Une ambition socialiste pour l'Europe

Texte adopté par le Conseil national du Parti socialiste du 17 avril 2004 pour les élections européennes


  1. Pour un traité social
      Des critères de convergence sociale
      De nouveaux droits sociaux
      Défendre les services publics
      Une politique industrielle européenne
      Reconnaître l'économie sociale
      Promouvoir la diversité culturelle

2. Des politiques européennes pour une croissance durable
      Le choix de la croissance
      Un gouvernement économique et social pour l'Europe
      Une politique agricole durable et juste pour l'Union
      Faire de l'Europe un éco-continent
      Reconnaître l'économie sociale

3. L'Europe qui protège :
Faire de l'Union européenne une zone de liberté, de sécurité et de justice

      De nouveaux défis
      Un espace de liberté, de sécurité et de justice
      Plus de sécurité pour plus de liberté, voici notre démarche
      Une nouvelle régulation efficace des flux migratoires
      Une politique d'intégration et de citoyenneté

4. Une Europe forte pour maîtriser les enjeux de la mondialisation
      Pour lutter efficacement contre la mondialisation sauvage
      Faire de l’Europe un acteur global
      Pour l'affirmation d'une politique étrangère et de défense à la hauteur des enjeux

5. Des institutions fédérales efficaces au service d'un projet ambitieux
      Une bonne Constitution européenne
      Le rôle décisif du Parlement européen dans le processus constitutionnel
      Un vrai Parti socialiste européen



 
L’année 2004 est celle des grands rendez-vous pour l'Europe : élargissement, nouvelle Commission, nouveau Président, décision d’adopter ou non la première Constitution européenne, négociation des financements de l’Union jusqu’en 2013 et enfin élection le 13 juin du nouveau Parlement européen représentant les citoyens de 25 pays.

Dans un monde déchiré par le terrorisme et la guerre, malade de ses inégalités et ses écarts de richesse, menacé de nouvelles catastrophes écologiques, l’Europe est plus nécessaire que jamais. Elle l’est non seulement pour renforcer la solidarité entre nos peuples et préserver notre modèle démocratique et social, mais aussi pour ouvrir une alternative à la domination d’un seul modèle et d’une seule puissance sur le monde. Plus que jamais, l’Europe est notre choix stratégique pour promouvoir un autre ordre mondial que celui de l’unilatéralisme et de l’ultralibéralisme qui loin d’apporter des réponses aux troubles du monde actuel en ont accrus au contraire l’insécurité et les risques.

L’Europe doit faire face à de nouveaux défis. Les attentats de Madrid l’ont atteinte tout entière. « Nous étions tous dans ce train » comme l’ont clamé les Espagnols. Comme eux nous devons choisir la réponse la plus forte, celle de la démocratie et d’une solidarité nouvelle et renforcée autour de nos valeurs.

Le combat pour une Europe unie, forte, sociale et solidaire n’est pas pour les socialistes un projet de circonstance, pour lequel notre engagement varierait en fonction des rapports de forces politiques, des conjonctures heureuses et des moments difficiles. Il fait partie de notre identité de socialiste. C’est un choix fondamental fondé sur une évidence : plus que jamais, à l’heure de la mondialisation, l’Europe, qui apporte la paix aux citoyens européens, offre le cadre dans lequel l’action politique volontaire en faveur de l’égalité, de la justice, de la solidarité, de la croissance et de la sécurité peut s’exercer.

L’Europe c’est la paix, c’est l’illustration d’une volonté commune qui porte historiquement ses fruits, ce sont des valeurs qui définissent un modèle philosophique que nous voulons affirmer et préserver, d’autant plus à l’heure où les communautarismes, les nationalismes et la xénophobie fragilisent nos démocraties. Il y a une Europe qui protège la paix. Il doit y avoir une Europe qui protège sur le plan social face au chômage, aux précarités, aux délocalisations.

Cet engagement ne nous aveugle pas sur les difficultés que traverse aujourd’hui la construction européenne. Le sommet de Bruxelles de décembre 2003 est la manifestation d’une véritable crise de l’esprit et de l’engagement européen au sein des gouvernements ainsi que de la capacité à trouver des compromis dans l’intérêt commun. Les fractures apparues lors de la crise irakienne ont mis en évidence des divergences qu’on ne peut sous-estimer et qui demanderont des efforts et du temps pour être réduites. Les insuffisances du Pacte de stabilité et l’incapacité à gérer le taux de change de l’euro sont devenues évidentes. En outre, un certain désarroi, parfois une méfiance réelle sont perceptibles chez les Français, qu’ils se représentent les institutions européennes comme un univers opaque, qu’ils redoutent l’ouverture à la concurrence dans certains secteurs ou encore les conséquences de l’élargissement.

L’Europe va aujourd’hui moins vite que les transformations de l’économie mondiale et moins vite que l’histoire, depuis la fin de la guerre froide et la naissance d’un nouvel ordre géopolitique international. Il lui faut prendre en main sa propre sécurité, défendre ses valeurs et sa vision de la société internationale. Il ne suffit plus de vouloir faire l’Europe, il faut aujourd’hui affirmer un projet, lui donner un contenu, définir une stratégie.

L’attitude du Président de la République et du gouvernement français actuel est, dans ce contexte, contre productive dans la méthode et erronée sur le fond : arrogance déplacée à l’égard des nouveaux États membres, rupture brutale et désinvolte du pacte de stabilité sans proposer une stratégie sérieuse de relance de la croissance et de l’emploi, dans le seul but de tenter de remédier aux conséquences d’une politique économique désastreuse et d’une baisse de la fiscalité socialement injuste.
Elle est aussi dangereuse : les attaques démagogiques contre les institutions européennes nourrissent le nationalisme et toutes les formes de populisme.

Les Français ont des craintes, mais surtout des attentes fortes vis-à-vis de l’Europe.

Cela oblige à l’ambition et à l’exigence
. Celle de bâtir une Union politique prête à assumer ses responsabilités dans le monde, de renforcer des institutions européennes démocratiques, transparentes et contrôlées par les citoyens, et enfin de créer une Europe sociale, espace de progrès pour tous et d’harmonisation des droits vers le haut.

L’année 2004 est lourde de défis et de choix.

