Les socialistes sont rassemblés pour servir la France
Congrès du Mans - 20 novembre 2005

Discours de François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste
Tribune du Congrès du Mans - discours de clôture


 
Chers camarades, ici, au Mans, le message de notre congrès est limpide, simple, évident : les socialistes sont désormais tous rassemblés pour servir la France. Notre congrès était attendu. Ce congrès était redouté, y compris par nous.

On nous annonçait le pire, nous avons réussi le meilleur.

Notre rendez-vous était décisif, on le sentait bien, d'abord parce que c'était le centenaire, cela crée des obligations à cet âge, ensuite parce que nous sommes à dix-huit mois d'une échéance décisive, après trois ans et demi de politiques de droite, destructrices pour la France. Enfin, le contexte nous obligeait à renouer le fil, ce contexte qui est celui d'une crise sans précédent que traverse notre pays.

Alors, notre congrès, son résultat, mais aussi son déroulement, est une bonne nouvelle. Une bonne nouvelle pour les socialistes, bien sûr, après tant de mois de débats internes qui finissaient par nous lasser et surtout qui commençaient à lasser nos électeurs. C'est une bonne nouvelle pour la gauche, qui trouve, quand nous allons bien, que nous sommes trop forts, et qui commençait, et je ne m'en plains pas, à s'inquiéter de nos propres divisions. Eh bien que la gauche soit rassurée, le Parti socialiste est uni, et c'est autour que la gauche va se rassembler. Et puis notre congrès est une bonne nouvelle pour la France, la France qui aspire au changement sans encore l'entrevoir. La France qui espère sans trop y croire l'alternance.

Nous avons répondu comme il convenait : l'unité est faite. La volonté s'est affirmée, et la vérité a été dite.

Soyez-en tous remerciés. D'abord les amis de la Sarthe et du Mans, Jean-Claude Boulard, le maire, Patrick Delpech, le Premier secrétaire de la fédération, ce succès, nous vous le devons, car l'accueil compte beaucoup, l'hospitalité aussi, et la météo nous a servi. Elle aussi était de bonne humeur.

Remercier également les délégations étrangères qui nous retournaient cette belle formule internationaliste : « Socialistes de France, unissez-vous. » Nous l'avons fait. Et puis remercier les délégués du congrès pour votre attitude tout au long de ces trois jours qui a fait souffler un esprit de rassemblement sur la commission des résolutions.

Je sais que notre synthèse n'allait pas de soi, qu'elle faisait débat au sein de chaque sensibilité, qu'elle pouvait se faire, et c'était le risque, dans la confusion, l'artifice, le faux-semblant.

Alors, pour nous, cette synthèse n'est pas la conclusion d'un moment, une habileté de langage ou d'écriture, un compromis savant qui ne durerait pas huit jours. Non. Cette synthèse, c'est un processus, c'est une dynamique, c'est une force, c'est une action en mouvement, c'est cette synthèse qui va permettre maintenant de changer la donne.

Si les socialistes ont rendu possible cette synthèse, c'est parce qu'ils ont tous fait l'effort et qu'ils doivent en être fiers. D'abord, dans la motion majoritaire, qui aurait pu considérer qu'elle avait toute liberté pour diriger le parti dans le respect du vote, mais qui a su comprendre que 55 % de socialistes, c'est bien, mais 100 % de socialistes, c'est mieux.

Et puis, les amis des autres motions qui auraient pu s'incliner sans rien céder de leurs convictions en attendant des jours meilleurs, c'est-à-dire des jours pires pour nous tous, et qui ont regardé au-delà de cette enceinte, au-delà de leurs propres intérêts, au-delà de leur propre sensibilité, et qui comme les amis de la motion 1, ont voulu s'adresser à tous ceux qui ne sont pas là, c'est-à-dire d'abord aux Français, à ceux qui espèrent en nous, qui attendent de nous, qui veulent une gauche forte, et qui attendent un Parti socialiste uni. Nous l'avons fait.

Chers camarades, vous n'avez pas, en faisant ce vote servi simplement votre parti, vous avez servi la politique, parce que moi je suis fier d'être dans un parti avec des sensibilités, et pas seulement des personnalités, un parti qui sait ouvrir le débat. Mais je le dis aussi, en prenant une formule bien ancienne, d'un camarade qui n'était pas socialiste mais qui était quand même un camarade : « Il faut à un moment savoir terminer un débat. » Terminer le débat dans la cohésion et dans le respect.

C'est ce rassemblement aujourd'hui qui nous permet de dépasser ce qui nous a séparés, le oui, le non, sans rien renier les uns ou les autres de nos convictions, sans rien oublier non plus du vote qui était intervenu au sein de notre parti, sans rien occulter non plus du vote prononcé par le pays, et qui nous amène aujourd'hui ensemble à regarder vers l'avenir, et non pas à nous tourner de manière rituelle, insupportable, vers le passé. Le seul mois de mai qui nous intéresse aujourd'hui, c'est le mois de mai 2007, pas le mois de mai 2005.

Voilà le mois de mai qu'il faut réussir ensemble.

Notre rassemblement doit effacer les amertumes, il y en a. Les blessures, il y en a eu, les mots inutiles, trop nombreux dans notre famille politique. Et les comportements, nous ne les oublierons pas, mais ils ne sont plus d'actualité. Le temps de la confrontation entre socialistes est fini.

Ce qui doit aujourd'hui nous mobiliser tous, c'est le combat principal contre la droite, c'est l'enjeu de l'échéance de 2007. Je n'ai pas d'adversaires, plus d'adversaires au sein du Parti socialiste, je ne vais pas gagner des batailles contre d'autres socialistes, c'est contre la droite ensemble qu'il faut maintenant partir en mouvement, pour aller jusqu'à la conquête en 2007. Voilà le temps venu de nous adresser aux Français, de leur redonner espoir en nous, de porter un projet et de répondre enfin à leurs problèmes.

Notre congrès du Mans se tient à un moment exceptionnel. La France vient de vivre une crise d'une immense gravité. Trois semaines d'émeutes urbaines, 10 000 voitures brûlées, des écoles saccagées, des agents publics agressés, 3 000 jeunes interpellés, beaucoup condamnés, bref, un immense gâchis qui révèle l'état de notre société, les ratés de notre modèle républicain, mais aussi l'échec de la droite.

Et permettez-moi de commencer par là, non par esprit de système, mais par lucidité, car tout de même, qui a supprimé les emplois jeunes de notre pays, qui a démantelé la police de proximité, qui a réduit les subventions aux associations, qui a renoncé à la prévention ? La droite. Qui a abandonné les services publics, qui a renoncé à la priorité pour l'école, qui a surchargé les collectivités locales même les plus pauvres, qui a troqué la laïcité républicaine contre le communautarisme électoral ? La droite. Qui a allumé les mèches par ses provocations verbales ? Qui a même récidivé, comme par bravade, par foucade, et sans doute par calcul ? Car l'échec de l'UMP, et c'est bien ce qui doit aujourd'hui nous interpeller, est aussi une opportunité pour elle de choisir son terrain, pour la prochaine confrontation, de trouver son registre dans les thématiques de l'extrême droite, où l'on accuse maintenant les enfants de polygames d'être les fauteurs de troubles dans les banlieues, où l'on met en cause le regroupement familial, où l'on pointe l'immigré comme le responsable de l'insécurité. Et l'on ressort le complot islamiste pour expliquer ce qui s'est produit. Hélas, la droite crée le désordre social pour incarner l'ordre public, alors qu'elle ne parvient même pas à faire respecter l'autorité de l'État.

Qu'aurait-elle dit si ces émeutes s'étaient produites avec un gouvernement de gauche ? Le laxisme aurait été dénoncé, les responsabilités pointées, les démissions exigées. Il est possible même que le président de la République, celui-là, serait même intervenu plus tôt à la télévision pour dénoncer la situation. C'est possible, c'est certain.

