Le gouvernement n'a pas écouté sa base


Entretien avec André Laignel, secrétaire général de l'AMF (Association des maires de France), paru dans Le Figaro daté du 16 novembre 2004.
Propos recueillis par Pascale Sauvage


 

Quel est l'état d'esprit des maires à propos de la deuxième phase de la décentralisation ?
Il n'est pas exagéré de dire que nous sommes passés de l'espérance d'une véritable deuxième étape de la décentralisation à une déception certaine, et, pour beaucoup de maires, à une inquiétude profonde. On nous annonçait de la clarification et de la simplification ; au lieu de quoi nous croulons sous des textes qui compliquent notre situation. Certains textes sont même dangereux, comme la loi organique sur l'autonomie financière des collectivités locales, qui dans les faits supprime la liberté de nos collectivités de lever l'impôt.

Par quel mécanisme ?
La loi autorise maintenant l'Etat à remplacer un impôt qui pouvait être décidé localement par une dotation que les collectivités locales ne pourront ni moduler ni rendre plus juste, puisqu'elles ne pourront pas en modifier les taux. La demande unanime des élus est de garder le pouvoir de voter le taux ou l'assiette de leurs ressources fiscales, voire les deux, ce qui est la condition de leur liberté. D'où l'étonnement douloureux d'une immense majorité des maires à l'annonce de la suppression, sans dialogue préalable, de la taxe professionnelle, puis de la taxe sur le foncier non bâti.

Allez-vous jusqu'à contester la poursuite d'une décentralisation que vous réclamiez vigoureusement ?
Au niveau des communes, il n'y a aucune décentralisation réelle, hormis la possibilité de donner aux intercommunalités la gestion des crédits affectés au logement. En fait, les communes ne disposent d'aucune compétence nouvelle, alors que, d'un autre côté, leurs libertés sont réduites. D'où le thème de notre congrès : « Quels moyens pour quelle décentralisation ? »

Pourtant le gouvernement dispose de nombreux relais avec les maires UMP qui le soutiennent. Comment a-t-il pu mal apprécier le contenu de la décentralisation ?
La dernière loi de décentralisation, «Libertés et responsabilités locales», n'a pu être adoptée qu'avec le recours à l'article 49-3, puisque la propre majorité de Jean-Pierre Raffarin n'y était pas favorable. Le gouvernement n'a pas écouté sa base, la réponse est là.

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