Pour un grand
Parti socialiste
Clarifier, Renouveler, Rassembler

 Contribution générale présentée par François Hollande au congrès national de Dijon du Parti socialiste.
18 janvier 2003

 
Chères et Chers camarades,

Je veux faire de notre Congrès de Dijon l’acte premier du renouveau de la Gauche. Le PS doit en sortir plus fort et plus uni. C’est possible si nous le décidons ensemble.

L’échec de 2002 a jeté une lumière crue sur la gravité de la crise politique, la distance des catégories populaires à notre endroit, la perte des repères dans une société profondément bousculée par la mondialisation et la montée des peurs.

La Droite, depuis qu’elle dispose de tous les pouvoirs, mène une politique qui aggrave tous les facteurs d’insécurité (sociale, économique, écologique et même personnelle). Elle utilise cyniquement cette thématique pour justifier une libéralisation accrue de notre société dans une complicité jubilatoire avec le MEDEF tout en affichant une compassion navrée à l’égard des victimes de ses choix.

Dans ce contexte, notre Congrès doit être différent de tous ceux qui l’ont précédé, à la mesure du choc que nous avons subi.

Innovant dans sa préparation, c’est la raison pour laquelle j’ai souhaité qu’il soit précédé d’un grand débat militant. Vous vous y êtes engagés pleinement. Cette prise de parole doit désormais être prolongée et traduite en actes politiques.

Lisible dans ses enjeux, en identifiant précisément les points en discussion pour permettre aux adhérents d’arbitrer entre les différentes options et de déterminer ainsi la ligne de notre Parti. Elle nous engagera tous.

Fondateur pour notre organisation : tout ce que nous déciderons, ensemble, sur notre fonctionnement au PS, nos règles de représentation et nos pratiques, sera immédiatement applicable et inscrit dans nos statuts.

La contribution que je présente adopte elle-aussi une formule nouvelle :
     Je la signe seul pour mieux affirmer que les idées doivent prévaloir sur les questions de personnes ou les synthèses préfabriquées,

     Je la limite aux sujets qui me paraissent décisifs pour notre avenir, répondant ainsi aux vœux que vous avez exprimés de disposer de textes sur lesquels vous pouvez vous-mêmes intervenir dans la perspective de la future motion.

Le sens de notre Congrès est d’abord de redonner espoir dans nos idées, dans notre parti, et plus largement dans la politique.

Il doit donc répondre, à mes yeux, à trois objectifs :
     clarifier notre rapport à la mondialisation, notre modèle européen, notre projet de société, notre stratégie de reconquête,

     renouveler nos idées, nos modes de fonctionnement, nos responsables, bref notre Parti,

     rassembler les socialistes, la gauche, les progressistes, à l’échelle de l’Europe et du monde comme, le moment venu, une majorité de Français.

Comme Premier secrétaire, ne détenant ma légitimité que de vous, je veux vous associer directement à cette démarche.

Les socialistes doivent dire franchement ce qu’ils sont, ce qu’ils pensent, ce qu’ils veulent. C’est le sens de cette contribution :


I/ Comprendre pour agir

 

1- En finir avec le 21 avril

    Rien n’est possible, sans retour sur notre défaite. Nous savons combien les divisions de la gauche ont pesé lourd dans un contexte où nul n’imaginait sérieusement un deuxième tour sans Lionel Jospin. Nous n’ignorons rien de l’accumulation des facteurs conjoncturels (erreurs de campagne, faits divers tragiques, harcèlement autour de l’insécurité…) Ces causes-là sont connues. Mais nous ne pouvons en rester là : après cinq ans d’action gouvernementale, saluée comme volontariste dans les objectifs et efficace dans les moyens utilisés, notamment sur les fronts du chômage et de la lutte contre les inégalités, disposant avec Lionel Jospin d’un candidat respecté pour ses qualités d’homme d’Etat et pour son intégrité, nous avons néanmoins connu l’échec.

    Ainsi, comme en 1986 et 1993, dans des circonstances certes différentes, la Gauche n’a pas été capable de s’installer durablement, c’est-à-dire au-delà d’une législature, aux commandes de notre pays. C’est cette fatalité-là qu’il faut vaincre.

    Plus gravement encore, alors que nous prétendions réhabiliter la politique en redonnant force à la parole donnée et en étant exemplaire dans les pratiques liées à l’exercice du pouvoir, nous n’avons pas pu endiguer la montée du populisme et de l’indifférence civique. C’est cette crise-là qu’il faut guérir. A la condition de faire le bon diagnostic.

       Ce n’est pas la supposée hégémonie du PS qui a fait problème le 21 avril mais d’abord sa faiblesse. Dépourvu d’une assise électorale large, privé pour des raisons historiques de liens structurels avec les grandes organisations syndicales, insuffisamment représentatif de la diversité de notre pays, notre Parti connaît une fragilité qui le met en péril chaque fois que l’enjeu se dilue et que la Gauche se divise. Tirons-en une première leçon : le temps est venu de construire un grand Parti socialiste, ce qui suppose de le doter d’une doctrine claire et d’en faire le reflet de toute la société.

       Ce n’est pas pour avoir été insuffisamment à gauche que nous avons perdu. C’est pour ne pas avoir assez été à l’écoute des Français. Mobilisés dans une lutte convaincante contre le chômage (35 heures, emplois jeunes, …), soucieux de soutenir la croissance et fiers d’y parvenir, absorbés par la gestion de l’urgence avec des succès incontestables (CMU, APA, PACS, parité, …), nous avons manqué de vigilance face à la précarité du travail, au niveau des salaires, à la dureté de la vie des plus modestes. Nous n’avons pas pris toute la mesure de l’insécurité, comme de l’exaspération populaire devant l’irrespect de la règle commune.


    Nous n’avons pas su réécrire, au milieu de la législature, un contrat politique avec les français fixant de nouvelles priorités. Sur le plan de la méthode, nous avons, au nom d’une démarche essentiellement législative, laissé trop peu de place au dialogue avec les acteurs sociaux (syndicats, associations, …), partenaires indispensables du changement.

    C’est le message que nous devons retenir : rien n’est durable pour la Gauche au pouvoir sans une redéfinition régulière de ses objectifs, sans des relais multiples, sans une délibération vivante au sein du Parti et sans une véritable démocratie sociale. La condition du succès, c’est la démocratie participative, l’implication concrète des citoyens dans la mise en œuvre des décisions qui les concernent.

       Ce n’est pas principalement notre bilan qui a été jugé, c’est l’absence de visibilité d’un véritable projet. Répondre aux problèmes immédiats, ne suffit plus dans une société où les repères s’effacent, l’individualisme s’installe, le travail se fragmente et le repli corporatiste, voire communautariste, s’accentue. Il nous faut combattre un double sentiment : le sentiment d’impuissance du politique face aux enjeux majeurs et le sentiment d’abandon devant les difficultés quotidiennes. L’abstention en est la conséquence directe.


    La dépolitisation n’affaiblit pas seulement la République. Elle frappe d’abord la Gauche. Elle est donc entretenue, comme à dessein, par la Droite ravie de l’aubaine lorsque plus du tiers du corps électoral, notamment les jeunes et les plus modestes, semble avoir renoncé à l’arme du vote.

    Voilà pourquoi les socialistes ne peuvent jamais réduire leurs arguments à la seule défense d’une politique, fut-elle aussi honorable et authentiquement à gauche que celle du gouvernement de Lionel Jospin ; ils ont l’obligation de présenter, face au libéralisme qui se définit comme une fatalité, une vision d’ensemble et de long terme.

2- Prendre un nouveau départ

    En ce moment si important pour notre avenir, nous devons conjuguer fidélité et invention. Cela vaut pour nos valeurs comme pour notre identité.