Mais nous ne pouvons pas le savoir parce que, quand même, il faut le dire, quand nous étions, nous, aux responsabilités, il n'y a jamais eu d'émeutes urbaines pendant trois semaines, jamais eu ces violences, ces déchaînés attaquant les services publics et notamment les écoles saccagées, non pas qu'il n'y avait pas de crise, mais elle n'avait pas pris cette intensité. La poudrière, comme l'a dit Claude Dilain, le maire de Clichy-sous-Bois, n'avait pas explosé, même si, sans doute, était-elle déjà présente.

Ce serait en effet trop simple que de laisser penser que cette crise n'aurait qu'un caractère conjoncturel, qu'elle ne tiendrait qu'à une maladresse, qu'à un cortège de mauvaises décisions ; c'est plus grave. Cette crise, elle est l'accumulation de choix collectifs. C'est une politique urbaine inhumaine, qui entasse les mêmes populations dans les mêmes quartiers, qui maintient des jeunes sans formation, sans qualification, qui propose une politique éducative uniforme, qui met les emplois en dehors des quartiers populaires. Bref, nous avons aussi notre part dans ces choix collectifs et nous devons les assumer.

Mais notre société est devenue discriminatoire. Aux inégalités sociales que vivent les habitants de ces quartiers, se sont ajoutées des discriminations dont ils sont victimes, pour l'accès à la formation, à l'emploi, au logement, aux loisirs, pour l'accès même à la citoyenneté. Ils sont à la fois pauvres et différents, double fatalité qui pèse sur eux.

Ce n'est pas simplement une crise sociale que notre pays traverse, mais une crise démocratique. Autant un problème de budget, de priorités, qu'une question de sens, car les jeunes de ces quartiers ne vivent pas simplement une condition économique défavorisée, et c'est le cas, avec le chômage, la précarité, les faibles revenus, mais une condition humaine de relégués dans des cités devenues des ghettos.

Cela n'excuse pas les violences, d'autant moins qu'elles frappent les biens individuels de ceux qui vivent dans ces quartiers et les biens collectifs prévus pour leur famille.

La République ne peut accepter le manquement à la loi, l'atteinte aux biens et aux personnes, et la mise en cause de ses symboles. Je pense notamment aux écoles, encore faut-il que la République elle-même réponde à ses promesses d'égalité et de fraternité. Or elle apparaît, cette République que nous chérissons tant, sur notre territoire, comme une devise à éclipses, comme une ligne en pointillés, comme un cadre éclaté. Où est la République quand l'école ne retient pas ses élèves, quand il y a 20 000 ou 30 000 déscolarisés ? Où est la République quand des jeunes ne sont pas conduits à un diplôme ? Où est la République quand le taux d'échec scolaire dans ces quartiers est trois fois supérieur à la moyenne nationale ?

Où est la République quand l'université, de rêve longtemps inaccessible, devient une réalité sans débouchés, faute de moyens, faute d'encadrement, faute de véritable orientation ?

Où est la République quand le droit du travail se réduit, au mieux, à la précarité, à l'intérim, et au pire, au désoeuvrement et au trafic ? Où est la République quand il devient impossible de sortir de son quartier pour y trouver un logement, et quand les centres villes installent de nouvelles frontières, de nouveaux barrages, avec les banlieues.

Où est la République quand les parents ne peuvent voter aux élections locales, et quand les enfants ne peuvent s'y faire élire ?

Où est la République quand on ferme purement et simplement la porte à ces hommes et à ces femmes des plus hautes assemblées représentatives de la Nation ?

On a cherché vainement, chers camarades, les députés issus de l'immigration. On ne les a pas trouvés.

Il y avait bien un ministre, il n'a pas été sans courage face à son collègue de l'Intérieur, mais il est apparu pour ce qu'il était, un symbole. Oui, un symbole de solitude et nous en portons nous aussi la responsabilité.

Le suffrage universel, en France, existe depuis 1945. Mais il n'existe toujours pas de fonctions électives universelles dans la République puisque certains n'y ont toujours pas accès aujourd'hui.

L'un de nous disait que le bulletin de vote a peut-être perdu lui aussi du pouvoir d'achat. Sans doute. Mais il reste l'instrument du changement, le moyen de renverser la donne, de briser la fatalité. À nous de rendre ce bulletin de vote utile, à nous de rendre la politique crédible, à nous de le montrer chaque jour sûrement avec nos maires, avec nos élus.

Et je dois dire, pour garder peut-être une image de notre congrès, que l'intervention de Claude Dilain a été pour nous tous un élément à la fois de fierté et d'interrogation. Merci à tous les maires socialistes d'avoir fait votre travail, merci aux élus des Départements, des Régions d'avoir assumé votre tâche.

Mais cela ne peut pas suffire. Nous ne sommes pas là simplement pour être disponibles, pour éviter les incendies, pour amortir les chocs. Nous aspirons à gouverner, alors engageons-nous. Nous proposons, à travers la résolution qui va vous être distribuée au terme de ce congrès, nous proposons une loi de programmation pour les quartiers.

Il faut maintenant garantir un engagement durable de l'État, fournir un effort massif de la Nation, autant en direction des habitants que des territoires. Cette loi engagera des moyens financiers à hauteur de 1 % de la richesse nationale par an. L'exécution de cette loi sera vérifiée par la tenue d'une conférence annuelle rassemblant les élus locaux, les services publics, les associations, les travailleurs de terrain. Et ces associations ne peuvent plus être considérées comme les seuls intermédiaires pour régler la crise. Ce sont d'abord les politiques publiques qui doivent intervenir. La seconde priorité que nous mettons, c'est celle pour l'éducation. Nous nous engageons donc à ramener les effectifs à quinze par classe dans les établissements qui sont dans ces quartiers.

Nous nous engageons à créer un service public de l'accompagnement scolaire dans ces villes, nous nous engageons à nous mobiliser pour une obligation scolaire à 16 ans, mais une obligation scolaire qui permette une formation, une qualification, une ouverture. Nous reviendrons bien sûr sur la décision d'ouvrir l'apprentissage dès 14. Nous ne pouvons pas l'accepter, faut-il encore que tous les enfants de moins de 16 ans soient dans l'école, oui dans l'école, et pas simplement pour attendre mais pour en recevoir la formation qu'ils espèrent et qui ne doit pas les désespérer.

La troisième priorité, c'est une mobilisation pour l'emploi et une lutte résolue contre les discriminations : rétablissement immédiat des emplois jeunes, volontarisme républicain fondé sur des critères sociaux et en aucun cas ethniques pour assurer la promotion des jeunes des quartiers populaires, permettre leur accès aux universités, aux grandes écoles de la République et à la fonction publique de l'État et des territoires. Renforcement des clauses d'insertion dans tous les appels d'offres publics. Et, enfin, rappel au patronat de sa responsabilité sociale à travers des obligations qui seront faites aux entreprises en matière d'embauche de salariés habitant dans les quartiers populaires.

Le quatrième engagement, c'est bien sûr de permettre une meilleure répartition de l'effort de construction de logements sociaux en faisant en sorte que les pénalités soient réellement dissuasives lorsque des maires ne respectent pas la loi SRU et en faisant en sorte que les maires et les communes qui, en revanche, ne la respectent reçoivent des subventions supplémentaires. On n'est pas simplement là pour pénaliser, on est aussi là pour favoriser, aider, soutenir.

Et puis, chers camarades, allons jusqu'au bout dans cet engagement, changeons la fiscalité locale pour que l'impôt local soit fonction du revenu et qu'à partir de là ce ne soit pas les plus pauvres qui souvent paient la charge la plus élevée comme contribuables quand on accorde des baisses d'impôt aux plus riches.

Répartissons différemment les dotations de l'État sur le territoire parce que c'est insupportable cette péréquation à rebours des intérêts de la population. Comment imaginer que les communes riches puissent encore recevoir des dotations de l'État quand dans trop de communes, pas forcément d'ailleurs dans ces quartiers, il y a une insuffisance de soutien de la part de l'État ? Il faudra changer les règles, cela coûtera sans doute y compris des communes socialistes, mais cela ne coûtera pas à la République, cela l'enrichira et cela donnera aux élus les moyens d'agir et de changer.

