Régionales 2004 :
Il faut crier fort dimanche

Dominique Strauss-Kahn
Entretien avec Dominique Strauss-Kahn, député du Val-d'Oise, paru dans Le Parisien daté du 22 mars 2004.
Propos recueillis par Dominique de Montvalon
 

Le 21 mars, c'est l'échec de Raffarin ou une victoire de la gauche ?
Les Français ont censuré Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin, le gouvernement et la majorité UMP-UDF. Et ils avaient de nombreuses manières de le faire : ils ont choisi de voter pour la gauche. Maintenant, nous n'en sommes qu'à la mi-temps. Pour que la victoire soit réelle, il faut que chacun vienne dimanche déposer un bulletin de gauche dans les urnes.

La droite suggère que vous devez, une fois de plus, beaucoup au FN...
Arrêtons !... Il y a des électeurs au FN qui viennent de la gauche comme de la droite. Qui s'est allié avec le FN lors des élections régionales de 1998 si ce n'est MM. Millon, Blanc ou Soisson ? Ils en paient d'ailleurs aujourd'hui le prix. Et qui a fait barrage au FN lors du second tour de la présidentielle, si ce n'est la gauche ?

Admettez-vous que Jean-Pierre Raffarin a été, comme le disent ses amis, un chef de gouvernement courageux ?
Non, pas du tout ! Le courage, en politique, n'est pas de prendre aux plus modestes pour donner aux plus riches. C'est l'inverse. Le courage n'est pas de cacher la vérité, mais de la dire. Le courage n'est pas de servir ses clientèles, mais l'intérêt général. Le Premier ministre vient de répéter qu'il tiendra bon, et poursuivra les réformes... Eh bien, que chacun médite cette phrase ! Cela signifie qu'il n'a pas entendu le message des Français. Il poursuivra exactement la même politique s'il n'est pas sanctionné dimanche prochain.

Quand Bernadette Chirac en Corrèze indique qu'elle soutient Nicolas Sarkozy « avec ardeur », est-ce l'annonce d'un virage de l'Elysée qui va conduire le ministre de l'Intérieur à Matignon ?
La question n'est pas de savoir qui sera le prochain Premier ministre, mais quelle est la politique qu'il conduira. Or Nicolas Sarkozy peut difficilement faire croire qu'il n'a pas été associé à la définition de la politique gouvernementale. Il est numéro deux du gouvernement, vous savez !

L'Espagnol Zapatero est-il le nouveau modèle du PS ?
José Luis Zapatero est un ami. Sa victoire est une bonne nouvelle pour la gauche et pour l'Europe. Cela dit, la question pour le PS n'est pas d'importer un modèle, mais d'en proposer un pour la France.

François Hollande vient-il de gagner ses galons de présidentiable ?
La victoire n'est pas acquise : elle est entre les mains du peuple de gauche. C'est à lui qu'elle appartiendra. François Hollande, comme d'autres, y aura beaucoup contribué.

Comment interprétez-vous la « résurrection » du PC ?
Je n'ai, pour ma part, jamais enterré le Parti communiste. Je n'ai donc pas besoin de le ressusciter. Et je me félicite qu'une partie de l'extrême gauche ait refusé le sectarisme de Mme Laguiller en votant pour Marie-George Buffet et Claire Villiers.

La reconstitution de la gauche plurielle, n'est-ce pas un hommage à Lionel Jospin ?
Ce n'est pas la reconstitution de la gauche plurielle : nous sommes en train d'inventer une nouvelle alliance, construite à partir d'un projet partagé. En revanche, les Français se sont rendu compte que la gauche, ce n'était pas la droite, et que les priorités de Lionel Jospin n'étaient pas celles de Jean-Pierre Raffarin.

De quoi la France souffre-t-elle ?
La France souffre de l'absence d'un chef d'Etat porteur d'un projet et capable de lui indiquer un chemin.

Quelle leçon Jacques Chirac doit-il tirer de ce qui vient de se passer ?
Il devrait radicalement changer de politique. Entendre ceux qui souffrent. Abandonner le projet de démantèlement de la Sécurité sociale. Renoncer à la remise en cause du code du travail. Arrêter la casse de l'emploi. Répondre - enfin ! - aux inquiétudes des chercheurs dont dépend une partie de l'avenir de la France. Pour qu'il entende bien, il faut crier fort dimanche prochain...

La modestie ostensible affichée par les ténors du PS n'est-elle pas hypocrite ?
Nous avons tiré les leçons du 21 avril.

Le duel Huchon-Copé est-il décisif ?
Oui. Il faut battre Jean-François Copé. Parce qu'il est... le porte-parole du gouvernement Raffarin. Parce que ses propositions ont été qualifiées de « démagogiques » par André Santini lui-même. Parce qu'il lance un appel clair au FN. Parce qu'il n'est pas capable de rassembler notre région dans sa diversité politique, culturelle et sociale. Donc, je suis optimiste. Je suis totalement engagé derrière mon ami Jean-Paul Huchon. Il a le projet et les qualités pour être un grand président de la région Ile-de-France.

© Copyright Le Parisien.com


Page précédente Haut de page

PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]