Construisons un autre monde

Martine Aubry
 Contribution générale au congrès national de Dijon du Parti socialiste présentée par Martine Aubry et le club Réformer.
18 janvier 2003

 
Le 21 avril n'est pas un accident de l'histoire, nous le savons, mais bien le révélateur d'une crise plus profonde de nos sociétés. Une crise politique qui a vu l'abstention, le vote pour les extrêmes, les candidats catégoriels s'accroître lors des élections, en même temps que se creusait le fossé entre les citoyens et l'action collective.

Après ce choc, l'analyse, la confrontation, le débat d'idées s'avèrent indispensables.

Cette démarche nécessitait une analyse du bilan des années 1997-2002, analyse sans faiblesse mais aussi sans auto flagellation ou recherche de boucs émissaires. Nous avons fait collectivement cette analyse avec les militants. Nous comprenons - au-delà des éléments conjoncturels de l'élection présidentielle - ce qui ne nous a pas permis de poursuivre l'action avec les français, principalement une insuffisante attention à certains d'entre eux qui se sont sentis oubliés ou abandonnés, et une incompréhension d'une société de plus en plus éclatée et sans sens collectif.

Mais nous n'oublions pas que Lionel Jospin a été élu sur des engagements et qu'il les a tenus. N'en déplaise à la droite, le chômage n'a jamais baissé autant en si peu de temps qu'en France pendant ces cinq dernières années. Les 35 heures y ont largement contribué. Ce n'était pas facile, comme il ne l'était pas de rétablir l'équilibre de la sécurité sociale tout en faisant la Couverture Maladie Universelle. Il n'était pas non plus facile de faire des réformes de société, comme la parité ou le PACS. Soyons fiers de cela, et sachons définir notre propre voie en évitant de reprendre par conformisme ou par facilité les discours de la droite ou les réponses qui sont dans l'air du temps. C'est en reniant ce que nous sommes, comme cela est apparu parfois, que l'on perd la boussole et que les Français ne s'y retrouvent plus.

Or, face à une droite décomplexée et revancharde qui se nourrit des peurs que suscitent notamment la mondialisation et la montée des intégrismes, qui derrière un discours du " bons sens ", accroît la dépolitisation et la déresponsabilisation des citoyens, nous avons aujourd'hui une impérieuse nécessité à retrouver une pensée, un " corpus idéologique ". Cette obligation concerne bien entendu les socialistes, mais aussi toute la gauche. L'histoire politique de notre pays montre avec force que le rassemblement des socialistes, et au-delà de toute la gauche, s'est toujours fait avec, en préalable, un débat sur un projet et une vision claire de l'avenir.

Nous savons que la crise politique n'est en fait que le révélateur d'une crise bien plus large de nos sociétés développées, dont les symptômes sont multiples :

     La montée de l'individualisme et du corporatisme, qui privilégie des intérêts particuliers propres au détriment des règles et aspirations collectives.

     La tyrannie de l'urgence et du court terme, qui privilégie l'anecdote et le sensationnel par rapport à la réflexion de fond dans la société comme dans les médias, et qui impose la rentabilité financière à court terme au lieu de la création de richesse productive dans les entreprises ce qui entraîne les dérives actuelles de type Enron.

     Le recul du politique, qui se déclare lui-même impuissant contre les délocalisations ou qui préfère détourner les yeux de la tragédie tchétchène ou du Proche Orient.

     L'absence de morale quasi généralisée dans notre société, où à tout niveau la fraude et la triche s'imposent au point de ne plus être contestées, si bien même que pour certains aujourd'hui l'honnêteté et la rigueur apparaissent presque comme de la naïveté.

Ces symptômes sont malheureusement ceux de sociétés développées qui ne produisent plus de sens et ne proposent plus d'espérances collectives, qui privilégient l'avoir, la consommation, le " toujours plus ", au détriment de la qualité de vie, de la solidarité et des valeurs collectives. Ils montrent combien se sont distendus les liens entre les citoyens et la République, entre l'individuel et le collectif.

C'est en tentant de comprendre et d'analyser que nous avancerons. C'est bien la raison pour laquelle les militants ont partout participé à la réflexion et aux débats. C'est à l'issue de ces discussions que nous souhaitons aujourd'hui apporter cette contribution.
Notre démarche se veut politique au sens plein du terme. L'honneur de la politique, c'est de permettre la confrontation des idées et de défendre ses valeurs. Nous voulons continuer à faire vivre le débat dans le cadre de notre Congrès, en allant jusqu'au bout de la nécessaire clarification, sans a priori mais avec détermination et courage collectif.

Avec tous les socialistes, nous partageons des valeurs communes et un même objectif, celui d'une société plus juste, plus humaine, et plus solidaire. Pourtant, entre socialistes, des différences existent et il est temps que, sur le fond, elles soient portées à l'appréciation des militants. Et ce d'autant plus qu'elles sont transversales à nos anciens courants et vont de l'Europe à l'appréciation de la politique sociale en passant par la globalisation libérale.

Au-delà de ce que sera la future majorité de notre parti, nous devons tous vouloir une orientation politique claire et cohérente. Nous voulons que l'affirmation d'un projet lisible soit le ciment d'une vraie majorité, au sein de laquelle les propos contradictoires n'auront pas lieu d'être. Rien n'est pire que le consensus de façade. Mieux vaut une majorité claire et une ou plusieurs minorités défendant d'autres choix. Refuser de clarifier les choses, c'est rendre le plus mauvais service à notre parti, à ses militants, à ses électeurs. Les vrais débats, la vraie démocratie au sein du parti n'ont jamais empêché les victoires, ni causé les échecs. Bien au contraire.

Nos concitoyens attendent un projet clair du Parti Socialiste. C'est pourquoi nous ne devons pas forcément chercher à dresser aujourd'hui un inventaire de mesures, mais plutôt chercher à reconstruire. Ce que les Français souhaitent, ce sont des repères clairs, des valeurs affirmées, et du sens à moyen et long terme. Nous avons à gauche le devoir de répondre à cette attente et de porter ensemble notre vision de la vie en société, notre sens de l'intérêt général, et le rôle de chacun dans cet épanouissement collectif.

Nous arrivons à la fin d'un cycle de vingt ans de " gouvernance " et de trente ans de rôle " premier " du parti socialiste. La rénovation est une nécessité. Elle ne peut se faire qu'en partant d'un préalable pour nous socialistes, à savoir notre positionnement face aux enjeux de nos sociétés au 21ème siècle. La ligne de gauche que nous appelons de nos vœux, et pour laquelle nous nous mobilisons, est celle qui traduira une réelle capacité à changer la donne, à peser sur les événements, ce qui suppose des options précises plutôt que des compromis inopérants.

Le défi majeur que le Parti socialiste a aujourd'hui à relever, c'est de mettre fin au sentiment d'impuissance que la politique inspire aux Français. Pour y arriver, le PS doit continuer d'être volontariste dans l'action, tout en restant fidèle aux valeurs fondatrices du socialisme : égalité, solidarité, démocratie, universalisme. Toute décision à prendre, toute réforme à engager doit l'être en référence à ces principes : l'égalité va de pair avec la liberté ; la recherche de l'émancipation de chacun s'inscrit dans le cadre d'un projet collectif ; la démocratie reste toujours à conquérir ; nos valeurs sont universelles et notre idéal est internationaliste.

C'est ainsi que nous redonnerons un sens collectif à l'action et que nous reposerons des repères dans notre parti, mais aussi dans notre société qui en est en partie dépourvue. Le socialisme que nous voulons contribuer à promouvoir est celui de la reconquête, celle de nos valeurs, de notre action. A nous de tracer des perspectives fortes.

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I
Un travail pour tous, un bon emploi pour chaque citoyen
II
Démocratiser la République
III
Pour des citoyens à part entiere : l'égalité des chances, notre ambition première
IV
Des citoyens à part entiere : acteurs d'un projet collectif
V
Un autre monde est possible
VI
Le Parti et la gauche



I/ Un travail pour tous,
un bon emploi pour chaque citoyen

 
Le travail représente encore dans nos sociétés contemporaines non seulement la première ressource financière pour la grande majorité des individus, mais aussi le vecteur majeur d'insertion sociale et d'acquisition de l'autonomie.

Nous socialistes poursuivons un objectif d'émancipation pour chaque femme et chaque homme de notre société. Viser cet objectif, c'est en particulier faire en sorte que tous aient un travail - donc une autonomie et une utilité sociale - et en même temps que chacun ait un bon emploi, sûr, valorisant et lui permettant de progresser.

Or aujourd'hui l'évolution du salariat est marquée par une forme d'éclatement et de précarisation, par la persistance du chômage de masse et par le fait que 60% des salariés réalisent des tâches d'exécution. Il est inquiétant de savoir que cette proportion ne fera que s'accroître dans les années à venir quand la course à la productivité et le recours de plus en plus fréquent à la flexibilité entraînent déjà stress, angoisses et développement des maladies professionnelles.

