles : livre, disque, cinéma et promouvoir la production indépendante par des fonds d’incitation à la création. Les moyens de l’audiovisuel public seront renforcés par une taxe sur la publicité audiovisuelle et les conditions de nomination et les prérogatives du CSA devront être entièrement revues pour renforcer son indépendance et sa capacité à réguler et à sanctionner.

D - La laïcité, condition du vivre ensemble

    La laïcité est la pierre angulaire de notre pacte républicain, car elle unit trois valeurs fondamentale : la liberté, et notamment la liberté individuelle fondamentale qu’est la liberté de conscience, mais aussi l’égalité entre les citoyens et les religions, et enfin la fraternité, car elle a pour objet de créer les conditions permettant à tous de vivre ensemble dans un respect réciproque.

    Elle est la seule voie pour vivre ensemble dans la République, avec toutes nos différences, dans le respect de ces différences et sans jamais que l’une de ces différences ne dicte sa loi à la communauté nationale.

    Il faut veiller dans le cadre de l’organisation du territoire, des collectivités locales et notamment de la ville, à ce que chacun trouve sa place, son habitation, son métier, son éducation, sa culture, sa pratique religieuse ou philosophique. Il faut donc initier des politiques publiques, assumées comme telles par l’Etat, en relation avec les collectivités locales qui organisent cette diversité.

    Si la République abandonne son territoire, elle laisse cet espace aux communautarismes.

    La loi de 1905, aux principes toujours d’actualité, ne fait pas de distinction entre les religions et elle leur reconnaît une égalité de droits et de devoirs. L’islam doit donc se voir reconnaître les mêmes droits et assumer les mêmes devoirs que les autres religions pour les lieux de culte, la place des sépultures dans les cimetières et les spécificités alimentaires.

    Mais, en cette année où nous célébrons le centenaire de la loi de 1905, deux ans après avoir voté, avec la droite, la loi d’interdiction des signes religieux dans les établissements scolaires dont nous savions bien, nous, qu’elle ne suffisait pas à redéfinir la laïcité, cette belle valeur est à nouveau menacée par la droite, par le Ministre de l’Education qui multiplie les déclarations et les gestes à l’attention de l’enseignement religieux. Et surtout par le Ministre de l’intérieur qui ne cesse d’instrumentaliser ce besoin renaissant de spiritualisme de nos concitoyens auquel seules les religions pourraient répondre. C’est pourquoi il nous semble que nous devons, tels nos prédécesseurs du XIXème Siècle, reprendre le combat pour une morale laïque, une morale républicaine et civique fondée sur la rationalité, l’esprit critique et le libre arbitre de chaque citoyen. Ce combat moral là nous trouvera présents.

    Dans le prolongement de notre Université permanente de la laïcité, nous proposons la création d’un observatoire national de la laïcité qui sera chargée de veiller au respect, à l’apprentissage des principes de la laïcité.

    II - Une nouvelle donne fiscale

    Sous l’impulsion des « révolutions libérales », ou plutôt des restaurations conservatrices, menées depuis la fin des années 1970, le poids de la fiscalité est désigné comme la source de toutes les difficultés économiques.

    Ce qui était considéré comme la manifestation d’un populisme douteux prend les allures d’un discours moderne. La droite a perdu tous ses complexes en matière fiscale et poursuit deux objectifs : réduire encore et toujours le montant des prélèvements collectifs pour contraindre le périmètre des services publics et limiter, autant qu’il est présentable de le faire, la progressivité de l’impôt.

    A l’idéologie du « toujours moins d’impôts et de charges » nous devons opposer la conception citoyenne des contributions publiques qui est au cœur de notre identité. Celle-ci peut se décliner selon quatre axes :

       Il ne peut exister de niveau théorique optimal pour les contributions publiques. Nous définissons d’abord le périmètre de l’action publique en termes de besoins, en éducation, en formation, en protection sociale. Ce sont ces besoins qui déterminent alors le montant total des contributions à lever. Poser comme principe la nécessité d’une réduction de la fiscalité revient tôt ou tard à réduire l’action de la puissance publique. Nous devons rappeler à ceux qui pensent bénéficier d’une baisse de la fiscalité qu’ils devront en payer le prix en supportant personnellement un coût supérieur en termes d’assurance.

       Le domaine de la progressivité doit s’étendre au détriment de la proportionnalité. La fiscalité est un instrument de financement. Elle doit aussi devenir plus qu’aujourd’hui un instrument de redistribution, cette dernière ne venant pas seulement corriger les inégalités de revenus, mais également les inégalités territoriales.

