Pour un nouveau souffle de la décentralisation | |
Contribution thématique au congrès national du Mans présentée par les présidents de Régions (juillet 2005) | |
« La France a eu besoin d'un pouvoir fort et centralisé pour se faire. Face à la crise de notre démocratie représentative, face à l’affaissement de notre modèle d’action publique, le défi qui est lancé
aujourd’hui à toute la Gauche et au Parti socialiste en particulier est
de refonder le contrat démocratique entre tous les Français. Rien ne
le permettra si nous ne répondons pas à la détresse civique qui
affecte notre pays, reflet d’une crise sociale plus grave encore, et si
nous ne réformons pas les outils de pilotage de l’action publique qui
permettront de retrouver la confiance perdue entre les citoyens et leurs représentants. Parmi la somme des échecs de la droite, la décentralisation Raffarin figure au premier rang des occasions ratées... Tout est plus flou, plus embrouillée, croisé. Les Régions, en particulier, ont été corsetées, du fait des majorités de droite à l’Assemblée nationale et au Sénat. La décentralisation est donc à nouveau au cœur du débat public. Parce qu’elle est une source de rétablissement du lien entre des citoyens qui confirment leur confiance dans les élus locaux et un système de représentation démocratique dans lequel ils ne se reconnaissent plus. Parce qu’elle est aussi une source de renouvellement des pratiques politiques, des modes d’expression et d’expérimentations de nouvelles solidarités. Dans la perspective de l'élaboration de notre Projet, nous appelons le Parti socialiste à donner un nouveau souffle au processus de décentralisation. La Gauche doit renouer avec l’ambition décentralisatriceDans le sillage des élections municipales de 1977 où la Gauche
avait progressé, notre Parti s’est incarné sous la forme de maires, de
présidents de conseils généraux et régionaux, dont la volonté et les
initiatives étaient contrariées par la tutelle de l’Etat et l’accaparement de tous les leviers d’action par la droite. Parce que le Parti socialiste était en prise directe avec ses élus locaux, il a été le premier à dénoncer le centralisme étatique. C’est sur la base des expériences conduites dans les territoires par des élus de Gauche que le Parti socialiste a opéré le tournant de la décentralisation. Voilà pourquoi François Mitterrand, Pierre Mauroy et Gaston Defferre avaient fait de la décentralisation l’un des piliers du Projet d’alternance de 1981. Après le grand élan des Lois Defferre, et malgré l’apport des lois Voynet et Chevènement, nous nous sommes trop souvent contenté de décentraliser à coups d’imperceptibles adaptations, sans réviser la carte territoriale, en nous gardant de toucher aux structures qui constituent un véritable obstacle à la refonte, désormais incontournable, de notre mode d’organisation institutionnelle. Nous en connaissons le résultat : notre pays demeure centralisé et monolithique, alors qu’au Royaume-Uni, l’Ecosse et le Pays de Galle se sont engagés sur la voie de la régionalisation, que l’Espagne et l’Italie ont institué des régimes d’autonomies se rapprochant du modèle Allemand. En renonçant à s’appuyer sur les élus locaux, en cédant trop souvent à la tentation de l’interventionnisme étatique, la Gauche a sacrifié une part de son identité décentralisatrice, laissant un nouvel espace à la droite. Or, lorsque la droite décentralise, elle ne décentralise que ce qu’elle veut voir disparaître, sans en assumer les conséquences. Depuis 2002, elle n’a cessé de dévoyer l'idée de décentralisation, la résumant à une simple délégation de compétence, à un simple transfert de charges qui annonce un dépeçage des politiques publiques. Aujourd’hui, c'est aux socialistes qu'il revient de renouer avec l’esprit des Lois Defferre, de réaffirmer et renouveler leur volonté décentralisatrice, de redéfinir en profondeur et dans la durée les missions de l’Etat et le fonctionnement de l’administration. Car rien n’est plus essentiel pour préserver notre identité que de doter notre pays d’un Etat moderne, souple, efficace et véritablement décentralisé, gage d’une République vivante et solidaire. Débloquer la démocratie locale, |
Ne laissons pas croire, à l’occasion du Congrès du Mans, que notre formation politique vit un état d’introspection permanent, réévaluant
sans cesse sa propre ligne politique. Les Français ne nous
pardonneraient pas cet égoïsme, eux qui expriment, scrutin après
scrutin, l’affaissement de la confiance accordée à l’ensemble du
système politique. Montrons, au contraire, que nous construisons un
Parti qui va de l’avant, qui aborde les échéances sur ses propositions. C'est la ligne directrice que nous nous sommes fixés dans la conduite de nos politiques régionales. Depuis un an, nous avons fait des choix forts, avec nos convictions pour seule boussole, dans le respect de notre identité décentralisatrice, en tirant aussi les leçons des échecs passés, en nous tenant à l’écoute de la détresse civique et sociale qui fait aujourd’hui des ravages dans notre société. Fidèle à l’ambition décentralisatrice qui a longtemps été la sève de son ambition, le Parti socialiste doit aujourd’hui inventer et revendiquer un nouveau tournant institutionnel pour transformer notre société. Cela implique des réformes audacieuses, qu'il s'agisse d'interdire le cumul des fonctions, d'assumer pleinement la régionalisation, de renouveller nos institutions, ou encore de réformer la fiscalité locale en l'adossant sur les compétences réelles de chaque échelon de collectivité... Bâtissons ensemble un nouveau pacte de démocratie, d'égalité et de solidarité territoriales ! |
Signataires : |
Alain Rousset, président du Conseil régional d'Aquitaine Pierre-Joël Bonte, président du Conseil régional d'Auvergne Philippe Duron, président du Conseil régional de Basse-Normandie Jean-Yves Le Drian, président du Conseil régional de Bretagne François Patriat, président du Conseil régional de Bourgogne Michel Sapin, président du Conseil régional du Centre Jean-Paul Bachy, président du Conseil régional de Champagne-Ardenne Raymond Forni, président du Conseil régional de Franche-Comté Victorin Lurel, président du Conseil régional de Guadeloupe Alain Le Vern, président du Conseil régional de Haute-Normandie Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d'Ile de France Jean-Paul Denanot, président du Conseil régional du Limousin Jean-Pierre Masseret, président du Conseil régional de Lorraine Martin Malvy, président du Conseil régional de Midi-Pyrénées Daniel Percheron, président du Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais Jacques Auxiette, président du Conseil régional des Pays-de-la-Loire Claude Gewerc, président du Conseil régional de Picardie Ségolène Royal, présidente du Conseil régional de Poitou-Charentes Michel Vauzelle, président du Conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d'Azur Jean-Jack Queyranne, président du Conseil régional de Rhône-Alpes |
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