En mai 2004, intervient l’élargissement, qui doit contribuer au renforcement de l’Europe. Dix nouveaux États seront alors membres de l’Union. Nous voulons réussir cet élargissement, nouvelle Frontière de l’Union européenne. L’enjeu majeur de cette réunification de l’Europe est celui de la paix, de la stabilité de notre continent et de la convergence économique et sociale. Nous avons déjà pu mesurer que la perspective d’entrée dans l’Union européenne avait permis, dans les pays auxquels cet espoir était offert, de gérer sans violence la question explosive des minorités nationales (minorités hongroises ou minorités russes dans les pays Baltes, par exemple) et une transition difficile à l’économie de marché.

Il nous faut maintenant favoriser l’intégration des nouveaux États en saisissant les opportunités que représente ce poids nouveau de l’Europe. Pour cela, il est nécessaire de développer une souveraineté européenne qui donne aux peuples européens fierté et identité. À cet effet, nous devons lutter politiquement contre la tendance au repli identitaire, porter un projet politique pour l’ensemble de l’Union, concrétiser pour tous de nouveaux progrès sociaux et faire du Parti des socialistes européens un des creusets permettant de réaliser par le débat une intégration réussie.

L’Union européenne doit aussi permettre à l’économie de ces pays de franchir cette difficile transition par un effort de solidarité. Celui-ci est aussi un investissement pour l’avenir : assurer les bases de la prospérité économique et de la solidarité sociale dans ces pays, c’est construire demain celle de nos pays, c’est construire les bases d’une croissance durable pour tous. C’est aussi combattre le dumping social et les délocalisations sauvages.

Nous ne nions pas les difficultés. Mais le succès de l’élargissement est d’abord une question de volonté politique : il suppose d'avancer dans l'approfondissement de l'Union et de la doter d’un cadre de prise de décision démocratique plus transparent et plus efficace. Nous avons besoin d’une Constitution : il faut donc trouver les voies permettant de dépasser le blocage actuel.

Les élections européennes de juin 2004 permettront aux citoyens de l’Europe élargie de faire des choix qui doivent être proposés avec clarté. Nous, socialistes, ne voulons pas la même Europe que les droites du continent qui oscillent, en fonction des circonstances, entre la mise en place d’un grand marché dérégulé, le repli sporadique sur la défense des égoïsmes nationaux et l’instrumentalisation de l’Europe comme bouc-émissaire.

Notre projet est celui d’une Europe qui nous permette d’affronter la mondialisation par de nouvelles régulations, d’assurer la réussite de l’élargissement, de promouvoir la croissance, l’emploi et la solidarité, de porter un modèle social garant de protections pour les salariés et les citoyens, de disposer d’institutions transparentes et efficaces permettant d’agir à 25 ou avec tous les pays qui souhaitent aller de l’avant.

Ce projet, c’est aussi celui de l’Europe démocratique. Nous sommes convaincus qu’il n’y aura pas d’Europe sociale sans Europe politique. Pour nous, les citoyens européens doivent enfin devenir les auteurs de leur avenir. Aujourd’hui les institutions européennes demeurent encore trop l’émanation lointaine des souverainetés nationales. Sans la constitution de majorité politique à l’échelle continentale, nous ne pourrons développer notre ambition pour l’Europe. Nous voulons construire un véritable espace public européen.


Pour un traité social

 
Nous voulons une Europe sociale. L’Union économique et monétaire ne prendra tout son sens et ne produira son potentiel de croissance que dotée de son indispensable complément : une Europe de la connaissance et des savoirs, de la cohésion sociale et territoriale, de la convergence des niveaux de développements et des droits sociaux. L’Europe doit chercher son dynamisme dans l’économie de la connaissance, l’effort de recherche, l’accès du plus grand nombre aux sciences et aux techniques, non dans le dumping et le moins disant social entre ses États membres. Pour les citoyens des nouveaux comme des anciens États membres, pour tous ceux qui y vivent, l’Europe doit être synonyme de progrès, de protection sociale de haut niveau, de plus grandes possibilités d’emploi et de formation : en un mot, de nouvelles avancées, de nouvelles chances, de nouveaux droits. Elle doit non seulement être l’économie la plus compétitive du XXIe siècle, comme l’objectif en a été fixé à Lisbonne en 2001, mais une économie redistributive, riche en emplois de qualité. Nous ne pouvons laisser se figer ou s’accroître des écarts inacceptables au sein de l’Europe élargie.
Des critères de convergence sociale
    L’Union doit accélérer la convergence sociale en son sein en se fixant des objectifs, un calendrier, des étapes. Pour nous, le Traité constitutionnel doit fixer ces objectifs et les mécanismes de cette convergence et être aussi un traité social. Nous avons créé une monnaie commune, vaincu l’inflation. L’Europe doit maintenant montrer sa détermination à vaincre le chômage, l’exclusion, la non-formation et la pauvreté. L’Europe devrait se fixer, comme le Traité de Maastricht l’a fait en matière monétaire, des critères de convergence sociale pour la fin de la décennie :

    Le premier critère de convergence sociale, c’est l’instauration d’un salaire minimum européen.

    Le second critère est une réduction progressive dans tous les pays de la durée effective du travail vers les 35 heures.

    Cette logique de convergence, vers le haut, doit aussi être engagée pour d’autres objectifs sociaux :
       un taux de chômage des jeunes réduit de moitié
       un taux de chômage des femmes non supérieur à celui des hommes
       un taux de pauvreté réduit de moitié, inférieur à 5 %
       un taux de mal-logés réduit de moitié, inférieur à 3 %
       un taux d’illettrisme à l’âge de dix ans inférieur à 3 %
       pour la solidarité avec les peuples du Sud : un taux d’aide publique au développement supérieur à 1 %

    Cette convergence sociale au sein de l’Europe élargie est essentielle pour combattre les délocalisations et pour éviter d’entraîner les peuples européens dans une concurrence destructrice, pour construire un espace de progrès partagé. La participation et la consultation des partenaires sociaux doivent être améliorées à tous les niveaux d’élaboration des politiques européennes. Nous n’accepterons aucune remise en cause des garanties de sécurité sociale et de retraite existant au plan national au nom de dispositions européennes. Celles-ci ne peuvent viser qu’à renforcer et compléter les systèmes de protection sociale, en particulier pour favoriser les travailleurs transfrontaliers.
De nouveaux droits sociaux
    L’Europe doit renforcer les moyens d’intervention et de contrôle des salariés sur la transparence de la gestion comme en cas de restructurations industrielles (information, consultation, droit d’alerte, droit à la reconversion…). Nous défendons la révision de la directive sur les Comités d’entreprise européens et une réforme de la procédure d’examen et d’autorisation des fusions d’entreprises, en veillant aux conséquences des concentrations sur l’emploi et pour les salariés confrontés aux éventuels reclassements.

