Muncipales 2001 à Paris
Campagne de désignation du candidat socialiste

Delanoë

 Courrier de Bertrand Delanoë adressé aux militants socialistes parisiens en février 2000



 

Tu le sais : les élections municipales de 2001 sont déjà au cœur du débat médiatique, perçues à juste titre, comme un rendez-vous démocratique essentiel. Jamais, il est vrai, la perspective d'un changement politique majeur dans la capitale, n'a semblé aussi plausible.
Face à un tel enjeu, j'ai donc décidé de prendre publiquement mes responsabilités, devant les Parisiens. Parce que je crois que le moment est venu. Parce que les choses sont parfaitement claires dans mon esprit. Et parce que, dès lors, il était inconcevable d'attendre davantage pour répondre à toutes celles et tous ceux qui, ces dernières semaines, m'ont interrogé sur mes intentions.
Mais à travers cette lettre, c'est d'abord à chacun des membres de notre famille politique que j'ai voulu m'adresser.

Oui. Si tu le souhaites, si vous le souhaitez, je serai candidat à la mairie de Paris.
Avec une ambition : gagner.
Avec une conviction profonde : cet objectif, certes exigeant, est à notre portée si nous agissons dans la cohérence, dans l'unité, et avec l'enthousiasme que peut générer ce que je perçois d'abord comme une formidable aventure collective et humaine.

Comment ne pas se souvenir, d'ailleurs, des pages décisives que nous avons déjà su écrire ensemble ? Ainsi, en 1995, vous m'aviez accordé votre confiance. A l'époque, l'enjeu était bien différent : mettre fin au " grand chelem " et ouvrir une brèche dans la forteresse RPR alors hégémonique. C'est ce " cahier des charges " que nous avons rempli, bien au-delà de nos espérances.
Ensemble, nous devons donc aller au bout d'une telle dynamique, nourrie et enrichie par les législatives de 1997 puis par les régionales de 1998 : gagner, non pour nous-même, mais d'abord et avant tout pour nos valeurs, nos idées, nos convictions, qui seules, pourront dessiner les contours d'une nouvelle ère politique à Paris.

Ecrivant cela, j'ai parfaitement conscience que tous nos échanges se dérouleront sous le regard des Parisiens : mais n'est-ce pas notre force que d'assumer sereinement dans nos débats internes une expression libre, moderne et transparente ? Le processus est ouvert. Et la règle est connue. Désormais, ce sont les adhérents qui s'expriment et qui décident. Comme ils l'ont fait en 1995, quand ils ont choisi Lionel Jospin comme candidat à l'élection présidentielle. Ou comme les militants parisiens l'ont fait récemment, en désignant Patrick Bloche à la tête de notre fédération.
Pour ma part, je conduirai cette campagne interne en n'oubliant jamais que les militants sont aussi et avant tout des Parisiens. Et comme eux, c'est un projet qu'ils attendent : des idées novatrices au service du changement, une ambition entièrement tournée vers une harmonie urbaine à réinventer, une méthode pour associer toutes les énergies de la société parisienne à cette démarche et des engagements concrets qui structurent ce nouveau contrat démocratique.
Les habitants ressentent depuis trop longtemps le sentiment d'un déclin de leur cité. Il est indéniable qu'au-delà de pratiques qui déshonorent l'identité et l'histoire de notre ville, le " système " municipal a produit des effets dévastateurs. La question du rayonnement de Paris dans un environnement européen concurrentiel est donc posée.
La réponse passe précisément par un traitement audacieux, ciblé, équilibré des " maux " qui affaiblissent Paris, dans ses quartiers, dans son quotidien, dans sa diversité, et nuisent ainsi à son dynamisme et à son pouvoir d'attraction.
Le prestige et la renaissance de Paris découleront d'une remise en mouvement de ses forces et de ses atouts : son pluralisme sociologique et culturel, ses potentialités créatrices, sa capacité à incarner un projet économique stimulant, sa propension à répondre aux exigences environnementales qui s'expriment.

L'ambition est là : donner à notre ville un rôle pionnier dans l'invention d'un modèle urbain inédit sur la scène européenne.