       La contribution aux charges collectives ne peut reposer essentiellement sur les revenus du travail. Les profits doivent également participer au financement de la protection sociale. La fiscalité doit traiter plus équitablement l’activité, la rente et la spéculation. Les prélèvements sur les revenus financiers ou fonciers doivent être revus, notamment par la suppression des « niches fiscales » qui dénaturent notre système d’imposition.

       La participation aux charges collectives doit prendre en compte les charges futures. La promotion d’une croissance économique plus respectueuse de l’environnement passe par une taxation écologique, favorable aux innovations technologiques économes en énergie et en ressources non renouvelables, défavorables aux activités polluantes.

    Les Français attendent de nous des réformes cohérentes, justes, claires, favorables au pouvoir d’achat des plus modestes.

    Nous proposons :

       Une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, ce qui aura pour effet de rendre notre système de prélèvements plus progressif, donc plus juste. Cette fusion permettra de revoir les tranches et Les taux qui devra aboutir, au voisinage du SMIC, à un supplément de pouvoir d’achat qui rendra la PPE inutile. Restaurer la valeur travail, c’est cela aussi.

       Le transfert d’une partie des cotisations sociales patronales, qui pésent aujourd’hui sur la seule masse salariale, sur la valeur ajoutée, pour que l’essentiel du financement de la protection sociale ne repose plus sur les secteurs intensifs en main d’œuvre, et pour que les profits contribuent au financement de la protection sociale.

       La taxation lourde des indemnités de départ scandaleuses que s’octroient certains grands patrons et de taxer de manière dissuasive les « stocks options », car ce dispositif incite à privilégier un pilotage à courte vue des entreprises, axé sur les profits à court terme au détriment des investissements à long terme.

       La création d’une véritable taxe écologique plus incitative et plus dissuasive, incluant le volet « énergie » qui lui fait actuellement défaut. L’arme fiscale se prête particulièrement bien à la correction des dommages à l’environnement, en ciblant précisément les pollueurs.

       La taxe d’habitation est injuste. Pour corriger cette injustice, il faudra prendre en compte les revenus.


    III - Une nouvelle donne pour l'État
    et les services publics

    Dans notre combat contre le libéralisme économique, l’Etat et les services publics sont au cœur de la réussite de la politique de changement que nous voulons conduire. Seuls l’Etat et les services publics sont en capacité d’assurer l’accès à des biens et des services individuels ou collectifs indispensables à chaque citoyen, mais également essentiels au développement économique. Mais nous entendons promouvoir le rôle de l’Etat et des services publics de façon dynamique, c’est-à-dire en les modernisant, en les adaptant en permanence aux nouveaux besoins de nos concitoyens et en leur donnant un cadre juridique national et européen clair et protecteur.

    Dans beaucoup de domaines, la difficulté de l’Etat à se réformer et à améliorer le fonctionnement de ses services l’empêche de répondre à tous les défis qu’il doit relever. Les dispositifs publics sont mal évalués quand ils le sont. Les lieux de décision se multiplient. Les compétences s’enchevêtrent. La réforme est nécessaire. Elle n’est possible que si elle se conforme à une méthode fondée sur une dynamique du changement :

       Les réformes doivent être adossées à un processus partagé avec les acteurs sociaux, comme avec les usagers en développant une autonomie d’action suffisante pour les agents.

       Il n’y a pas de réforme positive et acceptée sans les moyens nécessaires à sa réussite.

       Les politiques publiques doivent prévoir leur propre évaluation selon un calendrier préétabli de réformes, permettant de les corriger régulièrement.

    Les services publics garantissent à chacun l’accès à des droits fondamentaux. Ils doivent assurer l’égalité mais aussi la cohésion sociale et territoriale. Ils sont un élément fondamental de la compétitivité économique et de l’attractivité de notre pays.
    À côté des services publics traditionnels (Education, Energie, Transports, Communication, etc..) qu’il nous appartiendra de renforcer, de nouveaux besoins justifient de nouvelles réponses publiques :

       L’accès aux services publics doit être renforcé sur l’ensemble du territoire par la mise en place de contrats territoriaux de services publics définis en accord avec les élus, les agents et les usagers.

       De nouveaux services publics seront organisés : petite enfance, autonomie des personnes âgées, logement, eau, service bancaire de base.

       Nous créerons une agence de financement des grandes infrastructures avec le concours de la Caisse des dépôts et consignations.

       Nous modifierons le mode de désignation des dirigeants des grandes entreprises et renforcerons le pouvoir des conseils d’administration.