    L’amélioration des conditions de travail, de santé et de sécurité sur le lieu de travail doivent être des priorités européennes. La mise en œuvre effective de la directive sur l’information et la consultation des travailleurs et de la directive sur le temps de travail sera également pour nous une priorité de la prochaine législature. Aujourd’hui la durée maximale hebdomadaire du travail est fixée à 48 heures dans toute l’Union. Nous n’accepterons pas qu’elle soit remise en cause par des mesures d’exception qui poussent les travailleurs à renoncer à leurs droits dans certains pays. Par ailleurs, nous proposerons une directive sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises en Europe et dans les pays tiers où elles interviennent.

    Le droit à la formation tout au long de la vie et à la sécurité sociale professionnelle devra être soutenu au niveau européen. Il doit être une nouvelle priorité des programmes communautaires, et nous proposons la création de bourses « Erasmus adulte » permettant d’aller suivre une formation dans un autre pays de l’Union au cours de sa vie professionnelle ou d’une période de recherche d’emploi.

    Un droit à l’autonomie pour tous les jeunes d’Europe

    Nous proposons un droit à l’autonomie reconnu pour tous les jeunes en Europe, et la création de nouveaux programmes communautaires en matière de formation, d’éducation, de logement et d’aides à la mobilité des jeunes.
Défendre les services publics
    Parce que le marché seul ne garantit pas l’intérêt général, les services publics doivent rester au cœur du modèle social européen. Nous refusons une approche dogmatique du marché intérieur, qui contribue à la marchandisation de toutes les activités humaines et porte atteinte à l’emploi.

    L’intérêt général, le long terme, le développement durable, la cohésion des territoires ne seront pas assurés par le seul jeu de la concurrence. L’Union devra s’attacher, avec les États membres, chacun pour ce qui relève de ses compétences, à promouvoir les services publics (services d’intérêt général). Ceux-ci doivent être garants du droit pour chaque habitant d'accéder à certains biens collectifs européens et services fondamentaux (droit à l'éducation, à la santé, au logement, aux transports, aux communications, à l'eau, à l'énergie, etc.).

    Pour nous, les services d’intérêt général doivent être défendus dans le traité constitutionnel ainsi qu’à travers une législation-cadre qui devront notamment garantir ::
       le respect du principe d’égalité d’accès aux services d’intérêt général, quelle que soit la situation territoriale des usagers et le maintien des péréquations sociales et territoriales ;
       la possibilité pour chaque autorité publique (locale, nationale, et européenne) de définir les activités qui relèvent du service public et non du droit de la concurrence, ainsi que le libre choix par chaque collectivité du mode de gestion des services publics de son ressort, ainsi que des décisions qui concernent la propriété des entreprises
       le financement des investissements de long terme dont dépendent la sécurité des usagers, la sécurité d'approvisionnement, la protection de l'environnement
       le développement de services d'intérêt général portés par des acteurs privés sans but lucratif
       l'adoption d'un statut de l'association européenne constitue à cet égard une étape fondamentale
       la participation des usagers à la définition des services publics, à leur évaluation et à leurs évolutions.
Une politique industrielle européenne
    La mise en œuvre de la politique de la concurrence ne doit pas entraver le développement de stratégies industrielles aussi bien dans des domaines de service public (énergie, transport ferroviaire) où l’Union doit favoriser la création de réseaux européens, que dans des domaines stratégiques pour les emplois de demain (technologies de l’information, nanotechnologies, sciences du vivant, etc.), comme elle l’a fait avec Airbus ou Arianespace. Le temps est venu de définir une véritable politique industrielle en Europe tournée vers l’avenir. À cet égard, la constitution de groupes industriels européens dans certains secteurs devient indispensable.

    Le développement de l’industrie et de l’emploi en Europe ne peuvent pas être abandonnés au seul marché et au libre-échange. Des secteurs entiers de notre industrie et de nos services sont menacés de délocalisations au sein de l’Union, à sa périphérie et vers d’autres continents.

    À court terme, ce sont des pertes d’emploi massives. À long terme, des disparitions de savoir-faire. Une action globale doit être engagée au niveau européen pour endiguer les délocalisations industrielles et de service qui touchent tous les pays de l’Union. Elle doit s’appuyer sur la mobilisation d’outils financiers, fiscaux et réglementaires permettant en particulier de dynamiser les politiques de recherche et de développement en faveur de notre tissu industriel.

    Certains secteurs seront particulièrement exposés au cours des prochaines années, en particulier le textile en raison de l’expiration des contingents d’exportation au sein de l’OMC. L’ouverture commerciale internationale ne peut être négociée par la Commission européenne sans prévoir les protections indispensables pour l’emploi dans ces secteurs, à l’heure où la Chine, nouvel atelier du monde, entre dans l’OMC sans respecter les conventions sociales internationales de l’OIT. L’Union devra mettre en œuvre une Convention de protection sociale des travailleurs concernés, comme cela a été fait au plan national pour la sidérurgie. Elle devra développer un plan d’innovation, de modernisation et de formation dans les filières concernées, ainsi que des initiatives de soutien à l’attractivité des territoires en termes d’infrastructures, de transports, de services publics, de savoir-faire, etc.

