Bilan des municipales


 Intervention de François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste,
 devant Conseil national du Parti socialiste, le mardi 27 mars 2001
 
Chers amis, chers camarades,

Je suis heureux de vous retrouver nombreux dans ce Conseil national. Est-ce le choix du jour, un mardi, plutôt qu'un samedi matin, ou est-ce que c'est le thème de notre Conseil, le bilan des Municipales ? En tout cas, votre présence massive, nombreuse est un acte politique important.

Il s'agit ici de faire une analyse lucide sur le bilan des municipales, des cantonales, un an avant une échéance majeure, celle de 2002. Nos résultats les dimanches 11 et 18 mars sont, à bien des égards, paradoxaux. Nous gagnons Paris et Lyon, là où la droite semblait inexpugnable. Ce sont des victoires historiques.

Mais la Gauche plurielle perd en même temps une vingtaine de villes de plus de 30 000 habitants, là où nous espérions encore progresser par rapport à 1995, avec un bilan économique et social particulièrement flatteur… D'où notre déception.

Déception par rapport à l'espérance donnée un moment par les sondages, déception aussi par rapport au travail fait par les nombreuses équipes municipales sortantes qui n'ont pas retrouvé la confiance des électeurs. Cette situation inattendue s'explique, à la fois par des raisons locales mais aussi par des facteurs globaux qu'il convient d'appréhender en perspective de 2002.

Les élections municipales sont des élections locales ; nous n'avons cessé de le dire. Les explications sont donc d'abord locales. Le scrutin de mars 2001 a été pour les Français l'occasion de faire un choix fondé sur l'enjeu du scrutin, c'est-à-dire l'élection d'une équipe et sur une offre qui lui était présentée. Les victoires, comme les défaites, trouvent donc pour une part leur origine dans le contexte particulier de chaque élection.

1/ - LES EXPLICATIONS LOCALES

Quatre phénomènes ont pu jouer et parfois cumulativement.

Premier phénomène : nos divisions. Elles ont eu une double origine au sein du Parti socialiste : Strasbourg, St Denis de la Réunion, Roanne, Plaisir, Longjumeau, Lisieux, rien que cela.
À chaque fois, nous pouvons identifier la cause première de notre échec par des dissidences ou par des complications au moment de la désignation et ensuite dans la campagne.
Divisions également au sein de la gauche plurielle : Epinay, Villepinte, Rouen essentiellement à cause des Verts, Hérouville St Clair, St Brieux, le MDC n'y est pas pour rien, Châteauroux avec la difficulté de faire une union au premier tour avec le PRG, et Orléans avec la mouvance communiste.

Nous avons nous-mêmes quelquefois la responsabilité de ces divisions lorsqu'elles nous concernent directement ou quand nous n'avons pas été capables de comprendre qu'il fallait faire l'Union de la gauche plurielle dès le premier tour.

Deuxième phénomène : les successions qui sont toujours difficiles à réaliser. On l'a encore mesuré à Chartres, à Quimper, à Saintes, à Vienne, à Macon.

Troisième phénomène : l'usure après plusieurs mandats (et là, je ne citerai personne).

Le quatrième phénomène est majeur sur le plan politique dont nous ne devons pas nous plaindre mais qui néanmoins permet de comprendre pourquoi nous avons gagné en 1989, en 1995 et que nous avons perdu cette fois-ci, il s'agit de la fin des triangulaires, quelquefois même il y avait eu des quadrangulaires dans certaines villes.

Dès lors que le Front national a éclaté –ne nous en plaignons pas– les leaders de droite locaux ont su faire leur rassemblement jusqu'aux extrêmes, au moins au deuxième tour, sur le thème de la sécurité.

Alors nous avons, dans le sud de la France et dans la région Rhône-Alpes, perdu un certain nombre de villes que nous avions gagnées, il y a maintenant 12 ans, voire 6 ans.

Au-delà des explications locales, au-delà de ces phénomènes qui ont produit leurs effets –et l'analyse de chaque ville permet de comprendre pourquoi nous avons gagné ici et perdu là– il y a néanmoins une explication politique globale à donner.

2/ - LES FACTEURS GLOBAUX

Le Gouvernement, par son action ou son image, n'a pas été au cœur du débat électoral des 11 et 18 mars. Dès lors il n'y a pas eu sanction. Si cette hypothèse s'était vérifiée (la sanction), il y aurait eu comme en 1977, en défaveur de la droite, ou en 1983 au détriment de la gauche, un recul général. Nous aurions perdu partout, sans rien gagner nulle part. Nous aurions essuyé un double revers aux élections municipales comme aux élections cantonales.

