Une nouvelle Europe est en train de naître


Entretien accordé par Harlem Désir, député européen, au quotidien Libération daté du 8 mai 2004
Propos recueillis par Paul Quinio


 

Les européennes sont-elles l'occasion de sanctionner une nouvelle fois le gouvernement Raffarin ?
Si les Français ne veulent pas d'une Europe libérale et antisociale, ils doivent refuser le 13 juin de laisser les clés de l'Europe à la droite. Comme ils ont refusé de lui laisser les clés des régions le 28 mars. Nous allons appeler à sanctionner le bilan, au Parlement européen, du Parti populaire européen (PPE), dont la droite française est partie prenante. Qu'a fait le PPE de sa majorité pendant cette mandature sinon promouvoir le modèle d'une Europe libérale ?

« Et maintenant, l'Europe sociale », clame le PS. Quelle réalité pouvez-vous donner à ce slogan ?
La construction d'une Europe sociale est la priorité numéro 1 avec, par exemple, l'instauration d'un salaire minimum dans chaque pays, la convergence des droits sociaux vers le haut ou l'existence partout d'une protection sociale, même si ses mécanismes peuvent rester propres à chaque pays. La deuxième priorité, c'est la défense des services publics et le développement des réseaux européens dans les domaines de l'énergie, des transports ferroviaires, de l'eau... La troisième priorité, c'est la construction d'une Europe de la croissance et de l'emploi, et donc l'investissement dans la recherche, l'innovation, l'environnement, l'engagement de grands travaux ­ notamment dans les transports ­ et la construction d'une véritable politique industrielle.

Pourquoi serait-ce possible aujourd'hui ?
Parce qu'une nouvelle Europe est en train de naître. Nous l'avons vu à Madrid, après les attentats, comme au moment de la guerre du Golfe. Une opinion publique européenne émerge. Elle porte une nouvelle envie d'Europe. C'est une envie de paix, de droit international, de solidarité avec le Sud, de responsabilité environnementale. C'est aussi l'envie d'une Europe qui incarne un modèle social, où l'on ne demande pas sa carte bancaire à un malade avant de l'admettre à l'hôpital. Les gouvernements qui ne défendent pas ces valeurs, comme celui d'Aznar en Espagne, de Berlusconi en Italie, de Chirac en France, sont actuellement sanctionnés. Je crois que nous assisterons, le 13 juin, à une percée de cette nouvelle gauche européenne qu'incarnent Zapatero en Espagne, Rasmussen au Danemark, Hollande en France, à une désaffection à l'égard de la gauche New Labour, à un rejet de la droite libérale.

Pourtant, le PS semble de plus en plus euroréticent ?
Il n'y a plus de place pour la réticence. Plus que jamais l'Europe a besoin des socialistes. Notre engagement doit être entier pour construire l'Europe politique. Elle a besoin d'une Constitution. Nous nous battrons jusqu'au bout pour faire évoluer le projet actuel. Et surtout pour que les possibilités de révisions restent ouvertes. Il faut poser une première pierre.

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