La " révolution informationnelle " est une transformation du système productif d'une ampleur comparable à celle de la révolution industrielle. Elle se caractérise par la place centrale prise par l'information, à la fois comme facteur de production et comme produit à part entière.
Cette révolution des technologies de l'information caractérisée essentiellement par la mise en réseau et l'interactivité, que sous-tend un puissant processus d'informatisation, entraîne une transformation en profondeur de notre société, modifiant de manière croissante les modes de formation, de production et d'échanges.
Ces mutations ne sont pas seulement le fruit de développement spectaculaire de l'Internet, mais aussi le résultat d'un processus d'innovation accéléré des techniques de communication, de l'abaissement des coûts, de l'extension de leur consommation (du téléphone cellulaire à la TV numérique), et surtout de l'achèvement de l'intégration de l'informatique dans les entreprises (de l'automate dans l'industrie aux micro-ordinateurs dans les services).
Parce qu'elles sont cr&trices d'emplois et qu'elles transforment le travail et l'entreprise, les NTIC impliquent une réflexion approndie du Parti socialiste et un renouveau du dialogue des partenaires sociaux face à l'ensemble de leurs conséquences.
1. Les NTIC sont créatrices d'emplois |
Les NTIC offrent des perspectives particulièrement prometteuses pour une politique économique fondée sur la croissance et la création d'emplois.
Les nouvelles technologies ne sont pas seulement des facteurs de compétitivité grâce à une recherche de productivité passant par le seul développement de l'investissement matériel et la baisse des coûts de l'informatique et des télécommunications. Les gains de productivité qu'elles permettent grâce au processus d'innovation devenu fondamental participent directement au développement de l'ensemble de l'économie et à la création d'emplois. Elles sont à la source de nouveaux métiers, de nouveaux acteurs et de logiques de développement et de diversification des entreprises. Surtout, les secteurs économiques des technologies de l'information et de la communication (audiovisuel, informatique, télécoms, édition et production de programmes et de contenus multimédias), de l'industrie comme des services, sont fortement créateurs d'emplois.
La croissance de l'emploi dans ces secteurs, qui pour l'informatique et les télécommunications comptent déjà près de 340 000 emplois, a été de 4 % par an depuis 1994. Avec la reprise de l'investissement, cette croissance de l'emploi a atteint plus de 10 % en 1997 pour le seul secteur des matériels informatiques. En outre, le développement de l'Internet favorise la croissance de nouvelles activités de services et de contenus créatrices d'emplois dans l'ensemble de l'économie, notamment pour le commerce électronique.
Les NTIC concernent ainsi des secteurs économiques fortement créateurs d'emplois capables d'enrichir le plan emploi en faveur des jeunes.
Les NTIC constituent une chance et un défi pour l'emploi peu qualifié. Les NTIC ne permettent pas seulement la création d'emplois hautement qualifiés (ingénieurs, cadres), mais amplifient la création d'emplois pour les personnes à faible qualification, notamment parmi les jeunes. Les succès massifs rencontrés par le téléphone cellulaire, les services numériques, Internet, etc. à de nombreux jeunes la possibilité de trouver leur premier emploi (marketing et services commerciaux, etchniciens, etc.) et de créer la voie vers de nouveaux métiers (création de contenus et de services).
Sans impliquer exclusivement des niveaux élevés de qualification, les NTIC sont en mesure de favoriser une politique d'intégration dans la vie économique et sociale. Mais avec l'extension de leur développement, leur maîtrise devient une condition minimale et universelle d'intégration dans les entreprises et le monde du travail. L'effort de compréhension et de familiarisation aux NTIC ne doit pas être lié à la seule capacité de les consommer ou à la nécessité de s'y plier, mais à la faculté ouverte à tous à posséder les clés de l'économie de demain qui se dessine maintenant par la formation à l'utilisation des NTIC, priorité du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information.
En transformant le contenu du travail, les NTIC engendrent un besoin important de formation dont la satisfaction à tout âge de la vie doit permettre d'éviter de nouvelles formes d'exclusion.
