Les JO à Paris ?
Mille fois oui !

Point de vue de Bertrand Delanoë, maire de Paris, paru dans le quotidien Le Monde daté du 10 mars 2005



 
Sous un titre sans ambiguïté - " Des JO à Paris ? Non, merci.. " -, trois opposants à cette candidature signent dans Le Monde du 9 mars une tribune au ton résolument hostile. C'est leur droit : l'important, après tout, n'est-il pas de participer, y compris à ce débat ? Encore faut-il connaître le dossier. Or réduire les Jeux olympiques à une " affaire de gros sous ", au " sport spectacle " gangrené par " le dopage ", relève de la caricature et d'une démagogie consternante.

Ainsi, les notions mêmes de conquête de la victoire, de dépassement de soi ou de compétition seraient nuisibles. En poussant ce raisonnement, il faudrait interdire les Coupes d'Europe de football, de rugby, la Coupe Davis de tennis, le Tour de France, etc. Toutes ces épreuves mettent aux prises des champions qui présentent ce tort immense de chercher à... gagner.

Le dopage ? C'est une gangrène. Et nous sommes résolument aux côtés du CIO dans son combat courageux contre ce fléau. Pour autant, le raisonnement consistant à " prohiber " le haut niveau parce que des dérives peuvent exister nous semble contraire à l'esprit même du sport, qui nous enseigne la volonté de tendre toujours vers un résultat plus probant.

La candidature de Paris répond à une vision claire et exigeante de l'olympisme. C'est pourquoi nous proposons des Jeux " populaires, solidaires, écologiques et éthiques ".

Populaires ? 10 % des places seront à 10 euros et 45 % à moins de 30 euros, car nous voulons des stades pleins et ouverts à tous. Solidaires ? Tout le réseau de transports de surface - bus et tramway - sera accessible aux personnes handicapées. Entre les épreuves olympiques et handisports, le village olympique ne nécessitera aucune reconfiguration : il sera accessible à chacun.

Ecologiques ? La charte de développement durable de Paris 2012 fixe un objectif inédit : organiser des JO à impact neutre sur l'effet de serre. Et les nouvelles infrastructures répondront aux normes haute qualité environnementale (HQE). Nous sommes très loin des Jeux du gaspillage.

L'aversion de nos opposants n'a d'égal que leurs approximations : 2 milliards d'euros de garantie pour 11 millions de Franciliens, cela n'aboutit pas à 1 000 euros par personne mais à... 182. Ajoutons, comme l'a confirmé l'agence financière Standard and Poor's, que le budget olympique est maîtrisé, sans incidence sur les finances municipales, et qu'il n'engendrera aucun impôt supplémentaire.

Surtout, l'élaboration de cet événement mondial traduit une préoccupation sociale sans précédent. Nous avons noué un dialogue constructif et fécond avec les organisations syndicales. Nous avons repris à notre compte plusieurs propositions de Martin Hirsch, le président d'Emmaüs. Une attention particulière sera portée au recrutement de personnes en précarité pour les prestations et travaux mis en œuvre. Et nous veillerons à ce que le recyclage des matériaux contribue au développement de l'économie solidaire.

Ces illustrations font écho à ce qui nous semble un véritable postulat : Paris a besoin des Jeux. Un seul exemple : l'aménagement des 45 hectares des Batignolles, où sera installé le village olympique. Dès après les Jeux, un véritable quartier émergera sur ce site, avec des logements sociaux et étudiants, un parc de 10 hectares (qui parle de " bétonnage " ?), des équipements publics et des activités génératrices d'emplois.

Et qu'on ne s'y trompe pas : les Jeux ne se " substituent " pas à une politique municipale. Ils ont en revanche le pouvoir de faire avancer les dossiers, fluidifier les prises de décision, raccourcir les délais. Ils sont de formidables accélérateurs de progrès, comme l'a si bien démontré Barcelone en 1992.

L'héritage de ces Jeux, si Paris est désigné, sera considérable et intégré à l'identité de notre cité : 42 000 emplois pérennes, de nouveaux aménagements urbains (le tramway couvrirait une distance de plus de 20 km), des liens renforcés au sein même de l'agglomération. La piscine olympique à Aubervilliers, le vélodrome à Saint-Quentin-en-Yvelines ou la modernisation du RER B confirment que, loin d'une vision " centralisatrice ", notre projet est ouvert et soutenu par une écrasante majorité des communes voisines.

L'enjeu est de taille, la perspective immensément stimulante. C'est pourquoi tout un peuple se mobilise. Et qu'on ne vienne pas " opposer " ce défi à des " chantiers " essentiels, auxquels nous nous sommes confrontés dès 2001. Lorsque 1,2 milliard d'euros est consacré chaque année à la solidarité (un quart du budget global de la collectivité parisienne) et que sont réhabilités en une seule mandature plus de 1 000 immeubles insalubres, comment insinuer que ces priorités seraient négligées ?

L'olympisme mobilise des valeurs qui ont un sens, une portée, une légitimité dans le monde du XIXe siècle. La contestation systématique ou l'endormissement, au nom d'une morale conservatrice qui ne dit pas son nom, n'offrent aucune perspective. C'est pourquoi, avec 87 % des citoyens dont, évidemment, ceux qui ne sont pas les plus favorisés, oui, nous voulons les Jeux à Paris, en 2012 !
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