Un parti à 30 % des suffrages avec le double d'effectifs militants
Montreuil (Seine-Saint-Denis) - 15 décembre 2002



 Discours de François Hollande, Premier secrétaire, prononcé en conclusion de la rencontre de 1 500 cadres et responsables fédéraux


 
Chers amis, chers camarades,

La réunion d’aujourd’hui clôt une phase de débat mais pas le débat lui-même, puisque le processus de notre Congrès de Dijon va s’ouvrir dès le début de l’année prochaine, c’est-à-dire dès demain.

Après le choc du 21 avril, défaite pour la gauche, traumatisme pour toute la société, qui aurait pu admettre que les socialistes réduisent leurs réponses aux formes ordinaires de discussions de Congrès ? Avec des motions pré-rédigées et la bataille pour les postes.

Il fallait définir une autre méthode, celle de la parole militante dans un cadre libre, ouvert, transparent. Je l’ai proposé, et aujourd’hui j’en mesure la portée. Si l’on en juge par le nombre de réunions (plus de 6 000), de contributions de toute nature, résumées dans les cahiers fédéraux, c’est un véritable exercice de délibération collective qui a eu lieu. Et aussi de vérité : quel parti peut en dire autant ? Quel parti peut en faire autant, quel parti peut prendre ce risque ? Soyons fiers, soyons conscients.

Le débat a pris du temps, visiblement insupportable à certains mais il était nécessaire si l’on voulait se situer à la hauteur de l’événement et ne pas céder aux jugements sommaires, aux facilités de pensée et de langage. C’était une voie originale. Je peux dire aujourd’hui qu’elle est réussie.

Je tiens à remercier les premiers fédéraux, les secrétaires de section mais surtout les adhérents qui se sont pleinement investis dans ce débat, avec franchise, lucidité et exigence. Ils n’ont rien dissimulé de leurs critiques (bilan, campagne, parti, gauche plurielle). Mais ils ont aussi dit leur fierté dans les réalisations du gouvernement de Lionel Jospin et leur reconnaissance à l’égard de celui qui depuis 1995 leur avait redonné espoir et dont j’apprécie qu’il soit resté militant de notre parti.
Ils ont cherché à comprendre les causes profondes de l’échec, et surtout en analysant la société à préparer l’avenir et redonner de la force à leur l’idéal, sans perdre le contact avec la réalité. J’ai relevé, à la lecture des cahiers et des débats d’aujourd’hui, une grande convergence d’approche ce qui ne facilitera pas forcément les différenciations de Congrès.

Aujourd’hui, la condition première de la réussite, c’est que cette parole soit entendue tout au long du Congrès, et bien au-delà, et que les militants affirment leur volonté de maîtriser le Congrès du début jusqu’à la fin. Et j’en prends ici l’engagement. Aussi comme j’ai veillé à respecter le débat de ces derniers mois, sans chercher, comme on m’y a parfois invité, à l’orienter ou à le préempter, j’entends maintenant en tirer tous les enseignements et formuler toutes les conclusions utiles pour notre parti.

Le PS doit, en effet, en plus de son travail d’opposition, relever trois défis majeurs :
  1. la crise politique relevée le 21 avril appelle des réponses nouvelles pour rétablir le lien entre le citoyen et la république, l’individuel et le collectif, l’intérêt particulier et l’intérêt général. C’est la condition indispensable pour combattre le populisme et réduire l’indifférence civique

  2. la prise de distance d’une partie de notre électorat qui ne s’est pas suffisamment reconnue dans notre bilan, qui n’a pas vu dans notre projet une vision d’ensemble susceptible de la mobiliser et qui s’est éloigné de nous parce que nous n’étions pas suffisamment près d’elle. Une véritable reconquête s’impose en termes d’action militant mais aussi en termes de propositions politiques par une attention renouvelée aux problèmes concrets du travail, de la sécurité, des services publics, de l’école autour des principes d’égalité et de citoyenneté

  3. la division de la gauche : nous avons pu en mesurer les effets, lors des derniers scrutins. Le défaut de solidarité autour du bilan comme d’un projet a pesé lourd. Aujourd’hui, c’est le risque du repli sur soi, de la dérive identitaire ou de l’expression individuelle qui menace. Il nous appartient là encore de montrer que le PS est dans une autre démarche, qu’il sait se remettre en cause sans perdre ses repères et qu’il préserve son identité de parti de transformation et de gouvernement. Bref, un parti qui a retenu la leçon de nos amis suédois : gouverner au pouvoir comme si nous étions dans l’opposition, se comporter dans l’opposition pour revenir le plus vite possible au pouvoir. C’est donc à nous de créer les conditions d’un nouveau rassemblement.
En ce sens, nous sommes dans un moment décisif pour la gauche. Et le Congrès de Dijon est effectivement un rendez-vous majeur, non simplement pour des enjeux internes, que je respecte, mais pour la dynamique politique qu’il doit créer, pour le mouvement de renouveau et d’union qu’il doit lancer et pour l’espérance d’une alternance qu’il doit provoquer.

