Traité constitutionnel
On ne forge pas un destin présidentiel sur une crise de l'Europe

Jean-Marc Ayrault



Entretien avec Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, paru dans le quotidien Le Monde daté du 7 juillet 2004.
Propos recueillis par Isabelle Mandraud


 

Le débat interne au PS sur la Constitution européenne ne risque-t-il pas de perturber l'élaboration de son projet pour 2007 ?
La contradiction est de dénoncer une Europe sans règles et de refuser un texte qui établit des principes communs. La reconnaissance de droits identiques pour tous les Européens sur la grève, la protection contre les licenciements, l'accès aux services publics ou le développement durable, est un progrès, comparé au vide antérieur. Il est faux de dire que c'est un carcan libéral : la référence au marché existe depuis le traité de Rome ! Arrêtons de faire croire que le PS va changer, tout seul, l'orientation de l'Europe.

Tous les partis socialistes européens sont pour ce traité. On fera progresser l'Europe en travaillant à constituer des avant-gardes européennes pour renégocier le pacte de stabilité et aller plus loin dans les domaines social ou fiscal. C'est plus conforme à notre projet historique que de se retrouver avec ceux qui ont toujours combattu l'Europe.

Comment jugez-vous les " réticences " de Laurent Fabius ?
Elles sont légitimes à condition qu'on n'utilise pas le sujet à des fins tactiques. Pour moi, on ne forge pas un destin présidentiel sur une crise de l'Europe. Je vois aussi ceux qui voudraient s'en servir comme d'un levier pour casser la majorité du parti issue du congrès de Dijon et la ligne du réformisme de gauche adoptée alors. Faut-il rappeler que cette ligne nous a permis de nous redresser en moins de deux ans ?

Comment le PS doit-il travailler sur son projet pour 2007 ?
Il doit produire une rénovation intellectuelle sur le long terme. Et pour 2007, fixer cinq ou six priorités identifiantes, dont la réorientation de l'Europe fait partie.

Vous avez interpellé le gouvernement sur la réforme du statut pénal du chef de l'Etat. Avez-vous reçu une réponse ?
Pas encore. Cela fait pourtant un an qu'un projet de loi a été présenté au conseil des ministres. Puisque rien ne vient, je vais proposer au groupe socialiste d'utiliser l'une de nos niches parlementaires à la fin de l'année, pour reprendre le texte et permettre enfin que ce débat ait lieu. Le projet du gouvernement comporte des insuffisances. Mais nous ne pouvons laisser perdurer cette situation dans laquelle le chef de l'Etat est le seul citoyen qui ne puisse pas répondre d'actes contraires à la loi.

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