Si le PS refuse de ratifier ce traité, c’est une fuite en avant

Jean-Louis Bianco


Entretien avec Jean-Louis Bianco, député des Alpes-de-Haute-Provence, accordé au quotidien Le Monde daté du 9 septembre 2004
Propos recueillis par Isabelle Mandraud


 

Quelle est votre position sur la constitution européenne ?
Mon " oui " n'était pas, au départ, spontané, mais il est maintenant ferme et déterminé. J'ai travaillé, pendant un an, dans un groupe de travail du PS, à l'Assemblée, consacré à l'Europe, qui m'a convaincu.
Certes, l'Europe ne nous satisfait pas. Mais il ne faut pas caricaturer ce traité comme le font ceux qui soutiennent le " non ".

Qu'est-ce qui a emporté votre décision ?
On nous dit que, dans ce texte, le marché et la concurrence sont des valeurs suprêmes, c'est faux. Ce qui figure dans les objectifs, c'est : " une économie sociale de marché hautement compétitive qui tend au plein-emploi et au progrès social ". Nous avons gagné le mot " social ". C'est un vrai progrès. Ce texte est meilleur que tous les autres en vigueur. Il n'y a aucun point qui constitue un recul, tout au contraire. Dans les valeurs affichées de l'Europe, on trouve désormais l'égalité hommes-femmes, le respect des droits des minorités et le développement durable.

Que répondez-vous aux partisans du " non " qui mettent en avant l'impossibilité de réviser le texte s'il n'y a pas unanimité ?
C'est le cas dans tous les traités internationaux. Dans le domaine social et fiscal, en particulier, cette règle prévaut déjà. C'est pourquoi je pense qu'il faut une avant-garde, des coopérations renforcées entre des Etats membres, y compris, je n'hésite pas à le dire, en dehors de ce traité.

C'est-à-dire ?
Si ce n'est pas possible autrement, on peut très bien imaginer signer un autre traité. Nous devons militer pour l'instauration d'une nouvelle convention en 2009 en faveur d'un traité social. Il faut que nous parvenions à un programme commun des socialistes européens.
Mais je ne crois pas au choc salutaire si on se met à dire " non " tout seul. L'approbation de la Confédération européenne des syndicats est pour moi très importante, tout comme celles du président du Parti socialiste européen et du président de l'Internationale socialiste. En quoi un " non " avec Marie-George Buffet - secrétaire nationale du PCF - et les gauchistes nous fera-t-il avancer ?

Vos amis socialistes fabiusiens penchent pourtant aussi plutôt pour le " non "...
Je ne me considère pas comme un fabiusien, mais, c'est vrai, il y a une forte majorité parmi eux qui est hostile au texte. Si le PS refuse de ratifier ce traité, c'est une fuite en avant dont je ne vois pas le débouché.

Si Laurent Fabius s'exprime contre la ratification du traité, cela peut faire basculer les choses, selon vous, au PS ?
Je ne le souhaite pas pour lui car le destin d'un présidentiable n'est pas d'apparaître - je dis bien apparaître - contre l'Europe. Mais oui, sa position peut bouleverser les choses. Encore que je ne crois pas que les militants vont se déterminer en fonction des courants. Les positions ne sont pas figées. Tout est ouvert, dans les deux sens d'ailleurs.

© Copyright Le Monde Interactif


Page précédente Haut de page

PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]