2. Les NTIC transforment le travail et l'entreprise |
A l'uvre depuis plus de vingt ans, l'informatisation des entreprises s'achève de manière accélérée, assurant les conditions d'une émergence rapide des NTIC. En 1997, plus des deux tiers des entreprises industrielles et 63 % des entreprises de plus de 20 salariés utilisent des micro-ordinateurs en réseau (elles que 32 % en 1994). D'une manière ou d'une autre (Minitel, Internet, etc.) 80 % des entreprises communiquent électroniquement avec leurs fournisseurs ou clients. 30 % d'entre elles disposent déjà d'une connexion à Internet. Le déploiement rapide de ces outils n'implique pas nécessairement pour tous une pleine appropriation du potentiel des nouveaux outils d'information et de communication dans l'entreprise.
Une majorité des salariés est directement concernée par cette mutation et le sera davantage dans l'avenir. A tous les niveaux, les salariés ont déjà pris l'habitude de travailler sur un ordinateur ou de participer à des processus de production informatisée, robotisée ou automatisée. Dans près d'une entreprise industrielle sur deux (48 %) plus de 80 % des cadres et ingénieurs sont équipés d'un poste informatique et 45 % de ces entreprises annoncent le même taux d'équipement pour les employés : 60 % des entreprises ont plus de 60 % de leurs employés qui utilisent un poste informatique, près de 30 % des techniciens utilisent aussi un poste informatique.
Dans des situations de plus en plus nombreuses, le travail d'équipe s'effectue en réseaux, l'informatique est décentralisée, les hiérarchies bousculées ou l'organisation du travail repensée. Le développement des NTIC dans l'entreprise modifie en profondeur le travail : accélération des échanges, réduction de la chaîne de production ou de services, rapprochement de la relation fournisseur-producteur-consommateur, accélération et/ou parcellisation de tâches multiples, flexibilité du temps de travail selon la production et les services, préférence pour la sous-traitance, télétravail, nécessité de nouvelles formes de communication interne comme externe, etc. Il est peu de champ de l'activité des entreprises, du travail qui échappe ou échappera aux conséquences de la révolution de l'information. L'anticipation des transformations doit limiter les risques d'éclatement de la société salariale.
La réorganisation des entreprises peut se traduire par une individualisation croissante du travail, une moindre solidarité collective et le développement de formes " flexibles " du travail, le plus souvent imposées, auxquelles peuvent contribuer les NTIC. La mise en cause des organisations pyramidales réalisée par les NTIC et la flexibilité qu'elles offrent ne doivent pas impliquer nécessairement la fin de la communauté de travail qu'est l'entreprise, dont les fonctions de socialisation et de reconnaissance sociale doivent être réaffirmées. Les NTIC impliquent plutôt de nouvelles distributions des pouvoirs, un essor de l'autonomie des salariés, du partage des savoirs, de la réduction du temps de travail et de formes de corresponsabilité.
L'essor des NTIC dans l'entreprise peut être contrebalancé par le souci de prévenir l'émergence d'une " société de contrôle ", capable de mettre en cause les libertés individuelles, de faire éclater les formes de représentation dans l'entreprise, et plus généralement, de mettre en péril les principes du droit du travail. De nouveaux espaces de liberté face aux exigences de la communication en temps réel doivent ainsi être développés (droit à l'indisponibilité, déontologie des réseaux de communication, protection de la vie privée et des données personnelles, etc. ). L'ensemble des institutions représentatives du personnel (syndicats, comités d'entreprise, délégués du personnel) doivent se mobiliser pour accompagner l'intégration des NTIC dans l'entreprise et se prémunir de nouvelles formes d'abus qu'elles peuvent faciliter.
Les NTIC font émerger de nouveaux modèles d'entreprise dont nous devons mesurer l'importance. Avec le développement des réseaux, l'individualisation des compétences et leur valorisation contribuent à l'apparition de sociétés centrées autour de quelques individus entre travail salarié et travail libéral, à l'émergence de microsociétés travaillant en réseau, à l'éclosion de jeunes entreprises innovantes (start-up). Bousculées par les NTIC, les frontières traditionnelles de l'entreprise engagent à interroger la nature des formes de responsabilité, les circuits d'information, les modalités de participation et les conditions d'exercice des pouvoirs dans les entreprises. Avec le développement du gouvernement des entreprises, les NTIC doivent permettre d'accéder à une meilleure information et au développement de formes de participation.
Amendement déposé par Patrick Bloche, délégué national aux nouvelles technologies, député de Paris.
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