C'est pourquoi je veux, à travers ce plan, démontrer que la gauche est plus crédible pour la tranquillité et la sécurité publique que la droite. Ne laissons pas s'installer cette fausse idée qui nous a fait tant de mal dans le passé, qu'il faudrait finalement consentir au moins à la droite cet avantage : elle serait plus ferme quand la gauche serait supposée laxiste. Mais rien n'est plus faux, l'ordre public ne peut reposer sur le désarroi social et que ce qui fait la force de la gauche, c'est de démontrer que la justice sociale est un facteur de stabilité et de paix civile, qu'il n'empêche pas bien sûr le respect de la loi, qu'il exige même, qui demande à la police d'être là, oui, toujours là, et pas simplement lorsqu'il y a émeutes ou violence. Nous voulons une police présente, une police proche et pas des brigades anti-criminalité qui viennent pour rétablir l'ordre pour quelques minutes, mais jamais pour très longtemps.

Voilà, pourquoi sur ces sujets nous devons être à l'offensive.

Plus largement, nous avons voulu faire du congrès du Mans un congrès utile pour les Français. Qu'attendent-ils de nous ? Une opposition forte à la droite ? Sûrement. Un projet audacieux et crédible ? Assurément et le plus tôt possible. Et une confiance dans la politique et dans le Parti socialiste.

Je vais reprendre ces trois points pour clôturer notre congrès.

Oui, il faut marquer notre opposition à la droite. Dans l'histoire de la République, la gauche, chaque fois qu'elle s'est située dans l'opposition, et cela lui est arrivé plus souvent qu'à l'ordinaire, s'est toujours convaincue qu'elle faisait face à la droite la plus réactionnaire jusque-là rencontrée. Mais aujourd'hui il s'agit peut-être d'autre chose. C'est vrai que les conservateurs ne déçoivent jamais. Ils vont toujours au-delà de ce que l'on peut craindre d'eux. Je ne voudrais pas relativiser la dureté des combats passés, c'était dur sans doute de mener la bataille contre la politique de de Gaulle et de Pompidou, c'était sans doute difficile de lutter contre la politique de Giscard et de Barre, et chacun a en mémoire aussi plus récemment les politiques économiques de Balladur ou de Juppé. Oui, elles étaient bien réactionnaires, bien conservatrices, bien libérales.

Mais aujourd'hui c'est autre chose car, en trois ans et demi, la droite aura mis l'économie française en faillite, la cohésion sociale en miettes, le modèle républicain en procès et les institutions en crise. C'est beaucoup, convenons-en. Ils s'y sont mis d'ailleurs à deux Premiers ministres et à un président de la République.

Mais c'est beaucoup sans doute encore plus que les Français eux-mêmes, et même ceux qui sont en colère l'imaginent. C'est grave car les conditions mêmes de l'alternance peuvent s'en trouver obérées. C'est exceptionnel parce que la France en est la première victime et que la crise de confiance ne frappe pas simplement les auteurs de cette politique, mais la République et la démocratie. Autour de la mise en cause de ce qu'on appelle le modèle français, là est le danger. L'échec de la droite est ainsi mis au service de son objectif. Plus elle échoue, plus elle met en cause sa cible, le démantèlement de l'État et des droits fondamentaux. Et c'est pourquoi, et c'est notre rôle de le faire, il faut revenir sans cesse à sa responsabilité.

Oui, la droite a mis l'économie en faillite, et je ne me livre pas là à une facilité verbale pour cause de congrès. Non seulement la croissance s'est affaissée, mais l'investissement privé stagne depuis 2002, le pouvoir d'achat est anémié. Elle n'a pas réussi simplement à diminuer la demande, faute de consommation, malgré des baisses d'impôts aux plus favorisés, elle a aussi diminué l'offre productive et malgré l'emploi des allégements de cotisations sociales accordées aux entreprises.

Dès lors, l'échec est à la fois économique et social. Le chômage reste autour de 10 % de la population active et les diminutions récentes ne trompent personne puisqu'elles sont dues essentiellement aux emplois aidés, cent mille depuis le début de l'année, aux radiations et aux stages. Et avec 15,5 millions de salariés aujourd'hui, le secteur privé n'a toujours pas retrouvé le niveau d'emploi de 2002. Ce qui veut dire quoi ? Que depuis trois ans et demi la droite n'a créé aucun emploi supplémentaire quand la gauche, de 1997 à 2002, avec Lionel Jospin, en avait créé 2 millions.

Voilà la faillite de la politique de la droite !

Mais elle est aussi financière : le déficit de l'État qui est supérieur à 3 % de la richesse nationale depuis 2002 conduit le gouvernement non pas simplement, à se défausser sur les collectivités locales, mais à privatiser les autoroutes, EDF, GDF, non même plus pour toucher le produit de ces privatisations, mais pour hériter de soultes que versent les entreprises pour payer les retraites de ces agents dans quelques années.

Ainsi le déficit est aujourd'hui considéré comme excessif par les autorités de Bruxelles, l'endettement public atteint des niveaux records, sans doute 70 % de la richesse nationale à la fin de la législature, et pour autant le gouvernement continue ses baisses d'impôts. Comment comprendre ?

Les diminutions d'impôt aujourd'hui ne sont pas simplement injustes socialement, inefficaces économiquement, mais absurdes budgétairement parce que financées par emprunt puisqu'il y a déficit structurel. Pour accorder des cadeaux aux riches, le Trésor public emprunte sur les marchés. Et qui paiera ? Les générations présentes, mais aussi les générations futures.

Voilà ce qu'est une faillite.

Le déficit de la Sécurité sociale atteint des niveaux records, 12 milliards d'euros pour l'assurance maladie, l'UNEDIC ne peut plus boucler ses fins de mois, l'ensemble des régimes sociaux fonctionne à crédit.

Et que dire du commerce extérieur ? Son déficit atteint un niveau historique. On ne sait pas si ce cela va être 25 ou 30 milliards d'euros. Ce qui veut dire quoi ? Que la compétitivité des entreprises s'est dégradée depuis trois ans et demi révèle cette vérité cruelle : le gouvernement ne défend pas les entreprises, il défend simplement les actionnaires.

Une droite incapable, incompétente, impuissante, ne dites jamais, ne laissez jamais dire que la droite sait gérer l'économie française, et pire même, comme un bon père de famille. Or avec des bons pères de familles comme cela, on préfère encore être orphelin.

En trois ans et demi, la droite aura mis la cohésion sociale en miettes, la précarité est devenue la règle, la stabilité l'exception. Droit du travail avec le contrat nouvelle embauche qui n'a créé aucun emploi supplémentaire, qui s'est substitué au contrat à durée indéterminée, comme nous l'avions annoncé. Et puis la fin des 35 heures, les stages non payés, et les règles de négociation collective mises en cause.

Sur la protection sociale, les régimes de retraite qui ont été réformés, c'est-à-dire en fait les régimes de répartition qui ont été mis en cause, la capitalisation installée. L'assurance maladie, où c'est maintenant la responsabilité individuelle qui est la règle, avec 1 € par consultation, 15 € de forfait hospitalier, et maintenant ce forfait de 18 € sur les actes lourds. Et l'on nous dit que ce serait indifférent pour les assurés sociaux, que ce serait payé par les mutuelles et par les assurances complémentaires, mais qui sont donc ceux qui paient les mutuelles et les assurances complémentaires dans notre pays ?

Cohésion sociale en miettes avec une politique fiscale à rebours, là encore des principes d'égalité, un bouclier fiscal pour alléger l'impôt sur la fortune sans le dire, et une baisse de l'impôt sur le revenu, 4 MM€. Certes, au-delà de 2007, on a d'ici là encore un moyen de sauver l'équilibre fiscal ! Et je pense que les Français l'utiliseront. Mais 4 MM€ pour qui ? Pour les plus malheureux, pour les plus nécessiteux ? Non, pour les plus riches, parce que pour le gouvernement, les plus nécessiteux, ce sont les plus riches.