       Nous sommes d’abord des socialistes, tout simplement des socialistes.
      Nul besoin de changer le mot ou de l’affubler d’un autre. D’aller chercher ailleurs une voie nouvelle ou ici une radicalité ancienne. Car le socialisme garde, en ce siècle qui s’ouvre, toute sa modernité.

    Le capitalisme a changé de forme : il s’est étendu à la surface du globe, il s’est " libéré " des frontières nationales, il s’est financiarisé, accélérant la succession des crises, il s’est démultiplié, aspirant à marchandiser toutes les activités humaines. Il n’a pas changé de nature. Et le rapport que nous entretenons avec lui, non plus. Nous voulons le dominer par la démocratie. Le Pouvoir des citoyens doit être plus fort que celui des actionnaires. La régulation, la redistribution, les services publics en constituent les instruments privilégiés. Face à la prétention de l’argent à s’affranchir de toute contrainte et d’échapper aux règles nationales, notre ambition n’a pas perdu de sa légitimité, même si elle doit renouveler ses modes d’intervention.

       Nous devons inventer de nouvelles réponses

    Plus globales : c’est à l’échelle de l’Europe et du Monde qu’il faut désormais agir pour construire des alternatives au libéralisme.

    Plus concrètes : en appréhendant, avec nos valeurs, tous les sujets qui concernent l’existence des citoyens (la famille, les temps de la vie, la bioéthique, les discriminations, les handicaps, la violence …), en faisant en sorte que nos principes puissent être compris par les milieux populaires et non ressentis comme extérieurs à leurs conditions réelles de vie.

    Plus durables : en anticipant sur les risques à venir (la pénurie des ressources naturelles, les maladies, les manipulations génétiques, …), en inscrivant nos choix dans le long terme (formation, recherche, énergie, …), en donnant priorité au bien-être des générations futures, en intégrant l’écologie dans toutes les discussions publiques, bref en brisant la myopie des marchés.

       Nous voulons réformer pour transformer.
      C’est cette méthode qui, en France comme dans toutes les grandes social-démocraties, a fait avancer nos sociétés. Elle s’accompagne du respect de la parole donnée : promettre ce que l’on peut tenir, c’est l’un des messages que je retiens de Lionel Jospin. Elle a été régulièrement contestée par les mouvements qu’on n’appelait pas encore pôles de radicalité mais qui mettaient déjà en cause l’idée même du pouvoir conçue comme une compromission, un abandon, une trahison. Nous devons être sans complexe, sans mauvaise conscience par rapport à ceux qui préfèrent nous combattre plutôt que de battre la Droite à l’occasion des élections. Leur intention n’est pas de faire pression sur nous, c’est de faire sans nous et, le plus souvent, contre nous.

    Mais il est vrai que la voie que nous empruntons est difficile. La Gauche suscite chaque fois qu’elle est aux responsabilités plus d’attentes que la Droite dans la même situation et ne bénéficie de ce fait d’aucune indulgence. C’est sans doute notre honneur, mais c’est aussi notre risque principal. Raison de plus pour mieux saisir les attentes des Français et réinventer notre relation avec eux. Et s’il s’avère que l’audace réformatrice s’épuise, ce n’est ni le pouvoir ni la durée de son exercice qui en sont la cause mais l’oubli des objectifs eux-mêmes. C’est pourquoi je retiens cette formidable leçon de notre ami Göran Person, le Premier Ministre suédois qui, pour expliquer la présence pendant plus de soixante ans de son Parti au gouvernement de son pays, a fourni la recette : " se comporter au pouvoir comme si nous étions encore dans l’opposition et agir dans l’opposition pour revenir le plus rapidement possible au pouvoir ".

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II/ Changer le monde
avec une Europe fédérale
et sociale

 

1- Dominer la mondialisation par un nouvel internationalisme

    La planète, c’est l’enjeu même de la politique. Faute de l’avoir suffisamment affirmé, nous avons laissé s’étioler le débat public dans le seul cadre national et avivé la crispation identitaire qui nourrit la frustration et la peur. Aujourd’hui, les menaces sont celles de la guerre, du sous-développement, de l’uniformisation culturelle, des dégradations irréversibles de la nature et des espèces. C’est l’avenir de l’humanité qui est en cause. Cette prise de conscience ne nous affaiblit pas, elle nous oblige à faire retour vers l’internationalisme qui est la source même du socialisme. Mais notre démarche n’est pas simplement une contestation de la globalisation libérale, des désordres financiers, commerciaux, écologiques comme des injustices qu’elle produit. C’est une volonté d’organisation, de maîtrise, de gouvernement du monde autour de plusieurs objectifs qui doivent devenir les mots d’ordre de tous les progressistes à l’échelle du monde. Et ce, d’autant plus facilement qu’ils empruntent aux instruments du socialisme.

       La démocratie

    Nous devons proposer une grande réforme des institutions internationales (FMI, Banque Mondiale, OMC, …), fondée sur la transparence de leur fonctionnement, leur démocratisation et le renforcement de leurs pouvoirs. Un Conseil de Sécurité Economique et Social, au sein desquels les pays émergents doivent prendre toute leur place, doit se substituer aux clubs des puissants (G8, …).

    Nous devons nous engager à faire adopter de nouvelles règles internationales pour faire prévaloir les droits fondamentaux des travailleurs, le droit à la santé, à l’environnement, à la diversité culturelle et parallèlement en finir avec les paradis fiscaux et les zones de non-droit international, à travers la suppression du secret bancaire.

    Nous devons nous battre pour que des normes sur la bioéthique, notamment le clonage et le vivant, soient érigées au plus vite.

       La redistribution

    C’est plus qu’un impératif moral, c’est une obligation politique, c’est une exigence de paix. Il faut y mettre les moyens nécessaires et convaincre chaque être humain qu’il est d’abord citoyen du monde et qu’il a un prix à payer pour l’équilibre de la planète. Nos engagements doivent être fermes et publics :

      - annuler la dette des pays les plus pauvres et la transformer en aide aux projets de développement. La France doit être au premier rang de la mobilisation. Son premier devoir s’appelle l’Afrique,

      - changer les règles de l’OMC pour donner aux pays émergents les moyens d’accéder aux marchés, notamment en matière agricole, ce qui suppose la réforme de la PAC,

      - créer un fond mondial pour l’accès de tous aux médicaments (lutte contre le paludisme, le SIDA, …), sorte d’assurance maladie élémentaire à l’échelle du monde,

      - introduire un impôt sur la mondialisation pour financer les charges communes de l’humanité.


       L'accès aux biens publics

      • le patrimoine commun de l’humanité doit être élargi à tous les biens publics essentiels et faire l’objet d’une gestion internationale,

      • l’accès à l’eau doit être assuré à chaque habitant de la planète. Un plan mondial doit être mis en place avec les financements correspondants,

      • une Organisation Mondiale de l’Environnement doit être créée pour mettre réellement en œuvre le développement durable. Sa vocation sera de définir les normes en matière de lutte contre l’effet de serre, de veiller à leur respect et de sanctionner leur manquement. Elle sera financée par la création d’une taxe mondiale sur les émissions de gaz carbonique.

      • soutien aux programmes d’éducation et de maîtrise de la procréation initiés par les Nations Unies


    L’effort est considérable, il faut passer d’un monde interdépendant par les échanges, l’information et la technologie, donc structuré par les marchés, à une communauté mondiale intégrée, dans laquelle les règles, les responsabilités, les richesses et les technologies sont partagées. Être socialistes, c’est agir en citoyens du monde. L’Internationale Socialiste doit être complètement mobilisée autour de ces objectifs. Mais il faut aussi ouvrir des discussions de fond, et sans concessions, avec les acteurs sociaux, les mouvements et les ONG. Je propose que le Parti socialiste prenne l’initiative d’une rencontre avec l’ensemble de ces partenaires sur la mondialisation d’ici la fin de l’année pour fixer ensemble un agenda et des objectifs communs. Une Convention nationale viendra les ratifier.

