Être socialiste,
ce n'est pas seulement limiter les dégâts



Entretien avec Julien Dray, animateur du Nouveau Parti socialiste,
paru dans le quotidien Libération daté du samedi 18 janvier 2003.
Propos recueillis par Didier Hassoux


 

Vos concurrents vous accusent d'être incapables de vous accorder sur de nombreuses questions...
Quand on a, comme nous, la volonté de « brasser la cage » comme disent les Québécois, quand on mélange des parcours politiques aussi divers que les nôtres, cela nécessite de discuter, discuter et encore discuter. Le texte que nous avons déposé est très clair sur le rôle des services publics, sur les hausses des salaires et la lutte contre la précarité. Nous sommes également d'accord sur l'importance du maintien du niveau des retraites. Quant à leur financement, nous avons des discussions entre nous. Mais ce sont les mêmes débats qui traversent toute la société. Si la solution était simple, on l'aurait déjà trouvée.

Quels sont les points non négociables de votre contribution ?
On ne pourra pas reconstruire un PS qui soit un parti de masse, un parti populaire, sans changement réel. Je vois quatre points particulièrement importants. Il faut d'abord tourner le dos à la politique d'accompagnement social de la mondialisation libérale. Etre socialiste, ce n'est pas seulement limiter les dégâts. Pour cela, il faut en finir avec une construction libérale de l'Europe. L'impératif c'est qu'elle devienne, enfin, un instrument de conquêtes sociales. La croissance est chaotique certes, mais elle existe. Les socialistes doivent réapprendre à l'utiliser pour résorber les inégalités, notamment en revalorisant les salaires et en refusant la précarité. Enfin, nous proposons un régime véritablement démocratique : la VIe République.

Avec qui pourriez-vous faire alliance pour renverser l'actuelle direction du Parti socialiste ?
Je reste fidèle à ce que je dis depuis le début : si l'on veut que ce congrès soit utile, il faut à tout prix sortir des questions de personnes et des tractations d'arrière-cuisines. Nous n'excluons personne. Avec nous, une chose est sûre : il n'y aura pas de combine de couloir ou de petits arrangements entre amis. Nous allons rencontrer tout le monde pour examiner les convergences qui pourraient créer les conditions d'une véritable nouvelle majorité.

Les amis de François Hollande dénoncent votre « arrivisme »...
Si j'étais un arriviste, croyez-vous que j'aurais voté contre la guerre du Golfe contre l'avis de mon parti et de François Mitterrand ? Est-ce que j'aurais dénoncé, en 1997, alors que Lionel Jospin venait d'accéder au pouvoir, le traité d'Amsterdam ? Cela m'a d'ailleurs valu un blâme. Est-ce que j'aurais pris de tels risques pour donner au PS une nouvelle orientation par rapport au problème de la sécurité ? Dans ce congrès de Dijon, le plus confortable, c'est de rester bien au chaud derrière François Hollande, pas de passer ses journées à circuler dans toute la France, et ses nuits à écrire des textes.

Allez-vous présenter un candidat contre François Hollande ?
Nous verrons au cours des semaines à venir. Le problème n'est pas Hollande. La question pour nous est d'abord celle des idées. Si François fait les ruptures nécessaires, il aura une majorité. Sinon il faudra une alternative. Je crois que le PS de l'après-21 avril ne sera pas prêt à supporter ces synthèses artificielles que les éléphants s'empressent de déchirer sitôt le congrès terminé. Les batailles de califes finissent par lasser.

Êtes-vous pour le parti unique de la gauche ?
Je ne crois pas aux formules gadgets. La priorité pour la gauche, c'est qu'elle réapprenne à travailler ensemble. Pas dans des «réunions au sommet» mais à partir du terrain. C'est le sens de la nouvelle coalition arc-en-ciel que nous proposons de mettre en place.

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