La rupture actuelle entre le salarié et son travail conduit à un désintérêt croissant chez une grande majorité des salariés. Nombreux sont ceux, ouvriers ou cadres, qui ne se sentent plus mobilisés par leur entreprise. C'est fort compréhensible quand le seul objectif affiché et sur lequel est jugée l'entreprise est dorénavant le résultat financier à très court terme, et non plus, l'innovation sur les produits et les services, la bataille sur les marchés ou la capacité à mobiliser les intelligences et les énergies autour d'un projet d'entreprise.

De plus, certains Français ont eu le sentiment d'avoir été abandonnés ou oubliés par nous. Le désarroi des salariés modestes est manifeste face à un travail souvent précaire et mal rémunéré qui ne leur permet plus de vivre décemment, alors même que l'ascenseur social apparaît en panne. Un travail dur souvent sans intérêt, quand la richesse semble couler à flot pour d'autres, est pour eux inacceptable. Ils ne nous l'ont pas pardonné.

Le sentiment de démobilisation des salariés est aggravé par la mutation de la gestion des grandes entreprises. A la recherche de "valeur" s'ajoute "l'effet de taille", la nécessité de dévorer l'espace. Le spéculateur George Soros, qui parle de l'intérieur même du système, décrit ce processus d'une phrase brutale : "seuls les plus voraces resteront". La montée en puissance du pouvoir des actionnaires s'accompagne en outre d'un doute de plus en plus prégnant quant à la sincérité des comptes des entreprises.

Dans ce contexte, le PS doit réaffirmer son attachement au travail, à une société où sont valorisés la place du travail et des travailleurs, l'intérêt et la rémunération du travail. A cet égard les 35 heures, contrairement à ce que déclarent certains, ont contribué à cet objectif en améliorant la qualité du travail et de la vie quotidienne.

Aussi le PS doit-il proposer de :

Revaloriser les salaires et notamment les bas salaires

    Les socialistes doivent continuer à se battre pour une meilleure répartition entre le capital et le travail. La Gauche a suffisamment tardé et tergiversé : à elle de reprendre son combat historique sur les salaires pour faire en sorte que chacun puisse vivre de son travail. Ce qui aujourd'hui, nous le savons, n'est pas réellement le cas pour beaucoup d'ouvriers, d'employés, de commerçants ou d'artisans !

    Nous prônons une augmentation des bas salaires qui, au-delà du SMIC, passe par un plan de revalorisation négociée dans les différentes branches professionnelles, à l'instar de que nous avons déjà réalisé en 1984.

    De ce point de vue, il faut souligner que le débat sur les heures supplémentaires lancé par les opposants aux 35 heures est véritablement fallacieux : la vraie question n'est pas de savoir si les petits salariés pourront encore faire des heures supplémentaires comme avant, mais elle est de savoir si notre société accepte que certains salariés soient obligés de travailler plus que la moyenne pour gagner décemment leur vie. Nous, socialistes, ne pouvons l'accepter.

    Pour que la revalorisation des salaires soit possible sans remettre en cause la productivité des entreprises et le financement de la sécurité sociale, des marges de manœuvre financières doivent être dégagées pour les entreprises de main d'œuvre.

    C'est pourquoi nous réclamons depuis longtemps déjà que les cotisations patronales soient assises non plus sur les seuls salaires, mais sur l'ensemble des éléments de la valeur ajoutée. Cette réforme a un autre avantage : celui d'étendre les ressources de la sécurité sociale au-delà des prélèvements sur les seuls salaires. Nous l'avons déjà fait avec le gouvernement Jospin pour les cotisations salariales ; nous devons le proposer pour les cotisations patronales.

Améliorer les conditions de travail

    Au-delà de la rémunération, l'intérêt que le salarié peut trouver à son travail et les conditions dans lesquelles il l'effectue, sont déterminants.

    Comment se sentir impliqué, à quoi bon s'investir et se former quand on ne sait pas de quoi demain sera fait, quand on ne peut pas faire de projets pour l'avenir parce que la précarité est trop grande ?

    Beaucoup trop d'entreprises ont encore recours aux CDD et à l'intérim dans des proportions sans rapport avec leurs besoins économiques. C'est pourquoi le PS doit défendre une réforme du calcul des cotisations patronales qui permette justement de mieux tenir compte du taux de CDD et d'intérimaires dans les entreprises.

    A quoi bon aussi s'investir et se former si les tâches sont peu valorisantes et de plus en plus stressantes ? Car l'intérêt du travail, c'est bien sûr la manière dont il permet de vivre en apportant de la sécurité, de l'argent, du temps... mais c'est aussi la valorisation de soi qu'il permet.

    Le PS doit reprendre le combat pour l'amélioration de la qualité du travail. La gauche s'est toujours mobilisée contre les mauvaises conditions physiques de travail ; elle doit continuer et élargir ses revendications au contenu et à l'intérêt des tâches. Chacun sait le stress qu'entraînent les tâches répétitives et non valorisantes qu'on demande à de plus en plus de salariés, au-delà même des seuls emplois d'exécution. Le PS doit se battre pour une organisation du travail qualifiante qui reconnaisse les compétences, l'expérience, les capacités d'innovation et d'imagination des salariés. La Gauche doit être aux côtés de tous ceux qui se mobilisent pour retrouver l'entreprise "entreprenante", celle qui fait en sorte de valoriser la production de richesses et qui redonne tout son sens au travail pour les cadres comme pour l'ensemble du personnel.

    Par ailleurs le PS doit militer pour que chaque salarié, qu'il soit ouvrier ou cadre, homme ou femme, employé d'une PME ou d'une grande entreprise, peu qualifié ou diplômé, puisse se préparer aux nouveaux besoins de son entreprise ou du marché du travail, mais puisse aussi s'épanouir davantage dans son emploi et progresser dans son parcours professionnel. D'où la nécessité de défendre la création d'un droit à la formation tout au long de la vie. La valorisation des acquis professionnels doit être intégrée à ce processus de formation continue.

    Un bon emploi pour chacun donc, mais aussi un travail pour tous.

Le combat pour l'emploi reste au cœur de l'engagement des socialistes

    Se battre pour l'emploi, c'est d'abord garantir la bonne santé de notre économie. Cela passe par une politique économique au service de la croissance et fondée sur la consommation comme par des politiques sectorielles adaptées (agriculture, industrie, services, innovation et recherche, création d'entreprises, économie sociale et solidaire...).

    Seulement, cela ne suffit pas ! Se battre pour l'emploi, c'est aussi prendre des mesures de soutien aux chômeurs et des mesures de protection pour les travailleurs, comme nous l'avons fait de 1997 à 2002. Or aujourd'hui ces dispositifs innovants sont mis en pièce par le gouvernement. Les emplois-jeunes et TRACE vont faire long feu, les CES-CEC sont réduits à la portion congrue, le PARE est financièrement menacé comme nous l'avions craint lorsque nous avions refusé au départ de reconnaître un accord UNEDIC qui faisait la part trop belle aux baisses de cotisations patronales. Nous avions prévu un déficit du régime à court terme avec des conséquences directes sur les indemnisations des chômeurs et les cotisations des salariés : c'est ce qui arrive maintenant...

    Quelle que soit l'évolution de la situation économique, nous restons convaincus, pour l'avenir, de la pertinence des moyens mis en œuvre jusqu'ici. Le chômage ne baissera durablement que si sont ouvertes, en même temps, toutes les pistes de retour à l'emploi. Nous avons bien fait d'engager cette grande réforme de société que constitue les 35 heures, pour l'emploi, pour l'amélioration des conditions de vie et de travail. Qui a pu imaginer qu'une réforme d'une telle ampleur qui touche à la fois ce que chacun à de plus personnel - le temps - au rapport d'organisation et de pouvoir dans l'entreprise, et au débat sur le financement de la création d'emploi, aurait pu se faire sans aucune difficulté. L'honneur du politique c'est de ne pas renoncer quand l'objectif est bon, il est aussi de savoir s'adapter aux réalités. C'est ce que nous avons fait, et que nous aurions continué à faire. Nous avons de surcroît la certitude que les Français se sont aujourd'hui appropriés les 35 heures, et qu'ils sauront les défendre.

    Il faudra continuer de s'intéresser de manière différenciée à ceux qui arrivent pour la première fois sur le marché du travail (les jeunes, les femmes...), à ceux qui en sont sortis depuis trop longtemps (exclus, chômeurs de longue durée) et à ceux que les employeurs ignorent pour d'autres raisons (travailleurs de plus de 50 ans, travailleurs mal formés aux nouvelles techniques...). Dès aujourd'hui, le PS doit réaffirmer sa volonté de lutter contre l'exclusion du travail par tous les moyens.

    Enfin, toute politique sérieuse pour l'emploi doit intégrer la protection et l'accompagnement social des licenciements. Nous rétablirons l'obligation de négocier la réduction du temps de travail avant tout plan de licenciements. Nous nous battrons pour la création d'un fonds structurel européen destiné à aider les salariés des entreprises qui délocalisent.

    Le combat pour le plein emploi et des emplois de qualité doit être au cœur de la lutte contre les inégalités, ambition majeur et historique des socialistes. Cette égalité des chances que nous recherchons ne peut être obtenue qu'avec un Etat et des services publics forts et efficaces.

