Pour une nouvelle gauche | |
Contribution générale au congrès national de Dijon présentée par Jean-Patrick Gille, premier secrétaire fédéral d'Indre-et-Loire. 18 janvier 2003 |
Ce texte n’est pas un positionnement supplémentaire dans le concert
discordant des postures individuelles et des impostures médiatiques que constituent le débat politique tel qu’il est désormais présenté au grand public dans notre pays. Il se veut être une contribution à la réflexion des socialistes cherchant à analyser leur défaite tant du point de vue national, c’est à dire de nos institutions particulières et de l’histoire de la gauche en France*, que du point de vue européen, de l’essoufflement de la sociale-démocratie et de la montée du populisme, sans oublier le point de vue mondial avec la nécessité de redéfinir ce qu’est et ce que peut la gauche face à la mondialisation libérale. L’ambition de ce pré-texte est aussi, à partir de ces constats, d’essayer d’esquisser les moyens de renouveler la doctrine, le fonctionnement et les objectifs de la gauche en France : en s’inscrivant dans un cadre européen, en se pensant comme un mouvement plutôt qu’un cartel de partis, en intégrant pleinement le raisonnement écologique, en menant une bataille culturelle et pas seulement une lutte pour l’exercice du pouvoir, en proposant une alternative au mode de développement mondial actuel. * par bien des aspects la période que nous venons de vivre fait penser à celle qui prévalait à la moitié du XIXème siècle, lorsque le souffle progressiste et républicain de la révolution de 1848 est progressivement retombé et que la conquête du suffrage universel a permis l’élection de Napoléon comme Président de la République, qui s’est alors appuyé sur des courants contradictoires pour rétablir l’empire. Si Chirac appartient à la droite bonapartiste, c’est à celle de « Napoléon le petit », qui conduisit une France de plus en plus réactionnaire du triomphe de l’affairisme libéral à la Débâcle de 1870 ! |
I/ L’ECHEC DE LA GAUCHE | |
Le rejet de la gauche gouvernementaleAlors que les gouvernements de la Gauche Plurielle ont fait reculer le chômage, engagé des réformes sociétales et rétabli les comptes sociaux tout en dynamisant l’économie, Lionel Jospin a subi une lourde défaite en étant devancé par le Front national au premier tour de l’élection présidentielle et en étant éliminé du second. S’il est vrai que la droite, avec le soutien plus ou moins volontaire des média audio-visuels, a su créer un climat de pré-crise durant la période électorale en jouant sur la peur, l’insécurité, le rejet de l’autre et les promesses démagogiques, cela ne suffit pas à expliquer l’ampleur du revers subi par la gauche de gouvernement. Tout s’est passé comme si nos concitoyens avaient engrangé les avancées et les bons résultats de la gauche, puis fait le choix de la régression sociale, voire nationale pour certains, espérant en tirer un bénéfice individuel et ralentir les évolutions inéluctables de notre société, qui leur semblaient menaçantes pour leur situation. Autant de phénomènes que forts de leur bilan, nos ministres et nos dirigeants ont ignorés ou sous-estimés. Cette cécité collective est aussi sûrement imputable à la difficulté de se faire entendre dans notre parti, où les enceintes délibératives ne sont pas les véritables lieux de décision, où les cabinets ministériels ont infiniment plus de poids que les fédérations, où les sondages sont plus suivis que les positions du parti lui-même, celui-ci ayant essentiellement vocation à n’être qu’une machine à sélectionner les candidats et à mener campagne sous les recommandations des communicants. Mais peut-il en être autrement dans notre société d’images et de communication immédiate, dans un monde complexe où l’intervention du politique est présentée en termes de « marges de manœuvre » dans le cadre d’une économie mondialisée, et réduite à des expressions caricaturales sous formes de « petites phrases » et d’enjeux de personnes ? Lors des dernières élections, une bonne partie de l’électorat, notamment dans les milieux modestes, ne s’est pas