       Nous ferons adopter par le Parlement une loi cadre sur les services publics nationaux définissant pour chacun d’entre eux, pour chacune des entreprises publiques, les missions de service public que la communauté nationale leur confie et les moyens pluriannuels qu’elle leur affecte.

    Mais le service public devra impérativement renouer avec ses principes fondateurs : égalité dans l’accès, continuité, transparence à l’égard de ses usagers, exemplarité de gestion, adaptation des missions en fonction des besoins des usagers. Ainsi des contrats entre l'autorité publique et l'entité en charge de la réalisation du service public devront préciser les missions confiées, les critères à privilégier, les moyens dégagés.

    Le retour d’un Etat volontaire, des services publics rénovés réclament nécessairement des ressources publiques dynamiques. Aujourd’hui, la vérité commande de dire qu’il ne peut y avoir de services publics et de redistribution sans un effort contributif et chacun connaît l’état calamiteux des finances publiques que laissera la droite à la France. Aux ressources budgétaires, il faudra sans doute ajouter la mobilisation de l’épargne indispensable pour assurer le financement de certains services publics marchands dont les investissements sont considérables (SNCF, EDF).

    C’est pourquoi nous proposons la création d’une société de participation publique qui deviendra le pôle financier du secteur public.



Un parti socialiste fort pour une gauche unie

 
Au congrès de Dijon, nous nous sommes collectivement fixé un certain nombre d’objectifs pour faire du PS un parti plus démocratique et plus représentatif de la diversité de la société française. C’est ainsi que la parole a été donnée aux militants, conformément à la volonté affichée par tous au Congrès de Dijon pour qu’ils arrêtent la position du Parti sur le Traité constitutionnel européen. Ce référendum interne qui a connu une participation sans précédent, 100 000 militants se sont exprimés, a été de l’aveu de tous un moment réussi de débat démocratique au sein du Parti socialiste.

Fort de ses succès électoraux en 2004, faut-il rappeler que jamais notre parti n’a compté dans son histoire autant de conseillers régionaux, généraux et de députés européens. Le Parti socialiste peut s’enorgueillir d’avoir sur ses listes assuré la représentation de la diversité de toute la société et fait élire des conseillers régionaux et des députés européens issus de l’immigration.

La constitution de nos listes aux européennes et aux régionales a également tenu compte de la diversité de notre parti, permettant ainsi à des camarades issus des motions minoritaires de siéger dans les conseils régionaux et au Parlement européen.

I - Un parti socialiste fort

Nous sommes attachés à notre Parti parce qu’il n’est pas un parti comme les autres. Il a traversé nombre d’épreuves depuis sa fondation. Il connaît une confrontation idéologique permanente. Il est divers selon les régions et les communes. Mais, il est l’outil qui nous permet de penser et d’agir ensemble, et de faire entrer nos idées dans la réalité.

La rénovation de nos structures et de nos pratiques s’impose évidemment. Le bon état de la démocratie ne dépend pas seulement des institutions mais aussi de la vigueur de ses acteurs au premier rang desquels les partis politiques. Deux fautes doivent être évitées. La première est le dénigrement systématique pratiqué par certains, alors qu’ils sont tout aussi partie prenante de la vie du Parti que les autres !

Demander un référendum militant interne devrait permettre de comprendre pourquoi le Parti n’a pas pu mener une ample campagne de recrutement d’adhérents du projet et éviter de le lui reprocher… La seconde faute serait de dérouler une litanie d’objectifs tous plus ambitieux les uns que les autres et qui ne seraient pas réalisés…

Aussi voulons-nous proposer quelques principes clefs pour le développement de notre parti.

A - Un parti démocratique

    Notre Parti est sans aucun doute le plus démocratique des grands partis français. Le débat est libre. Les orientations sont discutées et votées par les militants. Les responsables du parti et les candidats à toutes les élections sont élus.

    Mais, tout cela n’a de sens que si le vote des militants est respecté. C’est le principe de notre vie commune. Cette exigence doit s’imposer à tout militant quels que soient son rang et sa place. Sinon à quoi bon débattre, voter, à quoi bon militer !

    Notre Congrès devra évidemment rappeler les principes de notre vie commune. Il devra également statuer sur les conséquences des manquements à la règle.

    Aussi nous proposons :

       Lorsque le parti engage une campagne électorale, la ligne politique définie majoritairement dans les instances du parti ou après une consultation directe des militants, doit être respectée. Si un responsable, au niveau national comme au niveau local, s’affranchit publiquement des choix arrêtés par le parti, il est automatiquement exclu des instances du parti et ne peut pendant deux ans se présenter à quelque élection que ce soit au nom du parti socialiste.