Enfin, la droite aura mis ce modèle républicain en procès. La faiblesse de l'État sert de prétexte au dévoiement de la décentralisation, les insuffisances de l'école pour justifier sa marchandisation, le poids de l'impôt, notamment pour démanteler la progressivité, l'endettement des entreprises pour permettre leur privatisation. Et encore récemment, la persistance de la violence, de l'insécurité, pour recourir à des lois d'exception.

Je l'ai dit, tous les échecs de la droite deviennent des opportunités pour saper les fondements même de l'État républicain et les principes de l'État Providence.

Cohésion sociale en miettes, modèle républicain en crise et institutions en déroute, la droite a érigé l'irresponsabilité en principe.

Le président de la République décide de tout, mais n'est engagé par rien. Il tient son mandat directement du peuple, mais ne tient aucun compte de son expression, ni aux élections régionales, ni aux élections européennes, ni même lors du référendum du 29 mai.

Il promet, comme un candidat, mais n'agit jamais comme un président. Et que dire que son statut pénal qui devait être réformé la première année de son second mandat, et qui n'est toujours pas voté, et qui sans doute ne le sera jamais, en tout cas sous cette législature.

Ce système d'irresponsabilité a touché tout l'Exécutif. Le Premier ministre, qui veut apparaître comme un homme neuf, nous dit-on, alors qu'il est depuis dix ans associé à toutes les décisions de Jacques Chirac. Il prétend agir au nom de l'intérêt général, et il ne fait que céder aux intérêts particuliers. Il retrouve les accents du patriotisme économique, mais il brade le capital public, avec les autoroutes ou les entreprises d'énergie.

Il n'est pas élu, il en tire même fierté, mais j'ai cru comprendre qu'il était aussi candidat, d'où cette compétition qui s'est engagée avec son ministre de l'Intérieur au sommet de l'Etat.

Quant à Nicolas Sarkozy lui-même, c'est le champion de l'irresponsabilité. Ministre de l'Intérieur, il aura connu la plus grande explosion de violence de notre histoire récente, et il voudrait s'ériger champion de la lutte contre l'insécurité.

Ministre des Finances quelques mois, il aura mis la croissance en berne et les déficits en hausse. Il arrive même à faire oublier qu'il est aussi président de l'UMP, on l'avait deviné, président du Conseil général, il l'est encore, des Hauts-de-Seine, et candidat à l'élection présidentielle, il l'est toujours, tout le temps.

Mais c'est surtout un ministre de lui-même, ce n'est pas un ministre de l'Intérieur. Il nous dit qu'il parle comme tout le monde, mais le rôle d'un ministre, surtout de l'Intérieur, n'est pas de parler comme tout le monde, c'est de parler pour tout le monde.

Mais il est tellement obsédé par lui-même, par sa candidature, par sa campagne, qu'il est un agent de sa propre propagande, une propagande néanmoins et, je le dis avec gravité, aux frais de l'État. Chaque fois qu'il se déplace, se déplace-t-il comme président de l'UMP ? Comme ministre de l'Intérieur ? Comme candidat à l'élection présidentielle ? Où en est-on ?

N'acceptons plus cette confusion des genres. Exigeons cette séparation essentielle en République des pouvoirs et des rôles.

Ainsi va notre République sous la droite, victime des comportements de ceux qui devraient la préserver. République accusée de fautes commises par ses propres occupants, République utilisée comme un bouclier pour protéger un pouvoir qui échoue.

Eh bien, je vous le dis, en 2007 il sera nécessaire de rompre avec le chiraquisme dans toute sa dimension, pas simplement avec l'homme, mais avec sa politique, avec ses pratiques, avec ce système. Oui, il faut rompre avec le chiraquisme qui a gangrené d'une certaine manière l'usage qu'on devait faire de la République. 2007, de ce point de vue, sera une rupture nécessaire indispensable.

Mes chers camarades, il nous faut aussi, et c'est l'objet de ce congrès, offrir une alternative, nous retrouver sur le projet, nous l'avons fait, changer le monde avons-nous dit. La mondialisation, elle est là et nous n'avons pas décidé, même par un vote de congrès, d'en sortir. Qui le croirait ? Mais la mondialisation n'est pas une fatalité. Ce n'est pas un ordre immuable, un libéralisme irréversible. Elle doit être dominée par la politique à l'échelle internationale, c'est elle qui décide autour des principes de droit, de la régulation, du partage.

Et donc, pour nous, le droit, c'est d'abord les institutions internationales, l'ONU. La régulation, c'est ce que nous proposons, un Conseil de sécurité économique avec des normes sociales, environnementales, publiques qui permettent justement de dominer le marché. Et le partage, qui pour nous est une obligation, c'est d'abord l'annulation de la dette des pays les plus pauvres. Première condition.

C'est une autre organisation des marchés, deuxième condition.

C'est aussi une mise en cause de la politique agricole commune telle qu'elle est aujourd'hui. Et moi je ne me désole pas de voir le Président de la République s'arc-bouter toujours sur les mêmes outils de politique agricole qui mettent le Tiers Monde, et notamment l'Afrique, dans une situation de désolation.

Et puis il nous faut, si nous croyons à cette belle idée de changer le monde, alors être exigeant à l'égard de l'Internationale socialiste présente ici. Nous voulons une grande organisation, nous voulons un parti à l'échelle du monde, et nous en sommes loin. À nous de porter cette volonté, à nous de faire avec les socialistes ici présents de cette Internationale socialiste une vraie alter mondialisation, mais cela dépendra aussi de nous, à condition de considérer, nous socialistes français, que les socialistes d'autres pays peuvent nous apporter leur expérience, leur crédit, leur confiance.

Changer le monde, changer l'Europe. L'Europe fait partie, et nous l'avons tous dit, de notre idéal socialiste, même si l'idéal socialiste ne se réduit pas à l'Europe. Et nul ne peut se réjouir ici, qu'il ait voté oui ou qu'il ait voté non, de l'état de l'Union européenne : pas de Constitution, nous étions pour une Constitution ; pas de budget ; pas de projet ; pas de frontières reconnues ; mais revanche que de projets de directives libérales, de dérégulations, de privatisations, de déréglementation. Voilà l'Europe telle qu'elle est, une Europe en panne. Et la crise jusqu'à présent n'a rien eu de salutaire. Depuis le 29 mai, c'est vrai, le Traité constitutionnel n'est plus.

En d'autres termes, quand on dit qu'il n'est plus, c'est qu'il est mort. C'est la conséquence du vote est intervenu en France et nous, socialistes, respectons le vote populaire. C'est notre devoir premier de républicains, comme nous respectons, je le sais, le vote militant parce que c'est notre devoir de socialistes.

Alors, comment sortir, de cette Europe en panne ? Ce n'est pas la droite qui y parviendra, parce que fondamentalement la droite européenne, et la droite française en particulier, n'est plus favorable à l'intégration européenne. C'est le fait nouveau de ces dernières années. Très longtemps la démocratie chrétienne dans toutes ses formes, y compris les plus dévoyées, était pour la construction européenne. Aujourd'hui les droites à l'échelle européenne ont ce qu'elles veulent : le marché. Et rien que le marché. Ils ont réussi même, ces conservateurs, à se débarrasser du fardeau institutionnel, et ils sont lancés dans un élargissement sans fin pour faire perdre à l'Union européenne, justement, sa dynamique politique. Alors, si la droite ne peut pas changer l'Europe, c'est à la gauche, et seulement à la gauche, avec tous ceux qui voudront bien l'accompagner, de trouver les clés pour une relance de l'Europe.

La gauche, je le dis, européenne, pas seulement la gauche française, parce que l'Europe, pas plus que le socialisme, ne se fait dans un seul pays. On voudrait bien, nous, et on l'a montré ici, que l'Europe soit aux couleurs de la France, non pas simplement de la France, aux couleurs du socialisme français, là encore, pas simplement aux couleurs du socialisme français, parfois aux couleurs d'une sensibilité socialiste particulière.

