Traité constitutionnel européen
Cette campagne doit laisser des traces

Dominique Strauss-Kahn



Entretien avec Dominique Strauss-Kahn, député du Val-d'Oise, paru dans le quotidien Sud Ouest daté du 26 novembre 2004
Propos recueillis par Bruno Dive
 

Vous écrivez dans votre ouvrage (Lettre ouverte aux enfants d'Europe - Grasset) qu'en Europe, pour la première fois, nous avons un traité politique. Or les opposants à la Constitution lui reprochent justement de contenir toute une partie économique qui n'aurait rien à y faire...
C'est la première fois qu'on aborde vraiment les questions touchant à la fois l'organisation des pouvoirs en Europe et des questions sociales, qui sont tout de même plus politiques que les droits de douane, par exemple ! Cela ne veut pas dire que tout le traité ne soit que de la politique. Puisque, comme tous les traités européens, il reprend les accords précédents. Les partisans du non disent que ça n'a rien à faire dans une Constitution. Ils ont raison ! Mais ce n'est pas une Constitution ! Le Conseil constitutionnel vient de le rappeler. Une Constitution, c'est ce qui fixe les relations entre les individus, un peuple et un Etat. Là, il n'y a pas de peuple européen. C'est un accord entre les Etats, un traité.

Autres arguments des tenants du non : toute révision du traité sera impossible. Et les coopérations renforcées très difficiles à mettre en œuvre.
La révision est difficile ; elle n'est pas impossible. Pas plus que pour les précédents traités. On peut dire que c'est plus difficile car nous sommes maintenant vingt-cinq. Mais si on refuse ce traité et qu'on en fait un autre, nous serons toujours vingt-cinq ! Quelques clauses (l'initiative parlementaire) offrent, au contraire, un peu plus de possibilités que précédemment pour une éventuelle révision. Les coopérations renforcées seront plus faciles que par le passé. Il n'y aura plus besoin de l'unanimité du Conseil des ministres européens. D'autre part, leur champ est étendu. La seule chose qui rend la vie plus compliquée, c'est qu'on est plus nombreux.

Cette fin de campagne marque un durcissement des positions. On peut donc se demander, avec Lionel Jospin, s'il était bien raisonnable d'organiser ce référendum interne ?
Par principe, je ne suis pas très favorable au référendum. Mais nos statuts le prévoient depuis le congrès de Dijon et François Hollande ne pouvait s'y opposer.

Cette campagne laissera-t-elle des traces ?
Oui, sans doute, et il faut qu'elle en laisse. Selon que le oui ou le non l'emporte, les choses s'organiseront différemment. Par exemple, nous n'aurons pas le même projet.

Et cela ne vous gênerait pas de faire ensuite la campagne avec Chirac, voire pour Chirac ?
Méfions-nous de ce genre de rapprochement ! Je ne reproche pas à ceux qui défendent le non de voter avec Le Pen ou Villiers. Sur des grandes questions comme l'Europe, il est normal de suivre ses convictions quoi que fassent les autres. Par exemple, sur la guerre d'Irak : fallait-il l'approuver sous prétexte que Chirac s'y opposait ? Sur l'Europe, c'est plutôt Chirac qui est venu sur nos convictions que le contraire.

Et si c'est le non, ferez-vous ensuite campagne au niveau national ?
Si c'est le non, je ne ferai rien qui puisse nuire à mon parti. Mais il ne faut pas me demander d'aller défendre des choses auxquelles je ne crois pas. Ce sera le travail des promoteurs du non.

En saura-t-on un peu plus, le 2 décembre, sur le nom du candidat PS à la présidentielle ?
Je ne crois pas. On saura lesquels ne peuvent plus être candidats.

François Hollande a-t-il gagné ses galons de présidentiable dans cette campagne ?
Il les avait déjà. Il y a au PS plusieurs hommes ou femmes qui peuvent porter ses couleurs à la prochaine présidentielle. Mais attendons que le oui l'ait emporté...

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