2- Faire le choix de l'Europe fédérale et sociale

    C’est l’utopie poursuivie, inlassablement, par les socialistes depuis la fin du XIX° siècle. À l’aube du XXIème, nous sommes à une étape décisive, historique. Je veux ici vous appeler à faire du combat pour une Europe politique, sociale, écologique, le cœur de notre action.

    L’élargissement, qui consacre la fin du partage du continent européen, le dépassement de Yalta, l’effacement des traces de la guerre froide, est un événement heureux pour ceux qui nous rejoignent. Il l’est pour nous, sauf à penser que l’Europe serait un club réservé aux favorisés de l’Histoire, sauf à imaginer une Europe réduite à des fonds structurels et à la Politique Agricole Commune.

    Mais l’élargissement révèle aussi les ambiguïtés de la construction européenne et les risques d’une dilution de l’ambition initiale. L’Europe est devant des choix essentiels qui correspondent à un clivage politique majeur. Que veut-on ? : un espace de solidarité et non une zone de libre-échange. Une Europe des citoyens et non une Europe des seuls Etats. Une Europe puissante et non une Europe alignée sur les Etats-Unis.

    Ce débat recouvre en grande partie les différences entre la Gauche et la Droite à l’échelle du continent. Les socialistes européens qui auraient dû prendre leurs responsabilités lorsqu’ils étaient en situation de contrôler onze gouvernements sur les quinze de l’Union doivent saisir l’occasion de la " Convention Européenne " pour promouvoir l’Europe de leurs valeurs. Ce qui veut dire aujourd’hui, pour nous, avancer notre propre idée de l’Europe.

       Clarifier le projet

    Nous avons fait l’Europe parce que nous partageons des valeurs communes et nous voulons aujourd’hui promouvoir un modèle de développement et associer l’Europe avec le reste du monde. Il nous faut donc fixer nettement les objectifs et les politiques de l’Union Européenne et les inclure dans la future Constitution :

    - le plein emploi et la cohésion sociale comme objectifs prioritaires : ce qui suppose un véritable gouvernement européen sur le plan économique, un traité social garantissant des droits sociaux, un salaire minimum et une harmonisation, par le haut, des garanties sociales.

    - la solidarité : l’Europe ne peut plus continuer à fonctionner sur la seule logique de la concurrence : les missions et les moyens des services publics doivent impérativement figurer dans le futur Traité, permettant l’élaboration d’une Directive cadre pour en assurer le respect.

    - le développement durable : à travers des normes communes en matière d’alimentation, de sécurité maritime, de transports et la mise en place d’une fiscalité européenne pour préserver l’environnement.

       Débattre des frontières

    Il n’est plus possible d’élargir l’Europe sans réfléchir à ses contours et donc de son identité. Il n’y a de citoyenneté que sur un territoire clairement établi et un horizon défini.

    Il nous faut donc un grand débat au Parlement Européen dès 2004 puis dans l’ensemble des pays de l’Union pour fixer les limites et donc les frontières de ce qui sera, à terme, l’Union Européenne et bâtir avec nos voisins de l’Est et du Sud un partenariat privilégié, une coopération qui intègre le développement mais aussi la sécurité et la circulation des personnes. D’ores et déjà, un grand pacte euro-méditerranéen pourrait être conclu, avec des échanges renforcés avec les sociétés du Maghreb.

       Affirmer la citoyenneté européenne

    Je propose d’aller jusqu’au bout de la logique fédérale. Cela veut dire adopter une Constitution qui définisse précisément les compétences de l’Union et qui donne aux citoyens européens la capacité de choisir la composition des organes qui auront autorité pour engager l’Europe.

    Les socialistes doivent faire ce choix, dès lors qu’ils ont l’assurance que le projet commun de l’Europe est celui de la solidarité et que l’Union peut faire progresser les droits et les protections mieux que chaque Etat-Nation ne pourrait y parvenir isolément. La logique fédérale signifie que les décisions à la majorité deviendront la règle dans tous les domaines et qu’aucun Etat ne pourra plus, par le jeu de l’unanimité, bloquer le processus. C’est la seule façon de faire progresser l’Europe.

    Le risque ? C’est tout simplement celui de la démocratie. Ce sont les Européens, par leur vote, qui doivent déterminer leur avenir, c’est-à-dire le projet et les responsables pour l’incarner. C’est ainsi que l’on créera une véritable citoyenneté européenne :

      • le Président de la Commission sera désigné au sein de la coalition victorieuse, c’est-à-dire de la majorité du Parlement Européen. C’est lui qui incarnera l’Europe,


      • Il formera un véritable gouvernement européen, politiquement responsable devant le Parlement et le Conseil Européen.

    C’est sur le fondement de la Démocratie parlementaire et du suffrage universel que l’Europe politique peut s’accomplir. Pour que l’Europe soit politique, il faut politiser l’Europe.

    La citoyenneté européenne, c’est aussi consulter, par référendum, l’ensemble de la population du continent à chaque grande étape d’avancement de la constitution de l’Union.
    Les Français doivent être impérativement interrogés, en 2004, sur la nouvelle Constitution Européenne, qui clôturera l’ensemble de la démarche d’approfondissement et d’élargissement.

       Aller plus loin et plus vite

    Vouloir l’Europe, c’est être aussi capable de forger une fédération plus étroite pour avancer plus vite, et notamment sur la défense et la politique étrangère. Aussi est-il indispensable de former une avant-garde qui, au sein de la grande Union, mette des compétences en commun et aille plus loin dans l’intégration. Cette avant-garde peut être portée, soit par les six nations fondatrices de l’Europe (celle du traité de Rome), soit par les pays qui ont adopté l’euro. Dans les deux cas, c’est avec nos amis allemands qu’il faut travailler pour donner à l’Europe, l’impulsion, la force et la légitimité qui lui manquent aujourd’hui pour peser face à la toute puissance américaine.

    Etre de gauche dans la mondialisation, c’est faire le choix de l’Europe. De l’Europe solidaire, de l’Europe citoyenne, de l’Europe politique, de l’Europe puissance.

    Les socialistes français doivent en être les premiers militants. C’est un combat. La ligne qui est la nôtre n’a de chances de réussir que si nous savons recueillir le concours de toutes les forces progressistes, notamment au sein du Parti Socialiste Européen. Il faut en faire un vrai parti avec des dirigeants élus, des orientations débattues par l’ensemble des militants. Nous n’y serons pas les plus nombreux, à nous d’être les plus convaincants.

    C’est pourquoi je propose que, pour les élections européennes, le Parti Socialiste élabore avec nos partenaires du PSE un programme commun des socialistes européens afin d’en faire le projet majoritaire en Europe.

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III/ Fonder notre projet
sur la solidarité citoyenne

 
Notre Congrès n'a pas à élaborer un programme. Nous n'en sommes pas là. Il doit tracer une perspective, une vision, un projet, tout en répondant aux sujets que l'actualité impose. C'est cette démarche qui nous permettra d'être identifiés par nos concitoyens, de susciter des engagements, de présenter une alternative à la Droite. Bref, d'organiser et d'assurer la reconquête.

C'est au Congrès de fixer la ligne. Une fois adoptée par le vote des militants, elle vaudra pour l'ensemble de notre Parti. Il y va de notre cohérence et de notre crédibilité. Nul ne pourra s'en extraire au gré de ses choix personnels ou de ses ambitions. Chacun peut présenter librement, dans ce débat qui s'ouvre, ses propositions. Mais la démocratie, c'est d'abord le respect du vote. Il peut y avoir des minorités, il ne doit y avoir qu'une seule position des socialistes. C'est cette force d'expression qui nous permettra d'être entendus et de convaincre. J'en fais la condition première de notre réussite. Et je n'admettrai pas que, dans un Parti de libre discussion comme le nôtre, cette règle puisse être écornée ou transgressée.

