Présider autrement
Mulhouse  - vendredi 12 avril 2002

 Discours de Lionel Jospin prononcé lors d'un déplacement thématique pour exposer ses propositions en matière d'environnement.


 

Mes chers amis,

En 1995, les choses étaient simples parce que quand j’étais venu à Mulhouse, c’était la dernière journée. J’avais commencé à Caen, j’étais passé à Mulhouse et j’avais terminé à Besançon. C’était une journée formidable, d’ailleurs, on s’en souvient et on avait rêvé. Certains avaient rêvé. Du coup, on n’avait pas gagné. Cette fois-ci, on ne rêve, on a les yeux ouverts, c’est pourquoi je pense que l’on va gagner.

Du moins, si nous sommes capables de rendre nos compatriotes, nos concitoyens, les Français conscients des enjeux et si, eux aussi, regardent les yeux ouverts cette élection, les bilans de chacun, les conceptions de la politique, les pratiques et les projets qui sont présentés.

Je suis venu à Mulhouse pour parler de l’environnement, ce n’est pas tout à fait par hasard. J’avais envie de venir en Alsace, j’avais envie de venir dans la ville de Jean-Marie Bockel parce qu’il est, parmi les socialistes, un des hommes pour qui j’ai le plus d’estime et de respect pour sa façon de faire de la politique, pour la manière dont il conduit cette ville depuis des années dans un environnement politique qui n’est pas aussi porteur que dans d’autres régions, où la tradition est elle socialiste, de gauche que les choses vont presque toutes seules, à condition de les accompagner ; ce travail remarquable méritait d’être salué. Enfin, sur ces questions de l’environnement à travers une pratique, comme il appelait à débuter au début des années 90, il y a plus de dix ans, il y a un travail remarquable qui a été fait dont on m’a donné plusieurs des traductions et aussi plusieurs des projets qui sont en cours. D’ailleurs, j’ai été frappé de voir qu’on parlait d’environnement mais on parlait en même temps d’urbanisme. On parlait de vie quotidienne.

Je suis heureux de retrouver Jean-Pierre Beaumler, Marie-Hélène Gillig, Catherine Trautmann qui a été membre de mon gouvernement à qui nous souhaitons tous bonne chance pour l’avenir parce que j’éspère bien que l’on ne pourra pas retrouver des conditions aussi négatives pour aborder une campagne que celle qu’elle a eu malheureusement à affronter, mais le temps est encore là devant elle. Pierre Moscovici, membre de mon gouvernement, qui joue un rôle précieux dans la campagne parce que c’est lui qui anime tout le travail de réflexion, de réponses aux questions, aux interviews, aux demandes de groupes professionnels, d’association, qui font qu’il y a chaque jour des dizaines et des dizaines de réponses de nature diverses qui partent de l’Atelier de campagne, du siège de campagne pour aller irriguer ce grand courant démocratique que représente une élection présidentielle. Je remercie Michel Dreyfus-Schmidt d’être venu en voisin et c’est très bien qu’il y ait des réunions à Belfort parce que, même à Belfort, on peut faire du gauche - gauche ! Je voudrais saluer deux camarades qui sont avec moi : Géraud Guibert qui dans la direction du PS a justement en charge les questions d’environnement et puis Claudy Lebreton, président du Conseil général des Côtes d’Armor qui dans ma campagne est justement le porte-parole thématique sur les questions d’environnement.

J’ai été frappé par la haute qualité environnementale des logements que vous avez rénovés, par la mobilisation des acteurs économiques pour lutter contre la pollution de l'air, la politique de l'eau, les initiations conduites en direction des enfants, ce qui montre que les élus de cette agglomération sont depuis longtemps orientés vers le développement durable. Ce n'est pas un hasard si ce sont les élus locaux de gauche qui mènent depuis de nombreuses années les politiques les plus audacieuses et les plus courageuses en matière d'écologie urbaine. Quand une municipalité de gauche s'installe là où il existait une municipalité de droite, comme c’est le cas dans la capitale, à Paris, on voit immédiatement sur ce sujet que la différence se marque! Cela prouve, pour nous socialistes, qui sommes historiquement, et cela a un sens, particulièrement dans cette région de tradition ouvrière qui sommes particulièrement ceux qui avons posé la question sociale, celle de l’exploitation de l’homme par l’homme, celle de la dureté des conditions de vie dans le monde industriel, dans le monde de la fabrique puis de la grande industrie. Les socialistes qui ont porté les grandes réformes sociales au cours de la fin du XIXème siècle et du XXème siècle posent désormais la question environnementale. Cette question sociale dont nous sommes les porteurs et cette question écologique ou environnement qui apparaît aujourd’hui comme essentielle se rejoignent justement dans ce que l’on appelle l’environnement ou l’écologie au quotidien. Car ce sont les hommes et les femmes qui vivent dans les conditions les plus difficiles qui subissent à la fois l’injustice sociale, l’inégalité des conditions urbaines et souvent les pollutions ou les nuisances qui marquent cette vie urbaine.