Pour répondre à ces défis, je vous appelle à engager un effort collectif considérable. Il s’agit rien de moins que de changer nos pratiques politiques, de situer à l’échelle internationale notre action, de clarifier notre identité et de mener une opposition ferme à la droite.

I / Construire
un grand parti socialiste

C’est le passage obligé pour ne plus jamais revoir un 21 avril, c’est l’étape indispensable pour mobiliser l’ensemble de la gauche. Car ce n’est pas de notre hégémonie mais de notre faiblesse que la gauche, ce jour-là, a eu à souffrir.

Le PS, s’il a su s’imposer 10 ans après Epinay, grâce à François Miterrand, comme premier parti de la gauche française, n’a pas été capable de se situer, en termes d’effectifs militants et de résultats électoraux, au niveau de ses homologues européens. Prenons la mesure des choses.

Le nombre de nos adhérents est l’équivalent du nombre des électeurs d’une grosse circonscription législative. Et nous n’avons jamais dépassé, sauf exception, 25 à 27 % du corps électoral. Aujourd’hui, c’est un parti à plus de 30 % des suffrages avec le double d’effectifs militants qu’il faut bâtir. Mais fixer un tel objectif suppose des changements de nos pratiques et de notre structure politique. C’est pourquoi je propose que notre Congrès de Dijon soit un congrès statutaire, et en ce sens fondateur, ce que nous déciderons ensemble sera immédiatement applicable.

    1) Un parti plus ouvert

    Nous connaissons notre force : un réseau d’élus présent sur tout le territoire, des militants disponibles, des sympathisants nombreux au moment des élections. Nous mesurons nos faiblesses : numériques d’abord mais aussi le vieillissement et une sur-représentation des classes moyennes, la présence bien insuffisante des jeunes comme des catégories populaires.

    Voilà pourquoi il faut :
     Faciliter l’adhésion directe
     Multiplier les structures associées
     Développer le parti : création d’un secrétariat national chargé du développement avec campagnes d’adhésion régulières

    2) un parti plus représentatif de la société

    Il faut aller jusqu’au bout de l’objectif de parité dans les instances du parti. Assurer la rotation régulière des responsabilités en renouvelant à chaque Congrès au moins un tiers des membres de ces mêmes instances.
    Enfin, quant à la constitution de nos listes pour les prochaines élections régionales et européennes, je prends ici l’engagement d’y faire figurer toute la diversité de notre parti et de notre pays, avec la présence de toutes les catégories et de toutes les couleurs qui forment notre nation.
    Il y faudra plus que de la proclamation mais une détermination. Je m’y engage. C’est notre devoir et c’est aussi notre chance.

    3) un parti plus démocratique encore

    Certes, depuis 1995, nous élisons au suffrage universel direct tous les responsables du parti. Mais il faut aller plus loin dans l’implication des militants dans nos décisions collectives :
     conférence militante annuelle : pour un vote des résolutions sur l’activité du parti et sur ses orientations qui compléterait un rassemblement annuel des secrétaires de sections devant lesquels la direction nationale viendrait rendre compte de son activité
     consultation directe des militants sur des questions d’actualité à la suite d’un débat , préparée en Conseil fédéral puis en Conseil national
     renouvellement et rénovation du Conseil national pour en faire un véritable Parlement du parti.

    4) un parti du mouvement

    Le lien avec les acteurs sociaux s’est distendu, sans doute du fait d’une responsabilité collective. Affirmation sentencieuse de la primauté du politique de notre côté, revendication farouche de l’autonomie des acteurs sociaux de l’autre côté.

    Cette étanchéité est dangereuse pour la démocratie, le respect n’est pas l’indifférence, l’indépendance n’est pas l’isolement. Syndicats, partis politiques, associations interviennent dans des champs différents mais portent des valeurs communes.