    Les combats des socialistes pour une organisation du commerce mondial intégrant des garanties sociales et environnementales doivent inspirer la politique commerciale extérieure de l’Union.
Reconnaître l’économie sociale
    Le secteur de l’économie sociale doit être pleinement reconnu, avec ses spécificités. Après l’adoption du statut européen des coopératives, il sera nécessaire d’adopter un statut européen pour les associations et les mutuelles qui sera la marque de la reconnaissance d’un autre mode d’entreprendre. Ce statut permettra de donner une base juridique protectrice à l’économie sociale dans la législation européenne.
Promouvoir la diversité culturelle
    Au-delà de sa dimension économique, l’Europe doit s'affirmer comme espace de culture, riche de la diversité de ses peuples, de ses langues et de ses créateurs, ouverte aux échanges, soutenant la liberté de création et la liberté de choix des publics ainsi que les moyens permettant un accès réel de tous à la culture et aux médias. Le développement d’une nouvelle politique culturelle doit être au cœur de l’identité européenne à construire et devenir un élément fort d’appartenance à un espace démocratique commun.

    Les socialistes affirment que la culture et le secteur public de l’audiovisuel n’entrent pas directement dans les mécanismes du marché. Accompagnant les politiques culturelles régionales et nationales, la politique menée par l‘Union européenne doit veiller à cet équilibre.

    Nous proposons de la renforcer dans plusieurs dimensions :
       Une dimension politique renforçant la capacité d’impulser des actions. De ce point de vue la majorité qualifiée, à l’intérieur de l’Union doit être la règle, et l’unanimité pour tout ce qui concerne les questions culturelles extérieures. Nous défendons les acquis de la directive Télévision Sans Frontières.

       Une dimension budgétaire, pour en finir avec des programmes communautaires culturels aux budgets ridicules, et donner de véritables moyens à l’Europe, c’est-à-dire tendre vers le 1 % du budget global pour la culture et les médias. Nous défendons une augmentation des fonds structurels destinés aux coopérations interrégionales en matière culturelle.

       Une dimension artistique, en favorisant la création à tous les niveaux, dans tous les secteurs et la circulation des œuvres dans l’Union.

       Une dimension de mise en réseau des lieux culturels européens, de développement des jumelages, et des co-productions européennes.

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Des politiques européennes
pour une croissance durable

 
L’Europe souffre plus que tout d’un manque de croissance qui l’empêche d’assurer le plein emploi, d’accroître ses solidarités et de répondre aux besoins de sa population. Pour nous, l’objectif premier de la politique économique européenne doit bien être l’emploi et le développement de bons emplois. Nous voulons réaffirmer l’ambition qui a permis la naissance du « modèle européen » : la cohésion sociale, un haut niveau de redistribution, l’investissement dans les services publics, l’éducation, la recherche et la prise en compte des préoccupations environnementales sont non seulement compatibles avec le dynamisme économique, mais le renforcent.

Pour mettre en œuvre des politiques communes qui favorisent la croissance durable, l’emploi et la qualité de la vie, l’Europe a besoin d’un gouvernement européen.
Le choix de la croissance
    Le choix de la croissance doit orienter tous les instruments économiques de l’Union européenne. Nous voulons substituer au pacte de stabilité un Pacte de croissance, qui permette d’accroître les marges d’action conjoncturelle en phase de crise économique, tout en installant une réelle coordination des politiques budgétaires. Le développement des dépenses d’avenir nécessaires à la réalisation des objectifs définis à Lisbonne pour une économie privilégiant la connaissance, l’emploi et la cohésion sociale (recherche, éducation, formation, transports durables) doit être une priorité. Ces dépenses doivent être exclues du calcul des déficits publics autorisés par les traités. Pour lutter contre le dumping fiscal, il faut harmoniser les politiques fiscales : il est donc nécessaire d’instaurer une prise de décision à la majorité qualifiée dans ce domaine.

    La croissance doit être au service de la cohésion sociale et territoriale. La priorité à une croissance durable et à l’emploi doit être affirmée dans les choix des finances publiques européennes et dans la conduite de la politique monétaire par la Banque centrale. Celle-ci doit poursuivre un double objectif : lutter contre l’inflation et soutenir la croissance et l’emploi. Ces deux objectifs doivent être inclus dans ses statuts révisés.

Un gouvernement économique et social pour l’Europe
    Pour mettre en œuvre efficacement ces politiques, des évolutions institutionnelles sont nécessaires, au-delà même de ce que prévoit aujourd’hui le projet de Constitution : l’Europe doit être dotée d’une autorité commune unique décidant de la politique budgétaire et fiscale commune ; un ministre européen de l’économie et des finances doit être désigné ; un véritable dialogue politique doit être instauré avec la BCE pour conduire une politique économique adaptée à la conjoncture et à la situation de l’emploi. La situation difficile dans laquelle se trouvent aujourd’hui les entreprises européennes du fait de la surévaluation de l’euro par rapport au dollar et aux monnaies asiatiques, sans que la BCE n’y trouve rien à dire, renforce cette nécessité. Nous souhaitons qu’une loi-cadre établisse les modalités du dialogue entre la Banque Centrale, le Parlement européen, le conseil de la zone euro et le ministre européen de l’économie et des finances. Le taux cible d’inflation visé et les objectifs de croissance devront être débattu par le conseil de la zone euro et le Parlement européen chaque année.

    Il est également nécessaire que le niveau du budget européen s’adapte à l’ambition politique qui est la nôtre pour l'Europe élargie. Le budget européen ne peut pas être établi après 2006 à partir de contraintes budgétaires préalables, ni constituer une nouvelle addition de dépenses sans logique politique cohérente. Le niveau du budget doit permettre le développement de politiques communes utiles et efficaces au niveau européen.

    C’est une ambition collective qu’il s’agit de financer : nous sommes favorables à un impôt européen, assis sur l’impôt sur les sociétés et à une capacité autonome d’emprunt de l’Union. Nous pensons qu’il est illusoire et contre productif de ramener la barre du budget européen à 1 % du PIB de l’Union, comme l’a notamment souhaité le président de la République ; nous souhaitons porter ce ratio à au moins 1,5 % pour accroître le potentiel d’action de l’Union. Dans ce cadre, l’Europe doit continuer à assurer la solidarité entre régions riches et pauvres. Nous ne pouvons accepter la logique des égoïsmes nationaux caractérisés par les revendications sur les soldes nets.

    L’Union doit pouvoir financer les grands réseaux transeuropéens de transport, de télécommunication, d’énergie qui contribuent à sa compétitivité globale, sa cohésion territoriale, son développement durable. Le ferroutage, le système de positionnement par satellite Galiléo, le développement des énergies renouvelables sont des priorités. Les investissements dans ces domaines seront moteurs de croissance et d’emploi.