reconnue en nous. A leurs yeux, nous incarnions le pouvoir et même une conception assez administrative du pouvoir. Ceci s’explique en partie par l’usure due à cinq années de gouvernement, mais aussi par notre approche très étatique de la réforme. Comment un Etat qui peine à se réformer lui-même peut-il être le moteur de la réforme ? Cette désaffection provient aussi de notre difficulté à renouveler nos dirigeants, qui finissent par avoir des profils très proches, jusqu’à apparaître comme une sorte de « noblesse républicaine », coupée de la réalité quotidienne des Français. D’un parti qui avait la volonté de renouveler, voire de réformer l’appareil d’Etat, nous en sommes arrivés à un cartel de chefs issus de la haute administration et à une prise de décision confisquée par les cabinets. En un sens, c’est l’appareil d’Etat qui a conquis le parti plus que l’inverse. Pour s’en convaincre, il suffit de compter le nombre de nos dirigeants actuels qui ont commencé ce qu’il faut bien appeler une carrière dans un cabinet ministériel plutôt que sur le terrain. Si l’ascenseur social est en panne dans la société, c’est encore plus vrai dans nos instances dirigeantes. La gauche est avant tout un mouvement culturel et socialTant qu’elle restera un simple parti politique, c’est-à-dire avant tout une structure
militante destinée à conquérir et exercer le pouvoir d’État, notre organisation restera
marquée par les travers de ce type d’organisation, dont le modèle de référence
demeure, malgré nous, celle du Parti léniniste : culte du chef, caporalisation,
bureaucratie et établissement d’une nomenklatura... C’est pourquoi nous devons nous transformer en un mouvement qui irrigue toute la société, et qui la reflète. Notre stratégie ne doit pas se limiter à vouloir transformer la société par le haut, mais à l’influencer à tous les niveaux. L’accession au pouvoir ne doit pas être la finalité ultime de notre action, mais seulement un des moyens pour initier une société de liberté, plus fraternelle dans un monde plus juste. Le combat que nous menons est aussi un combat culturel, qui nécessite de développer une contre-culture à l’idéologie libérale aujourd’hui dominante, plutôt que d’en intégrer progressivement les postulats. A ce titre, nous devons aussi nous poser la question des média et réfléchir à organiser nos propres circuits d’informations et de communications, indépendants du pouvoir de l’argent, afin que ce ne soit pas le trio « Bouygues, Dassault, Lagardère », c’est-à-dire les « bétonneurs et les marchands d’armes » qui fassent l’opinion. Internet nous offre vraisemblablement des possibilités d’interactivité que nous n’exploitons pas assez. Le chemin vers la démocratie et l’égalité n’est pas une pente naturelle, mais requiert une dimension pédagogique, voire éducative pour dépasser les égoïsmes et améliorer les règles du mieux vivre ensemble, tout en favorisant l’épanouissement personnel de chacun. Absorbés par la gestion, nous avons déserté le combat idéologique, la bataille des idées et des idéaux. Nous avons oublié de redonner du sens global à notre action, et nous nous sommes positionnés en experts de la chose publique. Il est vrai, que pour une fois, la gauche au pouvoir n’était ni confrontée à une crise grave, ni empêtrée dans des compromissions. Se croyant forte de son relatif succès, elle a cru qu’il suffirait à la reconduire dans ses fonctions. C’était oublier un peu vite que dans notre pays l’élection présidentielle nécessite d’esquisser un projet de société, et ne peut se limiter à désigner l’équipe gouvernante. L’échec de la gauche n’est pas seulement national, il est aussi européenL’autre raison de notre disgrâce a été notre incapacité à évoquer les enjeux de la construction de l’Europe et de son élargissement. Comment se fait-il que les sociaux-démocrates à la tête, pendant quelques années, de 11 Etats membres sur 15, n’aient pas été capables de donner une autre orientation à l’Europe et qu’ils aient subi l’hégémonie de la pensée libérale, produisant dérégulations, privatisations et surtout
