Je déciderai, le moment venu, d'être candidat ou pas | |
Entretien avec François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, paru dans le quotidien Le Monde daté du 25 août 2006 Propos recueillis par Arnaud Leparmentier et Isabelle Mandraud |
Pourquoi le premier secrétaire du PS n'est-il pas le candidat du parti pour l'élection présidentielle ?Lionel Jospin pose la question de la légitimité…Mon rôle, dans cette période, est encore et toujours de rassembler pour gagner. Et c'est en fonction de cette seule considération que je déciderai, le moment venu, d'être candidat ou pas. Je ne suis pas dans la même situation que d'autres prétendants, parce que je suis premier secrétaire. Aujourd'hui, toutes les hypothèses sont ouvertes. Viendra le temps du choix au moment du dépôt des candidatures [avant le 3 octobre]. François Rebsamen, numéro deux du parti, a appelé des candidats à l'investiture du PS, comme Jack Lang et Dominique Strauss-Kahn, à se retirer au profit de Ségolène Royal. Quelles règles allez-vous instituer ?Soutiendrez-vous Ségolène Royal ?Les sondages commandent-ils la désignation ?L'expérience n'est plus le critère déterminant ?Les détracteurs de Ségolène Royal lui reprochent d'être " creuse "…Que faites-vous de la " disponibilité " de Lionel Jospin ?A gauche, le nombre de candidats ne semble pas plus limité…En revanche, ce que je conteste, c'est une conception de la présidentielle qui voudrait que cette élection ne soit plus le choix d'un chef de l'Etat lors du second tour, mais l'occasion d'un vaste débat du premier tour et qui, pour la gauche, pourrait s'arrêter là. Je ferai tout pour redonner à ce scrutin son sens et sa dignité. J'ai donc proposé aux radicaux de gauche et aux amis de Jean-Pierre Chevènement un accord dès le premier tour. Et j'ai demandé aux élus socialistes de réserver leur parrainage au seul candidat de leur parti. L'enjeu de 2007, c'est le changement, pas le chahut. Les Français doivent faire un choix. Pas pour nous-mêmes, mais pour le pays. La croissance repart à la hausse, ainsi que les indicateurs sur l'emploi, la consommation et le moral des ménages. Cela ne vous prive-t-il pas d'arguments pour la campagne ?La question majeure donc est de savoir comment pérenniser la croissance et redistribuer ses gains. Quant au chômage, il se situe aujourd'hui au niveau de 2002 ! Sa baisse récente s'explique essentiellement par les évolutions démographiques liées aux départs en retraite. Et les créations d'emploi sont essentiellement liées à l'intérim et aux contrats aidés. C'est-à-dire au développement de la précarité. Enfin, le pouvoir d'achat des Français est largement amputé par la hausse des prix de l'énergie, alors que nous demandons depuis un an la réintroduction de la TIPP [taxe intérieure sur les produits pétroliers] flottante. Sa faible progression cette année cache un creusement des inégalités en faveur des revenus patrimoniaux et des hautes rémunérations. Les classes moyennes et modestes n'ont pas le juste retour de leurs efforts. Je demande donc une conférence sur le pouvoir d'achat qui permettrait de relancer les négociations salariales sur les minima de branche, notamment ceux inférieurs au smic, et d'introduire les mécanismes fiscaux et sociaux permettant d'amortir le choc énergétique qui pèse sur le budget des Français. Est-il constructif d'avoir déposé des milliers d'amendements sur le rapprochement de Gaz de France et de Suez au Parlement ?Nous sommes favorables à un rapprochement d'EDF et de GDF. Je mènerai moi-même, avec les présidents de groupes, le combat parlementaire sur ce sujet. Le nombre d'amendements est destiné à imposer un débat dans le pays qui doit être aussi long que possible. Il ne s'agit pas d'une question banale, mais d'un choix irréversible. En cas de fusion GDF-Suez, il n'y aura pas de retour. Je ne désespère pas d'ailleurs que le gouvernement soit obligé de retirer son texte comme il l'a fait pour le contrat première embauche. Car, au-delà du ralliement de Nicolas Sarkozy à Dominique de Villepin et du reniement de sa parole d'ancien ministre de l'économie et des finances, les réticences dans la majorité demeurent fortes. Au-delà de la dénonciation sur l'expulsion du squat de Cachan, qu'auraient fait les socialistes ?Hier sur l'Irak, aujourd'hui sur le Liban, le PS s'est aligné sur la position de Jacques Chirac. Jouez-vous toujours l'union sacrée en politique étrangère ?Sur le Liban, nous avons approuvé le triptyque " cessez-le-feu, accord politique, force d'intervention ", proposé par le chef de l'Etat en juillet. Mais, nous n'avons pas admis les déclarations de Philippe Douste-Blazy sur le rôle stabilisateur de l'Iran. On en voit aujourd'hui les conséquences avec l'annonce de la poursuite de son programme nucléaire… Mais ce qui est le plus incompréhensible, c'est qu'après avoir été actrice du vote de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, la France apparaît désormais spectatrice. Je regrette que notre pays ait finalement choisi d'être en retrait par rapport au rôle qui était attendu de lui au sein de la Finul et qu'il n'ait pas dégagé une stratégie européenne pour la constitution de cette force. Le Hezbollah est-il un parti terroriste ? |
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