Strauss-Kahn invite Bayrou à se prononcer contre l'alliance avec Sarkozy | |
Entretien avec Dominique Strauss-Kahn, député du Val-d'Oise, paru dans le quotidien Le Monde daté du 10 mars 2007. Propos recueillis par Arnaud Leparmentier et Isabelle Mandraud |
Lorsque François Bayrou a fait de vous un premier ministre potentiel de sa majorité, vous avez laissé dire… Pourquoi ?C'est certes un homme de droite, mais il a donné des signes de rupture par rapport à Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Est-ce que ces signes de rupture en font une solution pour la France ? Je ne le crois pas : en mettant sur le même plan le PS et l'UMP, il est injuste sur le passé et inopérant pour l'avenir. Est-ce que cela en fait le meilleur candidat pour battre Nicolas Sarkozy ? Je ne le crois pas davantage. Il ne peut ni ne veut rassembler l'ensemble de la gauche, or c'est nécessaire pour battre Nicolas Sarkozy. Ségolène Royal, parce qu'elle n'est pas centriste mais occupe une position centrale, est la mieux placée pour rassembler. François Bayrou devra finir par se déterminer. S'il va jusqu'au bout de sa logique - et je l'y encourage ! -, il se prononcera contre l'alliance avec Nicolas Sarkozy au second tour. Cela fera une belle majorité pour battre Sarkozy et pour changer la France. Vous suggérez au candidat centriste de rallier Mme Royal ?Le candidat centriste est donc compatible avec la gauche ?Vous faites une ouverture à l'électorat centriste ?La progression de M. Bayrou dans les sondages signifie-t-elle que le clivage droite-gauche a du mal à s'installer ?Cette campagne est beaucoup trop remplie d'anecdotes. Les Français sont dessaisis des débats. Nicolas Sarkozy organise le brouillage, en citant Jaurès et Blum, et se fait le champion du travail, " travailler plus pour gagner plus ". Or, il a été rappelé mille fois que ce ne sont pas les salariés qui décident des heures supplémentaires, et que ça n'apporte aucune solution aux salariés en temps partiel subi. C'est une approche très différente, sur le pouvoir d'achat, de celle que propose la gauche avec l'ouverture d'une grande négociation avec les partenaires sociaux qui traite de la hausse du smic et de la revalorisation des petites retraites mais aussi de toute la revalorisation des carrières professionnelles… Sur la question fiscale, Nicolas Sarkozy dit qu'il faut baisser de 4 % les prélèvements obligatoires alors que chacun sait très bien que le problème central du pays, c'est celui de la dette, sur laquelle Ségolène Royal a mis l'accent, et que cela impose de stabiliser les prélèvements obligatoires. Dire, comme le fait Nicolas Sarkozy, qu'on veut faire passer le bouclier fiscal à 50 % revient en fait à supprimer l'ISF. Dans ces conditions, qu'il le dise clairement ! Que le débat commence enfin sur les objectifs, les priorités, les solutions, les modalités… sous le regard des Français. Quelle relance faut-il pour l'Europe ?Avec la présidence allemande en 2007, la présidence française en 2008 et les élections européennes en 2009, la fenêtre est étroite, mais elle existe. Pour le reste, il faut écarter le " mini-traité " version Sarkozy parce qu'il manque d'ambition et heurte les dix-huit pays qui ont dit oui à la Constitution européenne. Nous n'avons pas besoin d'un traité " moins ". Nous avons besoin d'un traité " plus ", qui réponde aux attentes sur le social, l'environnement, la gouvernance économique, de ceux qui sont inquiets d'une Europe trop libérale. Ce nouveau traité doit-il être soumis à un référendum ?La présence de l'Etat dans le capital d'EADS est-elle nécessaire ?Cette gouvernance bicéphale, il faut y mettre fin ?Mais vous êtes d'accord avec la demande de Ségolène Royal d'une recapitalisation par les Etats et d'une participation des régions ? |
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