Et puis, quand on n'y arrive pas, on voudrait amasser d'autres apports, d'autres conforts, eh bien non ! On fera l'Europe, désolé de vous l'avouer tout à trac, avec les Européens, et je veux faire l'Europe avec les progressistes d'Europe, avec tous les progressistes.

Mais aujourd'hui, il va falloir procéder par étapes. Et je vous le dis tout net, il serait aujourd'hui incompréhensible de reprendre la démarche institutionnelle sans qu'on ait réglé les autres questions de la construction européenne. Cela ne peut être que la conclusion d'une relance qui doit commencer d'abord par la croissance et par l'emploi, et c'est là que nous nous sommes retrouvés hier, en accord, tous ensemble, pour dire d'abord un gouvernement économique, face à une Banque centrale européenne, dont on doit maintenant s'assurer que son objectif, c'est le plein emploi, et pas simplement la lutte contre l'inflation, c'est fait.

On doit faire en sorte que les objectifs de l'Europe économique, ce soit la recherche, la formation, la qualification, et ne laissons pas simplement Tony Blair tenir ce discours, sans d'ailleurs mettre le moindre euro, qu'il n'a pas dans son propre pays, le moindre euro au service de cette noble cause. Oui, il faut d'abord faire l'Europe de l'emploi, il faut d'abord faire l'Europe sociale, à travers des protections, oui, des protections, permettant de lutter contre des formes de délocalisation insupportables, permettant de faire des harmonisations fiscales dans la zone euro, parce qu'il va bien falloir partir de la zone euro si nous voulons faire cela. Nous n'avons pas fait simplement une monnaie unique pour que les marchés puissent s'organiser mieux. Nous avions l'espoir avec François Mitterrand, avec Pierre Bérégovoy, avec Jacques Delors, nous avions l'espoir, pas l'illusion, le rêve qui n'était pas une chimère, de faire que l'euro soit l'amorce d'une construction politique d'un espace cohérent. Eh bien, faisons-le, faisons cette Europe-là, faisons cette Europe qui permette l'harmonisation des politiques.

Il faudra ensuite porter le budget européen à un niveau compatible avec nos objectifs. et c'était presque une plaisanterie de voir la discussion qui s'engage : est-ce cela va faire 1,02 ou 1,12 de la richesse européenne, que l'on va consacrer au budget de l'Union ? Eh bien nous, nous affirmons, tous ensemble, c'est 2% de la richesse européenne qu'il faut consacrer à l'Union européenne. On est Européen pour 2%, ce n'est quand même pas si ambitieux, que nous ne pourrions pas y parvenir.

Et moi, je suis d'accord avec ceux qui ont dit qu'il faut recourir à l'emprunt, si l'on veut financer les investissements de demain en Europe pour la recherche, pour la technologie, pour les infrastructures, pour la diversification énergétique.

Et c'est après, une fois qu'on aura déjà fait tout cela et davantage, qu'on pourra reparler d'institutions et porter ensemble avec les socialistes européens, les Verts et la gauche européenne toute entière, un nouveau traité, avec une démarche démocratique pour son élaboration, avec des frontières reconnues pour éviter que d'autres polémiques viennent interférer.

Et puis si nous pouvions avoir ce futur traité élaboré démocratiquement, nous le ferions ratifier dans tous les pays, le même jour, et par les mêmes procédures, cela aurait quand même un autre sens, un autre engagement pour l'Europe !

Enfin, il faut changer la France. Si nous voulons déjà changer le monde, c'est beaucoup, cela nous prendra du temps. Changer l'Europe, nous ne pourrons pas le faire seuls. La France, en revanche, c'est notre responsabilité première. Nous proposons donc aujourd'hui dans notre congrès un contrat aux Français pour répondre à l'urgence et préparer l'avenir. Ce contrat ne sera pas une somme de revendications. Nous ne sommes pas le syndicat du Parti socialiste, nous sommes le Parti socialiste, parti de gouvernement. Ce ne sera pas une liste, qu'il serait même difficile de rendre exhaustive d'abrogations. Ce sera bien sûr un programme qui remplacera toutes les lois de droite, j'allais dire iniques, mais toutes les lois de droite sont pour l'essentiel iniques, injustes, insupportables, mais ouvrira de nouveaux progrès.

Notre ambition, ce n'est pas de revenir par une somme d'abrogations à 2002, c'est, à partir de 2007, c'est d'accomplir de nouvelles avancées, de nouvelles conquêtes. C'est ensemble que nous pourrons convaincre.

Nous ne sommes pas pour un retour, nous sommes pour un aller, un aller vers l'avenir.

Alors, quel contrat ? Un contrat social, oui, d'abord avec l'augmentation du pouvoir d'achat. Nous avons trouvé les réponses, une conférence pour les revenues chaque année, une obligation de négocier, une augmentation du SMIC, on a dit 1 500 euros en cours de législature, très bien, n'attendons pas la fin. Et puis tous les salaires qui doivent également augmenter, mais comment contraindre ? Nous avons posé un principe qui est de conditionner les exonérations de cotisations sociales versées aux entreprises, 20 milliards d'euros, conditionner ces aides et ces exonérations à une augmentation de la masse salariale, que ce soit par des progressions du pouvoir d'achat ou par des ardoises supplémentaires, voilà l'arme que nous avons.

On transformera aussi la prime pour l'emploi en allégement de cotisations sociales salariées nettes pour donner tout de suite du pouvoir d'achat à tous ceux qui travaillent. Il nous faut aussi retrouver le plein-emploi. On changera, au-delà de la croissance, car il n'y a pas de plein-emploi sans croissance.

Je le dis à nos amis d'Utopia qui en sont aussi conscients. Il n'y aura pas non plus de plein-emploi sans développement, parce que le plein-emploi, ce n'est pas simplement que les emplois marchands, ce sont aussi toutes c'est formes d'emplois dans la société, solidaires, de l'économie sociale, qu'il nous faut impulser, renouveler, inventer.

Alors, la croissance, oui, mais changeons aussi les mécanismes de la protection sociale. Est-il encore concevable que les cotisations sociales soient les mêmes que le contrat soit à durée indéterminée ou à durée déterminée ? Nous proposons de les moduler selon la durée du contrat. Et de la même manière, il en sera terminé avec ce système de prélèvement social sur le seul travail, ce sera sur l'ensemble de la richesse produite, qu'elle soit en capital ou en main-d'œuvre, qu'il faudra financer la protection sociale.

Nous ferons en sorte aussi de proposer pour les jeunes un contrat unique de réinsertion et d'offrir, à tous les salariés victimes de plans sociaux que nous n'avons pas pu prévenir, un contrat de reclassement qui évitera qu'ils reviennent vers l'ANPE, ou les accompagner à travers la qualification, la formation. C'est ce qu'on appelle la sécurité des parcours professionnels, qu'importent les mots. Il faudra bien sûr refonder le pacte social pour les retraites, mais là aussi, soyons francs, nous allons abroger la loi Fillon, mais il faudra bien la remplacer, et la remplacer à partir d'une négociation avec les partenaires sociaux car nous, nous respecterons, les partenaires sociaux.

Et puis nous ferons en sorte que dans cette réforme ce soit les petites retraites qui soient valorisées, ce soient les femmes qui soient justement protégées par rapport à aux règles de la répartition, que nous devons conforter. Mais il faudra dire aussi la vérité, tenir compte de la pénibilité pour les temps de cotisation et trouver de nouvelles ressources. Ne laissons pas croire que l'on pourra avoir une espérance de vie plus longue, rester en bonne santé sans ressources supplémentaires, la croissance y pourvoira mais pas seulement et le financement de notre protection sociale doit reposer sur l'ensemble de la richesse produite. Disons-le, car sinon, nous ne préparons pas les Français aux défis qui doivent être les leurs dans les prochaines années.

