Nous sommes tous des sociaux-libéraux

Alain Bergounioux
 par Alain Bergounioux, secrétaire national à la Communication.
 Point de vue paru dans l'hebdomadaire Le Point daté du 23 août 2002

 
La politique appelle la simplification. C'est entendu. Encore faut-il faire porter la critique sur des réalités - quitte à les outrer quelque peu. Or la manière avec laquelle toute une partie de la gauche française, et malheureusement dans le Parti socialiste aussi, est en train de s'accrocher au terme de "social-libéralisme" pour discréditer ce qui a été fait pendant cinq années par le gouvernement de Lionel Jospin et pour se donner un brevet de bonne conscience à peu de frais mérite qu'on y mette sinon le holà (car chacun est libre de discourir comme il l'entend), du moins qu'on s'inscrive nettement en faux.

Car, enfin, à moins de nier l'utilité et la légitimité de l'économie de marché et de mettre en doute l'apport même du libéralisme politique (c'est le cas pour une part de l'extrême gauche), nous somme tous, à gauche, des sociaux-libéraux... Nous défendons les libertés politiques et nous voulons même les étendre en les rendant effectives pour tous. Nous reconnaissons l'efficacité du marché, mais nous pallions ses insuffisances et nous luttons contre les inégalités qu'il crée au nom des droits de la démocratie. C'est cela, le socialisme démocratique. La synthèse entre la République - la forme française du libéralisme politique - et le socialisme ne date pas d'hier. Un certain Jaurès y a même été pour beaucoup...

Cette volonté de stigmatisation par cette épithète de "social-libéralisme" est donc avant tout une bêtise. Elle peut certes offrir quelques succès rhétoriques à bon compte. Mais elle ne peut pas permettre de répondre aux vraies questions, du moins pour celles et ceux qui pensent qu'il vaut la peine de faire entrer les idéaux dans les faits et que l'acte de gouverner est profondément digne.

Face à un capitalisme plus fort, plus confiant, étendu désormais aux dimensions du monde, le socialisme démocratique, cette force politique qui cherche à unir la solidarité sociale, l'efficacité économique, la démocratie, s'est trouvé partout sur la défensive en Europe et dans le monde. Cela explique ses fluctuations électorales dans des sociétés inquiètes. Sa tâche majeure - qui devrait appeler tous les efforts - est de repenser les termes de la synthèse qu'il propose. Ce n'est pas le cadre de cette synthèse qu'il faut remettre en cause, mais ce sont les moyens qu'il faut redéfinir face aux questions nouvelles. Il y a là suffisamment de matière à débat et à controverse sur la qualité de l'emploi, les défis d'une société multiculturelle, le rôle des services publics, la régulation de la mondialisation, etc. , sans avoir besoin de construire des chimères idéologiques qui retardent le temps des réponses.



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