Vœux du Premier secrétaire
à la presse


 Discours prononcé à Matignon le jeudi 11 janvier 2001.
 
Je suis heureux de vous présenter nos vœux au nom du Parti socialiste.

Notre pays va mieux, mais de nouveaux défis nous attendent. La France connaît depuis 3 ans et demi un contexte économique qui n'a jamais été aussi favorable si l'on regarde les deux décennies qui viennent de s'écouler. La croissance est dynamique - plus de 3 % par an - avec deux facteurs favorables :
Le prix du pétrole retrouve son niveau de 1999, ce qui prouve que l'État n'était pas responsable de la hausse du mois de septembre 2000, et que ce n'est pas à lui non plus de faire la promotion d'une baisse qui ne lui appartient que secondairement. Ce fléchissement du prix des carburants aura néanmoins des effets extrêmement favorables si elle se poursuit, sur le pouvoir d'achat et sur la consommation.
L'Euro est de nouveau mieux apprécié. Laurent Fabius relevait au Japon que l'Euro avait retrouvé son crédit, notamment par rapport au dollar. Un Euro stable à un niveau raisonnable c'est le travail des Français et des Européens mieux valorisé et c'est aussi une diminution des tensions inflationnistes.
La demande est vive et stimulée par une hausse du pouvoir d'achat, provoquée par la progression du salaire direct (les chiffres de l'année 2000 en témoignent), et amplifiée par les mesures fiscales qui ont été prises ces derniers mois. La vignette a disparu, la part régionale de la taxe d'habitation a été supprimée -ses effets ont été perceptibles dès le mois de novembre- et la baisse de l'impôt sur le revenu, intervenue en 2000, sera amplifiée en 2001.

Enfin, va s'ajouter en septembre prochain la " prime à l'emploi ".
La mesure prévue pour alléger la CSG a connu les vicissitudes de sa censure par le Conseil constitutionnel. Le seul regret que l'on peut avoir tient au calendrier, car il faudra attendre le mois de septembre pour verser aux salariés les sommes dont ils auraient pu bénéficier directement sur leurs fiches de paie dès le mois de janvier 2001. La prime n'a pas d'autre but que de redonner sous une forme différente et aux nuances près voulues par le Conseil constitutionnel, les allégements fiscaux décidés lors de la loi de financement de la Sécurité sociale.

Nous n'avons pas lieu d'avoir entre socialistes ou au sein de la gauche plurielle, de débats idéologiques à ce sujet. Notons que le crédit d'impôt existe dans notre système fiscal depuis longtemps et personne ne s'était jusque-là ému que l'on puisse introduire un crédit d'impôt sur les travaux aux logements ou plus récemment sur les véhicules propres. Cela ne choque personne que l'on puisse donner directement à ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu des remboursements sur leurs frais.

Il a été dit que cette mesure pouvait atteindre la dignité des bénéficiaires : nous sommes sensibles à l'argument, mais l'avoir fiscal est un crédit d'impôt, et je n'ai pas eu le sentiment depuis que cette mesure est en vigueur dans les années 60, que ce soit perçu comme une atteinte à la dignité des actionnaires que de leur rembourser les sommes liées à l'avoir fiscal. Les salariés n'auront certainement pas une attitude différente, car il est normal et juste lorsqu'on ne peut pas baisser l'impôt que ne paient pas les plus modestes, qu'on utilise d'autres modalités, qu'il s'agisse de prime de ristourne ou de remboursement dès lors que l'on ne peut pas agir sur la CSG.

Le chômage régresse

C'est un mouvement régulier depuis l'automne 1997. 1,5 million d'emplois ont été crées, près de 600 000 pour l'année 2000, ce qui est un record historique depuis 30 ans et la meilleure performance en Europe. Nous avons même quelque pudeur, quelque réserve à évoquer ces bons résultats, parce que nous sommes conscients —au-delà du rôle décisif du Gouvernement- qu'ils sont le produit du travail des Français, de l'initiative des entrepreneurs et d'une conjoncture mondiale favorable. Mais, nous avons également de la mémoire. Si nous sommes conscients de ce que nous avons fait, c'est que nous nous rappelons que nous avons été battus durement en 1993 sur la question du chômage.

Nous ne laissons pas penser que le fait d'avoir fait baisser le chômage serait la condition sine qua non de notre victoire. Mais nous sommes sûrs que si le chômage n'avait pas régressé, alors les difficultés politiques pour l'année 2002 seraient grandes. Nous reconnaissons donc l'importance du travail fait et l'importance du bilan du gouvernement de Lionel Jospin, tout en étant conscients que des difficultés demeurent.

Le climat social

C'est vrai que le nombre de jours de grève est faible dans notre pays, c'est vrai que nous avons le souci grâce au gouvernement, d'entendre les préoccupations des Français, mais il y a un certain nombre de conflits, durs qui témoignent de l'âpreté de la relation sociale dans notre pays. Je pense aux annonces de licenciements chez Danone, à tous ces conflits individuels qui opposent des salariés avec des CDD aux entreprises qui abusent de ces pratiques, ou aux sanctions syndicales prononcées à l'égard de telle ou telle organisation comme à Rouen pour les traminots.

