Le NPS s'enferme dans l'opposition



Entretien avec Julien Dray, co-fondateur du Nouveau Parti socialiste,
paru dans le quotidien Libération daté du mardi 18 février 2003.
Propos recueillis par Paul Quinio


 

Arnaud Montebourg et Vincent Peillon considèrent que vous ne faites plus partie du NPS. Vous êtes viré ou c'est vous qui partez ?
J'ai fondé, avec eux, le Nouveau Parti socialiste. Je n'ai pas à le quitter. Mais j'ai le droit de poser des questions sur la stratégie à suivre. Veut-on être utile au PS, ou est-on simplement là pour prendre date, pour commencer une longue mar che personnelle, pour faire un coup ?

Vous visez Arnaud Montebourg ?
Sans commentaire. Je préfère tourner ma langue sept fois dans ma bouche avant de dire des bêtises. Ce n'est pas une querelle personnelle.

Pourquoi ce divorce ?
La bataille du congrès n'est ni une revanche, ni la préparation d'un coup d'Etat. Il me semble important, pour ne pas rester dans un discours imprécateur, de participer à la discussion qui a lieu autour de François Hollande avec toutes les autres contributions. Sinon, cela veut dire que le congrès est déjà joué et que la seule question qui compte, c'est celle du rapport de force avec le premier secrétaire. Cet argument, je le conteste.

Vous serez donc présent à la réunion des signataires de contributions autour de François Hollande ?
Il fallait déjà y aller la semaine dernière. La décision de ne pas s'y rendre constitue un tournant par rapport à la stratégie initiale du NPS. Moi, je sais ce que je veux depuis le début. Je veux créer les conditions pour peser sur la majorité et réancrer le PS dans le combat social. Il n'y a pas de divergences fondamentales avec le texte de Hollande. Mais il subsiste beaucoup de flou. D'où la nécessité de participer à la discussion en posant des questions, sur l'Europe, les institutions, la précarité, les salaires, ou la coalition «arc-en-ciel» comme stratégie d'alliance à gauche. Le NPS est en train de s'enfermer dans une stratégie d'opposition frontale. Or les militants ne veulent pas d'un combat fratricide.

Vous pourriez vous retrouver sur la même motion que Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn ?
Tout dépend du contenu du texte. C'est tout le problème de ce congrès : peut-on faire confiance aux gens ? Dans un parti politique, si on fonctionne uniquement sur la défiance, on ne s'en sort plus, c'est la scission permanente. On peut être utile à son parti sans perdre son âme.

Regrettez-vous d'avoir cofondé le NPS ?
La force du NPS n'est pas liée à tel ou tel individu. Ce que nous avons fait au départ, en brassant les idées, en mélangeant des cultures, a été utile. Je ne veux pas gaspiller cet acquis. Après le congrès, l'imprécation des mots et le fétichisme des formules, il faudra bien vivre ensemble. L'adversaire principal, c'est la droite. Je me vois mal être dans l'opposition à l'opposition. Nous ne sommes pas là pour être minoritaires pour le plaisir d'être minoritaires. Certains au NPS pensent que ce congrès n'est pas décisif pour leur génération. Que serait cette génération qui, pour des raisons obscures, ne donnerait pas au PS le meilleur d'elle-même au moment où il en a le plus besoin ? C'est maintenant qu'il faut être disponible, pas dans trois ans. On n'a pas le droit de sauter un tour. On a besoin d'un PS fort tout de suite.

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