Tel ne fut pas le cas. Nous l'emportons dans des villes plus que symboliques et je n'en citerai aucune et fort peuplées, là je citerai Paris, Lyon et Dijon. Nous faisons basculer la gauche : 6 Conseils généraux. Il n'empêche, le résultat global met en lumière trois faits incontestables.

D'abord la gauche est minoritaire dans notre pays, de peu sans doute, elle l'est néanmoins, mais elle l'a d'ailleurs toujours été depuis 1989. Elle n'était que très faiblement majoritaire en 1997. N'oublions pas que nous avons gagné avec quelques poignées de voix, même si les triangulaires ne sont pas responsables de notre victoire. Il n'empêche, la gauche aujourd'hui, c'est 47 % des voix. C'est un score considérable, un score élevé par rapport à d'autres élections municipales ou cantonales. La droite - sans doute avec le renfort d'un électorat d'extrême droite - fait autour de 49 % dans les villes de plus de 3 500 habitants. C'est une réalité que nous avons mesurée le 18 mars, en dépit de la déstructuration de la droite - au plan national - et de la vacuité de ses programmes locaux.

Deuxième fait incontestable : sur les 340 villes de plus de 30 000 habitants, 38 ont été ravies à la gauche par la droite et la gauche elle-même n'en a gagné que 17, soit une perte nette de 21 villes. Sur les 37 villes de plus de 100.000 habitants, la gauche en gérait 20 et la droite 17. Aujourd'hui la situation est inversée, la gauche en a 17 et la droite 20.

Il est vrai que Paris et Lyon, sont aujourd'hui de notre côté, et que cela change sans doute le fléau de la balance. Pour comprendre politiquement ce résultat-là aussi, il y a des causes politiques et des causes sociales si tant est qu'on puisse faire la distinction. Quatre mutations fondamentales sont intervenues au plan politique à l'occasion de ces élections municipales.

D'abord le haut niveau de l'abstention pour une élection municipale supposée - avec les élections présidentielles - passionner le plus les Français. Là, il nous faut regarder la séquence, la chronologie de l'abstention depuis 15 ans.

À chaque scrutin, l'abstention progresse ou plus exactement l'abstention progresse par rapport à des scrutins comparables. Il y a plus d'abstentions aux élections européennes de 1999 qu'il n'y en avait eu 5 ans plus tôt. Il y a plus d'abstentions aux élections législatives de 1997 par rapport aux élections législatives de 1993. Il y a plus d'abstentions aujourd'hui aux élections municipales, alors même qu'il n'y avait pas d'autres scrutins dans l'année, qu'il n'y avait eu d'abstentions en 1995 à ces mêmes élections municipales qui suivaient une élection présidentielle.

Le phénomène de montée de l'abstention est un évènement majeur - peut-être la surprise principale du scrutin - qui explique un certain nombre de déconvenues que nous avons pu rencontrer, d'autant que l'abstention est plus forte à gauche qu'à droite. Selon les sondages 37 % des sympathisants de la gauche plurielle n'ont pas participé au scrutin municipal contre 28 % pour ceux de l'opposition.

C'est le premier phénomène majeur sur le plan politique.

La deuxième évolution est historique sans doute, c'est l'affaiblissement du Parti communiste ou plus exactement la révélation de cet affaiblissement. Nous avons pu le mesurer aux élections cantonales notamment, qui n'est que la suite d'un certain nombre de glissements depuis plusieurs années. Nous avons aussi vu la difficulté qui était maintenant pour le Parti communiste de représenter au niveau de la gauche plurielle la conduite d'un certain nombre d'équipes municipales ou bilans, même s'il a résisté dans bon nombre de villes (1/3 de la Gauche plurielle).

La troisième évolution qui est apparue dans cette élection, c'est la fusion des électorats de droite et d'extrême droite sur le thème de l'insécurité. Là, il y a eu la rencontre, sur cette thématique de l'insécurité, lancée par le Président de la République dès la fin du mois de décembre de l'année dernière et prolongée par les questions d'actualité qui, avec le respect des rituels à l'Assemblée nationale, ont été organisées au plan local. Ce sont les mêmes campagnes qui ont été faites dans de nombreuses villes de France avec les mêmes arguments. Il y a là confusion de l'électorat de droite et de l'extrême droite sur ce thème-là qui, bien entendu, nous fait problème dans un grand nombre de villes.

Bien sûr que le déclin de l'extrême droite à ces élections est une bonne nouvelle et bien sûr que l'éclatement du Front national est un fait politique qu'il faut enregistrer comme une victoire du combat mené depuis plusieurs années contre ces idées-là.