    Sans doute, convient-il de rappeler et de faire appliquer une règle de nos statuts qui prévoit que tout adhérent du PS doit être également membre d’un syndicat ou d’une association.
    Mais il faut multiplier les instances du dialogue, avec les acteurs sociaux. Confronter les points de vue. Rechercher les convergences de proposition.

    Mais le mouvement, c’est aussi celui que l’on peut créer en portant de grandes causes, en agissant là où la solidarité ne s’exerce plus, en France mais aussi dans le monde, en occupant l’espace public partout où il a été abandonné, en s’adressant au parti le plus puissant, celui des abstentionnistes.

    La construction d’une grande force socialiste souhaitée par l’électorat est à ce prix. Elle ne doit pas être conçue comme une machinerie électorale mais comme un mouvement militant, vivant, utile, capable de peser, dans la majorité ou dans l’opposition, sur le destin collectif en France mais aussi dans le monde.

II/ Affirmer la vocation internationale
et européenne du PS

Si la politique perd son souffle c’est qu’elle vit en vase clos, c’est-à-dire dans le cadre étroit de l’Etat nation quand les enjeux sont devenus planétaires et les leviers continentaux.
Les questions majeures de la paix, du développement, de l’écologie, de la diversité culturelle, loin d’affaiblir la portée de notre action politique nous ramène aux sources du socialisme : l’internationalisme et l’idéal européen.

Mais, là-aussi, faut-il faire preuve de clarté et de courage :
    Sur la mondialisation, la clarté commande d’éviter le procès global pour s’attaquer au libéralisme économique qui s’est installé dans le monde comme s’il était partout chez lui. Ce débat n’est pas nouveau mais, précisément, ses formes avec les marchés financiers et la rapidité de l’information le sont.
    Voilà pourquoi il faut agir à l’échelle du monde avec les instruments du socialisme démocratique : la régulation, en réformant les institutions internationales et en introduisant des normes et des impôts mondiaux ; la redistribution en engageant un plan en faveur du développement du Sud avec notamment l’annulation des dettes ; l’appropriation collective à travers les biens publics internationaux (eau, espaces naturels).
Tels sont désormais, nos nouveaux engagements. Nous devons les porter partout dans les institutions et notamment l’IS, les Parlements mais aussi dans un dialogue avec le mouvement social dont nous sommes un des débouchés politiques, à la condition qu’il accepte l’exercice de la responsabilité et sorte d’une logique de résistance ou de dénonciation.
Le courage c’est aussi de dire à chacun sa vérité. A commencer par le fait que le monde peut et doit être gouverné. Et que c’est même la seule façon de le changer. Et que la plus grosse manifestation compte moins qu’une victoire au suffrage universel.
    Sur l’Europe, nous entrons dans une période cruciale : l’élargissement, la Constitution européenne, l’avenir du projet européen lui-même.

     L’élargissement qui vient de se conclure à Copenhague, même si nous avons pu déplorer les conditions de sa préparation et notamment la manière avec laquelle les peuples en ont été tenus à l’écart, consacre la fin du partage du continent et de Yalta. La première étape de la construction européenne en avait terminé avec la guerre la plus monstrueuse de notre histoire. La seconde efface les séquelles de la guerre froide. C’est une date historique, c’est un événement heureux pour ceux qui nous rejoignent. Il l’est aussi pour nous sauf à penser que l’Europe est un club réservé aux favorisés de l’histoire, sauf à imaginer une Europe réduite à des fonds structurels et à la politique agricole commune. Ceux qui avaient rêvé l’Europe au lendemain d’un conflit mondial, l’avaient-ils même imaginé ?

     Raison de plus pour être exigent sur la constitution européenne qui doit marquer une évolution fédérale, avec un partage cohérent des responsabilités, des modes de décision fondés sur la majorité qualifiée et la reconnaissance d’une citoyenneté européenne à travers des institutions issues du suffrage universel.

     Mais l’Europe que nous voulons porter, c’est plus qu’un continent unifié, des institutions démocratiques pour l’organiser, c’est un projet fondé sur le plein emploi, le progrès social, la diversité culturelle, la laïcité, le développement du Sud, la maîtrise des enjeux planétaires.