A partir de 1981 puis en 1988, la gauche a su s'ouvrir aux revendications de ceux qui ont tracé les chemins de la défense de notre planète. En 1995 un rapprochement plus étroit s'est amorcé et en 1997, à travers la majorité plurielle, pour la première fois, l’arrivée d’un mouvement écologiste et de ce représentant dans un gouvernement, nous avons créé une nouvelle donne et amplifié cette prise de conscience de l’importance des problèmes écologiques. Cela n’est pas illogique parce que comme les socialistes sont pour le progrès, appartiennent aux forces de progrès, que le progrès est le développement et que le développement aujourd’hui pour ne pas se retourner contre les conditions de vie de l’humanité doit être un développement durable, là aussi il est logique que socialistes et écologistes se retrouvent. Nous nous retrouvons dans la micro réalité des quartiers pour faire face aux difficultés et aux nuisances et nous nous retrouvons quand nous avons à penser l’avenir de la planète, si nous voulons que ses équilibres soient préservés et que nous ne connaissions pas des situations dramatiques.

Au-delà des problématiques écologistes, qui ont leur logique, leur identité, au-delà des symboles qui existent, il me semble que la gauche a désormais intégré la dimension environnementale de la lutte incessante que nous devons mené pour le respect de la vie, pour le respect de l'autre, et on le sait maintenant à travers le risque de disparition d’espèces, avec les risques qui pèsent sur la bio-diversité, le respect de toutes les espèces vivantes. Nous avons progressé ensemble avec la majorité plurielle, pour que l'environnement devienne un souci constant. Avec les Verts, les socialistes, les communistes ou les Radicaux, ou le MDC ce sujet est devenu pour la gauche une question de politique quotidienne, de justice sociale, de démocratie mais aussi de solidarité internationale. C'est ce gouvernement qui a amorcé les premiers choix de société fondés sur le développement durable. Et comme j’ai eu l’occasion de le dire dans une interview, je veux à cet égard remercier Dominique Voynet pour le rôle qu’elle a joué hier dans mon gouvernement et aujourd’hui Yves Cochet pour le rôle qu’il y joue comme ministre de l’Aménagement du territoire et de l’environnement.

Ce changement d’état d’esprit implique une volonté forte pour dépasser les contradictions qui existent dans notre société industrielle, celle dont on voyait les termes à propos de l’agriculture ou à propos du transport.

Il faut harmoniser les exigences du court terme, de la société telle qu’elle est et de la préservation du long terme –et cela suppose un effort de sensibilisation des citoyens et notamment des jeunes parce que l’on voit bien que nos concitoyens, comme nous-mêmes les responsables politiques ayant à décider, oscillent parfois entre ces exigences contradictoires et puis aussi balancent entre l’intérêt général, idéal, et puis des intérêts particuliers qui sont très puissamment inscrits dans la réalité et qui font sentir aussi leur pression, et qui défendent aussi les intérêts catégoriels qui ne sont pas non plus forcément illégitimes.

Cette dimension du temps, cette dimension du lien que nous nouons maintenant avec les générations futures, qui n’était pensé par les socialistes qu’à travers l’idée de progrès, l’idée de transformation sociale, l’idée utopiste des cités radieuses des premiers socialistes utopistes ou l’idée de la transformation du monde rêvée par ceux qui se réclamaient de la Révolution, inscrits dans des promesses et dans des concrétisations de réformes pour ceux qui avaient choisi la voie réformiste mais qui ne s’exprimaient qu’à travers cela, ce lien, cette capacité à nous projeter dans l’avenir au moment où nous prenons nos décisions, doit être tourné maintenant aussi vers la préservation même de la planète ; sinon c’est une menace mortelle qui pèse sur nous.