Mais, il faut reconnaître notre propre responsabilité par rapport à trois villes de France qui restent gouvernées par l'extrême droite, deux par le MNR et une par le Front national. Là aussi, la gauche n'est pas exempte de tout reproche, quand il faut convaincre des camarades socialistes qu'il faut faire liste commune dans ces trois villes-là et qu'ils nous disent qu'ils sont les meilleurs pour l'emporter et qu'au bout du compte, c'est l'extrême droite qui gagne.

Que penser là aussi de la capacité, de la lucidité d'un certain nombre de camarades ?

Il n'empêche, même si l'éclatement du Front national est une bonne nouvelle pour la démocratie, la fusion de la droite et de l'extrême droite a donné à la droite la capacité de gagner nombre de villes que j'ai citées.

Quatrième évolution politique : c'est le mauvais report de l'extrême gauche. Il y a toujours eu un vote d'extrême gauche depuis une vingtaine d'années dans notre pays. Le fait nouveau, ce n'est pas que l'électorat existe, souvenons-nous de l'élection présidentielle de 1995 avec Arlette Laguiller… de l'élection européenne ? Cet électorat de gauche est aujourd'hui immobilisé, soit qu'il est sectarisé, sans qu'il se porte sur Lutte Ouvrière, soit qu'il ne se met pas systématiquement au deuxième tour pour faire la victoire de la gauche, ou le refus de la droite. Ce point-là mérite d'être traité en tant que tel. Si l'extrême gauche se mobilise sur un électorat qui empêche notre victoire, l'extrême gauche n'est plus l'extrême gauche et c'est un vote extrémiste qui fait le jeu de la droite, il faut le dire.

3/ - LES CAUSES SOCIALES

Il y a sans doute l'exaspération des couches populaires d'abord à l'égard de l'insécurité, thème dominant de la campagne de la droite dans un certain nombre de villes, notamment des villes qui jusqu'à présent n'étaient pas touchées par les phénomènes de violences.

Je pense à toutes les villes préfectures autour de Paris. Je pense aussi à ce qui s'est passé dans le Sud-Ouest, le Sud-Est ayant connu depuis longtemps cette manipulation et cette utilisation de l'extrême droite. Toutes les enquêtes révèlent que pour les élections municipales, l'insécurité a été la première préoccupation des électeurs.

La deuxième cause sociale c'est l'apathie des jeunes. 53 % d'abstention chez les moins de 25 ans à l'occasion de cette élection municipale qui a priori pouvait paraître la plus proche de leurs préoccupations. Alors même qu'on avait soi-disant facilité leur inscription, il faudra sans doute évaluer cette Loi sur l'inscription des jeunes sur les listes électorales. Il y a eu beaucoup de déconvenues. Ces jeunes sont sans doute ceux pour lesquels nous avons fait beaucoup déjà, et je ne parle pas simplement des emplois-jeunes. Le fait qu'ils ne se soient pas sentis concerné par les élections locales est un problème qui doit être traité là aussi en tant que tel.

Troisième cause sociale, la frustration des exclus de la croissance : ouvriers, employés, travailleurs, pauvres qui ne trouvent pas leur dû dans la prospérité retrouvée. C'est aussi le sentiment d'abandon de certaines villes ou de certains départements qui affrontent des déclins structurels. Ce sentiment a coûté cher notamment au Parti communiste, quand il était en situation de responsabilité. Il ressort de cette analyse, sans doute encore succincte, une triple exigence :

 D'abord la nécessité de repositiver les élections locales.

La politique de la droite a pu trouver du crédit quand la gauche elle-même s'est confondue avec une gestion purement locale. Il ne faudrait pas que la décentralisation soit uniquement un sujet d'élus, un débat entre spécialistes où les programmes sont devenus indifférenciés.

Il nous faudra, notamment aux prochaines élections cantonales et régionales, remobiliser l'enjeu même du scrutin.

 Deuxième exigence : l'efficacité de l'action collective par rapport aux priorités : qualité de la vie, sécurité, etc.

 La troisième exigence c'est la justice sociale parce que c'est le cœur même de notre identité.
Évitons néanmoins les faux débats entre nous.
J'en vois deux :
Le premier porte sur la pseudo opposition entre classes populaires et classes moyennes.

Nous avons besoin des uns et des autres. Le Parti socialiste a toujours été un Parti de classes moyennes, il n'y a pas là de phénomène nouveau d'embourgeoisement ou de découverte du phénomène "BoBos". Il y a là une tradition qui a longtemps eu et qui n'a plus son explication dans la présence du Parti communiste fort.