     Or nous savons que ce modèle européen, fondé sur une puissance solidaire, se heurte à un autre : celui des tenants du grand marché et de l’alliance transatlantique. Un combat s’engage. Nous devons en être les premiers acteurs, parce que nous sommes socialistes, parce que nous sommes la France mais nous ne le gagnerons pas seuls, il nous faudra le concours de tous les mouvements et forces progressistes, notamment au sein du PSE.

     Je vous propose, en connaissance de cause, d’en bouleverser le cadre : faire du PSE un vrai parti, avec un vrai débat et une vraie ligne politique. Il n’est pas écrit, si nous savons faire partager notre idéal, que nous y serons minoritaires. Je vous propose en tout cas de prendre, dès à présent, toutes les initiatives pour sensibiliser tous nos partenaires à la transformation du PSE en véritable outil politique pour 2004 autour d’un programme commun.

III/ Clarifier notre identité

A l’heure où beaucoup s’interrogent sur les définitions, les labels, les positionnements au sein de notre parti, parfois avec la volonté sincère de faire du nouveau, je pense que nous sommes d’abord des socialistes et que le socialisme reste d’une grande modernité dans le monde qui est le nôtre, aussi bien pour les valeurs qu’il porte que pour la démarche politique qu’il propose.

Nos valeurs correspondent à l’accomplissement jusqu’au bout de l’idéal républicain. La recherche de l’égalité constitue le sens même du projet socialiste, la citoyenneté son prolongement et son levier quand à la laïcité elle permet plus que jamais de faire vivre ensemble des citoyens au-delà même de leurs diversités. Enfin, la poursuite de l’intérêt général et le souci du long terme nous offrent les moyens de dominer démocratiquement le marché.

Quant à la nature de notre parti, il tente depuis toujours de concilier la transformation sociale pour changer l’ordre des choses comme le désordre des conditions et la réforme par l’action gouvernementale. C’est cette méthode qui, en France comme dans les grandes social-démocraties, a fait avancer nos sociétés et a fait progresser les droits et les garanties. Elle a toujours été contestée par des mouvements, que l’on n’appelait pas encore les pôles de radicalité, mais qui mettaient déjà en cause l’idée même du pouvoir conçue comme une compromission, une trahison ou un abandon. Nous devons être sans complexe ou mauvaise conscience par rapport à ceux qui préfèrent nous combattre plutôt que de battre la droite à l’occasion des élections. Et si l’audace réformatrice s’épuise, ce n’est ni le pouvoir ni la durée de son exercice qui en est la cause mais l’oubli des objectifs eux-mêmes.

C’est pourquoi, j’appelle les socialistes, à la suite de nos débats, à fixer leur identité sur quatre priorités essentielles :

    1) l’Education

    C’est l’enjeu essentiel qui permet de relever tous les défis qui nous sont adressés : l’égalité, la promotion sociale, la diffusion du savoir, la citoyenneté, l’accès aux qualifications donc à l’emploi, l’usage des nouvelles technologies mais aussi le civisme et l’intégration.

    Un projet socialiste, c’est d’abord un projet éducatif, qui vaut pour tous les âges de la vie et qui dépasse les lieux même de l’école : lutte contre les inégalités scolaires, éducation tout au long de la vie, formation aux emplois de demain, éducation populaire. Tout se tient.

    Je propose que, dans les prochains mois, nous menions avec tous les partenaires de l’action éducative, un grand chantier de réflexion pour bâtir un plan global pour fonder la société de la connaissance, indispensable à la réussite économique et sociale de notre pays mais aussi l’intégration républicaine.

    2) Les services publics

    Convenons que c’est sur ce terrain que nous avons été les plus mal compris. Sans doute parce que nous n’avions plus de doctrine depuis le fameux « ni-ni » de 1988 sur cette question que nous avons souvent confondu secteur public et service public, et que l’adaptation à la réalité européenne et industrielle nous a servi de ligne de conduite, ce qui n’a pas contribué à la rendre plus visible.

    Or, les services publics constituent des formes d’organisation permettant d’assurer la cohésion sociale et l’égalité dans des domaines aussi fondamentaux que la santé, les transports, l’énergie, la communication et la culture mais aussi le logement et l’insertion.

    L’essentiel consiste d’abord à en fixer le périmètre et c’est à la Nation, et à elle-seule, de déterminer les biens et les services qui échappent aux règles de l’économie de marché, pour adopter celles de l’économie des besoins.