A cet égard, le fait que la plus grande puissance mondiale, la puissance qui par là-même, simplement parce qu’elle produit plus pollue plus, que cette puissance se soit détourné du mouvement collectif qu’avait accepté l’administration précédente, l’administration Clinton notamment sur le Protocole de Kyoto, notamment après la Conférence de Berlin pour lutter contre l’effet de serre, est un événement d’une très grande importance et particulièrement menaçant pour l’avenir. J’espère bien que l’Europe, les autres pays développés, si nous arrivons à convaincre les pays en développement qu’eux aussi ont intérêt à cette évolution, qu’ils en seraient les premières victimes en cas de réchauffement irréversible de la planète, avec les conséquences pour la montée des eaux, pour la désertification, pour toute une série d’autres conséquences, j’espère bien que nous pourrons faire bouger l’administration américaine, celle-ci ou éventuellement une autre ultérieurement. Cette dimension du lien avec les générations futures dans nos grands arbitrages d’aujourd’hui, les citoyens et les responsables politiques, doit absolument être prise en compte.

- D'ailleurs, dans la société française d'aujourd'hui, la qualité de l'environnement est devenue une exigence sociale : nous voulons des villes propres, des paysages harmonieux, une nature préservée. Nous voulons aussi pouvoir manger et boire en toute confiance, nous voulons préparer la planète que nous allons transmettre à nos enfants. En même temps, la préoccupation environnementale doit être aussi inscrite dans la vie quotidienne. Il est clair que la qualité de l’environnement n'est pas également partagée par tous. Ce sont les plus démunis qui vivent dans des logements dégradés, souffrent du bruit, et de trajets trop longs, qui les exposent à la pollution ou au saturnisme en fonction de l’eau qu’ils peuvent boire ou dans les conditions dans lesquelles cette eau circule, se privent des aliments les plus sains parce qu'ils sont les plus chers. La défense de l'environnement conçue ainsi est aussi de la lutte pour la justice sociale, de la lutte contre les inégalités. C’est vraiment ce message que je veux faire passer aujourd’hui.

Avec mon gouvernement, nous avons engagé cette bataille. Nous avons donné des moyens sans précédent dans leur progression depuis 5 ans au Ministère de l'environnement. J’ai la volonté de poursuivre en proposant au pays et aux différents acteurs du pays, un contrat écologique.

L'ENVIRONNEMENT EST D'ABORD UN ENJEU DE JUSTICE SOCIALE DANS LA VIE QUOTIDIENNE

La droite nous donne aujourd'hui des leçons, mais elle a symbolisé le règne du " tout voiture ", favorisé une agriculture productiviste.

Le bilan de la gauche plurielle, lui, montre que nous avons traité cette question sérieusement : la pollution de l'air dans les villes a sensiblement diminué, grâce notamment à de nouvelles politiques de circulation ; la responsabilité de chaque acteur a été définie en ce qui concerne la gestion des déchets, la maîtrise de l'énergie a été relancée, la recherche d’énergies renouvelables pour diversifier notre politique énergétique a été engagée, le développement des transports collectifs accéléré, la priorité au rail enfin amorcée.

Cette lutte pour l’amélioration de la vie quotidienne doit être approfondie dans des domaines essentiels comme :
 la lutte contre le bruit ;
 le soutien aux collectivités locales pour le doublement de l’équipement en transports collectifs ;
 l'amélioration de la qualité de l'eau potable ;
 la préservation de nos paysages, parmi les plus beaux d'Europe, et de leur biodiversité ;
  j’engagerai le gouvernement, au lendemain de l’élection, si les Français me font confiance, dans une loi-cadre sur la gestion durable de notre patrimoine naturel.

L'ENVIRONNEMENT EST ENSUITE UNE CHANCE POUR LA DÉMOCRATIE

Depuis 10 ans, la conscience environnementale chez nos concitoyens a considérablement évolué. Ceux-ci sont conscients de leurs responsabilités et les collectivités locales mènent désormais des politiques dynamiques. Je veux mettre l'environnement au cœur de notre culture politique, ce qui passe aussi par l'éducation, dès l'école, d'une véritable citoyenneté écologique.