incompréhension ? La construction européenne voulue par les Etats nationaux pour pouvoir peser à l’échelle de la planète et résister à la mondialisation de l’économie libérale, qui ne connaît pas de frontières et déstabilise les équilibres sociaux en exigeant toujours plus de dérégulation et en précarisant le marché de l’emploi, apparaît en même temps comme le vecteur de ces dérégulations et de cette mondialisation dévastatrice (souvenons-nous des incompréhensions suite au sommet de Barcelone). Faut-il en conclure que le socialisme ne s’applique que dans le cadre national et qu’en pleine mondialisation il est voué à disparaître ou qu’au contraire il est possible et même nécessaire de faire vivre une dimension internationaliste, qu’il faut néanmoins redéfinir notamment si l’on considère l’état de l’Internationale Socialiste. Nos difficultés proviennent aussi paradoxalement de la réussite de la sociale-démocratie, c’est-à-dire qu’elle a accompli son programme fixé à l’issue de la seconde guerre mondiale, en installant un «État-social » ( congés payés, retraites, assurances santé, indemnisation du chômage …) dans chaque pays et en établissant la paix grâce à la construction européenne. En effet, qu’avons-nous proposé aux électeurs, si ce n’est de poursuivre et de renforcer notre action - qui à nos yeux mêlait réussite économique, amélioration de la justice sociale, lutte contre l’exclusion - et de garantir la sécurité sociale, les retraites, les congés payés ? L’enracinement du populismeIl faut revoir notre analyse du vote de l’électorat populaire en faveur de l’extrême
droite et reconsidérer notre manière de lutter contre le Front National. Il existe
désormais un électorat populiste constitué, devenu comme dans d’autres pays
européens la 3ème force politique. Il s’enracine dans la peur et le refus de
l’immigration, aujourd’hui confortée par la politique sécuritaire du gouvernement. Il
s’appuie aussi sur le sentiment que (malgré la baisse du chômage, la « prime pour
l’emploi » et les « 35 heures ») les principaux bénéficiaires des politiques menées
par la gauche étaient d’une part les plus démunis (avec la CMU et l’APA) et d’autre
part les classes moyennes supérieures (bénéficiant des baisses d’impôts). En votant
massivement pour les candidats de la droite classique au deuxième tour des
législatives, les électeurs du FN ont assuré sa victoire, tandis qu’une frange de la
gauche radicalisée refusait son soutien à la gauche de gouvernement. Force est de constater que Jacques Chirac a réussi à la fois à unifier la droite et à rejeter l’extrême droite tout en en bénéficiant au second tour, soit comme repoussoir, soit comme réservoir de voix. Sans s’allier avec lui, la droite unie a encore besoin du FN pour gagner, car celui-ci lui « gèle » toute une partie de l’électorat populaire. Un nouveau succès de la gauche ne peut donc plus être bâti sur les divisions de l’adversaire mais nécessite une victoire arithmétique, c’est à dire l’adhésion d’une majorité de Français à nos valeurs. C’est donc avant tout l’opinion que nous devons conquérir, en animant un mouvement de toute La Gauche, mobilisant les partis, les syndicats, les associations et les citoyens, qui ne se résignent pas devant l’ordre économique et qui se reconnaissent dans les valeurs de justice sociale, d’émancipation, de laïcité, de développement durable... bref tous ceux qui s’intéressent plus à l’indice de développement humain qu’au DOW JONES. |
II/ LES ENJEUX DU CONGRÈS | |
La question qui nous est posée n’est ni de départager les énarques qui ont prétention à nous diriger, ni de trancher une pseudo querelle entre des soi-disant modernistes « sociaux-libéraux » et des orthodoxes « néo-gauchistes », qui en fait se répartissent le pouvoir entre-eux depuis 25 ans en faisant varier les alliances (faut-il rappeler qu’en 1994 Henri Emmanuelli est devenu Premier secrétaire grâce au