Contrat éducatif avec le service public de la petite enfance, lutte contre les inégalités sociales, priorité donnée à l'université, c'est insupportable de constater que la dépense par étudiant, en France, est inférieure à la dépense consentie pour un lycéen. Comment peut-on accepter, socialistes, qu'on dépense deux fois plus pour un élève de grande école que pour un étudiant dans une université ? Contrat logement à travers une maîtrise du foncier. Oui, du foncier. Il y a quelques années, pas si lointaines, il y avait des textes au Parti socialiste qui proposaient la municipalisation du foncier !

Depuis, les socialistes sont devenus raisonnables, peut-être trop sur ces questions.

Et pourtant la maîtrise du foncier est essentielle. Il n'est pas acceptable qu'un propriétaire, parce que son terrain devient constructible par une décision publique, puisse encaisser une plus-value considérable. Il faudra là aussi socialiser les profits tirés de décisions publiques.

Maîtrise du foncier, logements sociaux et révision des aides fiscales. Comment comprendre que le dispositif de Robien favorise des logements uniquement pour les catégories favorisées et pour un rendement immédiat. S'il doit y avoir des aides fiscales, c'est pour le logement en faveur des plus modestes qui n'arrivent plus à faire vivre leurs familles.

Et le dernier contrat, et il n'est pas le plus mince, c'est le contrat écologique. Je relisais pour préparer ce congrès, je ne savais pas ce qu'il allait être, donc je cherchais mes références, dans nos bons congrès, même dans nos moins bons, chacun les a à l'esprit, mais toujours dans les congrès nous faisons de bons discours, quel que soit le sort de la synthèse ou pas. Et je relisais, c'est vous dire jusqu'où je suis allé, les interventions du congrès de Rennes, mais pas sur la synthèse, je ne m'en suis pas inspiré, j'ai eu raison. Une nuit de Commission des résolutions suffit, en faire trois est souvent mauvais signe. Mais je lisais les discours sur le fond, il y a quinze ans, et l'on disait déjà : « Il faut s'occuper de l'écologie. Les socialistes doivent être des écologistes. » Eh bien, dites donc, on a mis du temps, hein, à arriver à cette prise de conscience.

Nous si aujourd'hui, on ne traite pas cette question comme socialistes, je vous le dis, nous ne serons pas d'abord des socialistes, et en plus on passera à côté des défis qui nous sont lancés, planétaires, européens, nationaux, locaux. Nous devons faire des choix, choix du transport collectif. Nous le faisons dans nos mairies, choix d'économies d'énergies, choix de diversification énergétique, faire un pari sur les énergies renouvelables, sur la recherche, faisons-le, chers amis, non pas pour faire une alliance avec nos amis Verts que je veux ici saluer, mais faisons-là parce que nous sommes socialistes et que nous considérons que le développement durable, que l'investissement pour l'avenir, que la protection des générations futures, c'est notre première responsabilité.

Et puisque nous avons cette volonté, il faudra aussi y mettre les moyens et c'est tout le discours de la vérité. Vérité sur les rythmes du changement. Ne laissons pas croire que nous pourrions réaliser toutes nos priorités, tous nos engagements, régler les problèmes de toute la société simplement en une législature. C'est d'ailleurs de l'avoir laissé penser que les Français nous ont remerciés toujours à la fin de la législature, puisque nous avions dit que nous ferions tout dans une législature. Alors je vous conseille de dire que ce que nous allons proposer, même s'il faudra faire beaucoup dans la prochaine législature, pourra aussi se poursuivre sous une seconde, sous une troisième. Il n'y a pas de raison que nous soyons les seuls socialistes d'Europe, et je n'ose pas dire du monde, à nous arrêter au bout d'une législature.

Ayez plus d'ambition. Gouverner longtemps, durer, agir, et ce n'est pas parce qu'on est réélu qu'on est un mauvais socialiste. Ne le pensez pas.

Ce n'est pas parce qu'on est battu qu'on est un bon. Ou alors ce serait contradictoire parce que, chaque fois qu'on est battu, on nous dit qu'il faut tirer les leçons.

Eh bien, tirons les leçons, ne soyons pas battus. Ce sera la meilleure des précautions pour l'avenir.

Vérité sur les marges de manœuvres financières, elles ne seront pas considérables, et je viens de dire que l'économie est en faillite, que nos finances publiques sont en déroute, et l'on va dire qu'on pourra tout financer ?

Si on le dit, il faut qu'on mette de la croissance. Et en attendant, il faudra qu'on fasse une réforme fiscale. Ah oui ! Une réforme fiscale ! Je n'ai pas relu tous les discours de congrès, mais je suis sûr que depuis 20 ans, 30 ans, nous avons dû voter toutes les résolutions en matière de réforme fiscale, et je ne suis pas sûr qu'on ait fait le respect de tous nos engagements. Alors disons-le aujourd'hui une bonne fois, et je prends donc mes risques pour l'avenir, car il y aura bien un socialiste, un jour, peut-être un premier secrétaire, qui ne serait plus moi, qui relirait le discours que je viens à peine de prononcer : la réforme fiscale, cela consiste d'abord à fusionner l'impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée, pour faire de la fiscalité directe l'élément indispensable à travers la progressivité de la justice fiscale et de l'efficacité.

La deuxième réforme, la plus urgente peut-être, mais je ne peux pas dire que la première ne l'était pas, car je commencerais à être coupable de ce que je viens de dénoncer, c'est la réforme de la fiscalité locale sous toutes ses formes, réforme de la fiscalité, taxe d'habitation, taxe foncière, taxe professionnelle, on ne peut pas quand même demander aux élus d'agir et les priver de toutes les ressources nécessaires. On ne peut pas les obliger à imposer, à travers des prélèvements archaïques, des contributions que les ménages ne peuvent plus accepter. Alors il faudra le faire, et ce ne sera pas facile. Parce qu'il faudra sans doute, pour la taxe d'habitation, pendre l'assiette revenu. Rendez-vous compte !

Il pourrait y avoir même des électeurs, les nôtres, qui puissent y perdre. Eh bien quand même y aurait-il, je ne veux pas les décourager, aujourd'hui des électeurs qui pourraient y perdre, c'est une réforme fiscale, et il faudra bien prendre aux uns pour donner aux autres. Il n'y a pas de trésor caché.

Vérité sur l'État, parce que moi je vous le dis encore une fois, l'État ne pourra pas tout, tout seul. Et si on le laisse croire, cela voudrait dire que dès qu'on va revenir au pouvoir, on va nous demander tout, et rien qu'à nous. Eh bien pardon, il va falloir mettre la société en mouvement, et sérieusement. Parce que, quelle est la leçon de nos échecs ? Je connais la leçon de nos succès. Néanmoins, on ne les répète jamais suffisamment. Mais la cause de nos déconvenues répétées, c'est que nous avons toujours prétendu que l'État pourrait faire seul, et que nous avons laissé la négociation sociale en friche, des associations démobilisées, les citoyens en dehors de nous.

Alors comment voulez-vous qu'on puisse réussir, si les citoyens ne sont pas partie prenante, si les associations n'ont pas les moyens indispensables, si les collectivités locales n'ont pas de contrat de confiance, et si les syndicats, je dis bien les syndicats, dans leur diversité, dans ce qu'ils sont, n'ont pas les moyens de négocier, de conclure et de faire avancer, eux aussi, l'intérêt général, voilà ce que nous avons à faire ensemble.

Vérité sur les institutions. Oui, il y a eu un débat, pas tellement dans le congrès d'ailleurs, un peu dans la commission des résolutions sur les institutions, nous n'avons pas changé, je l'avoue, de République en commission des résolutions. Cela m'aurait d'ailleurs semblé étrange, en une nuit, rien que pour faire synthèse entre nous, de changer le numéro de la République ?

Je comprends ceux qui réclament la VIème République, je respecte leur position. Ce débat doit se poursuivre, et il n'est pas terminé. Mais ce qui reste vrai, c'est qu'il ne pourra y avoir de succès de la réforme s'il n'y a pas d'abord, et en même temps, une réforme de nos institutions.

