L'euro,
un petit morceau d'Europe sur soi

Dominique Strauss-Kahn
Point de vue signé par Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'Économie et des Finances, paru dans L’Hebdo des Socialistes daté du 20 novembre 1998.


 
Pour la première fois en Europe, par la voie pacifique, 290 millions d'hommes et de femmes ont décidé d'unir leurs destins en partageant leur souveraineté monétaire pour mieux l'exercer.

Loin d'être un renoncement, l'euro est un espoir de progrès économique et social et une conquête. Une conquête de souveraineté : l'euro nous rend des marges de manœuvre économiques, il est l'instrument de maîtrise de la mondialisation. Une conquête d'identité également. De Lisbonne à Helsinki, de Paris à Vienne, ce sera un symbole exceptionnel d'identité européenne au quotidien. L'euro, c'est un élément fondamental de la construction politique de l'Europe. En 2002, avoir l'euro en poche sera avoir un petit morceau d'Europe sur soi.

Les conditions sont aujourd'hui réunies pour mener une politique de croissance en Europe, fondée sur l'euro.

• Les politiques économique et monétaire doivent être conduites en vue de mobiliser le potentiel de croissance que recèle l'euro, en veillant à ne pas compromettre la stabilité des prix et des taux de change. Cela signifie aujourd'hui poursuivre l'assainissement des finances publiques, tandis que la politique monétaire doit veiller à maintenir les conditions d'une croissance non inflationniste.. Pour mettre en œuvre cette combinaison des politiques budgétaires et monétaires, la coordination des politiques économiques, sur laquelle la France a insisté depuis un an et demi, est particulièrement nécessaire.

• L'euro a déjà commencé à jouer son rôle positif. Dans les turbulences financières récentes, d'une ampleur exceptionnelle, les taux de change des Onze n'ont pas bougé; les taux d'intérêt sont restés à leurs niveaux exceptionnellement faibles (4,3 % à 10 ans). Cette réduction de la contrainte de change, cette faiblesse des taux d'intérêt ne peuvent qu'être favorables à l'investissement, à la consommation, donc à la croissance : la Commission estime que la zone euro sera la plus dynamique des pays industrialisés de 1998 à 2000. En outre, la très faible inflation profite directement aux ménages, avec des progressions de pouvoir d'achat (+3 % en 1998) qui n'avaient pas été vues depuis longtemps.

L'euro ne nous isole cependant pas du reste du monde.
Lorsque le Japon, les pays émergents d'Asie, la Russie... sont en récession, nous en subissons les effets. C'est pourquoi le gouvernement français a proposé à ses partenaires européens, il y a un mois et demi, une série de propositions visant à mieux organiser le système financier international, par plus de transparence pour l'ensemble des acteurs, et par plus de légitimité politique donnée aux institutions financières internationales. Dans le cadre de cette réflexion sur un système financier international mieux ordonné, la stabilisation des taux de change entre les principales devises est une question importante. Je ne suis pas favorable à une politique de change de l'euro fondée sur " une douce insouciance " européenne.


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