soutien de Laurent Fabius, qui souhaitait écarter Michel Rocard ?), ni de ressasser éternellement les qualités et les erreurs de Lionel Jospin. Il s’agit bien plutôt de définir le cadre d’actions et de réflexions dans lequel l’ensemble des personnes se réclamant de la gauche démocratique puisse se retrouver. C’est-à-dire d’esquisser « une nouvelle gauche » réformiste, favorable à la démocratie représentative, ayant intégré l’écologie et situant son action dans le cadre européen, voire mondial en impulsant trois renouvellements majeurs : Le renouvellement doctrinal : c’est une question qui est posée à l’ensemble du mouvement socialiste et social-démocrate et qui n’est plus celle du plus ou moins d’Etat, car cette dernière se résume toujours, une fois en situation de pouvoir, à une simple question de déplacement du curseur entre idéologie et pragmatisme, entre volontarisme et réalisme. Cette querelle a d’autant moins de sens dans un contexte ou les potentiels de l’Etat-Nation s’estompent devant la réalité de la mondialisation des données économiques et sociales. Sinon, il faut dire clairement qu’on se replie sur le cadre national, (mais est-ce encore possible ?) ou bien adopter une stratégie de rupture avec l’économie de marché, qui n’est plus la nôtre depuis quelques dizaines d’années et qui correspond à un autre combat. La question est devenue celle du cadre, de la portée même de l’action politique, face à ce qui nous est présentée comme la toute puissance des marchés. Pouvons-nous encore nous satisfaire d’un raisonnement qui consiste à soutenir la production pour ensuite concentrer notre action sur l’amélioration de la redistribution, c’est à dire tenter de corriger les inégalités engendrées par le système de production, sensé apporter néanmoins un progrès global ? Tout cela sans tenir compte des conséquences sur l’environnement, et en maîtrisant de moins en moins les phénomènes de concentration des richesses. Nous devons intégrer les coûts environnementaux et humains dans le choix des modes de production et dans le calcul de leur coût de production. Certes, les tentatives du siècle précédent pour intervenir directement sur les modes de production et de diffusion par leur « appropriation collective » ont débouché sur un capitalisme d’Etat calamiteux et aggravant les problèmes plus qu’il ne les réglait. D’où notre conversion à l’économie de marché et à un productivisme permettant, au moins dans nos pays, l’élévation générale du niveau de vie. Certes nous pouvons et nous devons nous battre pour un rééquilibrage de la taxation du capital par rapport à celle du travail et instaurer une taxation du capital au niveau mondial destinée au développement. Mais il nous faut aussi entamer à nouveau une réflexion sur les modes de production, et les rapports sociaux qu’ils engendrent avant que les libéraux ne gagnent définitivement la bataille contre la fiscalité en invoquant les limites des seules politiques de redistribution. Il faut à la fois revendiquer que les biens essentiels (l’eau, l’énergie, l’air, l’éducation, la culture, la santé…) ne relèvent pas de la logique du marché, et que le marché lui-même requiert d’être régulé et pas seulement a posteriori. Il nous faut pleinement intégrer le raisonnement écologique et penser en termes de développement durable, c’est-à-dire prendre en compte l’avenir de la planète tant du point de vue de la paix, que de l’environnement, de la nutrition, de la démographie, des inégalités, du savoir et du développement, que de la démocratie. Être socialiste aujourd’hui, c’est aussi être mondialiste et écologiste. A un modèle fondé sur la concurrence entre individus, nous devons opposer le modèle européen de solidarité collective et promouvoir l’autonomie de la personne, c’est-à-dire le droit à l’autodétermination de sa conscience. C’est à partir de ces principes que nous pouvons reposer la question de la laïcité à l’échelle planétaire, mais aussi celle de l’immigration et des flux migratoires. Comment accepter qu’on se batte pour la libre circulation des capitaux et des biens et qu’on entrave celle des personnes, y compris lorsque leur liberté de conscience est menacée ? C’est donc bien le cadre européen - pensé, non pas comme un marché de 400 millions d’individus mercantiles, mais comme le lieu ouvert du déploiement d’un