       Dans le cadre de l’élection présidentielle, chaque candidat à la candidature devra s’engager publiquement à respecter le choix qui sera fait par les militants.

B - Un parti ouvert

    Nous savons que le nombre des militants socialistes est trop faible, même s’il existe des fédérations qui ont de nombreux militants et de nombreux élus. C’est pourquoi, nous devons mettre en œuvre un grand plan de développement du parti et de nos fédérations. Un effort d’accompagnement tout particulier devra être fait pour aider la vingtaine de fédérations qui comptent moins d’un adhérent pour 1000 habitants à se développer. Nous n’avons pas su mettre réellement à profit l’élan amené par les victoires de 2004 pour attirer davantage d’adhérents.

    Pour donner corps à cet objectif, plusieurs conditions doivent être réunies. Les unes sont matérielles : nous devons faciliter les conditions d’adhésion, harmoniser les barèmes des cotisations financières, accepter l’adhésion directe sur internet, mieux associer les sympathisants en les invitant à participer aux débats d’orientation. Les autres relèvent d’une volonté de mener beaucoup plus qu’aujourd’hui des débats de société, ancrés dans les préoccupations des citoyens, sur la famille, sur le progrès scientifique, sur la laïcité, etc…

    Nous devons également mieux utiliser et valoriser notre Conseil économique, social et culturel dont les travaux de qualité sont trop peu connus. Il nous faudra aussi réfléchir à la possibilité pour les fédérations et les sections du parti de développer –selon leurs moyens- des activités d’aide pour la population, en matière juridique, en matière d’animation culturelle, d’action sociale, etc…

    Un parti ouvert, c’est également un parti qui noue un dialogue régulier à tous les niveaux avec les syndicats et les associations pour connaître leurs positions et leurs réflexions. La tenue régulière de forums sociaux, notamment dans les régions, devrait devenir une habitude.

C - Un parti représentatif de la société

    Les progrès pour assurer une parité entre les militantes et les militants dans les responsabilités et les candidatures sont réels même s’ils sont insuffisants. Nous devons aller plus loin et mettre pleinement en application ce principe de la parité lors des prochaines élections.

    Le Parti socialiste ne reflète pas encore suffisamment la diversité de la société française. Il n’y a pas de mesure miracle pour y remédier. Des progrès importants ont été accomplis depuis le Congrès de Dijon, mais des obstacles restent à lever qui demandent une forte volonté politique. La limitation du cumul des mandats permettra d’offrir davantage de possibilités à plus de militantes et de militants de représenter le parti. Il doit en aller de même dans les sections et les fédérations où l’attention doit porter sur un recrutement plus diversifié. C’est dire aussi tout simplement l’importance de l’accueil dans nos structures.

D - Un parti moderne

    Nous pouvons faire des progrès dans plusieurs directions.

    Dans l’organisation d’abord. Notre démarche interne doit faire preuve de plus de vitalité. Le Conseil national devra voter de manière régulière sur le rapport d’orientation politique présenté par le Premier secrétaire. Encore conviendra-t-il à celles et ceux qui en seront membres titulaires de faire preuve de présence et d’assiduité dans la participation aux travaux. C’est pourquoi nous proposons qu’au bout de trois absences consécutives le titulaire soit remplacé. Dans les fédérations et les sections pour préciser notre projet, fixer notre programme, prendre une position sur un thème important d’actualité, les militants seront consultés par le biais de Conventions nationales, de Conférences militantes, de votes directs.

    Dans la formation ensuite. Une action persévérante a été menée depuis quelques années au niveau national, avec l’Université permanente, et dans de nombreuses fédérations avec des centres départementaux. Mais il faut pouvoir toucher tous les militants, tout particulièrement les nouveaux, pour faire connaître l’histoire du parti socialiste, ses positions, les grandes données économiques, sociales, politiques. Nous disposons d’outils avec nos revues, les notes de la Fondation Jean Jaurès. Mais il y a tout un travail de simplification à mener. Internet doit permettre de diffuser des jeux de fiches et de constituer une banque de données.

    Dans la communication enfin. L’hebdo a su évoluer. Il est plus clair, plus lisible, plus maniable. Il faut poursuivre cet effort. Mais les campagnes récentes ont montré toute l’importance des technologies modernes pour la communication interne comme pour la communication extérieure. Un nouveau site internet va être ouvert cet l’automne. Les fédérations se verront également dotées gratuitement de site qui pourront être déclinés au niveau des sections.

