Il était temps que l'UMP se décide...

François Hollande

Point de vue signé par François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, paru dans Le Parisien daté du 7 mars 2005.
 

Pour Nicolas Sarkozy, « on n'a pas le droit de dire non à l'Europe »...
Il était temps que l'UMP proclame son adhésion franche à la Constitution européenne. Et que Nicolas Sarkozy renonce à l'obscurcir par le rappel incessant de la question de l'adhésion de la Turquie, laquelle ne se posera pas avant dix ou quinze ans. Maintenant, les Français ont le droit de dire oui ou non à l'Europe, comme à sa Constitution. Je préfère les arguments de conviction à ceux d'autorité. Les citoyens veulent d'abord être informés sur le texte : c'est notre devoir. Ensuite, il sera plus simple de démontrer les progrès qu'il contient et les raisons fortes, pour la France, de voter oui.

Quels arguments comptez-vous faire valoir alors que beaucoup sont sceptiques ?
La Constitution comporte des avancées incontestables. J'en vois trois majeures. D'abord, sur le plan politique, elle renforce considérablement les institutions, et crée un ministre des Affaires étrangères européen. Face aux menaces, nous avons besoin d'une Europe puissante capable de préserver la paix ici, et partout dans le monde. Ensuite, il y a la charte des droits fondamentaux : tous les citoyens européens auront les mêmes droits sociaux, politiques, économiques, civils. Enfin, il y a une avancée sociale : pour la première fois, la Constitution reconnaît les services publics et consacre les syndicats comme des partenaires européens. C'est la raison pour laquelle toutes les grandes confédérations syndicales européennes approuvent ce traité. Pourquoi faudrait-il refuser ces progrès ? Parce que l'Europe marche mal ou serait trop libérale ? Mais dire non, ce serait précisément au mieux le statu quo, au pire la régression.

Pourquoi avez-vous renoncé à sanctionner Henri Emmanuelli ou Jean-Luc Mélenchon, qui militent pour le non...
Je ne fais preuve d'aucune compréhension à leur égard. Ils ont été les premiers à réclamer une consultation interne. Ils l'ont perdue, et largement. Aujourd'hui, ils déclarent s'en affranchir au nom d'une conscience personnelle : elle ne peut se substituer à un vote démocratique. Je leur demande donc de respecter la position de leur parti ou de prendre la distance nécessaire pour éviter toute confusion car il n'y a qu'une campagne socialiste : celle du oui. Quant à la sanction, elle va bien au-delà d'une mesure disciplinaire : c'est celle que des militants infligeront, le moment venu, lors d'un congrès ou d'une désignation de candidat, à ceux qui se sont écartés de la règle commune. Comme premier secrétaire, je suis garant de l'unité du PS. Elle est notre bien le plus précieux pour les victoires futures. Je ne défends donc pas ma position ou ma ligne, mais les principes qui nous permettront de nous rassembler tous au lendemain du référendum.

Samedi à Guéret (Creuse), vous vous êtes fait brocarder par les tenants du non...
Il s'agissait d'un défilé pour protester contre la politique du gouvernement Raffarin en matière de services publics. Dans ce cortège, certains tenants du non ont utilisé la mobilisation des élus et des citoyens qui voient tous les jours depuis trois ans les gares, les perceptions, les écoles, les bureaux de poste fermer pour faire porter le chapeau à l'Europe, voire au traité constitutionnel même pas encore approuvé. C'est un comble, une absurdité, une erreur politique majeure que d'exonérer ainsi le gouvernement. Car tout cela, c'est sa responsabilité.

La victoire du oui ne serait-elle pas avant tout la victoire de Jacques Chirac ?
Chirac, c'est notre présent. Que dis-je ? C'est déjà notre passé. La victoire du oui sera celle de l'avenir puisque nous aurons une Europe plus forte, plus démocratique, plus sociale. Tous les socialistes européens approuvent le traité, qu'ils soient au gouvernement ou dans l'opposition. Il n'y a qu'en France qu'on pose la question comme cela. En Italie, par exemple, la gauche vote le traité sans se préoccuper de Berlusconi. Quand la Constitution européenne entrera en vigueur en 2007, les gouvernants d'aujourd'hui ne seront peut-être plus là. Aux socialistes d'être au rendez-vous de l'alternance. Ne nous trompons ni de moment ni de sujet.

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