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II/ Démocratiser la République

 
Pour faire rimer Egalité et Liberté, aspirations individuelles et projet collectif, animation et régulation par l'Etat et participation des citoyens, il nous faut continuer à démocratiser la République :
     Un Etat et des services publics efficaces et modernisés
     Des institutions démocratisées au niveau national comme au niveau local
     Une société plus participative

Un État et des services publics efficaces et modernisés

    Être socialiste, c'est s'engager pour une société où soient garanties l'égalité des chances et la cohésion sociale, ferments du contrat social républicain. Pour nous, les services publics sont les principaux outils de ce contrat social républicain, pour établir l'égalité républicaine entre tous les citoyens et entre les territoires. Or notre société a changé et les réponses uniformes de nos services publics ne correspondent plus aux besoins éclatés et multiples des citoyens.

    Chaque jour, les agents des services publics sont confrontés à des demandes plus fortes, plus personnalisées. Les citoyens et les usagers ne réclament pas seulement l'application mécanique de la loi et des règlements ni même la prestation d'un service standardisé. A l'école, il faut construire un projet éducatif pour les élèves en tenant compte de leur diversité, autant que leur transmettre un savoir. Dans les transports, il faut se soucier du confort et de la sécurité des passagers autant que relier les territoires. Aujourd'hui, la plupart des agents peinent à répondre à ces demandes. A la fin, découragés, certains baissent les bras et se découragent.

    C'est pourquoi le PS doit militer pour le renforcement et la rénovation du rôle de l'Etat et des services publics. Parce que la Gauche croit en l'Etat et aux services publics, elle ne peut accepter ni leur dénonciation permanente, ni l'immobilisme érigé en principe. Ainsi, la droite s'emploie constamment à assimiler les fonctionnaires à de la mauvaise graine, à opposer les salariés du secteur privé aux agents publics. Nous avons toujours dénoncé les procédés. Pour autant, l'immobilisme ne convient pas davantage car il ne protège pas l'Etat et ne satisfait pas davantage les agents qui le servent. Il faut comprendre que ce qui menace vraiment l'Etat, ce sont bien sûr les politiques libérales qui visent à le priver de moyens, mais c'est aussi une certaine forme de statu quo.

    La position du PS doit s'articuler autour de six grands principes :
       Un État fort de son autorité, modernisé, efficace, régulateur, protecteur et non un Etat résiduel, minimaliste tel que le propose la Droite. Cette action de l'Etat renouvelé doit s'appuyer sur une réelle décentralisation et une forte déconcentration.

       Une décentralisation qui clarifie le rôle de l'Etat et des différentes collectivités locales, qui améliore par la proximité l'efficacité de l'action publique, et qui accroît la démocratie. A l'inverse, les socialistes ne peuvent que s'opposer à une décentralisation à la carte qui, sous prétexte d'expérimentation, remet en cause l'égalité républicaine, ne clarifie pas les missions de chacun, n'affiche pas le principe et les modalités d'une péréquation fiscale forte. Nous voulons une décentralisation républicaine et démocratique.

       Une déconcentration des services publics, qui, en gardant les mêmes ambitions pour tous, donne les moyens de la réussite à chacun. A l'école par exemple, les programmes, les diplômes, les statuts des personnels doivent être les mêmes pour tous, mais les établissements et les enseignants doivent bénéficier d'une plus grande autonomie pour trouver les organisations et les pédagogies adaptées à chaque élève et soutenir efficacement ceux qui en ont besoin. Les agents des services publics doivent devenir des acteurs innovants, plus autonomes, pour répondre aux attentes de chacun et retrouver la fierté de leur métier. Pour cela, ils doivent aussi être mieux reconnus.

       Des agents exemplaires, dont le comportement mais aussi le traitement doit être à la hauteur de l'enjeu quand l'Etat est le premier employeur de France. La fonction publique doit par exemple offrir plus d'égalité dans le déroulement de carrière des différents agents. La négociation doit permettre d'avancer.

       Des entreprises clairement dédiées au service public.

      Qu'il s'agisse des entreprises publiques ou des entreprises gérant un service public, la clarté s'impose. Ce qui doit nous importer à nous socialistes, c'est d'abord la qualité du service rendu à tous et au moindre coût pour chacun.

      Nos grandes entreprises publiques ont besoin des fonds publics pour garantir les investissements lourds amortissables sur le long terme. Les contre-exemples du rail et de l'hôpital britanniques sont de ce point de vue éloquents. D'où l'importance pour l'Etat d'avoir la maîtrise du capital dans de grandes entreprises comme EDF par exemple. L'ouverture du capital d'une entreprise publique ne doit être envisagée que si elle est indispensable à la poursuite de son développement ou à la conclusion d'alliances et si, et seulement si, l'Etat en garde in fine le contrôle.

      Mais, dans notre débat, la question du fonctionnement des entreprises gestionnaires d'un service public ne peut aujourd'hui se limiter à la question de la propriété de leur capital.

      Est-il en effet normal que France Télécom et La Poste, dont le capital est pourtant composé différemment, réduisent l'une comme l'autre le service de proximité qu'elles rendent et ferment des bureaux dans certaines zones de notre territoire ? Est-il normal que les entreprises du secteur de l'eau, certes privées mais en même temps gestionnaires du service public, n'aient pas à respecter certaines conditions comme l'uniformisation des tarifs ou la généralisation de la qualité ?

      Au nom du service public, le PS doit s'engager pour que de nouveaux rapports, régis par la loi, soient établis entre l'Etat et les entreprises... Il doit être audacieux et ferme sur l'inscription dans la loi d'obligations de services publics qui ont nom : égalité d'accès, non-discrimination, péréquation tarifaire.

       Des moyens appropriés et bien gérés pour l'Etat et les services publics.

      Il faut évidemment donner aux services publics les moyens nécessaires à leurs missions par une bonne appréciation des besoins.

      Il faut aussi veiller à ce que l'argent des contribuables soit bien dépensé et faire des efforts dans la transparence, la gestion et l'évaluation.

      Il faut enfin rappeler que la contrepartie des services publics, c'est l'impôt. Ce qui compte pour les citoyens, c'est que leur contribution au fonctionnement de l'Etat et des services publics reste raisonnable mais aussi qu'ils en aient pour leur argent ! C'est dans ce contexte que se situe le débat sur la baisse des impôts. Les réformes fiscales, comme les baisses d'impôts lorsqu'elles s'avèrent possibles en fonction du contexte économique, et lorsque les missions du service public sont remplies, doivent avoir comme critère dominant : la justice. C'est vrai de la fiscalité nationale, comme de la fiscalité. C'est la justice qui doit éclairer notre choix de réforme.

Des institutions toujours plus démocratiques

    " Le socialisme c'est la démocratie jusqu'au bout " disait Jaurès.

    Il est temps que le PS propose un changement profond de nos institutions parce que c'est un élément essentiel de la rénovation de la démocratie politique française. Cette démocratie est incontestablement en crise. Les citoyens cultivent le sentiment que ni les élus, ni les institutions ne les représentent plus correctement. Plus grave, ils jugent, à tort ou à raison, que les élections pour lesquelles on sollicite leurs suffrages ne concernent plus forcément les lieux où s'exerce le vrai pouvoir, celui de peser concrètement et efficacement sur nos destinées collectives.

    En effet, de quel poids pèsent leurs suffrages au moment où les marchés financiers s'effondrent ? De quel poids pèsent leurs suffrages contre les délocalisations ? De quel poids pèsent leurs suffrages quand l'Union Européenne décide de fixer l'âge de la retraite à 63 ans ? De quel poids pèsent leurs suffrages quand l'Union Européenne détourne les yeux de la Tchétchénie ? De quel poids pèsent leurs suffrages devant la concentration de plus en plus exorbitante des pouvoirs au sein des médias et de la presse ?

    Qu'il s'agisse de la décentralisation, de la construction de l'Europe politique et sociale, de l'entreprise ou de la réforme de nos institutions, il faut renforcer partout l'intervention citoyenne, multiplier les contre-pouvoirs, obliger à la transparence des décisions, extraire les uns de la gangue technocratique, les autres de la dictature de la rentabilité à court terme des actionnaires.

    Il doit défendre la construction d'une véritable démocratie parlementaire autour d'un certain nombre de réformes constitutionnelles. Il est nécessaire de rééquilibrer la démocratie politique française en renforçant les pouvoirs du Premier Ministre, en revitalisant le Parlement par une capacité accrue d'initiative législative, mais aussi de contrôle de l'exécutif grâce notamment à une plus grande capacité d'initiative et d'enquête. De plus, pour rendre nos institutions plus démocratiques, il est nécessaire de réformer le Sénat, d'engager la réforme du Conseil Constitutionnel et de poursuivre la réforme du non cumul des mandats.

    Une société plus participative

       Le Parti socialiste doit défendre l'émergence d'une réelle démocratie sociale, notamment fondée sur la représentativité des syndicats et la validité des accords signés. Le PS doit continuer de soutenir le principe de l'accord majoritaire.

       Il doit défendre la clarification de qui fait quoi localement, et revendiquer pour les collectivités locales des moyens financiers adaptés à leurs charges assortis d'une large péréquation. La clarification doit inclure, compte tenu du poids grandissant des structures intercommunales dans les décisions et les finances locales, l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.