II - Une gauche unie

A - Un contrat de gouvernement

    Un Parti socialiste rassemblé autour d’une ligne politique claire, en prise directe avec les préoccupations des Français, capable de mener une politique de réformes audacieuses : c’est la condition pour faire gagner la gauche comme en 1981, 1988 et 1997.

    Notre objectif, une fois notre Congrès tenu, est d’associer toutes les forces de gauche, prêtes à assumer des responsabilités de gouvernement, à la définition et à la mise en œuvre d’un contrat durable de gouvernement. Ceux qui veulent à l’extérieur et à l’intérieur de notre parti, faire perdurer le clivage entre le « oui » et le « non » ont doublement tort. D’abord, parce qu’en 2007, il nous faudra sortir l’Europe de la crise actuelle pour lui donner des bases plus progressistes. Ensuite, parce qu’il n’y a pas de majorité de gauche possible dans le pays sans l’addition des « oui » et des « non » de gauche.

    Il s’agira dans ce contrat de gouvernement de s’attaquer aux inégalités majeures de la société française et de réunir les conditions de la réussite en explicitant non seulement nos objectifs mais aussi les moyens d’y parvenir.

    Nous devons passer d’une « gauche plurielle » qui a fini par insister sur ce qui la divisait et non pas sur ce qui la rassemblait, à une gauche durable où chaque parti respecte et prend en compte l’identité de l’autre mais conclut un contrat qui l’engage.

    Le contrat devra être évalué chaque année. Pour ce faire, un Comité de liaison sera créé. Il formalisera un cadre collectif d’action et de débat régulier.

    Certains font maintenant des positions de l’extrême gauche le critère de ce qui est de gauche ou ne l’est pas. C’est une erreur politique majeure de légitimer des organisations qui contestent au parti socialiste la capacité de conduire le changement, tant que ces organisations n’auront pas clarifié leur rapport à la gauche en s’engageant au désistement républicain au deuxième tour de toutes les élections.

    Notre attitude qui consiste à proposer la discussion d’un contrat de gouvernement s’adresse à tous. À chacun de prendre ses responsabilités et de dire s’il veut ou non le changement en France.

B - Les assises de l’alternative

    Le rassemblement de la gauche que nous voulons concerne évidemment les partis politiques qui s’engagent dans les élections. Mais nous devons aussi dialoguer avec tous les acteurs, les militants, les syndicats et les associations pour aider à créer une dynamique de changement.

    Nous proposerons, dès après notre Congrès, d’organiser des forums sociaux qui pourront se conclure par des Assises de l’alternative durant le troisième trimestre 2006. Chacun, en gardant sa spécificité, sera ainsi conduit à dégager un diagnostic des priorités et des engagements à prendre. La gauche une fois revenue aux responsabilités devra faire vivre de manière régulière ce dialogue, en institutionnalisant ce processus.

C - Un calendrier

    Nous proposons aux socialistes d’adopter un calendrier politique qui fixe clairement les étapes à franchir ensemble :

       Une Convention nationale pour préciser et adopter notre projet en mars 2006 ;

        La désignation de nos candidats pour les élections législatives au printemps 2006 ;

       La conclusion d’un contrat de gouvernement avec nos partenaires à la fin de l’été 2006 ;

       Le choix de notre candidat ou de notre candidate pour l’élection présidentielle en novembre 2006.

    Pour nous, le Parti socialiste est la clef de voûte du rassemblement de la gauche. Le besoin de changement est fort dans la société française. Il va continuer à s’exprimer avec force jusqu’en 2007. Nous en serons partie prenante, nous devons lui offrir un débouché politique à gauche. C’est notre devoir, c’est le sens de notre Congrès : définir collectivement une orientation pour réussir l’alternative en 2007.



 
Notre rendez-vous du Mans revêt une grande importance. Tous les socialistes en sont conscients. S’y décideront, selon le vote des militants, l’avenir de notre parti, le projet de la gauche et les conditions de la victoire.

Aujourd’hui le monde est en déséquilibre, l’Europe est en panne et la France est en crise. A notre place, socialistes français, nous pouvons jouer notre rôle. Nous sommes conscients de nos responsabilités. La mondialisation peut être maîtrisée, l’Europe peut être relancée, la France peut retrouver confiance en elle même.

Beaucoup dépend de nous.

Nos électeurs nous veulent unis et rassemblés, capables de porter une alternative au libéralisme et à la droite, et crédibles dans notre parole. C’est ainsi que nous voulons faire de notre Congrès le point de départ de la reconquête, non pas pour nous-mêmes, non pas seulement pour la gauche, mais pour les valeurs que nous portons depuis l’origine du socialisme.





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