Si je m'étais trompé Jospin serait président

Jérôme Lambert



Entretien avec Jérôme Lambert, député de Charente, paru dans le quotidien Sud Ouest daté du mardi 6 mai 2003
Propos recueillis par Patrick Guilloton
 

C'est un coup de sang ou une décision mûrement réfléchie qui a dicté votre choix en faveur du NPS ?
C'est un vote de refus, d'opposition, de protestation. Parce que je ressens un malaise depuis des mois, et cela, bien avant le 21 avril. Un malaise par rapport à l'action des socialistes quand ils sont au pouvoir, quant à leur comportement, à certains choix politiques. Pendant toute la période où nous avons été au gouvernement, j'ai beaucoup écouté les militants portant des critiques souvent justifiées, et j'en ai tiré les conclusions, renforcées par le résultat des présidentielles, loin d'être brillant. Jospin a fait 16 %, on entend quantité d'explications, on dit : c'est à cause de Chevènement, c'est à cause de Taubira. Non ; c'est parce que les gens n'ont pas voté pour lui ou qu'ils se sont abstenus, n'étant pas d'accord avec la politique menée, avec celle qu'il prônait.

Quand, sur le terrain je faisais campagne, je ressentais un décalage entre ce que j'entendais et les argumentaires que je recevais chaque matin et qui partaient à la corbeille dans les trente secondes qui suivaient. Si j'avais dit ce qu'on me demandait de dire, si je m'étais exprimé comme on me conseillait de le faire, je pense que ça aurait été pire et que je ne serais plus député ! C'est la conséquence de tout ce malaise qui m'a rapproché d'Arnaud Montebourg, d'autant plus qu'avec lui j'avais réclamé que Chirac puisse être entendu par la chambre d'instruction de la Haute Cour et que je n'ai pas oublié la façon dont le parti a ressenti cette démarche, la façon dont on nous a demandé, plus ou moins gentiment, de nous calmer.

Il n'y a plus de débat au sein du PS ?
Sur maintes questions sur lesquelles je n'étais pas d'accord, les institutions, l'inversion du calendrier, même le quinquennat, je n'ai pas eu le sentiment d'un débat, je n'ai pas eu l'impression d'être entendu. Et, au bout du compte, ras-le-bol... vu le résultat. Parce que si je m'étais trompé, Jospin serait président. Donc, à l'occasion de ce congrès, pour la première fois, je n'avais pas envie de dire à la direction sortante : « Mes chers amis au demeurant, ce sont tous des amis, je suis très content de vous, on a fait du bon travail. » Autant je crois à la capacité de chaque dirigeant de me dire entre quatre yeux : « OK, j'ai compris, on va changer ceci ou cela »... Hélas, quand ils se retrouvent à vingt-cinq ou quarante autour d'une table pour décider de ce que sera la politique du PS, là je crois que plus rien ne peut changer : c'est figé. Quand on ne bouscule pas, il ne reste plus que le rapport de forces. Voilà pourquoi j'ai voté pour cette motion... même si elle contient des points avec lesquels je suis en désaccord.

Et au lendemain du rendez-vous de Dijon, quelle sera votre attitude ?
Pour le choix entre les motions, mon vote consiste à bousculer le jeu de ce parti, qui en a grand besoin. Au congrès, je n'irai pas. Les discussions de couloir me fatiguent. J'ai, à ce moment-là, des manifestations locales avec des gens au contact desquels je me sentirai mieux qu'à Dijon. Ce qui est certain, c'est qu'au lendemain du congrès, le jour où il faudra voter pour un premier secrétaire, si la motion de François Hollande est en tête et s'il est candidat, j'appellerai à ce qu'on vote pour lui, parce qu'il conviendra de se rassembler.

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