La Constitution européenne n'est pas ultra-libérale : elle est protectrice

Jean Glavany

Point de vue de Jean Glavany, député des Hautes-Pyrénées


 
Les tenants du NON, disent que la constitution européenne serait « ultra-libérale ». Ce slogan ne repose sur rien de sérieux. Car sont bien inscrits dans le texte :
     le droit à une protection contre le licenciement abusif (article II-90) est-ce ultra-libéral ?
     le droit de grève (article II-88) est-ce ultra-libéral ?
     le droit aux congés payés et à la limitation du temps de travail (article II-91) est-ce ultra-libéral ?
     le droit d’accès à une sécurité sociale (article II-94) est-ce ultra-libéral ?
     l’égalité entre les hommes et les femmes (article II-83) est-ce ultra-libéral ?
     le droit à l’éducation gratuite (article II-74) est-ce ultra libéral ?
Tous ces droits, issus de la charte des droits fondamentaux, qui a été défendue par la Gauche française et rédigée par Guy Braibant conseiller d’Etat et militant communiste de longue date, seraient-ils la marque de l’ultra-libéralisme ? On en rirait presque...
     Et la reconnaissance et affirmation du rôle des services publics (article II-96) est-ce ultra-libéral ?
     L’autorisation des aides d’Etat aux services publics (article III-238) est-ce ultra-libéral ?
     La base juridique pour une loi-cadre sur les services publics (article III-122) est-ce ultra-libéral ?
On arrêtera la liste tant la démonstration semble édifiante : tout cela n’a rien, strictement rien à voir avec l’ultra-libéralisme.

Alors, on nous explique que ce texte serait ultra-libéral car l’expression « concurrence libre et non faussée » s’y trouve.

C’est normal, c’est le fruit naturel de l’histoire de l’Europe : puisqu’on a commencé par l’acte unique, la construction du marché unique et de la monnaie unique, on a commencé par l’économique. Mais le pari de Mitterrand, c’était justement que cela entraînerait inéluctablement un « besoin de politique et un besoin de social ».... Nous y sommes enfin !

En effet, on a beaucoup parlé, trop parlé, pendant 15 ans de concurrence, il est temps de parler d’autre chose : c’est justement l’objet de cette constitution, voulue par la Gauche française.

Ensuite, si on ne veut pas de le « concurrence libre et non faussée » parce que cela serait ultra-libéral, il faut dire ce que l’on veut à la place : La concurrence faussée ? Les monopoles ? Cela n’a pas de sens.

Nous savons tous que les consommateurs aimeraient, parfois, un peu plus de concurrence entre les grandes surfaces pour éviter les positions dominantes, Ne croyez-vous pas que les collectivités locales ou les organismes de logement social aimeraient un peu plus de concurrence entre les entreprises de BTP pour éviter les ententes et avoir des appels d’offres plus fructueux ?

Nous, socialistes, nous affirmons que la concurrence dont il ne faut pas faire une religion, n’est pas le signe de l’ultra-libéralisme. D’ailleurs, si ce texte était ultra-libéral, les ultra-libéraux le voteraient ! Or, quel est l’homme politique français le plus ultra-libéral ? Quel est celui qui s’est toujours opposé au SMIC, à la sécurité sociale, aux congés payés, à tous les acquis sociaux ? Il s’appelle Jean-Marie LE PEN et il vote NON à la constitution.

Et si ce texte était ultra-libéral, est-ce que les libéraux anglais voteraient NON ? Pourtant c’est ce qu’ils font, mais parce qu’ils le trouvent trop social !

Si ce texte était ultra-libéral, pourquoi l’immense majorité des syndicats votent-ils OUI ? Pourquoi la totalité des partis socialistes européens votent-ils OUI ? Pourquoi les militants socialistes français se sont-ils prononcés à 60 % pour le OUI ?

Tous ne sont devenus des libéraux ni des soutiens de Chirac. Au contraire ! Ils considèrent que ce texte apporte de vrais point d’appuis pour les combats futurs contre l’ultra-libéralisme.

La vérité, que certains ont du mal à admettre, c’est que ce texte n’est pas plus ultra-libéral qu’il n’est ultra-collectiviste ! Il n’est ni de Droite, ni de Gauche, c’est le fruit d’un compromis. Car l’Europe, pour toutes ses décisions, à toutes les étapes de sa construction, ne progresse qu’à coups de compromis. Et ce compromis est un progrès car s’il n’apporte aucun recul - AUCUN ! - il apporte des avancées notoires.

Cette Constitution est protectrice de tous les droits sociaux énumérés dans la charte des droits fondamentaux et qui pourront faire l’objet de recours devant les tribunaux européens. On peut prendre pour exemple la protection contre les licenciements abusifs (art II 90).

C’est un enjeu majeur en France et dans toute l’Europe. On se souvient qu’entre 1997 et 2002, le gouvernement de Lionel Jospin, notamment sous l’impulsion des communistes, avait renforcé notre législation nationale contre les licenciements abusifs. La droite, dès 2002, s’est acharnée à détruire cette législation protectrice.

Si on vote cette constitution, un salarié victime d’un licenciement abusif pourra se protéger par un recours devant les tribunaux européens. C’est un progrès protecteur.

Le OUI est une porte ouverte sur l’avenir de la construction européenne pour aller vers l’Europe sociale que nous appelons tous de nos vœux. Le NON est une impasse politique car aucune renégociation n’est possible : aucun message clair ne sortirait de ces « NON » hétéroclites et aucun gouvernement européen ne voudra, lui, changer d’avis.

Le choix est donc clair et simple : avec le OUI, on choisit de continuer à avancer et on renforce l’influence de la France pour construire l’Europe sociale ; avec le NON, la France s’isole et on en reste à l’Europe d’aujourd’hui, trop économique et libérale, pas assez démocratique et sociale. Il faut choisir le OUI de l’espoir.


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