    En matière territoriale, les politiques régionales doivent à la fois faire face aux besoins des nouveaux États membres, permettre le développement des zones à fort retard ou touchées par les restructurations industrielles dans l’ensemble des pays membres, et particulièrement viser à assurer la présence de services publics dans toute l’Union Européenne.
Une politique agricole durable et juste pour l’Union
    Le modèle européen, qui entend promouvoir une agriculture diversifiée, avec des produits de qualité, est mis à mal par la concentration des exploitations, générée par une politique de plus en plus libérale des prix et des marchés et par une affectation inéquitable des soutiens publics. Des corrections pour contrer cette tendance sont à imposer.

    D’abord, le maintien d’une politique agricole véritablement commune, une PAC redistributive en direction des petites et moyennes exploitations, la modulation des aides en faveur du développement rural, des soutiens relégitimés et conditionnés au respect des règles environnementales et sociales. Dans une Europe à 25, seules des règles sociales et environnementales communes éviteront des distorsions de concurrence pouvant provoquer des délocalisations de production, dans le secteur agricole comme dans les autres secteurs économiques. Par ailleurs, les inégalités entre territoires renforcent la nécessité d’une politique européenne de développement rural plus ambitieuse.

    La réforme de la PAC a intégré l'objectif d'une agriculture multifonctionnelle (sécurité alimentaire, développement durable, conservation des paysages, équilibre des territoires, ...). Cependant, elle n’a pas retenu les bons dispositifs pour traduire cet objectif dans la réalité. Elle doit donc encore évoluer en ce qui concerne, en particulier le système de « découplage » des aides de la production fondé sur des « références historiques » par exploitation qui entretient des inégalités et des injustices dans l'attribution des aides.

    La PAC de l'avenir devra permettre la rémunération du produit agricole par un marché régulé et une meilleure répartition de la valeur ajoutée dans les filières de production. Elle règlera la rétribution des services « non marchands », rendus par l'agriculture à la société (conservation des paysages, développement durable, équilibre du monde rural...) par les soutiens publics. Cette perspective implique la sauvegarde d'un engagement budgétaire important.

    Ces deux orientations fondamentales de la PAC future favoriseront un compromis au sein de l'OMC, nos aides publiques s'inscrivant alors en toute légitimité dans la « boite verte ».
Faire de l'Europe un éco-continent
    Face aux défis écologiques du présent et du futur, notre ambition est de faire de l'Europe le premier éco-continent. L’Europe contribue déjà aux progrès de chacun des pays qui la composent en matière d'environnement. Mais, l’Union européenne se doit d’être exemplaire tant en ce qui concerne sa contribution aux efforts internationaux, que pour la sécurité écologique de ses habitants, et en particulier des plus pauvres, qui sont souvent les premières victimes des nuisances environnementales. Sur le bruit comme sur l'eau ou l'air, l'Europe doit contribuer à un effort supplémentaire de solidarité écologique par des programmes adaptés.

    Sur le réchauffement climatique, le débat monte au sujet du protocole de Kyoto
    , avec la tentative par certains, à droite, d’une remise en cause de son application unilatérale par l'Europe. Au nom d'un handicap possible de compétitivité, on voudrait voir l'effort reporté ou atténué. L'Europe doit respecter l'engagement de Kyoto, même si d’autres tardent encore à assumer leurs responsabilités, et mettre en œuvre un vrai programme de lutte contre l'effet de serre. Nous proposons deux initiatives au niveau européen : la mise en place dans tous les domaines de risques (agriculture, énergie ...) d'un cadre de décision clair et cohérent, sur la base de ce qui existe dorénavant pour les OGM ; la participation beaucoup plus large et systématique de la population aux processus de décisions selon des modalités multiples. Nous soutiendrons le développement des énergies renouvelables.

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L’Europe qui protège :
Faire de l’Union européenne une zone
de liberté, de sécurité et de justice

 
L’Europe est confrontée à de nouveaux défis et de nouvelles menaces : terrorisme, criminalité transfrontalière, drogue, blanchiment de capitaux, trafics de personnes, réseaux de prostitution. Elle doit mieux assurer, dans le respect de ses valeurs, la protection des individus, condition de leur liberté et de leur émancipation.
De nouveaux défis
    La libre circulation des personnes au sein de l’espace de Schengen et la suppression des frontières de l’Union ont entraîné un fort accroissement des flux transfrontaliers. Parallèlement, l’ouverture des frontières des PECOS a accentué l’internationalisation des échanges marchands et financiers. Ces évolutions sont une chance pour l’Europe ; mais elles nous confrontent aussi à des comportements criminels renouvelés sous la forme d’une criminalité transnationale. Cette criminalité tire parti des facilités de circulation et joue des différences persistantes entre les législations des États.

    C’est pourquoi l’Union doit désormais aller plus loin dans la coordination des politiques de sécurité et de justice pour faire face aux défis liés au terrorisme comme à l’internationalisation de la criminalité.
Un espace de liberté, de sécurité et de justice
    Pour protéger sa population et faire une place sûre à ceux qu’elle accueille, l’Europe doit devenir un espace cohérent de sécurité et de justice. Des avancées significatives avaient été obtenues par la gauche, avec un renforcement de la coopération européenne en matière de justice et de sécurité, dans le cadre du traité d’Amsterdam puis de « l’espace de justice, de sécurité et de liberté » défini lors du Conseil de Tampere. Ce cadre garde toute sa pertinence, mais sa mise en œuvre est inégale et les niveaux d’harmonisation des législations européennes restent faibles. Il faut accentuer la coopération judiciaire et policière. C’est une nécessité car, contrairement à ce que considère le gouvernement actuel, il ne peut y avoir de solutions strictement nationales face aux problèmes liés aux trafics de drogue, de personnes, ou aux réseaux criminels internationaux.
Plus de sécurité pour plus de liberté, voici notre démarche
    À cet effet, l’Europe doit définir des priorités d’action et se doter d’organismes centraux efficaces avec une évaluation régulière des politiques menées. Quatre orientations doivent être développées :
       La lutte contre le terrorisme est prioritaire. L’échelle européenne est la plus pertinente pour être efficace. Des coopérations existent, elles doivent être renforcées dans le domaine du renseignement, de l’action policière et judiciaire, y compris la définition des incriminations et des délits permettant de combattre les réseaux terroristes. Il faut avancer rapidement dans le partage des informations et dans le contrôle des circuits de financement.

