Si le " non " l'emporte,
ce pourrait être un saut dans le vide pour le PS



Principaux extraits du Grand jury RTL - Le Monde - LCI consacré à François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, le 21 novembre 2004
Propos recueillis par Ruth Elkrief (RTL), Gérard Courtois (Le Monde) et Pierre-Luc Séguillon (LCI).


 

Laurent Fabius se dit très optimiste pour la victoire du " non " au référendum socialiste sur l'Europe. L'êtes-vous également pour celle du " oui " ?
Je ne suis pas dans le pronostic.

Vous êtes donc pessimiste ?
Non. Je suis un combattant. J'ai fait ce choix du " oui " parce que c'était ma conviction. C'est un choix de cohérence et de vérité parce que ce traité est un bon traité. Au nom de quoi, à partir de quel calcul, de quelle anticipation aurais-je pu prendre une autre position que le " oui " ? Donc j'essaie de convaincre ; j'espère y parvenir.

Les tenants du " non " estiment que ce traité consacre une Europe libérale, aux antipodes de l'Europe sociale que souhaite le PS. Que leur répondez-vous ?
Mais où va-t-on chercher ça ? Ce texte est le plus social de tous les traités existants. Il inscrit la Charte des droits fondamentaux dans le traité constitutionnel.

La Charte, oui. Mais pas la troisième partie du traité...
Eh bien, parlons-en. Cette troisième partie, c'est la codification de tous les traités antérieurs. Qui était au gouvernement lorsqu'ils ont été négociés et conclus ? Pour l'Acte unique européen de 1986, qui a ouvert les règles de la concurrence, qui était premier ministre ?

Laurent Fabius...
Pour le traité de Maastricht de 1992, qui était premier secrétaire du PS à l'époque, pour demander, à juste titre, d'approuver ce traité ? Laurent Fabius. Et pour le traité de Nice, qui était premier ministre et ministre de l'économie ? Lionel Jospin et Laurent Fabius. Si l'Europe c'est le libéralisme, alors il faudrait que tel ou tel fasse son devoir, non pas d'inventaire, mais de dépôt de bilan politique. Si l'on refusait ce traité constitutionnel, on reviendrait à tout ce que l'on dénonce dans la construction européenne, sans les acquis. Ce qui serait quand même un comble.

En approuvant ce traité, ne risquez-vous pas de creuser un peu plus le fossé entre le PS et les classes populaires ?
Le rôle d'un dirigeant politique de gauche, ce n'est pas de suivre tous les mouvements d'humeur, d'enfourcher tous les phantasmes populistes.

C'est ce que fait M. Fabius ?
Je ne l'imagine pas. Ce que je demande, moi, c'est de convaincre les catégories populaires. Ce serait une faute historique de les séparer de l'Europe.

N'êtes-vous pas embarrassé d'appeler, une nouvelle fois, à voter comme Jacques Chirac ?
Je ne conseille pas à ceux qui voudraient utiliser cet argument de persévérer. Parce que si le " oui " sera accompagné, sans doute, par une partie de l'UMP et par l'UDF, par qui serait accompagné le "non", s'il devenait la position du PS ?

Que ferez-vous si le " non " l'emporte, le 1er décembre ?
Si le " oui " l'emporte, je sais ce qui se passe : nous continuons, avec les mêmes équipes et la majorité du congrès de Dijon, le travail engagé depuis deux ans et demi et qui nous a permis d'avoir des victoires électorales importantes.

Et si le " non " l'emporte ?
Si c'est le " non ", je ne sais pas, c'est l'inconnu. L'inconnu au sein du PS parce que cela pourrait être, effectivement, un saut dans le vide. Mais l'inconnu aussi au plan européen, car avec qui pourrait-on résoudre cette crise ? Je n'imagine pas Jacques Chirac négocier un traité plus à gauche. Pas davantage les gouvernements actuels de l'Europe, dont 18 sur 25 sont à droite. On sait qu'on aura une Europe en panne.

Dans ce cas, vous imaginez-vous rester premier secrétaire et défendre le " non " lors du référendum national en 2005 ?
J'ai posé une règle simple qui vaudra dans tous les cas de figure : mèneront campagne pour le référendum dans le pays ceux qui auront défendu la ligne choisie par les militants. Si le " non " l'emporte, ce sera à ceux qui ont défendu cette position dans le parti d'en convaincre les Français.

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