    Parce que la démocratie, c'est aussi faciliter l'engagement de chacun dans la vie de sa cité, le PS doit s'engager et se battre pour généraliser les conseils de quartiers munis de pouvoirs et de moyens propres, pour étendre les forums citoyens, lieux d'échange et de débats sur des sujets qui les intéressent directement...

    Enfin le PS doit défendre une vision de la démocratie où soit davantage suscité l'engagement dans les associations ou les syndicats.

    Plus largement, le PS doit œuvrer pour que la décision politique rapproche le "temps citoyen", qui est le temps d'une société où tout va de plus en plus vite, et le "temps politique" qui demande réflexion, confrontation et explication. Il doit donc expérimenter et participer à l'invention d'autres pratiques, notamment administratives, d'autres canaux de transmission de la décision qui permettront aux citoyens d'avoir la concrétisation rapide sur le terrain des décisions annoncées.

    Notre idéal socialiste est une République citoyenne, autrement dit une société faite de droits et de devoirs qui puisse réconcilier l'émancipation de chacun et le projet collectif.

    Reconstruire le lien entre l'individu et le collectif, entre le citoyen et la nation, c'est reconstruire le pacte républicain. La République est un projet collectif où des femmes et des hommes, le peuple, peuvent vivre ensemble et former la Nation, en y ayant des droits mais aussi des devoirs. Il nous faut reconstruire la République. C'est une prise de conscience importante pour la Gauche qui s'est toujours battue pour les droits individuels et collectifs et, peut-être pas assez pour les devoirs du citoyen à l'égard de la société. Or, l'équilibre entre les droits et les devoirs est essentiel dans le pacte républicain.

    Reconstruire la République citoyenne, c'est affirmer des droits dans l'esprit du combat historique de la Gauche contre les inégalités, car pour nous socialistes il n'y a pas de liberté sans égalité. C'est chercher l'émancipation de chacun dans le respect des règles et des autres. C'est mobiliser les Français autour d'un projet collectif fondé sur la responsabilité et la laïcité. Reconstruire une société de droits et de devoirs, c'est retrouver une société où chacun est et se sent citoyen à part entière.

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III/ Pour des citoyens
à part entiere :
l'égalité des chances,
notre ambition première

 
Être citoyen à part entière, c'est bénéficier d'une égalité des chances et avoir accès comme tout le monde aux droits fondamentaux (école, logement, sécurité, santé...).

La persistance, et quelque fois même le creusement des inégalités, provoquent non plus des réflexes collectifs de lutte et de solidarité, comme à d'autres époques, mais au contraire des réflexes de repli sur soi et de rejet de l'autre. L'abandon de toute référence idéologique dans les discours politiques laisse aujourd'hui la place à un pragmatisme de tous les instants qui débouche sur la recherche exclusive d'une solution immédiate et locale à tous les problèmes. Cette évolution contribue à plonger les citoyens dans un apolitisme qui les amène à douter de toute réponse collective à leurs difficultés et à refuser de croire à tout projet de société à long terme. C'est l'efficacité de l'action politique elle-même qui est alors contestée. Aux yeux de beaucoup, la recherche de la réussite et de la débrouille individuelles serait devenue une valeur en soi, rejetant avec brutalité toute notion de solidarité.

C'est pourquoi, il est urgent de redonner corps au contrat social républicain. Concrètement cela signifie que chacun, quelque soit son origine, son milieu social, sa culture, son handicap... ait accès aux droits fondamentaux de notre République. Le plus essentiel de ces droits, c'est le droit à l'éducation, car l'école est le premier lieu à la fois d'émancipation personnelle et d'apprentissage du " vivre ensemble ".

Éducation : remettre l'égalité et le jeune au centre de notre projet de société

    La gauche n'a pas a rougir de son bilan pour l'Ecole. De la Loi d'Orientation de 1989 à la création des cours d'Education Civique, Juridique et Sociale ou des Travaux Personnalisés Encadrés, en passant par un budget prioritaire pour la nation, les socialistes ont montré l'importance qu'ils accordaient à l'école. Et pourtant ! Nous ne pouvons nous satisfaire d'une situation scolaire où tant de jeunes sortent de l'école obligatoire sans qualification, et donc sans réelle chance sur le marché du travail. Les phénomènes de violence à l'école ne peuvent plus être le lot quotidien d'enseignants qui semblent découragés d'un système fait de lourdeurs et de lenteurs.

    Face à cela, c'est au PS aujourd'hui de remettre l'école au cœur de son projet. Ce sont les fondements mêmes de la démocratie qui sont à consolider au travers de notre service public d'éducation. " Ouvrir une école, c'est fermer une prison " : ce message de Victor Hugo est plus que jamais d'actualité face à l'action du gouvernement actuel.

    Parce qu'elle croit que le progrès social repose sur le progrès humain et qu'elle sait que les avancées collectives sont le fruit du travail de chacun et de la capacité à appréhender son destin, la gauche s'est toujours identifiée au combat pour l'Education. L'égalité devant le savoir et la culture constitue donc une des valeurs de la République et du socialisme. La droite a sans cesse tenté de conserver le privilège du savoir pour l'élite sociale.

    Aujourd'hui, en France, sous prétexte des difficultés réelles rencontrées par l'école pour passer de la massification de l'enseignement à la démocratisation, et tirant argument des conditions souvent difficiles d'enseignement dans les écoles, les lycées et surtout les collèges qui accueillent tous les enfants dans leur diversité, la droite veut remettre en cause l'égalité des chances qui est un des fondements de l'école de la République. C'est ainsi que le gouvernement actuel veut réintroduire la sélection sociale dès la fin de la 5ème au collège, séparant dès l'âge de 12 ans les enfants qui auraient accès à la culture générale et ceux qui en seraient définitivement exclus.

    Il est évident que cette ségrégation dont les enfants des milieux défavorisés seraient les premières victimes, générerait la frustration et la révolte. Nul doute qu'une telle régression scolaire serait à l'origine d'une fracture scolaire, source de violence, d'intolérance et de repli sur soi. La vraie réponse aux difficultés que connaît l'école consiste à apporter à chaque collégien les méthodes pédagogiques appropriées à sa réussite. Car ce n'est pas le collège unique qui est en cause, mais les pédagogies abstraites et théoriques qui y sont pratiquées et qui excluent de fait bon nombre d'enfants. Autant nous sommes pour des approches et des parcours diversifiés, permettant de mener chaque jeune sur des chemins de réussite, autant nous sommes contre le retour à des filières étanches, sources de ségrégation.

    Dans le monde entier, des pays conservateurs et des partis politiques de droite veulent faire entrer l'éducation dans le secteur marchand. Ainsi, à l'école publique qui accueille de la même manière tous les enfants, quelles que soient les ressources de leurs parents, se substituerait une école marchande, où les plus riches pourraient acheter le savoir et la culture.

    Face à cette offensive idéologique de la droite en France, comme dans le monde, les socialistes ont le devoir de s'opposer à la " marchandisation " du savoir et de la culture, à la volonté de mettre en cause l'égalité des chances à l'école, et de proposer un projet éducatif qui mobilise les enseignants et les parents autour de la même exigence : permettre à chaque enfant d'aller jusqu'au bout de ses aptitudes.

    Il nous faut bâtir un projet éducatif :
       En redéfinissant les missions de l'école : socle de la formation tout au long de la vie, l'école obligatoire jusqu'à 16 ans doit permettre à tous les jeunes d'acquérir une culture générale commune dans le cadre de la laïcité, et le sens civique qui leur fera privilégier le dialogue à la violence. Le temps de l'éducation doit être repensé : il est plus que jamais nécessaire aujourd'hui de repenser la scolarité obligatoire pour l'ouvrir dès 2 ans et l'amener vers 18 ans ; il en est de même pour la formation continue qui doit impérativement être revue pour que chaque salarié ait un droit effectif au retour sur les bancs de l'école.

       En clarifiant son fonctionnement : le décloisonnement des classes, des disciplines, des horaires doit permettre aux enseignants d'appliquer aux élèves la pédagogie adaptée à la personnalité et au rythme d'acquisition de chacun. Ainsi, la pédagogie individualisée sera au service d'une même exigence pour tous, au collège comme dans les lycées qu'ils soient généraux ou professionnels.

       En plaçant le jeune au centre de tout dispositif d'éducation de la maternelle à l'Université ; dans une autre vision de la pédagogie.

       En recréant la démocratie dans la sphère éducative, car l'école est le premier lieu d'apprentissage des fondements de la citoyenneté.

    L'égalité des chances à l'école est vitale pour que chacun choisisse et réussisse sa vie mais aussi pour l'avenir d'une démocratie menacée par les communautarismes et le repli sur soi : c'est pourquoi l'éducation est une priorité majeure des socialistes. Une autre priorité doit être le logement qui détermine les conditions de vie de chacun.