Pour le développement des énergies renouvelables, la protection de la nature, la gestion des déchets et la pollution de l'air, le cadre décentralisé est le plus efficace. C'est pourquoi je propose la mise en œuvre dans l'année 2003 d'Assises locales du développement durable, afin de fonder des partenariats écologiques avec l'Etat.

Je veux mettre l'environnement au cœur de nos choix collectifs et cela implique d'associer davantage nos concitoyens à la prise de décision et aux grands débats qui doivent être conduit : multiplication des conférences des citoyens du type de celle que nous avons mené en ce qui concerne les OGM, leurs risques, leur potentialité, leur contrôle, leur limitation, le moratoire, dans quels cas on peut prendre des décisions, une information transparente systématique sur tous ces problèmes et des consultations plus nombreuses de nos concitoyens avant les prises de décisions, notamment pour les implantations de grands équipements, par exemple.

Dans le domaine des risques industriels, la catastrophe de Toulouse montre l'urgence qu'il y a à bâtir un plan de prévention des risques technologiques. Ici en Alsace, vous connaissez le problème car il y a des sites Seveso, vous avez engagé un premier débat public à l'automne dernier. Il faudra très rapidement s'attaquer aux zones les plus sensibles et c’est pourquoi après de larges concertations conduites notamment par le ministre de l’Environnement, Yves Cochet, un projet de loi sur la prévention des risques industriels a été examiné en Conseil des Ministres au début de l’année 2002.

Il faut réduire le risque dans la lutte contre l’effet de serre et cela sera pour moi comme président de la République dans les instances internationales une priorité absolument majeure. Cela suppose un effort accru de maîtrise de l’énergie et le développement des énergies renouvelables. Cela passe sans doute en partie par des solutions européennes et notamment par le recours à l’écotaxe, le niveau européen étant sans doute le plus approprié pour ne pas mettre en cause la compétitivité des entreprises dans tel ou tel pays d’Europe par rapport à d’autres ;

Les transports de marchandises réclament aussi des solutions européennes. Je souhaiterai lancer dès 2002 une initiative européenne sur le transport de marchandises, qui dépasse le cadre du simple franchissement des frontières. Puisque je parle de transport, je voudrais confirmer qu’avec moi, le TGV Rhin-Rhône « poursuivra » sa route.

Au-delà du projet de loi sur la transparence nucléaire - le 1er en France adopté depuis 40 ans ! - les choix énergétiques et notamment la place à réserver à l'énergie nucléaire doivent faire l’objet d'un débat national, public et parlementaire, qui permette d'évaluer de manière transparente et contradictoire les coûts économiques, les risques et les impacts en matière d'environnement de chaque option énergétique. En ce qui concerne le nucléaire, chacun connaît mon opinion. Ce débat n'aura de portée concrète qu'au moment où se posera le problème de renouvellement ou non du parc actuel de centrales nucléaires. Le nucléaire représente 75 % de notre production d’électricité aujourd’hui. En tout état de cause le " tout nucléaire " ne correspond plus à la situation actuelle. Il faudra faire au cours du quinquennat un effort nouveau et massif en matière de maîtrise de l'énergie et d'énergies renouvelables.

Le principe de précaution doit guider nos décisions, pour les OGM comme pour le reste. Tant que des conditions claires de traçabilité et de transparence de la filière ne sont pas assurées, je reste favorable au moratoire sur les nouvelles autorisations de production de mise en culture d’OGM ; la recherche fondamentale est utile, elle doit se conduire mais elle doit se faire en toute transparence.

L'ENVIRONNEMENT EST ENFIN UN IMPERATIF DE SOLIDARITE INTERNATIONALE

Nous savons tous aujourd'hui que la planète est en danger. Jamais cela ne s’est produit. Nous avons cru pendant quelques décennies que cela pouvait seulement résulter de catastrophes nucléaires dans le cadre de guerre nucléaire pendant la période de la guerre froide et de l’équilibre de la terreur.