       La lutte contre les réseaux mafieux qui contrôlent les trafics de drogue, d’armes et d’êtres humains, le proxénétisme, ainsi que contre la corruption, le blanchiment d’argent et la grande délinquance financière doit être intensifiée. Il n’y aura pas de réponse efficace au seul niveau national : une mise en commun plus ambitieuse des forces est nécessaire. EUROPOL doit pouvoir jouer son rôle de centre d’analyse et être plus opérationnel, alors qu’actuellement les États membres restent trop réticents à lui confier les compétences nécessaires et que les résistances culturelles au partage de l’information sont encore fortes.

       Beaucoup de progrès ont été accomplis en matière judiciaire, notamment avec la création du mandat d’arrêt européen. EUROJUST a été renforcée, avec l’extension de ses mandats à toutes les formes de criminalité graves et avec la possibilité de demander aux États membres d’initier des enquêtes. Pour poursuivre cette dynamique, nous soutenons le renforcement de l’entraide judiciaire en matière pénale et la création d’un parquet européen.

       En matière de sécurité, il faut passer du bilatéral à des coopérations multilatérales avec une vision stratégique permettant d’agir en commun de façon pragmatique et efficace dès lors qu’un réseau criminel sévit dans plusieurs États membres. L’Union européenne doit développer ses outils : renforcement du collège européen de police, création d’un collège européen de magistrats pour favoriser la coopération en améliorant la connaissance mutuelle des systèmes judiciaires, mise en place d’un observatoire européen de la délinquance et de centres de coopération policière et douanière.
Une nouvelle régulation efficace des flux migratoires
    L’Union connaît également un afflux de clandestins, parfois mêlés aux réfugiés, qui transitent notamment par les frontières du Sud et de l’Est de l’Europe.

    L’Europe doit être en capacité de réguler les flux migratoires. Elle doit lutter de façon plus coordonnée contre les réseaux d’immigration clandestine, les passeurs esclavagistes, la surexploitation d'une main d'œuvre non déclarée sans droit ni protection sociale. Il ne s’agit pas, comme le souhaite la droite la plus conservatrice, de fermer nos frontières aux étrangers, ce qui serait socialement et économiquement absurde, mais au contraire de permettre un accueil digne de ceux qui sont autorisés à immigrer. Parce que nous devons bien accueillir et intégrer ceux qui arrivent, nous voulons une immigration régulée et devons lutter fermement contre l’immigration clandestine. L’Europe doit définir une politique commune de régulation des flux migratoires. L’harmonisation des législations des États en matière d’asile, de séjour et de droit du travail pour former un cadre juridique clair, permettant l’accueil puis l’intégration des populations immigrées est nécessaire. En outre, nous devons continuer à travailler à l’élaboration des visas sécurisés. Une « police européenne aux frontières » doit être créée.
Une politique d'intégration et de citoyenneté
    L’immense majorité des immigrants et des enfants d’immigrants qui vivent dans nos pays sont là depuis des décennies, y resteront et ont vocation à devenir des citoyens. L’Europe doit donc traiter la question de l’immigration à partir de ses valeurs démocratiques et sociales. Sans l’apport de l’immigration, la population de plusieurs pays de l’Union aurait déjà commencé à décliner ces dernières années. Les pays qui n’accepteraient pas cette part d’eux-mêmes qu’est l’immigration, qui ne comprendraient pas qu’elle contribue à la richesse de leur économie mais aussi de leur société, qu’elle leur donne de plus en plus de chercheurs, de professeurs, de créateurs, d’artistes, perdraient beaucoup. Ils s’enfermeraient dans des logiques de discrimination, de reculs démocratiques et de replis communautaires.

    L’Europe démocratique ne peut tolérer aucune forme de racisme et d'antisémitisme, de discrimination en raison de l´origine, de la religion, de la couleur de la peau, du handicap, du sexe ou de l’orientation sexuelle, en particulier dans l’accès à l’emploi et aux formations, au logement. Nous veillerons à la transposition effective des directives contre les discriminations. L’Union devra encourager la lutte contre les ghettos, nous soutiendrons à cet effet le développement des programmes communautaires « Urban ».

    Nous défendons, contre les conservateurs, le droit de vote pour les résidents étrangers aux élections locales dans tous les pays de l'Union. Mais celle-ci doit aller plus loin, et encourager l’accès à la nationalité de nos pays pour les résidents étrangers installés depuis plusieurs années, et promouvoir, là où il n’existe pas encore, le droit du sol, c’est à dire la reconnaissance de la pleine citoyenneté pour tous ceux qui sont nés en Europe et y grandissent.

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Une Europe forte pour maîtriser
les enjeux de la mondialisation

 
Pouvoir agir à la bonne échelle, affirmer une alternative aux dérives du monde actuel, disposer face à la mondialisation de moyens à la hauteur des enjeux : telles doivent être les ambitions d’une Europe forte et solidaire.
Pour lutter efficacement contre la mondialisation sauvage
    La mondialisation se traduit par un essor technologique sans précédent et crée indéniablement de nouvelles richesses. C’est aussi un processus inégalitaire, qui renforce les distorsions entre le Nord et le Sud, accroît la précarité partout et affaiblit les États.
    L’interdépendance crée des solidarités nouvelles mais donne aussi aux peuples le sentiment de ne pas maîtriser leur destin.

    Notre refus d’une mondialisation, orientée par les intérêts des seuls grands groupes multinationaux, et dominée par une puissance, est aujourd’hui renforcé et encouragé par la mobilisation croissante de la société civile, au travers de militants syndicaux et associatifs, qui cherche à combattre les effets néfastes de la mondialisation. Nous nous inscrivons dans ce mouvement social international, dont nous mesurons l’énergie et la force. Nous voulons ouvrir la perspective d’une nouvelle gouvernance internationale, d’un autre ordre du monde en créant les conditions d’une alliance globale des progressistes.

