Jacques Chirac n'est pas le candidat d'un projet

Martine Aubry
 
 A l'occasion du premier meeting de campagne de Lionel Jospin à Lille (le 7 mars 2002), Martine Aubry, maire de Lille et porte-parole du candidat, revient sur le début de cette campagne. Entretien.


 

Le premier meeting de la campagne de Lionel Jospin aura lieu jeudi 7 mars à 20h00 à Lille. Lille, c'est la ville dont vous êtes maire depuis un an après avoir été ministre de l'emploi et de la solidarité et écrit le projet des socialistes en janvier dernier. Quel symbole faut-il y voir ?
Tout simplement, Lille est le cœur d'une région où la gauche puise une large part de sa force et de son histoire. Ici, Lionel Jospin sera entouré de Pierre Mauroy et de ses amis. Nous allons lui accorder un accueil très chaleureux et lui montrer notre enthousiasme pour cette campagne et aussi notre sens de la fête ! Je suis sûre qu'ensuite, pendant la campagne, Lionel se souviendra du souffle et de l'élan que lui ont apportés les participants de notre rencontre lilloise.

Lionel Jospin est en campagne depuis 15 jours. Les sondages le portent à la hausse. Quelle conclusion en tirez vous ?
Aucune conclusion définitive… Je crois que Lionel fait une belle campagne, une entrée en campagne crédible et solide. C'est probablement ce que les Français apprécient et ce que mesurent les sondages : un candidat qui a compris les aspirations des Français, qui leur parle de ses projets avec ambition et sérieux, qui ne recherche pas les effets d'annonce et ne pratique pas la surenchère.

En face, le président sortant semble chercher ses marques, il hésite à être lui-même, c'est-à-dire un homme de droite. Jacques Chirac n’est pas le candidat d’un projet, d’une vision ou d’une pensée pour la France. Il est le candidat de toutes les opinions. Or, la politique ne peut se résumer à " faire plaisir à tout le monde ". La politique, c’est s'appuyer sur des valeurs, et apporter des réponses à notre pays et renforcer sa place dans un monde qui doit être juste, équilibré et apaisé.

Ceci dit, il ne faut pas croire à la cristallisation des votes aussi longtemps avant le premier tour. Ne sombrons pas dans le triomphalisme comme la droite le faisait il y a un mois. Rien n'est jamais acquis… mais, nous avons que les Français feront confiance à celui qui agit et qui tient parole.

La droite et Jacques Chirac mettent en cause les 35 heures…
En effet. Il semblerait que pour eux les 35 heures représentent l'abomination de l'abomination. C'est ce qui ressort de toutes leurs déclarations. En même temps, on sent bien que ni Jacques Chirac ni les autres dirigeants de droite n'osent parler clairement de l'abrogation des 35 heures : ils savent trop à quel point les Français sont attachés à cette réforme. La grande majorité des salariés considèrent les 35 heures comme un changement positif et les deux tiers des employeurs estiment que leur entreprise fonctionne mieux après qu'avant les 35 heures. Parce qu'elle ne peut se permettre d'afficher clairement ses intentions, la droite préfère donc nous parler d'assouplissement. Mais, là encore, elle n'en dit pas trop pour ne pas effrayer les Français. Car, dans le fond, déplafonner le nombre d'heures supplémentaires et supprimer leur surcoût comme la droite le suggère en catimini, cela revient exactement à abroger les 35 heures en permettant à tout employeur de faire travailler librement les salariés 39 heures. Cela revient à priver les Français de ce temps libre supplémentaire qu'ils apprécient pour s'occuper d'eux, de leurs enfants, de leur famille, des autres, pour améliorer leur qualité de vie.

Au-delà, abroger les 35 heures, c'est - comme d'habitude - nier la réalité, nier les 400 000 emplois créés grâce à la réduction du temps de travail pour prétendre que seuls les allégements de charge au profit des entreprises seraient efficaces dans la lutte contre le chômage. Nous aussi, nous croyons à la nécessité d'alléger certaines charges, notamment sur les bas salaires. Mais nous savons que cela n'a de sens et d'effet que s'il existe une contrepartie et une réelle incitation à l'embauche. Au passage et sans esprit polémique, je voudrais juste souligner qu'un emploi créé par la fameuse ristourne Juppé (allégement sans contrepartie d'embauche) coûtait à la collectivité 200 000 francs, c'est-à-dire une fortune comparée aux 77 000 francs que coûte un emploi créé grâce à la RTT…Sur le chômage comme sur le reste, avec Jacques Chirac, la vérité est ailleurs !

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