projet politique fondé sur le respect de l’autonomie de la personne garantie par des principes démocratiques et sociaux acceptables par tous - qui nous ouvre à la fois une perspective historique et un espace d’émancipation de la société consumériste. Pour cela nous devons défendre la démocratie représentative, en veillant à la qualité de la représentation des institutions, sinon (et malheureusement nous en prenons le chemin), nous passerons d’une « démocratie de convictions » à une « démocratie de consommation », où les représentants du peuple ne sont plus que des « produits » façonnés par et pour les média. Il ne s’agit pas pour l’heure d’élaborer un nouveau programme de gouvernement, mais d’arrêter nos positions de principe sur des questions essentielles où nous avons manqué de clarté, où nous avons semblé hésiter ou tergiverser, où la réalité nous conduit à faire évoluer nos positions traditionnelles, pour ne pas dire « réflexes » :
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III/ REMPLIR NOTRE DEVOIR D’OPPOSANTS | |
La particularité de la période qui s’est ouverte au printemps dernier est que la France s’est dotée d’un Président dont le moins que l’on puisse dire est que sa réélection n’est pas due à son mérite, mais au réflexe républicain de la gauche, même si sa victoire a entraîné un succès indéniable de la droite aux législatives qui ont suivi. Il n’y a donc pas de crise institutionnelle ouverte, mais néanmoins une interrogation sur nos institutions et leur caractère monarchique. Alors même que pendant les cinq ans de gouvernement, Lionel Jospin avait administré la preuve qu’il était possible de faire jouer pleinement son rôle au parlement, il faut reconnaître que l’inversion du calendrier électoral a brouillé ce message et contribué à sa défaite. Voulant rester dans une lecture respectueuse de la lettre des institutions de la Vème République Lionel Jospin a cru que leur esprit monarchique était surmonté et s’est trompé de campagne. Aujourd’hui et pour la première fois depuis plus de vingt ans, la gauche n’est ni au pouvoir, ni dans la position d’y revenir rapidement. Notre rôle est donc de remplir notre devoir d’opposants, sans perdre de vue l’intérêt du pays. Il nous faut à la fois défendre le bilan des 5 années précédentes et des avancées telles que l’ARTT, l’APA, la CMU, le PACS (peut-être devrions-nous donner des noms plus combatifs et moins administratifs à nos réformes ?), et préparer les conditions d’une alternance permettant de poursuivre l’œuvre engagée, en en corrigeant les erreurs et les manques. Rien ne serait pire que de laisser croire que nous renions notre bilan gouvernemental. L’heure est venue de l’assumer et de le revendiquer pleinement. Le travail qui a été accompli a déjà commencé à être réévalué à une plus juste valeur, et les difficultés dans lesquelles s’enfoncent le gouvernement actuel attestent s’il en était besoin, même aux yeux des plus réfractaires, de la complexité des questions à traiter, et de la capacité dont avait su faire preuve Lionel Jospin de rendre des arbitrages équilibrés (certains diront trop) sous la pression d’une presse pourtant moins complaisante. Il nous faut dénoncer l’esprit réactionnaire qui anime la majorité parlementaire, décrypter sans relâche le double discours du locataire de l’Elysée, démasquer la fausse bonhomie du premier ministre, et souligner les incohérences et les dangers que représente la politique menée. La régression sociale : baisse des impôts pour les plus riches, augmentation des tarifs, la stagnation économique qui s’accompagne de la reprise du chômage, l’abandon de l’effort en faveur de la recherche et de l’éducation, la politique répressive en direction de la jeunesse et de la pauvreté, le retour de l’ordre moral... Enfin l’actualité internationale commande que notre premier devoir d’opposant soit de nous opposer à la guerre contre l’Irak que veut mener G.W. Bush, non pas par pacifisme béat, mais parce que c’est de solutions pacifiques et politiques qu’a besoin le Moyen-Orient et non d’un conflit qui va l’embraser et générer des tensions internationales incontrôlables car dépassant les simples relations entre états. |