La loi de modernisation sociale

Bientôt débattue au Parlement, cette loi pourra apporter une première réponse qui permettra de moraliser le recours aux contrats à durée déterminée, de pénaliser financièrement les entreprises qui abusent de ces formules et de légaliser l'amendement Michelin qui obligera les entreprises à aller le plus loin possible dans la réduction du temps de travail avant de procéder à des suppressions d'emplois.

La validation des acquis professionnels introduira un changement considérable et marquera l'histoire sociale de notre pays. C'est en effet la première fois que ce qui est fait par un salarié est reconnu comme l'ouverture à l'obtention d'un diplôme.

Enfin, la lutte contre le harcèlement moral, souhaitée par les partenaires de la gauche plurielle, fera elle aussi l'objet de propositions.

Le dialogue social

 Dans l'entreprise
La réponse aux attentes des Français est aussi de l'ordre de la négociation sociale. De ce point de vue, le Medef n'a pas encore compris que nous avons changé d'époque : nous ne sommes plus dans une période de chômage et de récession où le rapport de force était à l'évidence du côté patronal. Les salariés n'avaient alors pas le choix : accepter l'emploi qu'on leur proposait et les conditions de travail qu'on leur imposait, ou quitter l'entreprise et retourner au chômage. Alors que la croissance s'installe, la capacité des salariés qualifiés à trouver un emploi change la nature du compromis social et la relation qui existe entre les salariés et l'entreprise.

 Entre partenaires sociaux
La question des retraites complémentaires est, à cet égard, une bonne illustration. Il y a une menace patronale -énoncée ces derniers jours- de bloquer le système des retraites complémentaires, en suspendant les cotisations au-delà du mois de mars. Cette initiative patronale est condamnable à double titre : au plan de la méthode et sur le fond-même de la réforme proposée par le Medef.

Bien qu'habitués à la méthode, aux pratiques, aux discours du Medef, force est de constater, qu'annoncer une suspension des cotisations sur une question aussi fondamentale que la retraite complémentaire est un chantage inadmissible, à l'égard des syndicats et de tous les salariés. C'est l'ensemble du régime conventionnel qui serait mis en cause. Ce serait un paradoxe incroyable que de voir les partisans autoproclamés de la représentation sociale, mettre à bas les fondements mêmes de la responsabilité des partenaires sociaux. Curieuse attitude, qui voudrait relancer le dialogue social et en même temps provoque un véritable tremblement de terre pour le régime conventionnel.

Sur le fond, allonger jusqu'à 45 ans la durée des cotisations, c'est à notre avis ne rien comprendre à ce qu'est la perspective du régime des retraites et la capacité des Français à souhaiter ardemment une réforme. Dans le secteur privé que la durée des cotisations a été rallongée. Proclamer comme objectif 45 ans de cotisations, c'est remettre en cause le principe même de la retraite à 60 ans.

Compte tenu de la gravité de la situation, à la fois quant à la méthode et quant à la réforme proposée, le Parti socialiste compte faire entendre sa voix, en soutenant la mobilisation syndicale du 25 janvier, en appelant avant qu'il ne soit trop tard à une reprise des négociations et en demandant au gouvernement de se tenir prêt à intervenir si nécessaire. Il est n'est pas question en effet, que les retraités actuels ou futurs, aient à souffrir du comportement du Medef.

L'affaire de la vache folle

Des mesures courageuses prises dans un délai rapide, ont été annoncées et mises en œuvre. La France, a été la plus rigoureuse dans le domaine de la sécurité alimentaire et la plus convaincante, car c'est de son initiative que sont partis plusieurs mouvements au sein de l'Union européenne. Le prix à payer de la sécurité alimentaire est élevé. Mais en même temps, les éleveurs qui ont fait le choix de la qualité, ne peuvent être victimes d'un système qui n'est pas le leur. Nous savons aujourd'hui que dans de nombreux abattoirs, des salariés sont menacés dans leur emploi. Le Parti socialiste veut aller vers des mesures compensatoires pour les éleveurs concernés, modulées selon la taille des exploitations, et selon la qualité des produits.

Le rôle du Parti socialiste en 2001

Il ira croissant tout au long de l'année.

Les élections municipales et cantonales

Nous entendons placer cette élection sur 4 terrains :

 Utiliser le rendez-vous électoral de mars pour valoriser un bilan national et local. Nous avons une forte implantation dans les villes moyennes et même dans les grandes villes à l'exception de quelques unes. Nous avons donc un bilan à faire valoir.

 Faire vivre la décentralisation qui offre des moyens nouveaux aux élus pour l'activité économique, pour la gestion des grandes agglomérations avec la loi Chevènement, pour la solidarité territoriale avec la loi Voynet, et pour les services publics qui peuvent trouver le meilleur niveau d'intervention. Nous devons aussi animer la décentralisation, avec la perspective d'une grande réforme. Un débat aura lieu au parlement dans quelques jours, le Parti socialiste émettra ses propositions, pour que nous puissions voter au moins un texte d'ici la fin de la législature.

