| Comment jugez-vous le débat entre le “ oui ” et le “ non ” qui s’est engagé au PS, “ qui fait rage ” comme disent certains ?Ce débat porte sur une question fondamentale et c’est l’honneur du PS que de l’avoir abordé avec un tel souci de démocratie. Maintenant, c’est vrai, il serait grave que l’expression de ce pluralisme laisse place à des comportements trop irrationnels. Mais à l’occasion des déplacements que j’effectue un peu partout en France, j’observe chez les militants un sens de la responsabilité et de la mesure qui est plutôt rassurant.
Regrettez-vous que le “ non ” de Laurent Fabius soit largement perçu comme une offensive en vue de l’élection présidentielle ? Perçu à tort ou à raison ?J’ai déjà eu l’occasion de dire que ce procès là ne m’intéresse pas. Je respecte la position exprimée par Laurent Fabius, même si je ne la partage pas. L’essentiel d’ailleurs, ce ne sont pas les motivations de tel ou tel, mais la pertinence de leurs arguments. C’est cela, et seulement cela, qui doit orienter notre débat.
Vous dites dans votre livre La vie passionnément “ le vrai critère en politique, c’est l’honnêteté intellectuelle et celle-ci demande du courage ”. Est-ce que cela vaut pour ce débat européen ?Plus que jamais.
Actuellement, quel est l’argument qui vous paraît le plus efficace pour que le “ oui ” l’emporte au PS d’abord, chez tous les Français ensuite ?Ce texte, quelles que soient ses imperfections, fait avancer l’Europe en tant que force politique, modèle de société et espace de civilisation. Les valeurs, les idéaux, l’organisation collective qui prévalent en Europe, en font un territoire politiquement et culturellement unique sur la scène internationale. Et c’est essentiel dans un monde qui affronte le terrorisme, la montée des fondamentalismes, le retour du nationalisme ou les dérèglements divers liés à la mondialisation. Nous avons besoin d’Europe. Je dis oui à ce texte parce qu’il dessine un chemin convaincant pour un avenir démocratique.
Quels arguments spécifiques en faveur du “ oui ” retirez-vous par exemple de vos récents voyages à Washington et Moscou en tant que maire de Paris ?Si je voulais faire un peu de provocation, je dirais que d’évidence, le président américain rêve d’une victoire du “ non ”... pour maintenir le statu quo. Mais plus sérieusement, de nombreux maires européens sont très sensibles à ce que pour la première fois, ce traité fait référence à l’autonomie locale et régionale. Autrement dit, les collectivités territoriales d’Europe sont reconnues - c’est inédit - comme de vraies partenaires au sein des instances communautaires. Cette avancée est très importante. Elle rejoint totalement le combat des élus de proximité pour qui “ l’Europe des villes ” doit évidemment s’affirmer.
Craignez-vous un éclatement du PS si le “ non ”, derrière le numéro 2, l’emportait sur le “ oui ” de la majorité actuelle ? Comment l’éviter ? Que pouvez-vous faire personnellement pour l’unité du PS ?Il me semble évident qu’une victoire du “ non ” nous ferait entrer dans un période de turbulences sans précédent. Car c’est l’identité même de notre parti, tel qu’il a été fondé par François Mitterrand, qui s’en trouverait bouleversée. Comment l’éviter ? En faisant gagner le “ oui ” ! Et avec beaucoup d’autres, c’est ce à quoi je m’emploie en tentant d’argumenter, de nourrir ce débat interne, d’emporter la conviction des militants socialistes que je rencontre.
Est-il bon que François Hollande se mette en jeu personnellement comme premier secrétaire dans cette bataille européenne ?François Hollande gère la question ô combien complexe de ce débat en privilégiant la seule référence qui vaille : ses convictions européennes, qui sont anciennes et profondes. Je soutiens totalement sa démarche.