Du débat militant qui s'est ouvert depuis plusieurs mois, je retiens trois principes qui fondent notre identité : l'Egalité, la Citoyenneté et la Solidarité.

C'est par rapport à ces valeurs, qu'il convient d'élaborer nos réponses dans la France d'aujourd'hui, ce qui suppose, au-delà des questions économiques et sociales qui restent fondamentales, d'élargir le champ des réformes à toutes les sphères de la vie et de lutter contre la production et la reproduction des inégalités. " Contre la société de marché ", nous devons dire celle que nous entendons promouvoir : la solidarité citoyenne.

1- La société de l'Éducation

    L’Education, c’est la priorité première. Elle permet de relever les grands défis : la transmission du savoir, l’égalité, la citoyenneté, l’accès à l’emploi, la mobilité sociale mais aussi le civisme et l’intégration.

    Le Projet socialiste, c’est d’abord un projet éducatif qui vaut pour tous les âges de la vie et qui dépasse les lieux mêmes de l’école. Nous devons, à la différence de la Droite, y consacrer les moyens indispensables, mais aussi proposer un plan d’action pour mobiliser ces ressources au service de deux grands engagements :

      a) L'accès égal pour tous à la connaissance

    Il exige d’abord une lutte contre l’échec scolaire, par un encadrement renforcé, un suivi personnalisé des élèves et une adaptation des rythmes, en primaire comme au collège. Mais les inégalités dans les parcours trouvent aussi leur origine dans des facteurs extérieurs, à l’école, sur lesquels il faut agir : le logement, les transports, la précarité de nombreuses situations familiales. Une politique de la réussite commence par le développement des modes de garde collective pour les tout-petits, se poursuit par la pré-scolarisation dès deux ans et la généralisation des activités extra-scolaires, mais aussi l’élargissement des bourses et la gratuité des outils pédagogiques : les livres comme l’informatique.

    Le droit à une éducation égale durant tout le temps de la scolarité obligatoire appelle également une diversification des enseignements au sein du même collège et sans sélection précoce. Il accorde une place plus grande au civisme, à la technologie, aux arts, bref à tout ce qui fait le citoyen. Il réclame une véritable mixité sociale dans tous les établissements et une attribution des moyens mieux adaptés aux besoins réels.

    L’accès aux diplômes demeure la condition de la réussite professionnelle et donc de l’accès à l’emploi et à de meilleurs revenus. Le doublement du nombre d’étudiants entre 1985 et 1995 a été un indéniable progrès. Mais les disparités entre catégories sociales demeurent insupportables. Les enfants d’ouvriers ont trois fois moins de chances que ceux des cadres de devenir étudiants. Et ce sont les premiers à être victimes de la sélection par l’abandon ; quant à l’accès aux grandes écoles, il leur est même davantage fermé que par le passé. C’est pourquoi la proposition d’un contrat d’autonomie pour tout jeune en formation est une nécessité si l’on veut véritablement lever les verrous sociaux et le gâchis humain que l’enseignement supérieur peut ainsi générer.

      b) Le droit à l'éducation sur toute la vie

    Comment admettre pour un socialiste que tout soit joué dès les premières années de la vie ? Ce doit être l’utopie concrète des socialistes pour les années qui viennent : offrir à chacune et chacun la possibilité de reprendre ses études pour obtenir des diplômes de même valeur et d’évoluer professionnellement pour disposer d’une formation débouchant sur une meilleure qualification. C’est un nouveau droit social qu’il faut fonder : accessible à tous, quel que soit son statut professionnel, d’autant plus large que la formation initiale est brève, financée par l’ensemble des acteurs publics et sociaux et assuré par les établissements éducatifs eux-mêmes. Il va de pair avec la validation des acquis professionnels pour renforcer la promotion sociale.

    Ce grand souffle donné à la formation sur toute la vie est un enjeu économique, social, culturel. Il peut donner à notre pays un atout considérable dans la compétition entre pays développés. Il offre un nouvel espace à l’Education populaire pour que le temps libéré se transforme en temps d’échange, de partage et de citoyenneté.

    Et comment ne pas intégrer le service public audiovisuel dans cette redéfinition des missions ? Tout se tient.

    Je propose donc que, au lendemain de notre Congrès, nous menions, avec tous les partenaires de l’action éducative, un grand chantier de réflexion pour bâtir ce plan global pour la Société de l’Education.

2- La société de la solidarité

    C’est le sens même du combat de la Gauche. Sa raison d’être et le cœur de sa démarche. Chaque progrès crée une nouvelle exigence.

    Nous avons accompli, ces dernières années, de grandes réformes. Ayons aussi la lucidité de reconnaître l’inertie des inégalités et les limites des mécanismes de redistribution. Elle justifie une nouvelle mobilisation de la Gauche pour rendre plus effective, plus concrète, plus personnelle la politique de solidarité.

      a) Valoriser le travail

    C’est la priorité donnée au plein emploi et surtout au bon emploi. Nous en sommes loin. C’est pourquoi les socialistes doivent prioritairement se préoccuper de la production de richesses, de la croissance, de la recherche, du développement des entreprises et de l’initiative. Mais, face aux progrès de la productivité, nous savons qu’il faut une politique volontariste de création d’emplois (telle que nous l’avons menée avec les 35 heures, les emplois jeunes, …) et ce n’est pas au moment où la droite la sacrifie qu’il faudrait y renoncer. Toutefois nous vivons un changement dans les modes de production et les rapports au travail qui conduisent à des flexibilités accrues, des mobilités contraintes, des temps partiels subis, des rythmes divers et des statuts multiples. Nous savons que la baisse du chômage ne correspond pas toujours à une amélioration de la qualité de l’emploi.

    C’est pourquoi je propose que les cotisations sociales soient modulables en fonction de la durée des contrats de travail afin d’encourager la stabilité et pénaliser la précarité imposée par le patronat. Le même dispositif doit être prévu pour atteindre l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.

    Mais l’emploi est devenu, sous les effets de la mondialisation libérale, plus instable, plus vulnérable, plus inégalitaire. Nous devons, sans cultiver l’illusion de l’interdiction totale des licenciements, mettre un coup d’arrêt à cette dégradation de la condition salariale qui a été pour beaucoup dans l’éloignement des catégories populaires par rapport à la Gauche. Des engagements pour l’avenir doivent être formulés, en liaison avec les organisations syndicales et notamment celle d’une " sécurité sociale du travail " permettant aux salariés d’alterner les périodes de travail et de formation afin de disposer, quelles que soient les mobilités professionnelles, du même socle de droits, permettant ainsi de véritables carrières ouvrières.

    Enfin, reste la question majeure du pouvoir d’achat, notamment des bas salaires et du partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise. Elle est aujourd’hui déformée en faveur du capital, en raison du mode de calcul des cotisations sociales. Or, il n’y a plus de raison de faire dépendre l’ensemble du financement social du seul salaire. Une part doit provenir d’un prélèvement sur l’ensemble de la richesse produite. Cette réforme, forcément étalée dans le temps, aura pour effet majeur de favoriser l’augmentation des salaires directs dans le cadre de la négociation salariale.

      b) Garantir l'avenir de la protection sociale

    Le bilan de la Gauche en ce domaine est impressionnant, récemment encore avec la CMU et l’APA. Et pourtant, le système est devenu opaque, compliqué, et parfois injuste. Les bénéficiaires ne sont pas toujours conscients de ses mérites et ceux qui en sont exclus en conçoivent une légitime frustration. L’écart entre les minima sociaux et les bas salaires aggrave les tensions et les effets de seuil pour l’attribution des prestations sont de plus en plus mal ressentis. La Droite en tire argument pour libéraliser, individualiser, décentraliser et renvoyer vers l’épargne ce qui relève de la prévoyance collective. Les évolutions démographiques et techniques obligent par ailleurs à des mutations profondes.

