Il faut bâtir une grande Europe

Elisabeth Guigou

Entretien avec Elisabeth Guigou, députée de Seine-Saint-Denis, paru dans Le Parisien daté du 21 décembre 2004.
Propos recueillis par Frédéric Gerschel
 

Un débat de quarante minutes sur la Turquie, est-ce suffisant ?
Non, évidemment pas. Il aurait fallu faire plus et mieux. Je suis persuadée qu'une grande partie du rejet actuel de la Turquie vient du fait que beaucoup de gens n'ont pas compris, ne comprennent pas pourquoi il faut accueillir sans arrêt d'autres membres. Nous devons leur dire sans relâche que la petite Europe née de l'après-guerre est dépassée. Qu'il faut désormais bâtir une grande Europe pour rivaliser avec les Etats-Unis, la Chine et l'Inde.

Comment comptez-vous convaincre les Français ?
Il faudra tout d'abord montrer que nous sommes fermes sur les conditions posées à son adhésion. Qu'on ne transigera pas sur le respect des valeurs démocratiques, l'éradication de la torture, la fin des crimes d'honneur, ou la reconnaissance du génocide arménien. A la Turquie de nous prouver sa bonne volonté. Mais nous devrons aussi expliquer en quoi il est de notre intérêt que ce pays nous rejoigne : rejet de la tentation islamiste, stabilité de la région, apport économique considérable...

Vous étiez récemment en Turquie. Comment l'opinion réagit-elle aux réserves françaises ?
Il y a beaucoup de déception et d'incompréhension. D'autant qu'il n'y a pas plus francophones et francophiles que les Turcs. Qui sait par exemple qu'à Galatasaray, la plus grande université d'Istanbul, celle qui forme les élites, l'enseignement est exclusivement en français. Que le système administratif du pays est calqué sur le nôtre. Les Turcs nous aiment. Sachons saisir la main qu'ils nous tendent.

Une partie de la droite veut lier le référendum sur la Constitution et la question turque...
Il n'y a aucune raison de le faire. Le référendum sur la Constitution est programmé pour l'an prochain tandis que l'adhésion de la Turquie ne sera pas discutée avant dix ou quinze ans. Vouloir rapprocher les deux comme le font les proches de Sarkozy est une misérable manipulation. La rivalité Sarkozy-Chirac, en s'exprimant ainsi, risquerait de faire capoter le référendum et nuirait profondément aux intérêts de la France et de l'Europe.

© Copyright Le Parisien


Page précédente Haut de page

PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]