 Donner du crédit à la politique et du sens à l'engagement. Les élections municipales sont donc l'occasion de donner une illustration de ce qu'est notre conception de la politique. La loi sur la parité nous en fournira l'occasion, le renouvellement de nos listes, la place des jeunes, les thèmes utilisés, la façon de faire campagne, notre capacité à intéresser l'opinion à travers des propositions crédibles et pertinentes. Il faut donc redonner un souffle démocratique à la décentralisation.

 Penser que les élections municipales serviront de rapport de force au sein de la cohabitation. La manière avec laquelle nous sortirons des élections, confortera en cas de succès, l'action que nous devons poursuivre jusqu'en 2002. En revanche, je ne fais pas de lien mécanique entre nos résultats aux élections municipales et cantonales, et les futures échéances de 2002. Chaque élection a en effet, sa propre logique. Ceux qui au soir du 18 mars auraient l'extrapolation à l'esprit, et la volonté de leur faire jouer le rôle de premier tour des élections présidentielles ou législatives, se tromperaient.

Paris

Concernant Paris, où curiosités et pressions médiatiques sont nombreuses. Ce n'est pas un parti qui doit se substituer à un autre, ce n'est pas un système qui doit en remplacer un autre. Ce sont des Parisiens qui doivent retrouver un pouvoir qui leur a été confisqué et la démocratie qui doit retrouver sa place. Nous n'avons pas la volonté à travers la campagne de Bertrand Delanoë, de trouver à Paris une citadelle ou un coffre-fort. Philippe Séguin dit lui-même qu'il n'a pas été compris, ce qui est incontestable, étant lui-même incompréhensible. " J'ai compris, donc je ne changerai rien ", tout est dit : Philippe Séguin arrive trop tard.

Etre exemplaire dans la méthode

Lors du Conseil national du 27 janvier prochain, nous adopterons les listes du Parti socialiste et nous devrons régler les quelques contentieux qui subsistent. Nous adopterons ces listes à la parité, renouvelées, rajeunies, où nous avons tenus à mettre un certain nombre de jeunes issus de quartiers en difficulté.

Nous adopterons également notre manifeste municipal et cantonal, qui résumera l'ensemble de nos engagements, même si les candidats, nous le savons, adapteront leurs propositions à la réalité.

Tous nos accords avec les alliés de la gauche plurielle qui ont signé des pactes électoraux avec nous, sont et seront respectés. Nous n'avons pas d'accord national avec les Verts, mais des accords locaux dans 70 % des villes de France.

Un projet pour 2002

Il s'agit de l'élection présidentielle et des législatives, dans un ordre qui n'est pas encore établi, le parlement n'ayant pas délibéré sur cette question et le Conseil constitutionnel n'ayant pas encore été saisi. Quel que soit l'ordre, notre méthode ne changera pas.Nos victoires futures doivent être fondées sur un projet, non sur un rejet. Tel sera l'axe de notre mobilisation : le projet, non le rejet des autres.

Calendrier

L'occasion nous sera fournie par la 7ème réunion de tous les secrétaires de section de France, le dimanche 28 janvier. Nous mobiliserons nos fédérations, nos militants avec la volonté d'ouvrir nos débats, nos discussions localement et nationalement, à la gauche plurielle. Il y aura d'ailleurs 2 sommets de la gauche plurielle sur les propositions qui pourraient être élaborées en commun.

Nous voulons aussi dialoguer avec les Français, les acteurs sociaux et économiques, les forces vives à travers ce projet.

Sur le plan interne, nous envisageons trois conseils nationaux dont les thèmes seront établis prochainement. L'Université d'été sera consacrée à un débat sur le projet. Nous aurons des débats thématiques dans toutes les fédérations et des colloques pourront compléter ce dispositif.

Ainsi l'année 2001 sera pour les socialistes une année de travail intense. Nous aurons non seulement à affronter le suffrage universel pour les élections municipales et cantonales, à préparer le projet, mais aussi à désigner nos candidats pour les législatives. Ils devront donc être connus avant la fin de l'année 2001.

Nous devrons parallèlement conclure des accords électoraux avec nos partenaires de la gauche plurielle qui demandent que certaines circonscriptions leur soient réservées. Quant à la désignation de notre candidat pour la présidentielle de 2002, elle est prévue fin janvier 2002, ce qui laisse encore beaucoup de temps. Nous en reparlerons plus longuement pour les vœux de 2002.

La volonté n'a de force que si elle se prolonge dans l'action, et l'expérience de ces dernières années nous a appris que souvent, qui veut le plus, peut le moins. C'est une raison supplémentaire pour ne pas nous laisser détourner de l'essentiel durant les prochains mois. Car pour les socialistes, une bonne année 2001 sera une excellente année pour 2002. Lançant des vœux pour 2001, je forme aussi des espoirs pour 2002. Une nouvelle nous est d'ailleurs parvenue ce week-end : l'élection d'un socialiste à l'élection présidentielle au Portugal avec 55 % au premier tour, n'y voyons pas de présage ; simplement une bonne nouvelle.


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