    Je propose que les socialistes prennent là aussi l’initiative du mouvement et de la réforme.

      • D’abord, en distinguant ce qui relève de l’Etat (la politique de santé publique, la garantie de minima de revenus, les modes de financement) et ce qui est de la responsabilité des partenaires sociaux (la négociation des droits, la gestion des recettes, …),


      • Ensuite en assurant une véritable pérennisation des ressources, par une meilleure assiette des prélèvements sociaux pour garantir le socle même de la protection sociale et rassurer la population sur l’avenir des garanties collectives,


      • Enfin, en responsabilisant les usagers, les acteurs sociaux, les professionnels concernés afin de rendre plus efficace l’organisation collective, plus personnalisée la prestation et plus civiques les comportements. Et faire que nul ne s’installe dans l’assistance, ce qui suppose que le droit à l’insertion soit partout privilégié.


    Nous devons devant nos concitoyens ouvrir trois grands débats :

      • redéfinir les priorités de notre politique de santé et garantir à tous quel que soit leur niveau de revenus un égal accès aux soins,


      • évaluer en conséquence les ressources nécessaires avec l’hypothèse de devoir y consacrer des moyens plus importants, notamment avec la CSG,


      • redéfinir les missions de l’hôpital public, ses moyens et le maillage du territoire avec pour objectif la qualité et la proximité.


    Cette nécessité d’une réforme sur la santé existe aussi s’agissant des retraites. En effet, il s’agit de refonder le contrat entre les générations, passé après la seconde guerre mondiale en affirmant les grands principes suivants :

      • maintenir à un niveau élevé le montant des pensions,


      • garantir le système de la répartition et refuser tout engagement quel qu’il soit dans les fonds de pensions,


      • maintenir le départ à la retraite à soixante ans,


      • tenir compte de la pénibilité des métiers pour justifier les différences dans l’âge de départ ou la durée des cotisations,


      • assurer de nouvelles recettes pour abonder le fond de solidarité pour les retraites.


    C’est là que la confrontation avec les libéraux prend tout son sens ! Du financement obligatoire ou volontaire, collectif ou individuel, solidaire à travers une cotisation ou lié à un acte d’épargne, dépend l’avenir du modèle social français.

      c) Renforcer et moderniser les services publics

    Pour les socialistes, le service public n’est pas un héritage du passé qu’il conviendrait de préserver coûte que coûte ou, à l’inverse, d’adapter de gré ou de force à la concurrence, c’est un domaine que la Nation décide souverainement de faire échapper aux règles de l’économie de marché. Il correspond à ce que l’on pourrait appeler " l’économie de besoins ". Son accès correspond à un droit et non à un prix établi selon la loi de l’offre et de la demande. Le service public est un outil incontournable de la cohésion sociale mais aussi économique et nationale. Il consacre le droit à l’égalité sur l’ensemble du territoire (des zones rurales jusqu’aux quartiers populaires).

    Or, la pression libérale à travers la dérégulation des marchés atteint directement les missions et les structures du service public. Nous ne pouvons plus, comme dans un passé récent, nous en remettre au pragmatisme ou à l’improvisation, faute d’une doctrine suffisamment bien établie. Aussi, je considère tout à fait impérieuse la définition des principes qui doivent guider les socialistes en matière de service public ; ils pourraient se décliner ainsi :

      • Définir les domaines qui relèvent du service public. Ils recouvrent des champs aussi essentiels que santé, les transports, l’eau, l’énergie, la communication et la culture. Mais de nouveaux besoins apparaissent, justifiant une telle reconnaissance. Je pense au logement, à l’insertion et à l’accueil des étrangers, Leur mode d’expression peut varier selon les besoins mais ils doivent être régis par les mêmes principes.


      • inscription dans la loi des obligations qui s’attachent à la notion de service public : égalité d’accès, non-discrimination, péréquation tarifaire,


      • les entreprises nationales en charge d’un service public doivent rester sous le contrôle entier de l’Etat. C’est la raison pour laquelle je m’oppose à l’ouverture du capital d’EDF. En revanche, pour tout ce qui concerne les activités concurrentielles, sans aucun lien avec l’intérêt général, cette règle n’a pas de raison d’être,


      • la propriété ne suffit pas. Ce sont les critères de gestion des services publics qui doivent correspondre aux missions qui leur sont confiées. Ce qui suppose efficacité, organisation optimale de moyens, respect de l’usager et contrôle effectif par l’Etat de la gestion des dirigeants et de leurs choix industriels, Car le rôle de l’actionnaire public, c’est de définir la stratégie et de veiller à ce qu’elle soit mise en œuvre dans les meilleures conditions ; c’est lorsqu’il oublie cette responsabilité que les dérives se produisent.

    Cette approche est la façon pour nous de concevoir, de manière efficace, dynamique et évolutive, les services publics privilégiant l’intérêt général et le long terme, à côté de l’économie de marché.

      d) Réhabiliter et réformer l'impôt

    Il demeure néanmoins de première importance de réhabiliter la notion de " contribution " citoyenne. C’est en effet par rapport aux priorités de l’action publique, aux dépenses collectives, aux redistributions indispensables qu’il convient d’abord de raisonner en fonction naturellement des marges de la croissance, du caractère ouvert de notre économie et de nos engagements européens.

    Mais faut-il s’efforcer de rendre le plus juste et le plus efficace possible cette " contribution ". Or, si nous avons régulièrement aménagé le système fiscal, nous ne l’avons pas profondément réformé.

    En cette matière, rien n’est pire que les proclamations non suivies d’effets. Je suggère de nous fixer trois objectifs à fort effets redistributifs et compréhensibles par tous :

      • Renforcer la progressivité de la fiscalité directe. L’objectif pourrait être la fusion de la CSG et de l’IRPP en un seul impôt : proportionnel pour les bas revenus conformément à la CSG actuelle et progressif au-delà. La prime pour l’emploi serait alors réintégrée dans ce nouveau dispositif pour favoriser les revenus du travail,


      • Réaffirmer le principe de la " déclaration de revenus " pour renforcer le lien civique qui s’y attache,


      • moderniser la fiscalité locale. C’est la plus archaïque et la plus injuste. Changer ses bases est une nécessité et la taxe d’habitation doit être notamment fonction du revenu,


      • diminuer le poids de la fiscalité indirecte dans le cadre d’un programme européen d’harmonisation de la TVA,


      • introduire un impôt européen qui doit prioritairement porter sur les activités économiques et financières ( IS, …).


3- La société de la citoyenneté

    Le libéralisme n’a pas que des effets sur l’économie et sur l’espace social. Il efface les repères, brise les solidarités, uniformise les cultures, bref bouleverse les références, les identités, le sentiment d’appartenance. Il n’est pas pour rien dans la crise de la politique. Il la provoque et s’en nourrit, comme pour mieux s’affranchir des normes de la démocratie politique.

    Nous n’avons pas été attentifs à cette érosion du civisme, à cette montée de l’individualisme et cette dégradation des comportements et donc au besoin d’autorité qu’ils ont naturellement engendré. La Droite en fait l’usage que l’on sait à travers l’exploitation cynique des peurs. La Gauche, pour reprendre l’initiative, doit revenir aux fondements mêmes du pacte républicain qui est un ensemble de droits et de devoirs permettant de vivre ensemble au sein d’une même Nation.

