Nous devons quitter Le Mans rassemblés
Congrès du Mans - 19 novembre 2005

Discours de Eric Besson, député de la Drôme
Tribune du Congrès du Mans


 
Chers camarades, c'est un honneur pour moi de passer après Jean-Luc Mélenchon, et j'en remercie la présidence de séance. Chers amis, chers camarades, trois mots doivent marquer notre congrès. Ces trois mots, se sont : République, unité et rénovation. République, d'abord : si nous voulons remettre la République sur ses pieds, nous devons revenir à la notion fondamentale d'équilibre entre droits et devoirs.

Tous les citoyens acquièrent des droits, tous les citoyens contractent dans le même temps des devoirs. Si nous assumons pleinement ce lien, alors il n'y aura plus de schizophrénie pour les socialistes. Par exemple, sur les questions de sécurité, nous voulons à la fois l'ordre et la justice sociale, la prévention et la répression.

Sur notre rapport au travail, rappelons que la Déclaration des droits de l'Homme revendiquait dans un même mouvement le droit au travail et le devoir de travailler.

Cette exigence doit éclairer nos propositions pour 2007. Le droit au travail, cela veut dire concrètement, pour tout jeune, ou pour tout adulte désirant travailler, le droit d'accéder à un emploi, ou a minima à une formation rémunérée, à un contrat d'insertion ou d'utilité sociale.

Mais si nous voulons, comme on dit dans notre jargon, sécuriser les parcours professionnels, c'est à dire si nous voulons plus d'indemnités, plus d'accompagnements, plus de formations et plus de réinsertion pour les chômeurs, alors disons la vérité. Parce qu'il sera généreux, parce qu'il sera coûteux, ce système ne pourra durablement fonctionner que s'il est accompagné d'un contrôle à la fois humain et ferme de la volonté réelle de travailler.

Ce discours de vérité et de justice, nos concitoyens sont prêts à l'entendre, ils l'attendent de nous, c'est donc le premier point, celui de la République sociale, la République des droits et devoirs comme boussole.

Deuxième mot clé, l'unité des socialistes. Nous la revendiquons tous, mais chacun la verrait bien conforme à ses propres souhaits. Il faudrait alors recourir à une subtile arithmétique. Soyons sérieux, les militants, une nouvelle fois, ont choisi très clairement une ligne, une stratégie, une équipe et un premier secrétaire. Alors, le rassemblement, oui, l'unité, oui, la synthèse si possible, mais commençons par appliquer dans le parti ce que nous prônons à l'extérieur : respect de la majorité issue des urnes, respect du vote des militants. Cette unité, ce rassemblement, nous sont nécessaires, surtout s'ils sont sincères, s'ils ne ressemblent pas à un rafistolage de façade.

Ils nous semblent nécessaires pour retrouver le plaisir de militer, d'œuvrer ensemble. Convenons-en, on se lasse de tous les excès, de toutes les bagarres, et le moment est venu sans doute d'arrêter, si vous permettez l'expression, de nous mettre sur la poire.

Mais ils nous semblent aussi nécessaires, si nous voulons en finir avec la caricature qui est faite de nous, et à laquelle nous contribuons largement.

Mes amis, quel déluge, à en croire tout ce que la France compte de sociologues, de politologues, nous appartientrons à un parti sclérosé, vieux, dépourvu d'idées, inaudible, coupé des réalités. Rassurons-nous en partie, ce sont les mêmes qui nous expliquent que Sarkozy sait parler au peuple, parce qu'il dirait les mots que le peuple serait supposé utiliser. Ce peuple, que comme Sarkozy, ils ne connaissent que par les sondages et par les qualitatifs, comme ils disent, ils le méprisent en réalité, en imaginant qu'il n'a que kärcher et racaille à la bouche.

Alors, pourquoi nous reproche-t-on en permanence de ne pas suffisamment nous opposer. « On ne vous entend pas », nous dit-on à l'extérieur. « On ne nous entend pas », nous reproche-t-on parfois à l'intérieur. C'est sans doute vrai, mais pourquoi ? C'est un défaut d'opposition ? C'est une blague, nous nous opposons en permanence. Un défaut de propositions ? Quelle erreur, des propositions, nous en avons dans tous les domaines et sur tous les sujets.

Pourquoi ne sommes-nous pas entendus ? Parce que certains de nos responsables passent plus de temps dans les médias à critiquer leur parti qu'à apporter ses analyses et ses propositions.

Troisième et dernier mot clé : la rénovation suppose plus de cohérence et plus de sincérité dans nos débats internes, elle suppose que nous cessions les jeux de rôle dont nous sommes tous lassés. A Dijon, être allié avec tel ou tel, c'était être social libéral. Au Mans, ne plus être allié avec tel ou tel, c'est être social libéral.

Le jeu paraît simple, c'est un jeu compliqué, parfois, et notamment les deux dernières fois, ce sont les accusés qui ont gagné, et c'est surtout un jeu qui n'amuse plus personne. Le Parti socialiste doit renforcer et moderniser le pacte républicain. Il y a un danger, c'est le danger Sarkozy, danger pour notre conception de l'action publique, convaincre les citoyens en faisant appel à leur raison et à leur cœur et non en attisant les peurs, réunir les Français et non les dresser les uns contre les autres, mettre en œuvre une laïcité généreuse et non pratiquer un indécent marketing confessionnel à vocation électorale.

Nous devons être tous ensemble pour lutter contre ce qu'incarne Sarkozy, qui réussit le tour de force d'emprunter à Bush son néo-conservatisme, à Berlusconi ses méthodes, à Le Pen son fonds de commerce, à Aznar son atlantisme, et à Chirac son culot. Nous sommes venus au Mans désunis, mais synthèse ou pas, cela n'a pas tant d'importance, mais ce qui importe, c'est que nous devons quitter Le Mans rassemblés.


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