    Ensuite, se pose la question de la gestion de ces services et donc de la propriété. Cette propriété doit être entièrement publique chaque fois que l’ouverture du capital altère les principes mêmes du service public : égalité, péréquation, voire l’indépendance nationale. C’est le cas pour EDF.

    Enfin, la propriété ne suffit pas. Ce sont les critères de gestion et les règles qui doivent distinguer les services publics des services purement marchands, avec des règles de contrôle particulièrement strictes sur leurs dirigeants et sur l’efficacité du service rendu, car ce sont des fonds publics qui sont en cause.

    3) La solidarité

    Chacun l’a reconnu. Nous avons fait beaucoup dans la dernière législature en matière de droits sociaux. Et pourtant une partie de notre électorat n’a pas semblé, à tort ou à raison, y trouver son compte.

    Le travail n’a pas été suffisamment valorisé. Les revenus salariaux ont moins progressé que les revenus du capital. Les effets de seuil des prestations ont limité les mécanismes redistributifs. Les 35 heures, grande réforme de la législature, ont fait l’objet d’application variable selon les entreprises, la précarité n’a pas diminué malgré les progrès réalisés en matière d’emploi.

    Aussi faut-il en tirer les leçons en redonnant priorité à la politique salariale, en renforçant la progressivité de l’impôt, en améliorant l’efficacité des services publics et en garantissant mieux l’ensemble de la population contre les principaux risques, notamment face aux aléas économiques (précarité, licenciements). La sécurité sociale professionnelle, le statut du salarié et la formation tout au long de la vie doivent être aujourd’hui nos principaux axes de propositions. La solidarité doit être concrète, approchable pour chacun et ne peut se confondre avec une simple machine à redistribuer. Mais la solidarité, c’est aussi celle qui s’exerce entre les générations (les retraites), les territoires et les continents. C’est enfin la lutte contre toutes les discriminations (emplois, logements, loisirs) qui exige désormais de nouveaux instruments législatifs et une véritable mobilisation des acteurs publics, car c’est un élément essentiel du pacte républicain.

    4) Le pacte républicain

    Nous n’avons pas été assez attentif à l’effacement des repères, à la montée de l’individualisme, au besoin d’ordre et d’autorité qui s’expriment dans la société. Et nos discrétions dans le rappel à la règle est passé pour une faiblesse. C’est d’autant plus injuste que nous avons agi avec le souci de réhabiliter la politique : respect de la parole donnée, intégrité des comportements, indépendance de la justice. Et ce fut un paradoxe cruel de voir celui qui s’était le plus échappé de ces comportements éthiques sortir vainqueur de l’élection présidentielle, la plus symbolique de la crise du politique.

    Il reste que la réaffirmation des règles collectives, des droits et des devoirs et de l’exigence citoyenne constituent désormais pour nous une priorité. C’est cette approche qui justifie la création d’un service civil pour tous. C’est ainsi que nous devons aborder la lutte contre l’insécurité qui repose sur la conjugaison de la sanction, du respect de la discipline et de l’éducation. C’est ainsi que nous devons poursuivre l’intégration républicaine avec la laïcité comme règle et la non discrimination comme obligation.

    C’est ainsi que nous devons concevoir les évolutions institutionnelles autour des principes de clarté, de responsabilité et de démocratie : cela vaut pour le renforcement du Parlement, la décentralisation et la démocratie sociale. Et, à cet égard, les résultats des élections prud’homales justifient une révision des critères de représentativité et la reconnaissance des accords majoritaires.

    C’est l’affirmation de notre identité et la clarification de notre projet qui nous permettront de tirer les leçons utiles de nos déconvenues du printemps dernier. Il ne s’agit pas de faire plus de ceci ou moins de cela, ou de faire appel à un coup de barre ou à un coup de jeune, un coup de pub. Mais de bien prendre la mesure de l’effort à faire pour changer la relation politique avec les citoyens pour entendre les préoccupations de la société pour les mettre en cohérence dans un projet qui s’inscrive dans nos valeurs et soit à l’échelle de l’Europe et du monde.
Tel est l’enjeu de notre Congrès. Il ne s’agit pas d’une simple affaire entre socialistes, autour d’enjeux obscurs pour les non initiés. Il doit concerne les français, leurs préoccupations, leurs interrogations. Il doit montrer un parti en réflexion et en propositions. Il doit donner espoir à la gauche, montrer une attention et une écoute. Bref, nous devons être exemplaires dans notre façon de débattre. Il ne s’agit pas non plus d’un retour sur le passé. Ce Congrès doit être celui du rebond, non du repli. Il doit faire apparaître une force, un mouvement, un dynamisme.