    C’est avec la méthode de la République qu’il faut traiter les questions de la sécurité, de l’intégration et du civisme.

       Le droit à la sûreté est une mission fondamentale de l’Etat. Et nous savons que l’insécurité touche d’abord les plus fragiles, les plus modestes, c’est-à-dire le plus grand nombre. Nous avons su fixer les principes d’une politique cohérente : punition-dissuasion-prévention. Et il faut s’y tenir en étant ferme sur chacun de ces termes. Nous devons appréhender le problème de manière globale, traiter aussi farouchement la délinquance que ses causes, agir dans la durée pour peser sur le destin des générations. C’est ainsi qu’il faut s’opposer à la démarche du gouvernement, en partant de la réalité pour montrer que l’on y répond plus efficacement. Le " tout sécuritaire " peut, dans un temps, faire illusion. Il peut même, dans le cadre d’une suractivité médiatique, bousculer des statistiques surtout si ceux qui sont chargés de les produire sont jugés sur cette base ; mais il rencontre ses limites au sein même de la société. Et je persiste à penser que c’est notre approche qui finira par prévaloir : le respect de la règle, la sanction juste des délits mais aussi l’éducation, l’insertion, le suivi, l’accompagnement, la fin des ghettos, l’intégration. Tout est lié.

       L’intégration, c’est l’appartenance à la seule communauté que nous connaissons : la Nation. Nous devons la fonder sur des politiques urbaines, qui cassent les ghettos, sur des services publics présents partout mais aussi sur la promotion et la réussite scolaire des enfants de toutes origines. Le communautarisme est le refuge dévoyé de ceux qui ne retrouvent pas le lien social ailleurs. Il est le signe d’une société trop fermée.


    Or, chacun sait que les lois ne suffisent pas aujourd’hui pour assurer l’accès à la plénitude de la citoyenneté des Français d’origine étrangère, des citoyens des DOM-TOM ou des étrangers vivant en France essentiellement à cause de la couleur de leur peau. Les problèmes qu’ils rencontrent sont largement occultés et pourtant les discriminations se multiplient dans l’accès à l’emploi, à la formation, au logement, à la culture, aux loisirs. Ces faits-là doivent être connus, révélés, mesurés, dénoncés, sanctionnés. Mais l’exemple vient de haut : il n’y a aujourd’hui parmi les cadres supérieurs de l’Etat pratiquement aucune représentation significative de notre diversité. Le Parti Socialiste n’échappe pas à cette critique. Et le Congrès de Dijon devra marquer, de ce point de vue, une rupture irréversible. C’est un combat majeur pour la dignité et l’égalité. Il faut surtout représenter la France telle qu’elle est, c’est-à-dire plurielle.

    Enfin, il faut ouvrir le droit de vote aux élections locales comme celui de concourir aux emplois publics, et faciliter l’accès à la nationalité pour assurer cet équilibre entre les droits et les devoirs.

    Quant aux nouveaux arrivants et aux immigrés récemment installés, l’idée d’un engagement initial permettant l’apprentissage du français et la compréhension des règles communes doit être soutenue. C’est la condition d’un accueil réussi. Mais toute politique d’immigration lucide s’accompagne impérativement d’une stratégie de co-développement.

       La laïcité : elle est aujourd’hui menacée ; en France par la montée des communautarismes et par l’intolérance ; en Europe où nous peinons à le faire reconnaître ; dans le monde par les fanatismes religieux. Il nous appartient de rappeler son actualité et sa force. La laïcité joue un rôle central pour faire vivre ensemble une diversité d’hommes et de femmes, d’origines, de confessions, de cultures et de mœurs différentes. Les religions sont égales devant la laïcité. Et l’islam doit donc avoir des droits identiques pour accepter les mêmes devoirs. Je propose que le Parti Socialiste soit le vecteur de cette République laïque, le promoteur de cette liberté mais aussi de cette vigilance. Nous devons dénoncer tous les faits qui y dérogent, tous les manquements à la neutralité ou pire les discriminations de toute nature.

       Le civisme, c’est la culture première du citoyen. Au-delà de ce rappel nécessaire, l’idée de généraliser un livret citoyen à tous les résidents, à l’âge de dix-huit ans, associée à une cérémonie publique en mairie qui vaudrait inscription sur les listes électorales mérite d’être lancée. Mais il faut aller encore plus loin dans la consolidation du pacte républicain : il n’y aura de lien véritable que fondé sur l’échange, l’égalité, le partage. Et c’est pourquoi nous devons militer pour un service civique obligatoire pour tous les jeunes, de trois à six mois, consacré à des missions d’intérêt général (humanitaire, éducatif, associatif,..). Ce serait un formidable apport pour l’encadrement des populations en difficulté, une vitalité supplémentaire pour le réseau associatif, une coopération renouvelée avec les pays du Sud.

    Notre société a besoin de retrouver un brassage, une mixité, un mouvement. Elle n’est pas une juxtaposition, elle doit être une union. C’est pourquoi il faut soutenir davantage les réseaux associatifs, le bénévolat et l’action humanitaire. Comme socialistes, nous croyons dans la République, nous devons lui préparer un avenir si nous voulons nous faire comprendre dans les temps présents.


4- La société de la démocratie accomplie

    La Politique et la Démocratie sont intimement liées. L’affaiblissement de l’un est le reflet des imperfections de l’autre. Et réciproquement. Si les socialistes ont toujours poursuivi l’idéal de la démocratie jusqu’au bout, ils doivent traduire plus que jamais cette exigence, dans la vie institutionnelle mais surtout dans le champ social.

      a) Clarifier et moderniser les institutions

    En matière de révision de la Constitution, c’est moins une question de numéro que de contenu et de principes. Il ne peut, à mes yeux, être question de revenir sur le principe de l’élection du Président de la République au suffrage universel, en revanche il faut en finir avec la concentration des pouvoirs en temps de concordance des majorités et avec la contradiction en temps de cohabitation : la réforme consisterait à confier au Premier Ministre et au gouvernement l’essentiel du pouvoir exécutif et le Parlement verrait son rôle en matière d’initiative législative, budgétaire et fiscale renforcé et disposerait de tous les moyens pour contrôler l’action du gouvernement, y compris au plan international, notamment pour décider de tout recours à des actions militaires extérieures.

    Pour accompagner une telle évolution, il faut aller vers le statut de l’élu, le mandat unique, l’harmonisation de la durée des mandats et une décentralisation fondée sur des compétences clairement dévolues à chaque échelon territorial et sur le principe d’égalité républicaine, c’est-à-dire avec une péréquation des moyens et des ressources.

    La représentation doit également évoluer : cela vaut à l’évidence pour le Sénat dont le destin ne peut éternellement pencher à droite. Je propose la réduction du mandat à six ans et la réforme du mode de scrutin. Mais aussi pour l’Assemblée Nationale, 20 % des députés seraient élus à la proportionnelle sur des listes nationales, pour mieux traduire la diversité des opinions. Quant aux règles concernant la parité, elles doivent être rendues beaucoup plus contraignantes pour la rendre effective.

    Enfin, la composition et le rôle du Conseil constitutionnel doivent être révisés.

      b) Rénover et renforcer la démocratie sociale

    C’est sur la démocratie sociale que les mutations doivent être les plus profondes. Car l’intérêt général réclame un mouvement syndical présent dans toutes les entreprises, capable de prendre ses responsabilités dans la négociation sociale et disposant de moyens réels de fonctionnement. Les règles de représentativité doivent être revues en fonction des résultats aux élections professionnelles. Et le principe des accords majoritaires ou, à défaut, de la consultation directe des salariés, doit être introduit en matière de négociation collective. Chaque grande réforme sociale doit être préparée par une concertation préalable associant le Parlement et les partenaires sociaux. Mais la démocratie sociale, c’est aussi les droits donnés aux salariés dans l’entreprise et notamment la participation de leurs représentants aux organes de direction des sociétés pour être non seulement informés mais en capacité de contrôler les choix. Cette présence aurait sans doute évité bien des stratégies aventureuses. Elles contribueraient à renforcer le rôle des Conseils d’Administration et à considérer que l’entreprise n’appartient pas à ses seuls actionnaires. Ce doit être l’un de nos engagements forts.