Il faudra s'y prendre vite. Oui, renforcer les droits du Parlement, même quand nous sommes majoritaires, je le dis quand même, parce que, quand on est majoritaire, on aime mieux un Parlement docile. Eh bien, il faudra se mettre dans cette situation où les socialistes jouent tout leur rôle dans le Parlement rénové que nous voulons, oui, de ce point de vue, toute sa place au Parlement, toute sa place aussi pour que les nominations soient faites dans le Parlement, et pas simplement au niveau de l'Exécutif.

Oui, il faut rééquilibrer les pouvoirs entre président de la République et Premier ministre, mais surtout d'imposer le principe essentiel de la responsabilité, oui de la responsabilité de ceux qui exercent le pouvoir à tous niveaux, et à commencer par le chef de l'État.

Les institutions, c'est aussi le droit des citoyens de saisir les instances, Conseil constitutionnel, Conseil supérieur de l'audiovisuel, à condition de changer la composition de ces autorités qui ont perdu, finalement, pour une part, leur autorité, à force d'être occupés par les mêmes personnalités issues de la même famille de pensée, du même mouvement, et nommées bientôt par le même homme.

Oui, il va falloir changer nos institutions. Faire le mandat unique, ce ne sera pas facile, plus facile quand on n'a pas beaucoup de parlementaires, plus difficile quand les mêmes qui l'ont demandé deviennent eux-mêmes parlementaires, et préparent des élections locales après, en disant c'est peut-être plus facile, et c'est vrai que c'est plus facile quand on est maire de devenir député, et quand on est député, de devenir maire.

Mais, si nous voulons cette réforme, elle sera pour tout le monde. Parce que moi je le dis, autant nous devons être déterminés pour la République, mais autant je ne ferai pas de choix simplement pour le Parti socialiste, sauf sur un point qui est la parité, la parité parce que cela a été pour nous une loi, une loi que nous avons fait voter. Et c'est une honte, je le dis, y compris pour moi-même, d'être obligé comme Premier secrétaire du Parti socialiste, en tout cas le trésorier le fait à ma place, cela m'évite d'avoir la honte dans la main, de payer, oui un impôt parce que nous ne respecterons pas les règles de la parité. Et cela en sera terminé de cet impôt-là en 2007, terminé. Nous aurons la parité dans toutes les candidatures.

Chers camarades, le changement, ce n'est pas simplement des mesures, des réformes, une pratique démocratique, c'est aussi une morale politique, une éthique républicaine qui consiste pour moi à tenir le même discours, qu'on soit dans l'opposition ou au pouvoir, être toujours en cohérence avec nous-mêmes, à tenir nos engagements, à faire en sorte que ce que l'on prononce dans les motions du congrès, on soit capable de le tenir au gouvernement. C'est pour nous une obligation morale, une obligation politique, démocratique, qui nous permettra d'être entendus.

Enfin, je veux terminer sur le PS, même si ce n'est pas ce qui préoccupe les Français, vous êtes ici ses représentants les plus imminents. C'est un outil indispensable, le PS, un instrument majeur de la reconquête. Nous sommes la première force de gauche, nous sommes trop loin de la société, j'en suis conscient. Nous sommes trop étroits dans nos recrutements, trop repliés sur nous-mêmes. Nous avons pu en faire la démonstration. Il faut donc des changements. Sur le projet, nous sommes maintenant conscients que nous avons acté les grandes orientations. Il faudra faire maintenant les précisions, les compléments, les évaluations indispensables, les choix essentiels ayant été faits dans le congrès.

Il sera donc constitué une commission pluraliste, toutes les sensibilités qui maintenant, si j'ai bien compris, sont l'ensemble du parti. Mais cette commission, à partir des propositions qui sont déjà les nôtres, devra les confronter aux experts, aux syndicats, aux associations, à la gauche européenne pour savoir ce que nous pouvons faire, et jusqu'où. Il y aura également un vote militant sur le projet et, là aussi, faisons en sorte de ne pas simplement reproduire nos amendements habituels, mais d'aller chercher loin les suggestions et les propositions, et notamment dans les Régions et dans les Départements où nous faisons œuvre d'imagination, d'expérience. Et moi je veux saluer là les présidents de Régions, présidents de Conseils généraux, élus régionaux, élus cantonaux, faites-nous remonter ce que vous réussissez dans vos collectivités. Ce sera pour nous un gage de succès.

Et enfin, sur le projet, Romano Prodi est venu vous le dire et nous en faire démonstration avec ce qu'il appelle la fabbrica. Il va falloir faire des États généraux sur le projet avec l'ensemble de la société. On commencera dans chacune des Régions, on finira au plan national par cette confrontation, elle est indispensable, avec les citoyens.

Ensuite, nous avons le chantier de la rénovation, j'en entends parler depuis des années, depuis qu'il y a des rénovateurs, c'est vous dire si ça remonte à loin. Nous devons mieux organiser nos débats que nous avons, je ne parle pas simplement des votes qui doivent être transparents, François Rebsamen a fait des propositions indispensables. Si on veut qu'il y ait respect, il faut qu'il y ait aussi le respect de l'acte électoral. Il faut que nous ayons des débats dans nos sections qui ne soient pas simplement au rythme de nos propres décisions nationales. Je dois dire quand même qu'au Parti socialiste on ne doit pas travailler simplement trois jours sur sept considérant que le reste serait sur notre terrain politique. Non, le Parti socialiste, c'est tous les jours qu'il doit parler, s'exprimer, lutter, combattre, être présent partout sur le territoire. Et puis il va falloir reprendre le sujet des adhésions. Nous sommes tous pour des adhésions plus nombreuses, et immédiatement nous nous en méfions, surtout dans les périodes d'investiture. Imaginez que je lance une grande campagne d'adhésion là, pour les prochains mois. Que dirait-on ? Est-ce que nous accueillerions tous les nouveaux camarades avec intelligence ? Est-ce que nous ne commencerions pas à leur demander pour qui ? Pour quoi ?

Il reste que le Parti socialiste doit s'élargir. Ne reprochons d'ailleurs de ce point de vue pas aux grosses fédérations d'être grosses. N'accusons pas les petites d'être trop petites. Mais quand même, faisons en sorte que partout il y ait le même comportement militant. Ce n'est pas anormal d'avoir de grosses sections. Ce qui est anormal, c'est d'avoir aussi peu de militants quand il y a autant de population.

Moi, je ne suis pas pour un congrès virtuel, pour un parti virtuel où on vote par SMS ou sur ordinateur. Et je refuse de désigner notre candidat de cette manière. Mais quand même, entre le virtuel et le réel, il faut aussi être capable d'attirer tous ceux qui justement par ce moyen-là ont envie d'intervenir, d'agir, d'expliquer, de comprendre, d'argumenter. On l'a mesuré les uns et les autres au moment du référendum du 29 mai.

Et puis il y a l'investiture qu'il faudra donner à nos candidats pour les élections législatives. Je me suis exprimé là-dessus. Il faudra respecter pleinement le principe de parité. Et je me félicite que pour le Conseil national nous ayons donné, non sans mal, cet exemple. Il faudra aussi, chers camarades, quand on tient les discours qu'on a tenus sur les quartiers, les banlieues, les cités, faire que nous puissions avoir toute la diversité présente au moment des élections législatives. Toute la diversité.

Arrive maintenant la question du calendrier pour la désignation de notre candidat ou de notre candidate à l'élection présidentielle. Il y a eu une discussion entre nous et je respecte là aussi les positions de chacun. Nous avons fait un choix qui n'était pas par rapport à un intérêt de tel ou tel, mais l'intérêt du Parti.

Je vous ne le dis pas dans l'idée simplement de notre rassemblement d'aujourd'hui, du sens même du travail qu'il nous reste à faire, le projet, le rassemblement de la gauche. Certes, il faudra désigner notre candidat lorsque nous aurons achevé nos travaux sur le projet, procéder à nos investitures législatives et rassembler de la gauche. Mais il faudra le faire surtout dans l'intérêt de notre candidat ou de notre candidate, ni trop tôt, ni trop tard, j'allais dire au bon moment.