Nous devons donc tourner la trop longue page d'un système usé, dont la présente mandature ne constitue d'ailleurs qu'une expression résiduelle.
Cette page, nous ne la tournerons que si nos propositions sont à la hauteur des aspirations de la société parisienne : à nous de créer les conditions d'un dialogue vivifiant avec les Parisiens, et de rechercher la richesse des contributions citoyennes. L'époque des programmes " clés en mains " est révolue : la gauche ne gagnera que si les habitants peuvent s'identifier à son projet, donc influer à la fois sur son élaboration puis sur sa mise en œuvre.
Cette page nous ne la tournerons que si nous avançons unis avec tous les représentants du " mouvement pluriel " : nos partenaires écologistes, communistes, du mouvement des citoyens, et radicaux de gauche. Mais aussi - comme en 1995 - des femmes et des hommes qui, issus des corps intermédiaires et associatifs, sont également dépositaires d'une parelle de cette histoire en marche. Saurons-nous favoriser une telle dynamique et placer la loyauté au cœur de nos échanges avec tous ces interlocuteurs ? Pour ma part, non seulement je le souhaite, mais j'y contribuerai activement, si vous m'en donnez les moyens. Cette page, enfin, nous la tournerons si nous savons incarner à Paris, ce que Lionel Jospin et son gouvernement, ce que François Hollande à la tête de notre parti, incarnent à l'échelon national : une démarche moderne et pragmatique, qui aux yeux des français a su réconcilier action publique et ethique. Car j'en suis convaincu : l'éthique et plus largement, le renouveau démocratique, devront être au centre de notre offre publique.
A cet enjeu intrinsèquement culturel, je veux déjà répondre par trois engagements : car la parité, le non cumul des mandats ainsi que la transparence désignent autant de principes qui ne peuvent demeurer virtuels.
Tout candidat à la mairie de Paris doit donc s'engager, s'il est élu, à se consacrer exclusivement à la gestion sa ville, au service des Parisiens, et à abandonner par conséquent tout autre mandat électif. Je m'y engage.
Tout candidat à la mairie de Paris doit veiller à ce que la parité s'applique à la constitution de nos listes. Mais la parité a aussi vocation à devenir réalité dans la formation d'un exécutif municipal. Je m'y engage.
Tout candidat à la mairie de Paris doit enfin, se mettre en situation de rendre des comptes à ses concitoyens, sur tous les aspects de sa vie qui concernent directement le débat public, comme l'état de son patrimoine, par exemple. Je m'y engage.

Au cours de ces dernières années, la gauche a conquis, auprès des Parisiens, un crédit incontestable. Elle le doit à chacun de ses membres. Ses maires d'arrondissement, agissant dans un cadre juridique qu'il conviendra de réformer, ont démontré compétence, disponibilité, mais aussi imagination au service de la démocratie locale. Les élus minoritaires, dans les quatorze autres arrondissements, ont également participé à ce travail acharné. La Fédération de Paris et le groupe à l'Hôtel de Ville ont su faire vivre une synergie indispensable, démontrant que l'intérêt du collectif doit primer sur toute autre considération. Je veux d'ailleurs le dire ici : depuis 1993, en tant qu'animateur d'un ensemble divers mais cohérent, exigeant mais responsable, j'ai eu plaisir à faire vivre des idées nouvelles, à imposer à la droite locale des thématiques qu'elle ignorait, et à jouer ainsi un rôle utile au service des Parisiens. Nous leur avons démontré notre capacité à innover, à proposer et à faire entrer dans les faits certaines de nos suggestions.
C'est cet état d'esprit que je privilégierai au cours de la période qui s'ouvre. A la recherche d'un point de convergence indispensable entre une vision parisienne et les projets qui naissent dans les quartiers et qui illustrent le rôle majeur qu'auront à jouer les acteurs locaux durant la campagne et dans la prochaine mandature.
Ma force, ma légitimité, c'est chez vous que je veux d'abord les puiser. Et c'est avec vous que je veux ouvrir le débat, pour élaborer notre projet et poser des actes utiles à notre combat collectif.

Bertrand DELANOË