    Nous voulons traduire cette protestation et ces espérances dans les règles et les institutions internationales et peser sur les rapports de force planétaires. Nous pensons que pour cela, l’Europe est l’outil essentiel. Par sa taille, désormais renforcée avec l’élargissement, par sa puissance économique, par le modèle démocratique et de solidarité qu’elle incarne, elle nous offre l’espace politique qui permet d’affronter les enjeux de la mondialisation.

    Nous nous différencions en cela de ceux qui pensent que la construction européenne n’est qu’un des maillons de l’extension de la mondialisation libérale. Les défenseurs d’un monde unipolaire redoutent le rassemblement des Européens et travaillent à les diviser.
Faire de l’Europe un acteur global
    Notre ambition est double. L’Europe doit être capable, à la fois, de permettre à ses citoyens de tirer parti de la mondialisation et de les protéger contre les effets d’une dérégulation sauvage. Elle doit aussi avoir la force d’agir pour promouvoir un monde plus stable et plus solidaire, plus juste et plus sûr pour tous les peuples.

    Nous n’acceptons pas les politiques qui intériorisent les pseudo exigences de la mondialisation pour promouvoir la dérégulation, l’affaiblissement des services publics et l’accroissement de la précarité. Nous pensons que le meilleur moyen de mettre nos concitoyens dans la situation de recueillir les bénéfices et non les effets pervers de la mondialisation est d’investir dans la recherche, l’innovation, l’éducation, de se donner des objectifs de croissance soutenue et de renforcement de la cohésion sociale. Agir et ne pas subir.

    Nous voulons faire de l’Europe un acteur global
    , capable de contribuer à l’émergence d’un monde multipolaire où aucune puissance ne peut imposer ses vues aux autres. Il ne s’agit pas de s’opposer par principe aux États-Unis, mais toute forme d’impérialisme, et de tirer les conséquences du fait que la domination d’une puissance unique n’est pas adaptée au mode de régulation d’un monde complexe, et s’avère donc source de tensions et en définitive lourde de dangers.

    De même, nous nous battons pour que l’Europe pèse de tout son poids en faveur d’une redistribution des richesses mondiales, beaucoup plus qu’elle ne le fait aujourd’hui.

    Elle parle déjà d’une seule voix à l’OMC où elle a refusé l’intégration de la santé, de l’éducation et de la culture dans les négociations commerciales ; elle devrait aussi unifier sa voix au FMI, à la Banque mondiale, à l’OIT et à l’OMS.

    L’Union européenne est aussi, à travers l’aide communautarisée et l’aide bilatérale de chacun de ses États, de très loin le principal pourvoyeur d’aide au développement de toute la planète. L’esprit de solidarité qui est à la base du projet européen doit se manifester plus fortement encore à travers notamment l’annulation de la dette des pays les plus pauvres, le renforcement de l’aide au développement, la garantie des biens publics mondiaux et la défense des services publics, expression des préférences collectives des peuples face à la toute puissance du marché. L’Europe doit défendre le respect des normes sociales et environnementales au sein de l’OMC, le renforcement des pouvoirs de l’OIT et la création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement.

Pour l’affirmation d’une politique étrangère et de défense à la hauteur des enjeux
    L’Europe doit devenir un acteur majeur sur la scène internationale reflétant sa puissance économique. Les pays d’Europe ont en commun le choix du multilatéralisme comme mode de régulation du système international, et des intérêts communs de sécurité. Il va falloir répondre à deux défis nouveaux. Le premier est le déplacement de l’environnement proche de l’Union : l’élargissement rapproche de l’ancien espace soviétique, fait de la Baltique une mer intérieure et inclut les deux grandes îles de la Méditerranée, région dans laquelle l’Europe doit exercer des responsabilités particulières. Cette situation devrait amener l’Europe à proposer, d’une part, un partenariat continental dans le domaine de la défense à la Russie, et d’autre part, à prendre de nouvelles initiatives Euro-Méditerranéennes, passant par un renforcement très significatif des aides financières autour de projets de co-développement. Le deuxième tient à la nature de la relation transatlantique, qui doit être réexaminée sereinement, en préservant des liens amicaux avec les États-Unis mais en faisant de l’Europe un partenaire autonome, capable de faire valoir son point de vue sur la scène internationale.

    Nous sommes donc favorables aux mesures politiques et institutionnelles qui renforcent l’autorité et l’efficacité de l’Union en politique étrangère, comme le vote à la majorité qualifiée, la nomination d’un ministre des affaires étrangères européen, l’inclusion d’une clause de défense mutuelle dans le traité ou la création d’une Agence européenne de défense.

    Une politique étrangère forte ne pourra devenir une réalité que si nous construisons parallèlement l’Europe de la défense. Pour nous, l’objectif d’une défense européenne indépendante condition d’une diplomatie autonome est un objectif essentiel. C’est aussi la condition d’une Europe fédérale libre et indépendante susceptible de devenir un acteur majeur de l’avenir d’un monde multipolaire. L’Europe doit pouvoir dans l’avenir se défendre sans avoir à dépendre d’autres pour garantir sa sécurité. Elle doit pouvoir intervenir dans des opérations extérieures, car la défense de notre territoire commence à l’extérieur de nos frontières, mais également pour rétablir la paix et pour mener des actions humanitaires. Notre action armée doit s’inscrire dans le cadre du système de sécurité collective des Nations unies, rénové et renforcé.

    Cette Europe de la défense s’exprimera par la création d’unités militaires communes, placées sous des commandements intégrés et dotées des capacités technico-opérationnelles voulues, ainsi que par le renforcement de la base industrielle et technologique de défense. Cela nécessitera d’unifier les matériels de nos armées. Les programmes d’armement du futur devront tous être des programmes européens ou le résultat d’une répartition des types d’équipements entre les États membres, selon les compétences spécifiques de chacun. Dans ce domaine, il ne faut plus se contenter des paroles mais passer véritablement aux actes. Cette Europe de la défense se constituera dans le cadre de l’Europe élargie, mais elle ne devra pas faire obstacle à la possibilité pour quelques pays de mettre véritablement en commun leurs moyens militaires au service de la politique étrangère commune.