Ces dangers ne sont pas totalement écartés, mais la révélation des deux dernières décennies, peut-être presque de la dernière décennie, c’est que notre planète pourrait être menacée non pas d’une catastrophe thermo-nucléaire mais d’un processus insidieux mettant progressivement en cause et peut-être de façon irréversible les conditions dans lesquelles les êtres humains pourraient vivre effectivement, non pas les cent prochaines années ou les deux cents prochaines années mais les cinq cents, les mille prochaines années. La Renaissance, c’est cinq siècles ; la philosophie des Lumières, c’est plus de deux siècles ; la révolution industrielle, c’est plus d’un siècle et donc il faut que nous soyons capables certes d’agir pour transformer nos propres vies, certes agir pour changer le sort de nos propres enfants, de nos petits-enfants, certes pour agir autour de nous partout sur la planète pour réduire les inégalités et les injustices, comme nous avons vocation à le faire dans notre propre pays, en France mais il faut aussi que nous soyons conscients que l’histoire de l’humanité va se poursuivre longuement après nous, sauf si le risque majeur que cette aventure humaine exceptionnelle se poursuive était encourue par le développement industriel, ses conséquences et notamment par l’effet de serre. Protéger l'environnement implique donc une action collective internationale et la lutte contre la pauvreté, contre le sous-développement que nous devons conduire doit absolument aller de pair avec la préservation de l'environnement.

C'est pourquoi je défends la création d'une organisation internationale de l'environnement, son objectif étant de regrouper toutes les conventions environnementales afin qu’elles soient dotées d'instruments communs en matière d'évaluation, de surveillance et de règlements des différends. Si je suis élu président de la République, j’ai bien l’intention de poser ce type de problème dès le sommet de Johannesburg qui doit avoir lieu en Septembre et qui va être un sommet d’une importance majeure.

Nous devons aussi organiser la prise en compte des normes environnementales au sein même des institutions économiques internationales qui existent et notamment au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce qui règle les différends commerciaux mais qui le fait sans se préoccuper des normes sociales comme aussi d’ailleurs des normes environnementales.


Nous sommes à l'aube d'un siècle majeur. Le siècle que nous avons terminé a été le siècle de tragédies, le siècle de deux guerres mondiales, le siècle du nazisme et du fascisme, de l’Holocauste, le siècle d’une révolution qui s’est transformé en un totalitarisme, qui a secrété lui-même son propre système des camps avec le Goulag.

En même temps ce siècle a été celui d’un progrès scientifique et culturel fabuleux, a été le siècle pendant lequel au moins dans les pays développés les inégalités ses sont réduites ou en tout cas les inégalités se s’étant pas suffisamment réduites, l’accès aux biens matériels de la masse de la population - on se souvient des conditions dans lesquelles vivaient ici les ouvriers et les ouvrières dans les filatures, les enfants et encore même il y a 30 ou 40 ans, comment vivaient nos parents avant que le bien-être matériel se répande dans la population -, cela a été le siècle de la décolonisation, de l’émancipation des peuples qui étaient sous le joug des grandes puissances coloniales ; cela a été le siècle où après des convulsions, des retours en arrière notamment en Amérique latine, la démocratie a progressé y compris dans un certain nombre de pays du Tiers-Monde ; c’est un siècle qui a eu aussi ses promesses.

Nous ne savons pas bien sûr ce que sera le XXIème siècle, les plus jeunes ici qui m’accueillaient tout à l’heure vont le vivre entièrement. Un enfant sur deux qui naît aujourd’hui sera centenaire. J’aurai pu dire aussi l’allongement de l’espérance de vie avec la révolution sanitaire est aussi une révolution de ce siècle. Balzac écrivait un roman qui s’appelait « La femme de 30 ans » et elle était encore belle sans doute telle qu’on la lit entre les pages mais sa beauté n’était plus qu’une nostalgie. Maintenant, ce sont les femmes de soixante qui sont superbes ! On était vieillard à quarante ans ; maintenant à soixante-dix ans, on est superbe, on le sait bien ! Beaucoup de choses ont changé dans ce siècle. Un certain nombre d’entre nous essaieront d’en vivre le plus grand nombre d’années mais… Il va y avoir des défis formidables.