    Les socialistes ont trop négligé ce que j’appellerai " l’alteréconomie " : les coopératives, les entreprises solidaires, l’économie sociale. Des formules originales d’organisation juridique et de constitution du capital doivent être imaginées. Des mécanismes incitatifs au plan fiscal doivent être fixés afin d’encourager la création de richesses hors des règles du capitalisme.


5- La société durable

    Notre société est aujourd’hui vulnérable car notre planète subit chaque jour des atteintes irréversibles : épuisement des ressources naturelles, catastrophes industrielles, effet de serre, marées noires, insécurité alimentaire, pandémies, disparition des espèces et recul de la biodiversité.

    Les citoyens ressentent avec angoisse l’accumulation de ces insécurités et de ces menaces, d’autant qu’ils subissent d’ores et déjà une dégradation de leurs conditions de vie : bruit, pollution de l’air, détérioration de la qualité de l’eau, altération des paysages.

    Aussi l’environnement n’est plus un thème de second rang par rapport à l’économique et au social, même s’il se confond avec eux, au sens où c’est le libéralisme qui est la cause du déséquilibre planétaire. C’est le sujet le plus important de notre agenda politique car il touche à l’avenir même du monde et de l’espèce humaine, au mode de développement, à la production comme à la consommation. Il renvoie aux inégalités entre le Nord et le Sud mais aussi aux disparités au sein même de notre pays où les plus exposés aux nuisances sont toujours les plus modestes.

    Il n’est donc pas concevable pour les socialistes de sous-traiter l’Ecologie à d’autres au prétexte qu’ils en font - et c’est légitime - l’essentiel de leur identité. Pas plus qu’il ne peut être admis de faire de l’environnement la résultante d’autres politiques. Ce doit être une priorité inspirant l’ensemble de nos choix publics.

      a) Redéfinir courageusement les priorités

    Dans bon nombre de domaines, l’attentisme n’est plus de mise face à la montée des risques et à la pression des lobbies. La prudence n’est pas la précaution. Mieux vaut prendre des risques politiques qu’écologiques.

       Priorité doit être donnée au principe pollueurs-payeurs (ce n’est pas aux victimes de payer mais aux auteurs de pollutions) et au respect des accords internationaux.

       Priorité aux transports collectifs
      Il s’agit d’abord de réduire la pollution en ville, en diminuant la place de la voiture individuelle, en imposant des normes strictes sur les véhicules et en développant des transports urbains en site propre. Mais des choix conséquents doivent être faits en faveur du ferroviaire car si rien n’est engagé le transport routier triplera au cours des dix années qui viennent.

       Priorité à la diversification énergétique
      Le nucléaire a permis d’assurer l’indépendance de la France en matière énergétique. Mais sa part dans la production d’électricité doit être réduite au bénéfice des énergies renouvelables, avec parallèlement la relance de la politique d’économies d’énergie.

       Priorité à l’agriculture respectueuse de l’environnement
      L’ensemble des aides agricoles (et notamment dans le cadre de la PAC), doivent être conditionnées au respect des normes en matière de qualité de l’eau et d’utilisation des sols.

       Priorité à l’égalité entre les territoires
      Nous avons su faire évoluer les structures pour les agglomérations et les territoires ruraux. Il faut franchir l’étape suivante, celle de la péréquation financière, c’est-à-dire de la redistribution des aides de l’Etat et de la réforme de la fiscalité locale (notamment la taxe professionnelle).


      b) Engager une action européenne et internationale majeure

    Les enjeux planétaires en termes d’écologie doivent cesser d’être subordonnés aux autres sujets de notre politique internationale : liberté du commerce, liberté des mers, système financier international, construction européenne. Au contraire, l’ensemble de notre politique internationale doit intégrer la sécurité écologique comme préoccupation centrale, au même titre que les droits de l’homme et la défense de la démocratie.

    Mais la recherche louable du consensus international n’est plus compatible avec l’état d’urgence. L’Europe doit fédérer la lutte. Elle doit s’appuyer sur des mesures de sauvegarde et de rétorsion pour contraindre les Etats défaillants, à cesser leur guerre quotidienne contre la planète.

      c) Reconnaître la citoyenneté écologique

    La décision en matière d’environnement résulte trop souvent de la confrontation de groupes de pressions. Il en résulte un déficit démocratique qui ne permet pas de prendre en compte ni les intérêts des principaux concernés, les citoyens et notamment les plus démunis, ni ceux ayant le moins l’accès à l’information.

    Seule la combinaison de principes forts de droits écologiques, jusques et y compris dans la Constitution, avec les méthodes innovantes de consultation directe et de démocratie de proximité, peuvent permettre de fonder une action efficace en matière d’environnement.

    Cette démarche doit s’accompagner d’une véritable citoyenneté environnementale en favorisant l’éducation à l’environnement, l’évolution des comportements individuels et la mobilisation de tous les acteurs dans la vie au quotidien.

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IV/ Construire
un grand Parti socialiste
pour rassembler la gauche

 

1- Un grand Parti socialiste

    C’est le passage obligé pour ne plus jamais revoir un 21 avril, c’est l’étape indispensable pour le redressement de la gauche. Notre force n’est pas une prétention partisane, c’est la condition du succès collectif.

    Le Parti socialiste, s’il a su s’imposer comme premier parti de la gauche française, n’a pas été capable de se situer, en termes d’effectifs militants et de résultats électoraux, au niveau de ses homologues européens. Le nombre de nos adhérents, même s’il a grossi depuis le printemps dernier, plafonne autour de 125 000. Et nous n’avons jamais dépassé, sauf rares exceptions depuis 1981, 25 à 27 % du corps électoral. Aujourd’hui, c’est un parti capable de dépasser 30 % des suffrages avec le double d’effectifs militants qu’il faut bâtir. Mais fixer un tel objectif suppose des changements de nos pratiques et nos organisations et donc un effort collectif considérable. La nature du militantisme, l’évolution des aspirations des citoyens, le rôle des technologies de l’information exigent une transformation de notre parti. Sa réforme fait partie de la rénovation de la démocratie.

    Faire un parti de militants
    , assurer une représentation fidèle de la société, et en faire un mouvement populaire, être exemplaire en matière de démocratie participative, diversifier l’origine sociale et géographique de nos responsables, promouvoir une culture civique et solidaire, telles sont aujourd’hui nos obligations si l’on veut retrouver la confiance de nos électeurs et disposer d’une crédibilité auprès de celles et ceux qui ont vocation à nous rejoindre.

    C’est pourquoi, je propose que notre Congrès de Dijon soit un Congrès fondateur, ce que nous déciderons ensemble sera immédiatement applicable.

      a) Un Parti plus ouvert

    Nous connaissons notre force : un réseau d’élus présents sur tout le territoire, des militants disponibles, des sympathisants nombreux au moment des élections. Nous mesurons nos faiblesses : numériques d’abord mais aussi le vieillissement et une sur-représentation des classes moyennes, la présence bien insuffisante des jeunes comme des catégories populaires. Voilà pourquoi, il faut :

       rendre possible l’adhésion directe,

       multiplier les structures associées
      à notre Parti, par thèmes ou par activités,

       développer le Parti avec la création d’un secrétariat national chargé particulièrement d’organiser régulièrement des campagnes d’adhésion,

       mettre en place un contrat de développement avec chaque fédération, dans le cadre d’une " décentralisation " de notre Parti,

       agir spécifiquement sur les quartiers populaires.

