Les tenants du non se croient à Eurodisney !

Martin Schulz


Entretien Martin Schulz, président du Parti socialiste européen, paru dans le quotidien Libération daté du 23 mars 2005


 

Comment expliquez-vous cette poussée du non dans les sondages ?
Elle reflète surtout un mécontentement grandissant à l'encontre de la politique menée par Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin. Mais on a encore le temps de gagner ce référendum. Ce qui m'inquiète, en revanche, c'est la confusion entretenue autour du projet de directive Bolkestein. Il faut que les Français sachent qu'un rejet de la Constitution ne changera rien à l'avenir de ce texte, qui a été proposé sur la base du traité actuel. Dire non à la Constitution, ce n'est pas dire non à Bolkestein !

Pourtant, certains opposants à la Constitution se disent proeuropéens...
Comment peut-on être pour l'Europe et, en même temps, détruire la base de l'Europe du futur ? La Constitution est plus sociale et plus démocratique que le traité de Nice et va permettre à l'Europe d'exister sur la scène internationale. Cela me sidère que l'on puisse faire croire qu'il sera possible de négocier une meilleure Constitution. Avec qui ? Avec les gouvernements de droite qui ont refusé d'aller plus loin ? Les tenants du non se croient à Eurodisney !

Que pensez-vous des partisans du non au sein du PS qui refusent de se plier au résultat de la consultation interne de décembre ?
C'est inattendu ! Une majorité de 59 % a soutenu le projet de Constitution. Lorsque la base d'un parti exprime aussi clairement sa volonté, tous les responsables politiques doivent s'y plier. Il est d'autant plus choquant qu'Henri Emmanuelli et Laurent Fabius continuent à faire campagne pour le non qu'il s'agit de deux anciens premiers secrétaires du PS. Fabius avait indiqué qu'il se plierait à l'avis des militants et il fait le contraire ! Et c'est Emmanuelli qui avait demandé la consultation interne du parti. C'est incroyable ! Comment peut-on prétendre diriger un parti quand on ne tient pas parole ? On voit bien que Fabius ne pense qu'à la présidentielle et que la Constitution ne fait pas partie de ses préoccupations centrales.

L'unité du PS est-elle menacée ?
Je ne crois pas à une scission du PS. En revanche, si le oui l'emporte, les carrières d'Emmanuelli et de Fabius seront très compromises.

Au sein de la famille socialiste européenne, les minoritaires français sont-ils isolés ?
Tous les socialistes européens, sans exception, sont pour la Constitution, qu'ils soient au gouvernement ou dans l'opposition : le nouveau Premier ministre portugais, Sócrates, l'Espagnol Zapatero, qui vient de gagner son référendum, Tony Blair, qui représente un autre socialisme, le Suédois Göran Persson, qui incarne le modèle nordique. Même les partis socialistes les plus à gauche, comme le PS wallon ou le Pasok grec, sont pour, tout comme la très grande majorité des syndicats européens. Cela devrait faire réfléchir Fabius et Emmanuelli. Est-ce que tout le monde se trompe alors qu'ils sont les deux seuls en Europe à avoir une vision claire ?



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