Quel est le bon moment ? J'y ai réfléchi. J'ai beaucoup consulté nos manuels d'histoire interne, mais enfin, c'était le centenaire, c'est normal. Quelle est la plus belle élection que nous ayons gagnée ? La présidentielle, 1981, François Mitterrand.

Il y a eu une deuxième mais, s'il n'y a pas eu la première, il n'y aurait pas eu la deuxième, la plus belle, celle de 1981.

Quand est-ce que François Mitterrand a été candidat ? A annoncé sa candidature ? Novembre 1980.

Eh bien, je vous suggère, François Mitterrand n'étant pas le plus malhabile d'entre nous, le plus mauvais stratège et le moins bon de nos candidats, je vous suggère de reprendre le même calendrier qui nous a fait gagner en mai 1981. Quant à la floraison de candidats ou de candidates, nous verrons le moment venu, et je suis sûr qu'il y en aura moins, ça se décante ces affaires-là.

Puis, à un moment, c'est vous qui choisirez, et vous choisirez librement, démocratiquement, souverainement par le vote militant, transparent, clair, et il n'y aura qu'un seul candidat ou qu'une seule candidate à l'élection présidentielle. Et nous serons tous derrière celui-là ou celle-là, et nous le ferons ou la ferons triompher, c'est ça notre engagement aujourd'hui : tous derrière celui qui nous représentera.

D'ailleurs, je sais qu'il y a des camarades qui parlent de primaires, l'idée mérite d'être retenue, regardée en tout cas, pas aujourd'hui, pour 2007, mais quand même réfléchissons à cette bonne manière d'associer nos électeurs.

Je termine sur le rassemblement de la gauche, d'un mot, il doit être fondé sur le respect, respect de nos partenaires à travers un contrat de gouvernement, respect de nous-mêmes, aussi, parce que le Parti socialiste n'a pas à présenter ses excuses d'être un parti de gouvernement, quand même, heureusement qu'il est un parti de gouvernement, il n'a pas à battre sa coulpe, sans cesse à battre sa coulpe parce que nous avons été au pouvoir. Il n'a pas à être dans la mauvaise conscience d'être socialiste.

Je le dis ici, nos alliances ne fondent pas notre identité, c'est notre identité qui fonde les alliances dans la gauche française. C'est pourquoi nous avons besoin d'un Parti socialiste fort.

Là encore, permettez cette référence, c'est François Mitterrand qui nous le dit : en 1979, et ce n'était pas facile, le PS, et la leçon est d'une actualité brûlante, « le PS doit être d'abord lui-même. S'il ne répond pas à cette condition, il n'y aura pas d'union de la gauche », ou alors il y aura, dit François Mitterrand, « cette forme détestable d'union qu'on a trop souvent vu des socialistes, oublié qu'ils avaient un message pour imiter les autres ». Nous n'avons pas besoin d'imiter les autres pour être de gauche, nous avons besoin justement d'être de gauche pour que nous rassemblions tous les autres.

Quant à l'extrême-gauche, chers amis, qui peut parfois, nous dit-on, séduire, y compris chez nous, et je respecte cette inclinaison, et je respecte même l'extrême-gauche, elle a parfaitement le droit d'attendre la révolution. Cela lui prendra du temps, et laissons-lui tout la patience nécessaire. Mais nous, nous socialistes, nous avons le devoir de faire des réformes dès 2007, et la pression doit être sur l'extrême-gauche. Que va-t-elle faire en 2007 quand il faudra choisir entre la droite et la gauche ? Pas simplement aller dans les manifestations, pas simplement faire la grève générale, d'abord voter pour la gauche.

Chers camarades, je termine parce que l'heure avance, nous avons faim, peu dormi, nous sommes fatigués, mais heureux, le ventre vide mais rassurés. Alors je veux vous dire un mot de moi-même. J'ai compris ce matin que je serai le seul candidat à la responsabilité de Premier secrétaire, ce qui, quand même, convenons-en, me donne une grande chance d'être élu. Ce sera mon dernier mandat comme Premier secrétaire. C'est en cette qualité que je veux intervenir devant vous pour vous dire franchement ce que je pense de nous, nous socialistes, de nos défauts et de nos qualités.

Je vais commencer par parler de nos défauts, cette propension que nous avons pour le débat qui va jusqu'à la division, cette fascination pour la magie des mots qui va jusqu'au fiasco des actes, cette mauvaise conscience que nous avons en permanence et qui peut tourner au mauvais esprit pour ne pas être assez à gauche jusqu'au point de jeter la suspicion sur nous-mêmes, de cette quête des idées que nous avons en permanence mais qui s'arrête parfois à la conquête des places, oui, ce souci des grandes confrontations dont nous raffolons et qui peuvent se terminer, heureusement pas ici, par de petits arrangements.

Je connais nos qualités aussi. Nous en avons fait la démonstration ces trois jours, c'est le dévouement à l'idéal commun, c'est l'attachement irréversible à notre parti. C'est la fidélité dans les épreuves pour la cause qui est la nôtre, c'est le sens de l'intérêt général. C'est cette capacité de sursaut lorsque nous pensons que l'essentiel est en jeu. Ce sont des valeurs partagées depuis un siècle. Nous sommes les héritiers d'une longue histoire, d'une belle histoire. Quand nous avons vu le film hier, nous avons éprouvé les uns et les autres, et quels que soient nos votes de motion, les mêmes émotions et les mêmes frissons. Quand nous avons vu les figures de Jaurès, de Blum, de Mitterrand, de Jospin, quand nous avons retrouvé nos épopées, mais aussi quand nous avons pris conscience que nous étions dans un grand mouvement qui nous dépasse tous, qui transcende nos destins individuels. Comme d'autres générations, c'est vrai que nous avons le sentiment qu'il faut porter le fardeau tout en haut et après dévaler la pente tel Sisyphe, et refaire encore le chemin et toujours recommencer l'explication, la conviction que c'en est jamais terminé, que nos victoires ne sont jamais acquises.

Je m'amusais ce matin parce que j'arrivais à votre congrès, à notre congrès, et les journalistes qui m'interrogeaient me disaient : Alors, Monsieur Hollande, le plus dur commence ! J'avais envie de leur dire : Mais le plus dur, c'est toujours. Si on avait échoué, vous m'auriez dit : Ah ! Le plus dur arrive !

Je ne vous dis pas que le plus dur est derrière nous, parce que tant que nous n'avons pas fait la dernière marche avant 2007, gagné les élections, emporté les convictions, obtenu la confiance, eh bien rien n'est fait, et donc tout dépend de nous. Même si après 2007, après le succès de l'une, de l'un d'entre nous, de nous tous, parce que j'en ai finalement assez qu'on laisse penser que ce serait un homme, une femme providentiel(le) qui ferait le succès, mais c'est vous qui êtes la force du Parti socialiste, c'est vos idées, c'est votre projet.

Même quand l'un ou l'autre d'entre aura obtenu le succès avec nous, nous n'en n'aurons jamais terminé, je suis sûr d'ailleurs qu'il y aura un ou une journaliste qui dira à notre candidat victorieux (je ne sais comment il ou elle s'appellera, je ne veux pas prendre de risque) : Alors, le plus dur commence ? ! Eh bien oui, le plus dur commencera. C'est pourquoi rien, chers amis, ne viendra nous détourner de notre objectif. Que les Français soient sûrs, là, s'ils nous regardent, que nous sommes maintenant en mouvement, que nous ne laisserons passer aucune occasion de marquer notre identité, de donner nos propositions, de faire valoir nos arguments. Rien ne viendra désormais nous éloigner de la seule perspective que l'on s'est fixé ici au Mans : porter un projet, rassembler la gauche, réussir le changement en 2007, nous serons tous ensemble dans ce combat, nous serons tous ensemble pour rendre possible la victoire. Aujourd'hui, la victoire est possible, à nous de la rendre inéluctable.

Merci, chers camarades, merci pour le congrès.


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