    L’enjeu de l’élargissement de notre base militante est essentiel : être plus nombreux permet une meilleure perception des réalités, une capacité d’échange et de dialogue avec la société et un renouvellement des responsables.

      b) Un Parti plus représentatif de la société

    Il faut aller jusqu’au bout de l’objectif de parité dans tous les lieux de décision du parti, réduire le cumul des mandats et des fonctions, et assurer la rotation régulière des responsabilités en renouvelant à chaque Congrès au moins un tiers des membres de chacune des instances du parti (Conseils Fédéraux, Conseil National, Bureau National). C’est sur la constitution de nos listes pour les prochaines élections régionales et européennes qu’il faut être le plus volontaire. Je prends l’engagement d’y faire figurer toute la diversité de notre parti et de notre pays, avec la présence de toutes les catégories sociales, et de toutes les couleurs qui forment notre nation et de notre Parti. Il y faudra plus que de la proclamation de Congrès mais une détermination sans faille. C’est notre devoir et c’est aussi notre chance.

      c) Un Parti plus démocratique encore

    Certes, depuis 1995, nous élisons au suffrage universel direct tous les responsables du Parti. Mais il faut aller plus loin dans l’implication des militants dans nos décisions collectives. Je propose :

       Une conférence militante annuelle pour trancher, avec les adhérents, l’orientation du Parti, en dehors de tout enjeu de pouvoir. Ce sera la meilleure façon de poursuivre l’exercice de parole militante que nous avons engagé,

       La consultation directe des adhérents sur de grandes questions d’actualité à la suite d’un débat, préparée en Conseil Fédéral puis en Conseil national,

       Le renouvellement et la rénovation du Conseil national pour assurer une meilleure représentation des militants et en faire le véritable Parlement du Parti, avec un ordre du jour débattu au préalable par les Conseils Fédéraux et un vote sur des résolutions engageant l’ensemble du Parti,

       L’institutionnalisation du rassemblement annuel des secrétaires de section devant lequel la Direction nationale viendrait rendre compte de son activité.


      d) Un Parti du mouvement

    Le lien avec les acteurs sociaux s’est distendu, sans doute du fait d’une responsabilité collective. Affirmation jugée sentencieuse de la primauté du politique de notre côté, revendication farouche de l’autonomie des acteurs sociaux, de l’autre.

    Cette étanchéité est dangereuse pour la démocratie, le respect n’est pas l’indifférence, l’indépendance n’est pas l’isolement. Syndicats, partis politiques, associations interviennent dans des champs différents mais portent des valeurs communes.

    Sans doute, convient-il de rappeler et de faire appliquer une règle de nos statuts qui prévoit que tout adhérent du parti Socialiste doit être également membre d’un syndicat ou d’une association.

    Mais il faut multiplier les instances du dialogue, avec les acteurs sociaux. Confronter les points de vue. Rechercher les convergences de proposition. Mais le mouvement, c’est aussi celui que l’on peut créer en portant de grandes causes, en agissant là où la solidarité ne s’exerce plus, en occupant l’espace public partout où il a été abandonné, en rendant des services, en s’adressant au parti le plus puissant, celui des abstentionnistes.

      e) Un Parti de la citoyenneté et de la solidarité

    La citoyenneté par :

       le rappel des droits et des devoirs qui s’attachent à la vie en République et qui permet d’échapper au clientélisme et au corporatisme,

       le développement de la démocratie participative partout où nous sommes en situation de responsabilité afin de démontrer concrètement le renouvellement de l’action politique,

       l’adoption d’une Charte éthique pour s’assurer du caractère exemplaire de nos responsables et de nos élus.


    La solidarité par :

       la définition de projets d’action collective pour des causes humanitaires nationales et institutionnelles,

       la multiplication des actions de coopération de nos sections et de nos fédérations avec les pays du Sud.


2- Rassembler la gauche et ouvrir la voie à son unité

    Un grand Parti socialiste, renouvelé dans ses pratiques, ses formes et ses responsables, ouvert au dialogue et avec les acteurs sociaux, soucieux de couvrir l’ensemble du champ politique, sans concéder quelque thème que ce soit à d’autres, représentatif de toute la société, est la condition première.

    C’est lui qui donnera la dynamique, le mouvement, le sens. Mais le Parti Socialiste ne peut réussir seul. Il doit s’inscrire dans une démarche d’alliances fondée sur un contrat de gouvernement. De ce point de vue, notre Congrès intéresse toute la gauche.

    J’ai cru comprendre que le Parti Radical de Gauche souhaitait engager avec nous une discussion sur un possible regroupement. Nous y sommes prêts. Avec les Verts et les Communistes, c’est la formule de l’accord sur un projet qu’il faut privilégier. C’est la seule qui respecte chacune des composantes, c’est la seule qui justifie à l’avenir des accords électoraux.

    La construction d’un rassemblement de la Gauche, souhaitée par l’électorat, est à ce prix. Elle ne doit pas être conçue comme une simple machinerie électorale mais comme un mouvement militant, vivant, utile, susceptible de peser, dans la majorité ou dans l’opposition, sur le destin collectif en France mais aussi dans le monde.

    Pour y parvenir, la méthode doit également changer. Je propose que le premier acte de notre Congrès soit de lancer des " forums décentralisés de la Gauche " où, dans les grandes villes, les départements, les régions, les responsables, les militants mais aussi les citoyens voulant préparer ensemble l’alternance, confrontent leurs idées et débattent des convergences nécessaires.

    Cette initiative permettra de préparer au mieux les élections régionales de 2004 et favorisera, surtout, l’élaboration du Projet commun que la Gauche devra présenter pour les échéances majeures de 2007. Elle justifiera des candidatures communes à l’occasion des différents scrutins. Elle engagera un processus irréversible. Car nous devons nourrir la perspective de l’unité de la gauche au-delà des formes qui sont les siennes aujourd’hui.

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Conclusion

 
Notre tâche est considérable. Notre responsabilité aussi. Nous avons à surmonter non pas une simple défaite électorale mais une crise de la représentation. Nous avons à combattre non pas un simple gouvernement de droite mais un système libéral à l’échelle du monde. Nous avons à proposer non pas un simple programme mais un véritable projet dont l’accomplissement dépendra, pour partie, du devenir de l’Europe.

Pour y parvenir, nous devons à la fois rester nous-mêmes et changer profondément.

Nous portons une tradition, le socialisme démocratique, dont le combat s’est identifié à la République pour la prolonger jusqu’au bout. Il a produit de grandes avancées pour le pays et gardé toute sa vigueur : il s’agit toujours d’accélérer la marche vers la pleine Citoyenneté. Mais la mondialisation modifie les formes et la nature de notre intervention. La démarche de transformation doit toucher à tous les domaines de la vie, agir aux racines mêmes des inégalités et se situer aux dimensions géographiques pertinentes. C’est ce que j’appelle le réformisme de gauche.

Pour ouvrir ce nouveau cycle politique, il faut changer : nos structures, notre vie interne, nos relations avec les français. Mais changer aussi nos objectifs, faire un grand Parti Socialiste et ouvrir la voie vers l’unité de la Gauche. C’est maintenant notre devoir. C’est aussi l’espoir de toutes celles et de tous ceux qui, après la douleur de l’échec, sont prêts à aller de l’avant et à inventer l’avenir avec nous. Ils nous veulent unis, imaginatifs, combatifs. Ils attendent de nous un signe fort. Ce doit être le message de notre Congrès de Dijon.

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