Une nouvelle donne pour le logement et les conditions de vie

    Deux constats : premièrement la France souffre d'une crise du logement sans précédent qui empêche bon nombre de nos concitoyens de vivre dans des conditions décentes ; deuxièmement en France la ségrégation est plus forte que jamais et entraîne exclusions et violences. Le lieu où l'on vit détermine la façon dont on vit, dont on se forme, dont on travaille, dont on se soigne et même dont on meurt.

    Malgré les apports la politique de la ville depuis 20 ans, beaucoup de nos quartiers cumulent encore trop les difficultés : logements indécents, espaces publics dégradés, absence de services publics. Que la loi Solidarité et Renouvellement urbain ait été vidée de toute substance avec le retrait par la Droite de l'obligation des 20 % des logements sociaux dans les communes de plus de 50 000 habitants ne laisse malheureusement pas beaucoup d'espoir de changement.

    C'est pourquoi, avant toute chose et avec l'école, le PS doit clamer haut et fort que la priorité des dix prochaines années doit être de reconstruire la ville. Plusieurs centaines de quartiers sont à rebâtir. C'est un changement d'échelle qui est aujourd'hui exigé. La cohésion sociale et territoriale de la France, et donc la République, en dépendent.

    Tout doit être bousculé, les priorités budgétaires comme les pratiques administratives. On ne peut accepter plus longtemps que les programmes de démolition-reconstruction de logements s'étalent sur de nombreuses années alors que la construction du Stade de France n'a pris que quelques mois. Le PS doit se battre pour que soient construits des centaines de milliers de logements (au moins 400 000 logements sociaux sont nécessaires), pour que ceux qui sont vacants soient remis sur le marché, pour que soit amplifiée la lutte contre l'habitat insalubre, pour que soit créé un droit au logement universel... Tout cela doit être fait, et vite, pour donner un signal fort à tous ceux qui se sentent aujourd'hui mis au ban de notre société.

Sécurité : parler vrai, agir juste et efficace

    Oui, la sécurité est un droit comme les autres, au même titre que le droit à l'éducation, à la santé ou au logement.

    Oui, il faut savoir sanctionner tout délitde manière juste et rapide et parfois lourdement. Nous ne devons pas craindre de défendre en parallèle la prévention, quand on sait que l'accompagnement des adultes dans leur fonction parentale ou le soutien psychologique apporté à des enfants déjà déstructurés sont par exemple des conditions pour éviter que ne se développent demain des violences plus dures encore.

    Chacun a droit à la tranquillité dans sa vie quotidienne. A pouvoir vivre sereinement dans la cité. La tranquillité publique et la sécurité doivent être la même partout, pour tous. C'est là une véritable mission de service public.

    La sécurité est aussi l'affaire de tous : élus, représentants de l'Etat, policiers, magistrats, éducateurs, enseignements, responsables associatifs, parents. L'action doit être continue et globale.

    Tout acte de délinquance ou d'incivilité, quel qu'il soit, doit entraîner une sanction rapide, juste et proportionnée. Cette réponse doit être apportée en toute circonstance, et aucun de ces actes ne doit rester impuni. Notre démarche en faveur de la sécurité pour tous nécessite : une approche globale, qui va de la prévention à la sanction : c'est la condition de l'efficacité. Elle doit entraîner un travail qui va de la famille, et de l'école jusqu'au retrait des jeunes récidivistes des quartiers, et aux peines les plus lourdes. Elle requière un travail partenarial entre tous ceux qui ont entre leurs mains une partie des informations, une partie des compétences et donc une partie de la solution.

    Il nous faut agir ensemble dans le cadre d'objectifs partagés et d'une action coordonnée.

    Faire de certaines catégories de la population ( jeunes des cités, prostitués, mendiants, gens du voyage) des boucs-émissaires, en menant une politique de stigmatisation, n'est rien d'autre qu'un acte de démagogie sécuritaire voué à l'échec. Au contraire il nous faut travailler dans la durée, par une action qui nécessité le sérieux, le suivi, et qui engage la responsabilité de chacun. L'action actuelle du gouvernement ne s'inscrit pas dans cette durée, elle préfère utiliser la démagogie et les caméras en donnant l'impression que l'on peut tout régler tout de suite alors même que ce travail appelle une action de tous y compris de nos concitoyens.

Santé, retraites : assurer le présent et bien préparer l'avenir

    Le système de santé français est considéré comme le meilleur du monde. Un rapport de l'Organisation Mondiale de la Santé l'a encore rappelé récemment. Notre niveau d'excellence repose sur la qualité de notre corps médical, l'efficacité de la prise en charge des patients, et l'engagement des pouvoirs publics.

    Mais, au-delà de cette performance globale, et même si la couverture maladie universelle a constitué un progrès considérable des inégalités perdurent, notamment entre les territoires et entre les services.

    Parce que la santé est un droit fondamental et une préoccupation essentielle pour chaque Français, le PS doit militer pour que la performance de notre système soit maintenue et qu'en même temps les inégalités soient réduites. A cet égard, la suppression de l'aide médicale d'Etat pour les étrangers est honteuse et indigne de notre pays.

    La santé est non seulement un droit fondamental, mais surtout un "bien premier". Le maintien et l'amélioration de notre système de soins est une responsabilité majeure pour les socialistes. Cela nécessite un débat non seulement avec les organisations mais aussi avec les professionnels de la santé en traitant des problèmes tels que, le rôle de l'Etat et du paritarisme, la démographie médicale et l'évolution des métiers de la santé.

    A l'Etat il revient de définir les grands principes (prix des médicaments, couverture, taux de remboursement...) et de faire émerger les priorités de santé publique. C'est à lui de protéger les plus faibles, de lutter contre les inégalités et de redonner à chaque malade sa pleine place. La région est le niveau pertinent d'action où nous proposons la mise en place des agences régionales de santé

    Quant à notre système de retraite, même s'il n'a pas aujourd'hui à rougir de ses prestations, son avenir reste incertain tant qu'il n'aura pas été adapté à la donne démographique et sociale de demain. Disons-le nettement : nous avons trop tardé à entreprendre une réforme dont le plus grand nombre a pourtant intégré la nécessité. Les socialistes doivent s'exprimer clairement pour défendre leurs convictions.

    Pour préserver l'égalité et la solidarité, à nous donc d'être offensifs et clairs dans nos propositions sur les retraites. D'abord, le système par répartition doit être sauvegardé pour assurer la solidarité entre les générations et entre les catégories socioprofessionnelles. Cela signifie que le PS doit s'opposer fermement à toute tentative de privatisation et de capitalisation des retraites. Ensuite, le droit à la retraite à 60 ans ainsi que le niveau général des pensions doivent être maintenus. Ces deux objectifs supposent que des moyens supplémentaires soient trouvés compte tenu de la réalité démographique et économique. Des moyens supplémentaires doivent être apportés par l'Etat aux fonds de réserve des retraites créé par le gouvernement Jospin. Les entreprises et les salariés doivent en discuter lors des négociations nécessaires sur les retraites. Des adaptations doivent être réalisées dans le cadre de règles collectives fixées par la Loi ou par la négociation. Des avantages doivent être accordées en terme d'âge ou de niveau de retraite à ceux qui ont commencé à travailler tôt ou sur des emplois pénibles. Nous devons aussi prendre en compte l'aspiration de nos concitoyens à une plus grande liberté de choix quant aux modalités de départ à la retraite.

    Que les socialistes fassent œuvre de pédagogie quand la Droite fait preuve de simplisme, qu'ils fassent œuvre de solidarité quand la Droite fait preuve de démagogie, qu'ils fassent œuvre de transparence quand la Droite fait preuve de précipitation !

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IV/ Des citoyens à part entiere :
acteurs d'un projet collectif

 

Être citoyen à part entière, c'est être intégré dans la République laïque

    L'espace public laïc a été largement abandonné au profit d'espaces privés qui créent eux-mêmes leurs droits. Aujourd'hui, nous socialistes avons devant nous la possibilité de tirer la leçon de ce que nous n'avons pas su faire. La Gauche doit reprendre à son compte le combat pour la laïcité de l'Etat, du droit, de l'éthique et de la culture. La laïcité doit redevenir une valeur républicaine rayonnante, qui en même temps qu'elle protège une liberté individuelle essentielle - la liberté de conscience - est la clef permettant d'ouvrir la porte d'une société où chacun sait vivre avec ses différences, dans le respect de l'autre. Cela vaut aussi au plan européen.

    Etre un citoyen à part entière, c'est être respecté par la République et donc être reconnu quel que soit son sexe, son orientation sexuelle, son origine, sa culture ou sa religion.

    La République doit poursuivre le combat pour la parité qui a été engagé pour mieux passer de la loi aux faits, notamment dans la vie publique et dans les entreprises.

    Elle doit mieux reconnaître les droits des handicapés, en leur donnant enfin une place dans la société et une accessibilité réelle à l'école, à la ville, au travail et aux établissements spécifiques.

    Elle doit aussi affirmer clairement les droits des étrangers pour lesquels nous avons tant hésité. Comment ne pas regretter que, malgré de nombreuses discussions et les déclarations dans nos textes, nous n'ayons pas eu le courage de donner aux étrangers le droit de vote aux élections locales, de supprimer la double peine ou d'ouvrir plus d'emplois qui leurs sont aujourd'hui fermés... Comment ne pas regretter aussi que la France de gauche n'ait pas su se démarquer en matière de droit d'asile, en traitant mieux les demandeurs et en leur accordant à nouveau le droit de travailler... Combien de fois n'avons nous pas entendu que tout cela n'était pas possible sans risque de faire monter l'extrême droite ! Le 21 avril 2002 a démontré le contraire.

