Plus d'autonomie aux élus locaux



Entretien avec Claude Bartolone, député de Seine-Saint-Denis, paru dans le quotidien Libération, paru le jeudi 24 mai 2001.
 Propos recueillis par Didier Hassoux


 

Le Conseil des ministres a adopté hier le projet de loi sur la démocratie de proximité. Il rend obligatoire la création de conseils de quartier dans les villes de plus de 20 000 habitants. Ils existent déjà un peu partout...
On ne peut pas dire cela. Le projet de loi se fait le relais d'initiatives prises par une minorité d'élus, les plus imaginatifs. Lorsqu'elles existent, il faut évaluer ces structures de démocratie participative. Lorsqu'elles n'existent pas, il faut les créer. Ce projet de loi permet les deux. Il offre surtout un surcroît de démocratie là où elle fait défaut.

Peut-on vraiment parler de démocratie participative alors que ce sont les élus qui président ces conseils de quartier ?
Les grandes associations d'élus craignent que les conseils de quartier n'affaiblissent le suffrage universel. Je ne peux pas être d'accord avec elles. Au contraire, ils le renforcent. Le projet de loi fixe un niveau minimal de la participation des citoyens. Rien n'empêche les responsables collectivités locales d'être plus audacieux, de donner plus de pouvoir à leurs électeurs.

Une étude non publiée de vos services fait état d'un taux d'abstention incroyablement élevé dans les quartiers populaires lors des dernières municipales. Le projet de loi sur la démocratie locale donnera-t-il l'envie aux gens d'aller voter ?
Une loi, aussi belle et parfaite soit-elle, ne peut, à elle seule, modifier une réalité sociale et politique. Elle peut aider à créer les conditions pour que les habitants des quartiers retrouvent confiance dans notre système électif là où ils l'ont perdue. C'est aux responsables politiques et associatifs au niveau local de faire vivre la démocratie de proximité au quotidien. On a effectivement observé dans un certain nombre de nos quartiers populaires que l'abstention a augmenté de près de 10 points par rapport aux derniers scrutins municipaux. Les facteurs explicatifs d'un tel phénomène sont très divers et varient souvent d'une ville à l'autre, voire d'un quartier à l'autre. En revanche, là où les élus ont su associer les habitants aux projets urbains et sociaux, l'abstention a régressé. La corrélation entre démocratie participative et niveau de participation aux élections n'est certes pas mécanique mais elle est réelle.

Pour que les gens votent, encore faut-il qu'ils le puissent. Rien n'est prévu dans le projet de loi sur le droit de vote des immigrés...
Je suis favorable à la participation des immigrés aux élections municipales. Cette question devra être réglée au lendemain de l'élection présidentielle de 2002. Jusqu'à présent nous avons été obligés de reculer parce que l'extrême droite distillait son poison dans la démocratie. Il sera, dans un an, de notre responsabilité de mettre en œuvre cette réforme. Aujourd'hui nous ne le pouvons pas : le Sénat, comme sur la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, bloque le débat.

Le projet de loi contient un volet décentralisation. Quelles sont les avancées possibles dans ce domaine ?
Il faudra procéder comme au début des années 80 à des transferts de compétences de l'Etat vers les collectivités locales. Le débat sur la Corse indique déjà certaines pistes : environnement, tourisme, transports, infrastructures... Mais il y a aujourd'hui d'autres enjeux, comme la mise en œuvre de politiques adaptées aux territoires, en particulier dans les villes. Cette approche nouvelle suppose un travail en commun entre l'Etat et les collectivités locales, mais surtout une grande autonomie laissée aux acteurs locaux. Je pense en particulier à l'éducation et à la sécurité.

Reproduit avec l'aimable autorisation du quotidien
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