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Des institutions fédérales efficaces au service d’un projet ambitieux

 
L’Europe a besoin d’institutions qui permettent de retrouver l’adhésion des citoyens et de mettre en œuvre de manière efficace et dynamique les politiques communes nécessaires. Le désaccord sur les modalités de vote au conseil constaté lors du sommet de Bruxelles ne doit pas conduire à renoncer à l’acquis du projet élaboré par la Convention européenne.
Une bonne Constitution européenne
    Les différentes parties du texte préparé par la Convention sont de qualité inégale. Les dimensions institutionnelles des deux premières parties, sans être parfaites, marquent des avancées. Nous soutenons en particulier l’intégration de la Charte des droits fondamentaux dans le texte constitutionnel, l’extension des pouvoirs du Parlement européen, la désignation du Président de la Commission en tenant compte des résultats des élections européennes, l’extension de la méthode communautaire à la plupart des politiques de l’Union, le principe de double majorité (en nombre de pays et population) pour les décisions du Conseil, l’institution d’un ministre des affaires étrangères européen et la possibilité de coopérations structurées en matière de défense. Nous n’accepterons aucun recul sur la laïcité des institutions de l’Union. Les références à Dieu ou à l’héritage chrétien n’ont pas leur place dans la Constitution.

    Nous pensons, en revanche, que les troisième et quatrième parties du projet de la Convention, consacrées aux politiques de l’Union et à leur révision, ne sont pas de même nature : même si elles contiennent des avancées, elles restent marquées par leurs insuffisances. Nous demandons que la nouvelle phase de débat qui s’ouvre aujourd’hui soit utilisée pour orienter le texte dans le sens de la priorité donnée à la croissance durable, à l’Europe de l’emploi et à des garanties renforcées pour les services d’intérêt général.

    En outre, il est décisif que les modalités de révision de la Constitution distinguent les matières constitutionnelles, pour lesquelles il faut faire prévaloir durée et stabilité, des politiques de l’Union, pour lesquelles une procédure allégée, de décision à la majorité qualifiée, est indispensable. La Constitution ne peut figer dans le marbre toute évolution future et interdire toute politique alternative.

    Enfin, il faut aujourd’hui combiner unité et diversité dans la marche en avant de l’Europe. Nous voulons une Europe unie et une intégration réussie de tous ses membres. Lorsque des politiques nouvelles sont nécessaires, l’objectif doit être de convaincre l’ensemble des États d’être partie prenante de ces progrès. Aucune démarche de contournement a priori, aucune décision précipitée qui ne serait pas précédée d’un vigoureux effort de conviction de l’ensemble des partenaires, ne sont légitimes.

    C’est pourquoi nous rejetons l’idée de « groupes pionniers » qui seraient restreints aux grands États et alternatifs à l’action de l’Union, telle quelle a été proposée par le Président de la République. Le rôle du couple franco-allemand doit être d’entraîner des coalitions larges de pays, à l’exemple de ce qui a été fait pour l’euro, et non de s’isoler en cherchant à s’ériger en directoire.

    Il est donc nécessaire de disposer des instruments permettant, à l’image des coopérations renforcées, d’associer tous ceux, anciens ou nouveaux États membres, qui veulent aller de l’avant pour mettre en œuvre des projets conformes aux attentes des citoyens, car on ne peut accepter que l’Europe soit mise en panne par l’obstruction d’un seul ou d’une petite minorité d’États membres. Ces coopérations renforcées doivent donner un nouveau cœur à l’Europe, lui redonner du souffle et lui permettre d’aller plus loin quand l’unanimité risque de la bloquer.

    Dans une Europe à 25, une avant garde de pays, à partir de la zone euro et sans exclusive, devra mettre en œuvre la coordination économique, la convergence sociale et l’harmonisation fiscale. Elle devra se doter de la légitimité démocratique lui donnant les moyens d’agir et ouvrant la voie à l’Europe fédérale.
Le rôle décisif du Parlement européen dans le processus constitutionnel
    Le nouveau Parlement européen, investi d’une légitimité démocratique renouvelée, aura un rôle décisif à jouer dans le processus constitutionnel afin de poursuivre le débat, rapprocher les convictions et pallier les graves insuffisances de la méthode intergouvernementale. Il devra se prononcer sur le projet de Constitution finalement retenu et disposer d’un droit d’initiative constitutionnel sur les révisions ultérieures de la Constitution. Nous voulons une Constitution pour l’Europe, et demandons que celle-ci soit soumise à l’approbation des peuples par un référendum se tenant le même jour dans tous les pays qui auront choisi cette procédure de ratification. Les socialistes organiseront une consultation de l’ensemble des militants sur le projet de traité constitutionnel.

    Durant le moment privilégié de débat public que doit être la campagne pour les élections européennes, nous porterons résolument notre ambition et nos idées. Politiser l’Europe est aujourd’hui notre priorité pour permettre à nos concitoyens d’apprécier les enjeux et de formuler leurs choix entre plusieurs projets différents pour l’Union élargie. Le projet socialiste doit s’exprimer à l’échelle de l’Europe.
Un vrai Parti socialiste européen
    Pour cela, il faut construire un Parti socialiste européen qui devienne un vrai parti politique transnational. Pour ce faire, le PSE doit entreprendre des réformes profondes pour devenir un parti de militants, capable d’être un acteur à part entière de la vie européenne. Nous soumettrons ainsi des réformes statutaires au prochain Congrès du PSE, pour améliorer son fonctionnement démocratique. Nous demandons notamment que les orientations politiques du PSE soient débattues et tranchées par l’ensemble des adhérents des partis membres. De même, la légitimité et la visibilité des dirigeants du PSE, et notamment de son Président, seraient accrues s’ils étaient élus par les militants. Nous proposons aussi la création d’un Conseil du PSE, reflétant la diversité des partis membres, afin de permettre à toutes les sensibilités politiques de pouvoir agir au sein du PSE. Nous souhaitons la constitution de listes transnationales pour les élections européennes.

    Enfin, nous plaidons avec force pour faire campagne, avec le PSE, en faveur d’un candidat de gauche à la présidence de la Commission.

    C’est avec un tel parti, étroitement lié à toutes les forces syndicales et associatives qui partagent notre rejet de l’Europe des droites libérales et adhèrent aux mêmes valeurs, qu’il nous faut redonner du sens et du souffle au projet européen, l’un des plus beaux et des plus importants de ce début de siècle.

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