    Et enfin la jeunesse. Notre projet socialiste était clair en la matière, mais nous ne l'avons pas suffisamment défendu. Au lieu de montrer les jeunes du doigt comme violents ou délinquants, il faut passer avec eux un véritable pacte de confiance : en les accompagnant dans leur parcours de formation vers le travail grâce à un vrai contrat d'autonomie, mais aussi en s'adressant autrement à eux. Ils ne sont pas seulement de futurs producteurs ou consommateurs. Ils sont aussi porteurs de cultures et de modes de vie que nous devons reconnaître. Les jeunes générations défendent plus que d'autres les valeurs d'humanisme et de générosité. Elles sont une chance pour nos sociétés.

Être citoyen à part entière, c'est pouvoir accéder à la culture

    La culture doit être un moyen d'ouverture de notre société vers les autres, c'est l'accès partagé à l'émotion, au beau, à l'imagination mais aussi l'apprentissage et le respect des différences, la communion et le partage avec les autres. Face aux menaces du libéralisme, à la logique du tout-marchand, aux tendances hégémoniques de quelques grands groupes et au risque d'uniformisation, le PS doit exercer une vigilance de tous les instants pour protéger et promouvoir l'originalité de la culture et de la création.

    Pour ce faire, le PS doit être en permanence à l'écoute des mouvements culturels et artistiques et soutenir le développement des pratiques et des équipements culturels qui permettent la création et la diffusion des différentes formes d'art, des plus classiques aux plus nouvelles.

    Mais pour encourager un rapport actif à la culture, il ne suffit pas d'en faciliter et d'en démocratiser l'accès. Le PS doit aussi être à la pointe d'un nouveau défi : refaire du service public le fer de lance de la culture et de l'information.

    Quand on sait que la très grande majorité des Français ne s'informe et ne se divertit que par le biais de la télévision, il faut reconnaître que, malgré les efforts évidents faits ici ou là, elle est loin d'être à la hauteur des enjeux. Il est temps pour le service public de l'audiovisuel de tourner le dos à la facilité et d'assumer pleinement ses missions : information pluraliste et exigeante, magazines et documentaires objectifs et éducatifs à des heures de grande écoute, fictions de qualité, divertissements qui font appel au cœur et à la sensibilité du téléspectateur plutôt qu'aux instincts les plus égoïstes ou même les plus vils que chacun de nous a au fond de soi. Il n'est évidemment pas question de revenir aux pratiques anciennes de l'ORTF : il s'agit simplement de faire en sorte que l'argent public qui sert à financer la télévision publique soit utilisé à meilleur escient et dans le respect des principes humanistes et républicains qui sont ceux de la France.

Être citoyen à part entière, , c'est aussi remplir ses devoirs, c'est-à-dire respecter les règles de la société et respecter les autres

    La politique est entrée dans l'ère du consumérisme. Aujourd'hui, de plus en plus de citoyens perdent leurs repères, " consommant " du politique comme n'importe quel produit disponible sur le marché, et pratiquant le zapping électoral. Chacun a tendance à attendre tout de l'autre et particulièrement de la collectivité nationale. Cela se traduit par une perte de l'intérêt général et du sens collectif qui s'exprime dans un individualisme et un corporatisme exacerbés. Les politiques accompagnent même ce comportement en cherchant à satisfaire les demandes catégorielles, pour acheter une paix " sociale ", parfois au prix du renoncement à leurs idéaux.

    C'est à la gauche et au PS de redire que la citoyenneté ne peut être uniquement fondée sur l'avoir mais aussi sur le devoir. Plaçons nos concitoyens devant leurs responsabilités : disons leur clairement qu'ils ne peuvent pas tout attendre de la seule action publique et considérer de manière passive leur citoyenneté. La somme des demandes individuelles n'a jamais fait l'intérêt général. Chacun doit s'impliquer et apporter sa pierre à l'édifice citoyen. A chacun de faire preuve de civisme pour que les règles soient mieux respectées, de responsabilité, de solidarité ou de générosité vis-à-vis de son voisinage comme à l'égard de ceux qui souffrent dans le monde.

    Reconstruire la citoyenneté, c'est agir concrètement pour faire vivre cette République des droits et des devoirs. Les socialistes doivent s'engager collectivement à devenir ces militants de la République des droits et des devoirs. A eux de prendre les devants et de proposer la création d'un service civil de solidarité, ouvert à tous les jeunes (apprentis, étudiants, salariés, chômeurs) qui veulent s'engager à temps plein pendant 6 ou 9 mois au profit de leurs concitoyens.

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V/ Un autre monde est possible

 
Même si nous ne le savons pas, nous sommes tous des citoyens du monde. Et ce monde, nous le voulons juste, organisé, doté et respectueux de règles, car la crise que connaissent les sociétés développées est aussi l'expression de la perte de repères dans un monde menacé et menaçant.

Alors être internationaliste aujourd'hui, c'est penser et définir les instruments d'une politique à l'échelle internationale, pour rendre possible la régulation sans laquelle règne l'anarchie, et pour poser les fondements d'un monde nouveau, plus juste.

Plusieurs réalités ou menaces freinent à ce jour la construction de ce monde.

La menace de la guerre et du terrorisme.
Il nous faut instaurer de nouvelles règles de prévention et de règlement des conflits pour garantir durablement la paix dans le monde. Mais comment avancer quand le pays le plus puissant bafoue les principes du droit international pour organisation la prison de Guantanamo, ou quand il veut s'exonérer de l'action de l'ONU pour faire la guerre à l'Irak ?

La menace liée aux désordres induits par le nouveau capitalisme, transnational et essentiellement financier.
Il nous faut réfléchir au respect des règles de saine gestion par les dirigeants, à la protection des travailleurs et aux migrations internationales, à réglementer encore mieux le commerce et la concurrence tout en rééquilibrant la place des normes sociales et environnementales dans la hiérarchie internationale, réfléchir à une réelle architecture financière mondiale et à organiser le commerce électronique et les règles de la propriété intellectuelle.

La menace de la pauvreté.
On ne peut regarder plus longtemps tout un continent, l'Afrique, s'enfoncer chaque jour un peu plus dans la misère et compter ses morts de faim ou du Sida. Comme humanistes et comme socialistes, nous devons nous attaquer aux causes du mal : il est temps pour les pays développés d'admettre que les pays du sud entrent pleinement dans le jeu et retrouvent la maîtrise de leur développement.

La menace de l'uniformisation.
La mondialisation sera un vrai progrès si elle combat l'uniformisation culturelle, celle des modes de consommation et de production, et si elle respecte la diversité, la diversité culturelle. La mondialisation sera une réussite si elle respecte les différences et si elle s'en enrichit. Les socialistes ont le devoir d'être les militants de la diversité du monde.

La menace environnementale : la préservation et la valorisation de l'environnement requièrent l'action de tous. Notre responsabilité est engagée car de notre action d'aujourd'hui dépend l'avenir des générations futures. Le combat majeur est celui de la préservation des biens collectifs mondiaux (air, eau...) et de permettre l'accès de tous aux biens publics essentiels (eau, santé, éducation). Les socialistes sont écologistes !

Toutes ces menaces sont globales. Pour les conjurer, le changement doit donc être global et porter à la fois sur le fonctionnement des instances politiques internationales, sur l'impact des décisions internationales, sur la pertinence de l'action des Etats et des ensembles intégrés, en un mot sur une autre conception de l'organisation mondiale.

Avec ces menaces, se posent à nous, socialistes, le débat sur la globalisation libérale. Oui, comme socialistes, nous sommes tous des militants de la mondialisation, des militants internationalistes. Mais nous sommes des opposants à la globalisation libérale, c'est-à-dire au laisser-faire, laisser-aller. Pour contrer cette globalisation, et mener à bien ce combat pour construire un monde plus juste et plus solidaire, qui respecte les différences, nous devons, par des propositions concrètes et des initiatives collectives, en finir avec l'idée d'impuissance si répandue aujourd'hui chez les citoyens, et chez certains décideurs. Oui, il est possible de mettre en place une réelle régulation économique et financière.

Nous socialistes devons faire entendre notre voix et convaincre autour de nous que le monde peut aller mieux. Nous devons, pour cela, défendre fortement nos positions :
     Les instances politiques internationales doivent être profondément réformées. Le conseil de sécurité de l'ONU doit être revu, le système économique et financier doit être encadré et rééquilibré, les modes de règlement des conflits doivent être améliorés. Le rôle de l'Europe est ici majeur : les européens doivent se mettre d'accord pour renforcer leurs terrains d'influence et promouvoir la régulation.

