L'avenir de la région Ile-de-France | |
Mais que veulent-ils ? " Du pognon ", ont dit les lycéens. Les bandes des banlieues ont donné leur réponse en cassant les vitrines, symboles à leurs yeux d'un monde riche qui les exclut. Premiers signes d'explosion sociale d'une société en panne d'espoir ? Le pire n'est jamais sûr, mais la pente - dangereuse - est prise. Deux mondes se tournent désormais le dos, marquant les limites d'un traitement purement social des quartiers les plus durs. Nous payons aujourd'hui les choix de l'urbanisme technocratique des années 60 dont le corollaire est l'absence de vie sociale et culturelle. Les crédits importants engagés chaque année au développement social urbain et à la réhabilitation des quartiers dégradés ne suffisent pas à réparer le mal. On a trop oublié qu'emploi et logement sont des facteurs puissants d'intégration. C'est une politique qui doit s'engager à partir d'interventions fortes et décloisonnées des services de l'Etat. Encore faut-il que la référence au marché, pour ne pas dire à l'argent, soit celle qui balaie toutes les autres. Est-il acceptable qu'en Ile-de-France, la traduction la plus concrète de la reprise économique ait été la flambée de l'immobilier et particulièrement du marché des bureaux ? La question mérite que l'on s'y attarde, à l'heure du réaménagement d'une région qui concentre 27 % de la richesse et 18 % de la population nationales. Il est à cet égard symptomatique que la première grande opération, et en même temps la plus assurée de voir le jour rapidement, soit lancée à la Défense, symbole de l'opulence, grâce notamment à la vente d'une tour de bureaux. La volonté de préserver de la spéculation les terrains de l'île Seguin, à Boulogne-Billancourt, résistera-t-elle aux pressions fortes qui ne manqueront pas de s'exercer ? Réforme du foncier et des financements du logement En tout état de cause, ces deux projets aspireront des financements que l'on ne retrouvera pas ailleurs et particulièrement à l'est de Paris. Le rééquilibrage spatial et donc social de l'agglomération doit être la priorité des actes et pas seulement celle des discours. Renouer les fils d'une région en passe de dislocation n'est pas une tâche impossible. Mais il y faudra de la volonté, du temps et des financements colossaux. Raison de plus pour commencer vite et par le bon bout. C'est dire qu'il faut s'attaquer d'abord au foncier. Face à la rétention délibérée des terrains, il faut augmenter sensiblement les dotations budgétaires des opérateurs fonciers, qui peuvent ainsi se lancer dans une grande politique d'acquisition. Les mobiliser sera plus efficace que la fuite en avant qui consiste à urbaniser des champs pour réaliser une sixième ville nouvelle. Rien qu'à Paris et en petite couronne, ce sont 750 hectares que l'on pourrait dégager. Encore faut-il que les administrations et les sociétés nationales soient dégagées de la loi d'airain qui les conduit à rechercher le cours le plus haut du marché, afin, pour les unes, d'alimenter leur budget et, pour les autres, d'assurer leur rentabilité. De leur côté, les communes sont aujourd'hui maîtresses de leur urbanisme. Trop peu d'entre elles, et parmi les plus riches, n'assument pas leur rôle en matière de logements, particulièrement de logements sociaux. Est-il aberrant de demander que leur POS soit assorti d'une politique locale de l'habitat avec l'obligation d'en réserver 30 % au logement social ? En cas de carence des communes, l'institution du droit de préemption urbain en faveur de l'Etat permettra d'y pallier. Une arme de dissuasion L'Etat dispose d'une arme de dissuasion grâce à la dotation globale d'équipement et fonctionnement qu'il attribue chaque année. A l'inverse, les communes qui jouent le jeu doivent être encouragées et aidées. J'entends d'ici les hurlements de la droite pour qui le discours sur l'autonomie communale sert de prétexte à l'égoïsme local, de certains élus communistes - pas tous heureusement - qui préfèrent le malthusianisme à la vitalité, avec la part de risque électoral qu'elle peut entraîner. Enfin, on n'échappera pas à une réforme du système de financement des logements mis en place en 1977. Pour éviter une segmentation excessive du marché du logement, l'Etat doit instituer un logement aidé unique, dont il prendrait en charge le surcoût foncier à parité avec la région. Quand une société est taraudée par l'incertitude et menace de se déchirer, il est urgent de remettre au goût du jour l'intérêt général. |
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