Il n'empêche que le Parti socialiste n'a gagné historiquement les élections que lorsqu'il a eu la confiance et l'adhésion des classes populaires, ce qui veut dire qu'il ne faut pas chercher à favoriser les uns par rapport aux autres. Il faut chercher à unifier les catégories qui nous sont aujourd'hui liées ou par notre histoire ou par la nature même de la politique que nous conduisons.

L'unification s'était faite sans trop de difficultés à l'occasion des élections de 1997, c'était sur la thématique de la lutte contre le chômage que l'on pouvait trouver une solidarité entre les catégories moyennes et populaires.

Aujourd'hui, cette question reste majeure, notamment pour les catégories populaires. Nous n'avons pas terminé et si on laissait penser que la priorité n'est plus l'emploi, que penseraient les catégories les plus modestes et fragiles de la population par rapport au respect de nos engagements ?

Il y a une nécessité de refonder l'unification des catégories qui nous sont proches autour des thèmes de la qualité de la vie et des protections de toute nature.

Deuxième sujet sur lequel il faut éviter un faux débat, c'est le dépassement de la Gauche plurielle. La Gauche plurielle nous a fait gagner et a fait gagner toutes les composantes de la majorité. Elle ne nous a jamais fait perdre. Certes, il y a une autre gauche, celle qui souvent se fait à nos flancs, à notre détriment. Il faut dialoguer avec elle, il faut parfois travailler ensemble. Il faut aussi, dans certaines circonstances la combattre, car il ne faut pas perdre notre cohérence d'ensemble et notre identité au risque de perdre les nôtres en chemin. Donc, la gauche radicale a sans doute sa vocation, mais elle n'est pas notre référence. Si l'on doit essayer de capter un certain nombre d'électeurs qui, aujourd'hui, regardent de ce côté-là, si l'on doit dialoguer avec cette gauche-là, il ne faut pas non plus dériver vers elle, car nous perdrons d'un côté sans gagner de l'autre, et il faut lutter avec la dernière des énergies contre ce sentiment exploité par une partie de l'extrême gauche qu'entre la droite et la gauche c'est pareil. Si nous laissons accréditer cette thèse, y compris par nos propres discours, nous aurons une progression de l'abstention encore.
Quelles conclusions tirer pour le Parti socialiste, pour la Gauche Plurielle et la politique que nous suivons ?
Pour le Parti socialiste. Il faut tenir compte de ce qui s'est produit, à la fois pour la désignation de nos candidats, et la préparation de notre projet. Pour la désignation de nos candidats, oui, il faut renouveler, oui, il faudra rajeunir, oui, il faudra atteindre l'objectif de parité, oui, il faudra des candidats présents sur le terrain par rapport aux échéances de 2002, ce qui signifie qu'il faudra désigner tous les candidats aux élections législatives au plus tard à la mi-novembre de cette année.

D'ici là, il nous aura fallu prévoir les circonscriptions que nous voulons affecter à des candidats, et également identifier les circonscriptions que nous accepterons de donner à nos partenaires de la gauche plurielle.

Deuxième conclusion pour le Parti socialiste, elle tient à la présentation ou à la préparation de son projet. Nous devons, à la fois, tenir compte de nouvelles aspirations, celles que nous avons rencontrées au cours de cette campagne, et utiliser notre projet pour dialoguer avec le pays.

C'est pourquoi, nous avions prévu une réunion le 19 mai dans toutes les fédérations sur le thème du dialogue avec les Français pour préparer notre projet. Je crois, plus que jamais, que cette journée du 19 mai doit être utilisée pleinement pour que les élus, les militants, pour que tous ceux qui nous représentent, futurs candidats aux élections législatives, dialoguent avec leur environnement.

Pour la Gauche plurielle. Il faut d'abord reconnaître les tendances lourdes des électorats respectifs de nos alliés. Le Parti communiste est à l'évidence à la recherche de son identité, et les Verts, à la recherche de leur stabilité. Nous ne devons, ni oublier les uns qui ont été toujours dans notre histoire des alliés proches, ni écarter les autres au prétexte qu'ils seraient plus disciplinés.

Nous devons, en revanche, leur demander de faire eux-mêmes leur mutation. Ce n'est pas nous qui pouvons sauver le Parti communiste, c'est lui, ce n'est pas nous qui pouvons donner de la cohérence aux Verts, c'est eux, mais il faut respecter nos partenaires en évitant le jeu de bascule qui voudrait que nous attribuions nous-mêmes le rôle d'allié privilégié du Parti communiste.

Il n'y a pas de podium dans la gauche plurielle, parce que ce qui doit compter, ce n'est pas savoir qui sera deuxième du Parti socialiste, c'est si nous sommes capables nous tous, toute la gauche plurielle, de gagner les prochaines élections de 2002.