IV/ POUR UNE NOUVELLE GAUCHE | |
Ne donnons pas l’image d’un parti centré sur ses querelles et son avenir, alors que se joue celui de la France et de l’Europe. Attachons-nous à construire un mouvement politique fort, irriguant toute la société, et résorbons au plus vite le fossé qui se creuse chaque jour davantage entre « les politiques » (qui sont au mieux dépeints comme une sorte de mal nécessaire) et une « société civile » parée de toutes les vertus. Il n’y a pas plus d’autonomie du social, qu’il n’y a d’autonomie ou d’autarcie du politique. Ne pas le reconnaître, c’est s’inscrire dans l’idéologie libérale qui veut restreindre le champ du politique à la portion congrue pour laisser place au règne du marché. Etre un militant, un responsable, ou un élu politique, ce n’est ni une maladie grave, ni une hypertrophie de l’ego (enfin pas toujours), ni une conduite pré-délinquante, ni le symptôme d’un manque d’amour. C’est une activité humaine très respectable, nécessitant réflexions et actions, un engagement personnel fort, le souci des autres et souvent des sacrifices dans sa vie privée. Si nous avons appris que vouloir faire le bonheur des autres malgré eux finit toujours mal, nous savons aussi qu’il n’y a de bonheur que partagé. Les raisons d’indignation qui à partir de la fin du XVIIIème siècle ont donné naissance aux pensées socialistes n’ont pas disparues et la première d’entre elles, à savoir l’inégalité entre les hommes. C’est pourquoi notre exigence d’une meilleure répartition des richesses, des pouvoirs et des responsabilités demeure d’actualité et doit s’articuler avec le développement des libertés individuelles et le souci de la préservation de la planète ; car, malgré certains progrès, ce sont toujours ceux qui sont détenteurs des capitaux qui engrangent les richesses et ceux qui ont le savoir qui composent l’encadrement. Nos objectifs de redistribution, de démocratie politique et sociale sont loin d’être atteints, car c’est l’argent et ses lois qui demeurent la première source de pouvoir et d’autorité, plutôt que l’utilité sociale et la libre détermination des citoyens. Une nouvelle gauche qui s’émancipe du cadre hexagonale pour bâtir l’Europe et penser globalement, cela signifie aussi une éthique dans la conduite des affaires publiques. Il ne s’agit pas d’invoquer la Morale qui renvoie chacun à sa conscience et à la représentation qu’il se fait du Bien, mais de notre rapport aux autres et de la conformité des actes et des discours. Les questions politiques et donc de pouvoir ne doivent ni relever d’un esprit courtisan d’un autre âge ni d’un cynisme qui n’est plus supportable. Il nous faut trouver l’équilibre entre l’éthique de la conviction qui anime notre engagement et nos discours, et l’éthique de la responsabilité qui doit régir notre action, notamment quand nous sommes au pouvoir. La disjonction des deux, telle que l’incarne jusqu’à la caricature Jacques Chirac, ne peut que ruiner tout projet politique et a fortiori celui de progrès social et humain qui est le nôtre. Il faut éviter de réduire l’action de la gauche à une agitation vertueuse, mais inefficace, ou à l’inverse à un enfermement dans la gestion qui trahit tous les espoirs. La « méthode » de Lionel Jospin a consisté à rechercher sans cesse cet équilibre si délicat, mais certains n’y ont vu qu’un émoussement de la volonté de changement et d’autres un abandon au conformisme ambiant, alors qu’il s’agissait et qu’il s’agit toujours de trouver la voie entre l’action réformatrice et son acceptation par la société, de marquer le bon tempo entre l’urgence du quotidien et la durée nécessaire aux mutations profondes. Après un accablement compréhensible, c’est cette voie qu’il nous faut reprendre pour revaloriser la politique en réaffirmant son primat sur l’économique et poursuivre notre combat pour conjuguer liberté et égalité dans la fraternité. Notre ACTION pour les années à venir pourrait ainsi s’articuler en 10 points :
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