Les défis du développement, de la pauvreté de masse, des inégalités, défis du fanatisme, de la violence, de l’intolérance, avec ces conflits qui flambent et que nous devons nous garder d’importer et d’intérioriser dans notre communauté nationale, j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet encore à Bordeaux et déjà à plusieurs reprises. Mais, je pense que si nous faisons des choix lucides, si les grands dirigeants de la planète, si les grandes organisations internationales font les bons choix, pas simplement les choix de court terme, pas simplement les choix guidés par l’intérêt matériel, pas simplement les choix guidés par le confort des habitudes mais des grands choix à long terme qui soient clairs, qui soient adaptés aux besoins de l’humanité, et grâce aux progrès scientifiques fabuleux qui vont être faits, notamment dans le domaine de la biologie, je pense que l’on peut faire de ce siècle un siècle de progrès. Mais il va falloir naturellement préserver ce patrimoine naturel qui est le nôtre. En lançant des Assises locales, en refondant la législation sur la gestion durable de notre patrimoine, en approfondissant la démocratie environnementale, en portant ces problèmes à l’échelle de la planète, je crois que l’on peut faire ce qui est mon objectif, que l’écologie devienne partie intégrante de toutes les politiques publiques dans notre pays mais aussi à l’échelle européenne et internationale.

Je suis persuadé que les deux grands chantiers de la lutte contre la pauvreté et de la vigilance environnementale sont parmi les plus importants des prochaines années. Ils doivent rassembler nos concitoyens autour de la grande ambition d'un progrès réel, un progrès durable, économe des ressources, rompant avec le productivisme. C’est l’ambition de la gauche. C'est un défi : les majorités sont souvent difficiles à rassembler sur ces sujets et c’est pourquoi notre société qui donne trop peu la parole aux exclus, qui ne peut pas entendre les générations futures parce que non présentes à nous, elles sont encore muettes et donc il faut entendre par avance la parole qu’elles tiendront demain, mais qu’elles tiendront trop tard si nous n’avons pas été capables de l’intérioriser, de la pressentir, d’en avoir la préséance : mais c'est un grand dessein que de penser à tous aujourd’hui, par tout en France, et c’est pourquoi vous le savez, je veux la justice sociale, partout à l’échelle internationale et c’est pourquoi je veux la régulation de cette globalisation libérale, mais pour tous aussi demain, c’est-à-dire en pensant à ceux qui vont nous succéder sur cette terre.

Parce que je veux une France plus juste, plus solidaire, une France qui innove et protège, une France ouverte sur le monde et qui garde son identité propre, sa culture, une partie de ses traditions, une partie de ce qui fait que nous sommes Français sans chauvinisme mais avec une identité et une originalité particulière que nous avons simplement envie de confronter aux autres, hors de tout nationalisme, comme des nations et des peuples fraternels. C’est pourquoi je pense que le développement doit s'attacher non seulement au rythme de la croissance mais à la qualité de la croissance qui va se fonder de plus en plus sur l'innovation créativité humaine, ce qui implique encore un effort majeur en faveur de l’éducation, de la recherche, de la culture qui sont les traditions de la gauche alors qu’on sait qu’à chaque fois que la droite est au pouvoir la culture, l’éducation et la recherche sont sacrifiées par elle. Ce sont des enjeux clairs de cette élection présidentielle, si l’on veut bien ne pas simplement se laisser emporter par le thème lancinant de l’insécurité que nous affrontons par ailleurs plus sérieusement que beaucoup d’autres.

Voilà un certain nombre d’enjeux de cette élection présidentielle : Justice – Démocratie pour notre pays comme pour le Monde. Cela suppose naturellement une volonté de l’Etat. Cela suppose une attention aux grands problèmes. Cela suppose de la sympathie véritable pour les souffrances qui existent encore au quotidien.

Ce projet, j’ai envie de le porter. Je suis prêt à le faire. Les cinq ans que j’ai passé à la tête du gouvernement, à m’occuper chaque jour de chacun des problèmes du pays, à chacun des problèmes des Français m’y ont préparé.

J’ai besoin de vous, de vous tous pour m’aider d’une part à franchir dans de bonnes conditions pour créer une dynamique l’étape du premier tour et puis ensuite pour gagner le 5 Mai.

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