Il nous faut, dès lors, stabiliser nos relations. Il y aura un sommet de la gauche plurielle au mois de mai prochain. Nous avons souhaité, nous, les socialistes, que ce sommet de la gauche plurielle porte sur le contrat que nous avons à préparer avec nos alliés pour 2002, nous pensons que les sommets de gauche plurielle doivent servir d'abord à fixer le contenu de la politique et pas simplement les alliances électorales. Donc, il faut redonner du contenu à la gauche plurielle.

Il n'empêche qu'il faut aussi négocier avec nos alliés Verts, Mouvement des citoyens, Radicaux de gauche, les circonscriptions qui devront leur être réservées, mais si nous allons dans ce sens, et je crois qu'il faut aller dans ce sens, il faut le faire avec des règles qui fixent les droits, sans doute (ne soyons pas hégémoniques), mais aussi les devoirs, parce que soyons soucieux aussi de la contrepartie.

Ce qui a posé problème, dans ces élections municipales, c'est que nous avons associé très largement nos partenaires dans la Gauche plurielle, sans avoir toujours été payés de retour (notamment par certaines composantes quant à la qualité du désistement quand il y avait des listes séparées, ou quant à la qualité de l'union). Et, il ne peut être question d'attribuer des circonscriptions à des partenaires sans être sûr de la manière avec laquelle ils appelleront à voter pour nous au second tour des élections législatives.
Pour la politique gouvernementale, je le répète, le cap qui a été choisi depuis 1997 est bon. Il nous a permis de réduire substantiellement le chômage et de voter de grandes réformes. C'est le rythme, l'ampleur du moment, jusqu'en en 2002. Notre stratégie économique a porté ses fruits, nous avons affronté pour la première fois depuis vingt ans le corps électoral avec un record de baisse du chômage, un indice élevé du moral des Français et même de confiance de la politique économique et sociale du gouvernement, mais cela ne suffit pas. Il faut aussi un projet et nous devons le préparer.

En revanche, l'ordre des priorités aujourd'hui change sous l'effet même de notre politique économique. Il faut maintenant regarder la répartition des fruits de la croissance, le pouvoir d'achat, la qualité de la vie, l'environnement, la sécurité et la jeunesse. Nous devons en tout cas essayer de proposer pas simplement la pérennisation des emplois-jeunes, mais une politique nouvelle à l'égard de la jeunesse et nous devons faire en sorte que l'insertion économique soit aujourd'hui prioritaire pour des catégories de la population qui, même si la croissance restait ce qu'elle est aujourd'hui, ne parviendraient pas à rentrer dans le processus économique et social que nous connaissons.

Il faut sans doute, aussi, réfléchir sur notre méthode de rapidité par rapport aux urgences et l'efficacité par rapport à l'application de la loi. Combien de candidats ont constaté qu'il y a loin entre la programmation d'un projet, le vote d'une loi et son application concrète. Il faut une vigilance par rapport aux nouveaux phénomènes de société. C'est de nous que viendront les propositions sur l'environnement et la qualité de la vie.

Si les Verts récupèrent une part de cette aspiration par leur identité même, par leur histoire, par leur forme de militantisme, ils ne sont pas en capacité toujours (et en monopole jamais) de faire les propositions sur l'environnement, la protection de la nature et la qualité de la vie. C'est encore vers nous que les Français se tournent s'ils veulent que nous avancions vers des réformes d'importance.

Ne transposons pas les élections municipales sur les échéances qui viennent. Chaque scrutin a sa logique, sa mécanique, son enjeu propre. Gardons nous, dès lors, de toutes exagérations, à la fois sur la célébration de nos victoires - et j'ai noté la modestie, à mon avis pertinente, de nos élus dans les grandes villes et notamment à Paris et à Lyon- et de toute exagération aussi sur le deuil de nos revers. Beaucoup ont des explications locales, mais faisons preuve aussi de lucidité, lucidité par rapport à ce phénomène de l'abstention, lucidité par rapport à la fusion des droites et de l'extrême droite. N'ignorons pas les signaux qui nous sont envoyés. Tout est ouvert pour 2002, le rapport de force entre la gauche et la droite est globalement stable depuis 1997, c'est cruel par rapport à tout ce que nous avons fait, c'est inespéré par rapport à la loi générale qui voudrait que nous trébuchions par rapport à toute élection intermédiaire et que nous perdions le pouvoir au terme d'une législature. Notre résultat final en 2002 dépendra de notre capacité à incarner l'avenir.

C'est la tâche de notre Parti pour les douze mois qui viennent.


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