Selon un sondage CSA, 46 % des Français ne croient pas que les divisions sur l’Europe “ diviseront durablement ” la gauche, 35% pensent que si. Qu’en pensez-vous ?Tout dépend du résultat ! Mais je vous le répète : l’hypothèse d’une crise est réelle si une majorité de socialistes choisissait le “ non ". Car ce serait aussi dire “ non " à l’une des composantes identitaires et historiques de notre famille.
A Vivement dimanche, aujourd’hui, les amis de Michel Drucker vous comparent d’emblée à Mitterrand et vous ramènent constamment à l’élection présidentielle de 2007. Cela vous gêne-t-il ?Non, d’abord parce qu’ils n’en abusent pas et ensuite parce qu’ils le font toujours avec humour. Ce que je retiens surtout de l’émission de Michel Drucker, à laquelle j’ai participé avec un immense plaisir, c’est que j’ai pu y évoquer plusieurs sujets dont je traite dans mon livre et qui me tiennent à cœur : par exemple, le terrorisme, les spiritualités, le droit à mourir dans la dignité, l’homoparentalité ou la place du sport, grâce à la présence de nombreux médaillés olympiques qui m’ont fait l’amitié d’être présents sur le plateau.
Dans la foulée des “ espoirs ” pour 2007, les chroniqueurs de l’émission placent Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, qu’en dites-vous ? Cela vous gêne-t-il ? Y a-t-il une génération nouvelle ?Cela ne me gêne nullement, d’autant que l’espoir fait vivre... passionnément. Pour le reste, ma conviction est simple : tout ce qui peut améliorer la représentativité, la féminisation, et même le renouvellement dans notre vie publique est positif. Là encore, c’est une dimension que j’aborde dans un chapitre consacré à la modernisation de notre démocratie.
Jacques Chirac s’est dit mardi, “ déterminé à faire gagner Paris pour les JO de 2012 ”. Vous-même menez le combat en symbiose avec le mouvement sportif et les grands patrons. Est-ce que cela ne modifie pas forcément votre conception des combats partisans droite-gauche ?Non. La démocratie a besoin d’un face à face clair entre une sensibilité conservatrice et une sensibilité progressiste. Une société n’est jamais aussi dynamique que lorsque s’expriment des projets différents, entre lesquels les citoyens peuvent choisir. Mais en démocratie, il y a aussi des circonstances qui justifient une mobilisation générale, au-delà des clivages partisans. C’est le cas des JO et de cette formidable compétition dans laquelle Paris et la France sont lancées, dans la perspective de 2012. Cette union sacrée est nécessaire : elle fonctionne très bien et c’est même l’une des forces de notre candidature. Car pour espérer l’emporter, nous avons besoin de tous les talents, de toutes les énergies.
Vos “ nuits blanches ” font de Paris une œuvre d’art. L’été, c’est Paris Plage. On dit les voies sur berge interdites à l’avenir aux voitures. Le Paris qui travaille est-il négligé, moins prioritaire ?Vous plaisantez ? La réduction de la place de l’automobile répond à un impératif de santé publique : lutter contre la pollution. Mais cette politique ne nous détourne pas d’un autre objectif prioritaire : la dynamique économique de Paris. Un seul exemple : entre 1990 et 1999, Paris a perdu 160 000 emplois. A l’époque, que je sache, il n’y avait ni couloirs de bus, ni Paris Plage, ni Nuit Blanche. A l’inverse, en 2003, il y a eu 34 000 emplois créés ou sauvegardés dans la capitale. Sur l’année écoulée, le chômage y est d’ailleurs en baisse de près de 9 %. La Ville prend toute sa part dans cette évolution encourageante : ainsi la seule opération “ Paris pour l’emploi ” que nous reconduirons d’ailleurs en 2004, a permis en 2003, l’embauche de plus de 3000 personnes. Vous voyez : opposer qualité de vie et ambition économique n’a pas de sens, à moins de s’accrocher à une vision totalement dépassée de notre cité...
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