J’y prendrai, en cohérence avec le débat militant, toute ma responsabilité.

Dès l’ouverture de la procédure à travers une contribution que je signerai seul, je fixerai les sujets principaux sur lesquels le parti doit, à mes yeux, se prononcer pour être doté d’une orientation claire pour les années qui viennent.

Je souhaite que nous soyons nombreux à nous y retrouver et que des apports viennent l’enrichir. Et s’il y a de véritables divergences entre nous, il y aura des votes et vous trancherez. Mais il faut permettre au Congrès de dégager, dans la transparence et la clarté, c’est-à-dire devant les militants, une majorité dynamique et cohérente autour d’une ligne claire qui engagera tout le parti et dont nul ne pourra s’extraire au gré de ses intuitions ou de ses positions personnelles. C’est nécessaire pour développer notre parti, renforcer sa présence comme sa crédibilité. C’est souhaitable pour rassembler la gauche et convaincre nos partenaires notamment ceux qui hésitent sur la stratégie à suivre qu’ils doivent débattre avec nous d’un projet commun pour le pays. Enfin, c’est indispensable pour nous opposer fermement à la droite et nous faire entendre.

IV/ Combattre la droite

La droite est en place depuis sept mois. Les français ne l’avaient plus vue depuis cinq ans. Ils avaient fini par l’oublier. Venue à la suite du traumatisme du 21 avril, elle a incontestablement bénéficié d’une forme d’indulgence. Sa méthode, il est vrai, est nouvelle : prudence dans les annonces, professionnalisme dans la communication, utilisation de la sécurité comme thème unique de son action. Omniprésence de Nicolas Sarkozy, Ministre de tout, à toute heure et sur toutes les chaînes, qui réduit le Premier ministre à l’agent d’ambiance chargé d’apaiser les sauts de colère d’Alain Juppé.

Mais sa politique est la même que par le passé, avec une préoccupation supplémentaire : défaire ce que nous avions fait. Emploi, éducation, privatisations, sécurité sociale, fiscalité (PEL). C’est une régression générale qui se prépare. Le pire est à venir : plan de rigueur budgétaire en janvier, plan d’austérité sociale au printemps.

Les socialistes doivent être à l’offensive. Pour contester au plan politique, combattre au plan parlementaire, alerter au plan médiatique, bref pour faire notre travail de force d’opposition avec le souci de proposer des alternatives et de montrer dans l’exercice de nos responsabilités locales des innovations politiques et sociales qui peuvent servir de références à nos actions futures.

Notre Congrès, là non plus, ne doit pas nous détourner de cette tâche essentielle. Nos débats internes doivent nourrir nos propositions publiques et ne peuvent tenir lieu d’activité principale, et surtout médiatique, de notre parti.

Je veux terminer par un message de mobilisation et de confiance.

Nous aurons besoin pour les mois qui viennent de tenacité, de volonté et d’unité.

La tenacité pour mener obstinément notre tâche d’opposition à une droite qui détient tous les leviers de pouvoirs jusqu’en 2007 et qui dispose de l’appui des puissants. Il y aura des moments difficiles, des impatiences, des résignations. A nous d’offrir à chaque moment, la réponse politique appropriée.

La volonté pour transformer notre parti, l’installer durablement dans la société, en faire un outil au service de la population et un facteur de rassemblement de la gauche et de construction d’une Europe politique et sociale. Nous connaissons les résistances, les obstacles, les inerties. A nous de travailler à les dépasser.

L’unité pour convaincre, parce que sans elle, notre parti est illisible, invisible, inaudible. Elle n’empêche pas la diversité, le débat, les confrontations d’idées mais elle en détermine le cadre. Nous savons nos défauts et nos rites. A nous d’inventer par l’intervention militante la méthode décisive pour donner de la cohérence à notre action.

Mais à constater le ressort qui est le nôtre, après cette épreuve du printemps dernier, à vivre l’intensité du débat militant, à voir la vitalité de notre parti qui ne s’est jamais découragé, qui a reçu le renfort de nombreux nouveaux adhérents, un parti qui s’est mis au travail, qui est devenu exigent quant aux suites à donner à ce qui reste pour nous un échec mais surtout un défi à relever.

Je vous le dis tout net. J’ai confiance, En vous et donc dans le Parti socialiste.



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