     La hiérarchie des normes doit être rééquilibrée. Aujourd'hui dominée par les normes commerciales et financières, cette hiérarchie doit être changée en tenant compte des normes sociales et environnementales. On parle beaucoup de l'OMC et du FMI mais pas assez de l'OMS, de l'OIT et d'une agence mondiale de l'environnement qui reste à créer. La notion de biens publics mondiaux, représentatifs de l'intérêt général international, doit être valorisée au nom du développement durable que nous voulons pour notre planète.

     Le développement des pays pauvres doit devenir une priorité dans les faits. Les pays riches, et en premier lieu l'Europe, doivent enfin prendre à bras le corps la question du développement des pays du Sud. Ils doivent mettre en œuvre une meilleure répartition des ressources et des richesses, sans laquelle une grande part des menaces qui pèsent sur l'humanité ne pourront être éliminées.
Nous devons nous engager :
     Pour l'annulation totale de la dette des pays les plus pauvres

     Pour la mise en place de réelles politiques de développement passant par l'accès à l'éducation et à la santé pour laquelle un fonds mondial d'accès aux médicaments doit être créé.

     Pour une préservation et une répartition équilibrée des biens publics mondiaux.

     Pour la création d'une taxe mondiale dont les modalités doivent être largement et rapidement discutées pour assurer les divers besoins de financement.

Les pays du Sud doivent, par ailleurs, pouvoir accéder au système économique mondial ce qui suppose que soit garanti l'entrée de leurs produits aux marchés de biens ou services, mais aussi qu'ils puissent accéder aux marchés de capitaux et dans les échanges internationaux. Le PS appuie les initiatives prises pour que l'Europe ouvre plus largement ses marchés aux productions des pays du Sud. Des accords préférentiels pourraient être conclus avec les pays qui respectent les droits sociaux fondamentaux ou des normes de soutenabilité environnementale, et qui luttent contre toutes les formes de corruption.

Les pays les plus riches par leurs politiques protectionnistes et de subventions empêchent les pays tiers de se développer. C'est vrai des Etats-Unis comme de l'Europe. C'est la raison pour laquelle le PS doit prendre clairement position pour une réforme de la PAC. La PAC est nécessaire pour assurer le développement rural, facteur essentiel d'équilibre de nos sociétés. Mais aujourd'hui les aides liées à la PAC encouragent la surproduction et non la qualité, ce qui entraîne une réduction des prix du marché mondial et déstabilise les productions des pays du Sud. Or dans ces pays, l'agriculture représente une grande partie du PIB et plus de la moitié des emplois. A quoi sert de vouloir augmenter l'aide au développement des pays du Sud quand le montant des subventions accordées par les pays riches à leurs producteurs agricoles est six fois plus important ?

Au-delà des propositions et pour mieux les défendre, il est temps que les socialistes prennent des initiatives ou s'associent à d'autres pour lutter contre la globalisation libérale. Il est temps que notre organisation mène en tant que telle un débat amical et fraternel, mais sans concessions, avec les militants "anti-mondialisation". La lutte de bon nombre de ces organisations pour un internationalisme humaniste et contre une globalisation libérale est la nôtre ! Cessons d'être timides, rentrons dans la discussion et reprenons la tête du combat pour la paix et l'égalité devant le développement. Mais, parce que depuis longtemps nous avons le sens des responsabilités, faisons déboucher la mobilisation sur des réponses concrètes aux questions posées par la mondialisation actuelle. Il ne suffit pas de traiter les conséquences négatives du monde dans lequel nous vivons, mais il s'agit bien de construire un monde nouveau. Un monde nouveau dans lequel l'Europe doit jouer un rôle majeur, parce qu'elle est porteuse d'un modèle à vocation universelle, bâti autour de l'humanisme et de la capacité des hommes et des femmes à construire leur avenir commun.

L'Europe, notre avenir

    Les socialistes sont profondément engagés dans la construction européenne et doivent le rester. Mais ils doivent le rester les yeux ouverts et, pour cela, éviter deux écueils :

       La critique protestataire qui pousse à l'extrême, celle qui par exemple pourrait nous amener à combattre l'élargissement alors qu'il est une chance pour l'Europe, pour la paix et pour l'accès de tous au progrès social.

       L'eurobéatitude de ceux qui continuent à crier " l'Europe, l'Europe ! " comme si celle-ci était, en elle-même porteuse de bienfaits et, par leur technocratisme européen, nous éloigne du peuple, de ses angoisses et de ses attentes profondes.

    Il faut sortir de ce piège qui peut être fatal : l'Europe est une nécessité incontournable pour notre avenir... mais pas n'importe quelle Europe ! Souvenons-nous toujours des raisons qui ont motivé l'unification progressive de l'Europe : la paix, le sursaut économique, l'union politique. Elles restent pleinement valables, tant par ce qui a déjà été fait que par ce qu'il reste à faire, dans le contexte nouveau de la mondialisation. Souvenons-nous en dans la façon dont nous pensons l'Europe et dont nous en parlons.

    Faisons mieux qu'aujourd'hui en dépassant les débats institutionnels importants. Certes mais ceux-là masquent l'essentiel : quelle Europe voulons nous ? Faisons mieux en osant prendre nos responsabilités et en assumant, dans nos pays, les décisions politiques que nous prenons à Bruxelles plutôt que de nous réfugier, démagogiquement, derrière les "bureaucrates bruxellois".

    Et surtout portons au niveau européen les débats politiques majeurs qui sont les nôtres. Disons clairement que pour nous, l'Europe ce n'est pas sur la seule libre circulation des marchandises, des capitaux et des personnes. Osons dire que seule l'Europe peut nous permettre d'atteindre nos objectifs : la paix, le développement durable, le progrès social et la défense des droits de l'homme, le dialogue Nord-Sud.

    Il est temps de sortir de la méthode de l'Europe à petits pas pour retrouver l'ambition de ces objectifs initiaux. Seule une Europe fédérale nous permettra de les atteindre.

    Seule une Europe fédérale, organisant une défense et une sécurité européenne, nous permettra de gagner durablement le combat pour la paix sur notre continent et à nos frontières.

    Seule une Europe fédérale, dotée d'une Constitution et intégrant un Traité social européen, nous permettra de lutter contre cette pauvreté et cette insécurité économique et sociale qui continuent de sévir ici et chez nos voisins, qui menacent en même temps le modèle français, et qui nous éloignent doublement de l'idéal socialiste et internationaliste.

    Fédérale en certains domaines, l'Europe doit aussi consolider ses politiques communes dans d'autres domaines.

    Sans un gouvernement économique européen, l'euro ne contribuera ni à la croissance ni à soutenir l'emploi, ni au pouvoir d'influence de l'Europe.

    Sans des signaux forts donnés aux citoyens européens sur des sujets sensibles, l'Europe restera un monstre froid et lointain : pourquoi ne pas créer un fond structurel européen chargé d'accompagner les salariés licenciés à la suite de délocalisations, pourquoi ne pas lancer un vaste programme de recherche européen, sur le cancer, le sida ou la maladie d'Alzheimer ?

    A nous de militer pour une Europe de progrès, dont les moyens sont à la hauteur de nos espérances collectives. Défendons cette vision de l'Europe devant les Français mais aussi devant nos amis et voisins socialistes et sociaux-démocrates. Renforçons notamment notre volonté européenne au sein du PSE.

    A nous de militer aussi pour que l'histoire de l'Europe respecte sa géographie et pour que le cap de l'élargissement soit passé avec succès. L'élargissement à 27 est un nouveau tournant de l'unification de l'Europe. Il pose bien sûr les mêmes questions que les élargissements précédents (Espagne, Grèce, Portugal, Irlande etc.) mais avec plus d'acuité parce que l'Europe telle qu'elle fonctionne à 15 est visiblement essoufflée. Cet essoufflement nous oblige à franchir enfin le pas politique que nous avons tant tardé à prendre ces dernières années, en particulier quand l'Europe était plus rose que bleue...

    Oui, il faut accepter l'élargissement de l'Europe unie aux douze candidats des pays de l'Est parce qu'ils ont une histoire commune avec nous, qu'ils font géographiquement partie de l'Europe et que leurs cultures vont nous enrichir. C'est une grande chance pour la construction européenne.

    Ces pays ont fait depuis près de 10 ans, et à notre demande, des efforts considérables pour remplir nos conditions : aujourd'hui le devoir de solidarité s'impose à leur égard, pour le bien des peuples et la création d'un grand espace de paix, de sécurité et de solidarités. L'élargissement est avant tout la victoire d'un modèle politique, social et humain et d'un projet fondé sur la tolérance, l'ouverture, le sentiment d'une identité partagée.

    Nous voulons :

     Une Europe fédérale défendant sa vision de la paix et du développement durable.

     Une Europe fédérale faite d'une constitution et d'un traité social

     Une Europe qui continue à avancer plus vite dans d'autres domaines avec ceux des pays qui le souhaitent grâce à des coopérations renforcées ou à une avant-garde.

     Une Europe politique dotée d'un Président élu par le Parlement responsable devant lui et le Conseil Européen.

