La volonté de rénover et l'expérience de l'Etat

DSK
Entretien avec Dominique Strauss-Kahn, député du Val-d'Oise, paru dans le quotidien gratuit 20 Minutes daté du 4 octobre 2006
Propos recueillis par Bastien Bonnefous


 

François Hollande estime qu'une candidature « s'est incontestablement installée » au PS, faisant allusion à Ségolène Royal. Outrepasse-t-il son rôle de premier secrétaire ?
Je crois qu'il se trompe. S'il y a un débat et un vote, c'est bien parce que personne n'est « incontestable ». D'ailleurs, je n'aime pas cette idée qui se marie mal avec la démocratie. Son rôle aujourd'hui est d'assurer la neutralité de l'appareil du parti à l'égard des différents candidats.

Trois candidats, la situation est enfin clarifiée ?
Restons lucides : pour les Français, la situation ne sera clarifiée que lorsque les socialistes auront un candidat ! Mais trois candidatures à l'investiture, c'est un début de clarification, d'autant plus que chacun incarne une sensibilité identifiable. Pour ma part, je représente la sensibilité sociale-démocrate. Je partage avec Ségolène la volonté de rénover - on ne peut pas construire demain la même gauche que par le passé - et je partage avec Laurent le fait qu'il faut avoir l'expérience de l'Etat pour mener le pays.

Les six débats d'ici au vote des militants ne risquent-ils pas de diviser encore plus le PS ?
Pas du tout ! Au contraire ! Cessons d'avoir peur de tout et à commencer de nous-mêmes. Ce qui pourrait nous menacer serait de donner le sentiment de corseter le débat à l'excès. Ce qui nous renforcera, c'est de réussir à conduire des débats de fond, vivants, centrés sur les vrais problèmes des Français. Après la désignation du candidat, pour la campagne présidentielle, je n'ai aucune inquiétude : les socialistes sauront se rassembler.

Lionel Jospin devrait-il naturellement vous soutenir ?
Lionel Jospin est un homme libre. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai aimé mener avec lui tous les combats depuis plus de vingt ans. Il a indiqué pour qui il ne voterait pas. Il a dit qu'il allait regarder la campagne avant de se prononcer. Si vous pensez qu'il serait naturel qu'il vienne vers moi, c'est une opinion qui me réjouit.

Avez-vous le sentiment que l'insécurité redevient un thème de campagne comme en 2002 ?
C'est clairement la stratégie de Nicolas Sarkozy. C'est d'ailleurs paradoxal au moment où vingt-neuf préfets viennent de critiquer sa politique et où lui-même n'a trouvé, pour seule échappatoire, que de désigner les juges comme boucs émissaires. Si je suis le candidat du Parti socialiste, je centrerai la campagne sur les vrais problèmes économiques et sociaux des Français : le pouvoir d'achat, la précarité, l'emploi, l'éducation, le logement, les retraites ainsi que sur les grandes questions de l'avenir que sont l'après-pétrole et le vieillissement. Voilà mes principales priorités.

Le 18 septembre, vous avez parlé à New York de « dynamiter » le système universitaire français. Pourquoi ne pas tenir un discours aussi tranchant en France ?
Le mot a été mal choisi mais, je ne veux pas biaiser : je tiens le même discours quel que soit le lieu et quel que soit l'auditoire. Ce que j'ai dit à New York, je l'avais déjà écrit dans 365 jours, mon livre sorti en mai. J'enrage de voir le rang occupé par nos universités dans les classements mondiaux. J'enrage de voir l'état dans lequel sont nos universités. Tout cela est inacceptable. Alors, oui, au-delà de la formule, je pense qu'il faut une véritable refondation de nos universités pour qu'elles retrouvent l'excellence. Et si demain par exemple, des entreprises privées citoyennes veulent, par des dons, financer des labos ou des chaires universitaires, comme cela se passe dans les autres pays, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas.

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