     Une Europe plus forte qui joue son rôle dans le monde pour la paix et la solidarité. Une Europe qui se tourne vers le Sud et la Méditerranée. Nous partageons en effet avec nos partenaires méditerranéens des valeurs et un projet. Appuyons-nous sur ce socle pour renforcer nos liens avec eux et pour relancer les relations euro méditerranéennes sur de nouvelles bases, prolongées par un message politique fort. Sous l'impulsion des socialistes, la France doit renouer avec sa vocation historique et culturelle de relais, d'intermédiaire, de passerelle entre les Etats et les peuples des deux rives. Prenons l'initiative de soumettre à nos collègues européens une proposition politique visant à faire sortir "par le haut" la coopération euro méditerranéenne de l'ornière dans laquelle elle est quelque peu enlisée.

    N'oublions jamais que faire l'Europe, c'est d'abord créé des solidarités nouvelles, au profit des citoyens et des régions les plus défavorisés, ici et ailleurs, des solidarités plus fortes que les risques potentiels, qu'ils soient économiques, sociaux ou géopolitiques. L'avenir de l'Europe en dépend et l'Europe, c'est la survie de nos valeurs humanistes et sociales au sein d'un ordre mondialisé libéral. Renforçons pour cela le poids du Parti des socialistes européens comme de l'Internationale socialiste, et renforçons nos contacts avec le mouvement social européen et international. Retrouvons là aussi les chemins de l'audace.

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VI/ Le Parti et la Gauche

 

Réformer le Parti socialiste

    La première phase du débat dans les fédérations a montré la nécessité d'un véritable changement de nos pratiques et de notre fonctionnement. Les militants souhaitent être entendus lorsque nous sommes au pouvoir par la direction et peser sur les orientations du Parti.

Un parti représentatif de la société

    Le premier tour de l'élection présidentielle a démontré le fossé qui s'est creusé pendant les années de pouvoir entre le parti et de vastes pans de la société. Plus que jamais il est primordial que nos sections et nos fédérations s'impliquent dans le champ social comme dans le mouvement qui agit pour une autre mondialisation. L'obligation, très virtuelle actuellement, d'adhérer à une association ou à une organisation syndicale doit être encouragée. De même, il faut impulser des rencontres régulières entre les fédérations, les sections, et les organisations syndicales ou le monde associatif.

    Dans le même ordre d'idées, il faut se débarrasser de tous les freins à l'entrée à l'intérieur du Parti en permettant l'adhésion directe auprès des fédérations ou du national.

    De plus, notre parti se doit de refléter la société. Nous devons retrouver la diversité au sein de notre parti telle qu'elle peut s'exprimer dans la société toute entière. La surreprésentation des classes moyennes dans nos rangs doit nous interroger pour arriver à faire entrer toutes les catégories sociales dans nos instances dirigeantes. Notre parti à l'impérieuse nécessité de s'élargir à tous les âges, toutes les origines, notamment aux français issues de l'immigration. Cette diversité doit se traduire par une présence effective dans les mandats électifs.

    Enfin, pour que notre parti retrouve la voie du dialogue avec les français, pour que les militants remonte les attentes des français, la relance d'une politique de formation des adhérents est primordial et doit aider à concrétiser la représentativité de notre parti dans la société.

Réformer le Parti sans renier nos principes

    Le Parti, né à Epinay en 1971, a tourné le dos aux pratiques " notabilistes " et aux baronnies locales de la SFIO ; veillons à ne pas ressusciter celles-ci par une peur des courants ! Les courants d'idées sont une richesse du Parti ! Ce qui nuit à celui-ci, ce sont les courants organisés autour d'intérêts particuliers et refusant le débat de fond. Ce sont aussi, et depuis trop longtemps, les consensus reconduits de congrès en congrès qui ne permettent ni de trancher les questions de fond ni de renouveler les instances dirigeantes du parti.

    Les États Généraux de 1993, et les réformes statutaires qui ont suivi, avaient permis de modifier notre fonctionnement. L'élection du Premier Secrétaire et des premiers fédéraux au suffrage universel direct la présence des premiers fédéraux au Conseil national ont permis de donner plus de légitimité au représentants directs des militants. Ce qui est maintenant important, c'est de faire vivre les instances dans lesquelles ils sont présents. Quelques mesures simples doivent permettre d'améliorer considérablement notre fonctionnement.

       Faire vivre le conseil national comme un véritable parlement du parti. Un texte, préalablement discuté dans les fédérations, devrait être soumis au vote du CN à chacune de ses réunions. Entre deux séances, des commissions du Conseil national animées par les secrétaires nationaux devraient pouvoir alimenter la réflexion.

       Réunir deux fois par an une convention nationale sur un thème précis sur la base d'un seul texte amendable directement par les militants dans les sections.

       Définir dans notre règlement intérieur une bonne fois pour toute le nombre de participants au Bureau national et le nombre de secrétaires nationaux, ceci afin d'éviter les assemblées pléthoriques et par voie de conséquence les réunions informelles en petit comité où les véritables décisions sont prises.

       Obliger chaque motion à présenter une liste de candidats au Bureau National composée à parité hommes/femmes avec un certain pourcentage de premiers secrétaires fédéraux.

       Limiter le cumul entre les mandats électifs et les fonctions à l'intérieur du parti en empêchant par exemple un Maire ou un parlementaire d'exercer la direction d'une section ou d'une fédération.

       Donner plus de poids au Conseil Économique et Social du Parti.

œuvrer à l'unité de la Gauche

    Fruit d'une véritable dynamique en 1997, le concept de gauche plurielle a montré ses limites au fil des années. L'alliance de la gauche gouvernementale ne s'appuyait pas suffisamment sur le mouvement social et le terrain. Au bout de cinq ans, nos partenaires n'ont retenu du concept de gauche plurielle que l'affirmation des différences. Nous nous sommes retrouvés à seuls à défendre le bilan du gouvernement et la gauche s'est présentée divisée voire éclatée lors du premier tour de la présidentielle.

    Parallèlement, les cinq dernières années ont vu l'émergence du mouvement antimondialisation. Comme tous les mouvements de cette nature, les contours et les objectifs restent flous. Les questions qu'il pose n'en sont pas moins réelles. Il ne faut donc pas construire une opposition factice entre " réformistes " et " radicaux ". Il faut plutôt offrir des débouchés politiques concrets aux objectifs dont ce mouvements est porteur, comme nous avons su le faire en 1981 après les mouvements des années 70.

Les conditions de l'unité

    Il ne peut être question de construire de manière factice une formation unique de la gauche, résultat d'un nouveau mode de scrutin ou construction au sommet style UMP.

    Il faut tourner le dos à la répartition des tâches au sein de la gauche. Le PS a vocation à couvrir l'ensemble des champs d'intervention. Il doit se donner les moyens d'être le moteur central de la gauche. C'est de la confrontation des propositions entre les différentes formations de la gauche sur tous les thèmes d'intervention que pourra naître un véritable compromis servant de base à un futur contrat de gouvernement.

    La gauche au gouvernement doit s'appuyer sur une véritable dynamique née sur le terrain et n'émanant pas seulement des seules organisations politiques. C'est pourquoi nous proposons la création d'ateliers décentralisés de la gauche qui, à partir des différentes situations (gestion municipale, luttes spécifiques, etc.), permettront de confronter les analyses, de partager nos expériences communes et d'élaborer les propositions.



L'honneur de la politique, c'est de défendre et de confronter ses idées et ses valeurs. La noblesse de la politique, c'est de faire vivre le débat d'idées tout en respectant les personnes.

Le défi majeur que nous socialistes avons à relever, c'est de mettre fin au sentiment d'impuissance qu'éprouvent les Français à l'égard de la politique. Nous devons, au contraire, redonner un sens collectif et reposer des repères dans un parti mais plus largement dans une société qui en sont aujourd'hui en partie dépourvus.

Le socialisme que je veux contribuer à promouvoir est celui de la reconquête, celle de nos valeurs, de nos marges d'action, de l'opinion.

Face à l'enjeu, nous devons être nous même, forts de nos valeurs.

Nous devons parler vrai, avoir de l'ambition et de la volonté.

Nous devons comprendre la société et innover dans les réponses.

Nous devons mobiliser tous ceux qui veulent un monde plus juste, plus solidaire, plus généreux.

Construisons l'avenir à gauche !



- Premiers signataires -

Martine Aubry maire de Lille, secrétaire nationale (59) Hicham Affane membre du conseil national (91) Pascal Buchet maire de Fontenay-Aux-Roses, membre du conseil national (92) Marie-Arlette Carlotti députée européenne, membre du conseil national (13) Michel Dasseux député de Dordogne (24) Yves Dauge sénateur de l'Indre et Loire (37) Yves Durand député du Nord (59) Robert Gaia membre du conseil national (83) Catherine Genisson députée du Pas-de-Calais, membre du bureau national (62) Marie-Hélène Gillig députée européenne (67) Paulette Guinchard-Kunstler députée du Doubs (25) Adeline Hazan députée européenne, secrétaire nNationale (51) Cécile Jonathan membre du conseil national (37) François Lamy député de l'Essonne, secrétaire national (91) Marylise Lebranchu députée du Finistère (29) Jean Le Garrec vice-président de l'Assemblée nationale, député du Nord (59) Jean-Pierre Sueur sénateur du Loiret, secrétaire national (45) Jean-Claude Viollet député de la Charente (16).

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