Oui au mariage pour les couples homosexuels !

Roger Madec
Point de vue de Roger Madec, maire du XIXème arrondissement de Paris, paru dans sa lettre d'information Réciproque datée du 15 avril 2004


 
L'institution du mariage a considérablement évolué au fil du temps. Nous avons assisté à la rupture du lien obligé entre mariage et filiation. L'intérêt de la société envers le mariage réside désormais moins dans la protection de la lignée que dans le soutien aux formes d'organisation familiale qui contribuent à des solidarités entre les personnes, pour le meilleur et pour le pire.

Ce critère, me semble-t-il, est, avec la reconnaissance du droit à l'égalité, le plus important pour juger du bien fondé d'étendre aux conjoints de même sexe le droit au mariage.

Si, pour la société, l'important est de consolider les formes durables d'organisation familiale, l'extension aux homosexuels du droit au mariage est bonne et favorise la durée des couples, la solidité des liens sociaux...

Les avantages du mariage valent pour les unions homosexuelles autant que pour les autres et à long terme continuer à militer pour une forme distincte d'union conjugale perpétue la ségrégation, le communautarisme et la ghettoïsation. Et cela vaut aussi pour l'éducation des enfants. Le principal argument défavorable au mariage homosexuel est la contradiction qui existe entre l'homosexualité et la procréation. Cette contradiction tombe sous le sens, en effet. Mais les statistiques montrent que même les couples hétérosexuels mariés ne se forment plus nécessairement pour avoir des enfants.

Je suis donc favorable aux mariages homosexuels, pour les gays et les lesbiennes et à une loi qui les reconnaîtrait, mais je persiste à penser que d'autres priorités nous interpellent :

D'abord une lutte efficace contre l'homophobie.
Bien que l'homophobie ait toujours existé, ce n'est que tout récemment que l'on a commencé à lui donner un nom, et surtout, à réaliser qu'elle constituait une attitude inacceptable dans une société civilisée, au même titre que le sexisme, le racisme ou la xénophobie.

Et la lutte doit continuer car nous sommes loin d'avoir vaincu l'homophobie.

Car l'agression homophobe dont a été victime Sébastien Nouchet - aspergé d'un liquide inflammable le 16 janvier dernier et brûlé par ses agresseurs - puis il y a quelques semaines, à Villetaneuse, la haine homophobe dont a été victime David, 19 ans, agressé de manière sadique par un groupe de jeunes qui avaient envie de " rigoler ", nous montre à quel point la lutte contre l'homophobie est nécessaire.

Souvenons-nous aussi de 1999. Des quolibets, très souvent homophobes et trop souvent douteux, proférés par cette droite durant le débat à l'Assemblée nationale sur le PACS. Ce pacte, défendu courageusement par Patrick Bloche et quelques autres hélas trop peu nombreux, qui hier suscitait le doute sur son " utilité " se révèle aujourd'hui un formidable succès.

Au PACS, né dans un esprit d'égalité entre homosexuels et hétérosexuels, s'ajoute aujourd'hui l'amendement sur la pénalisation de l'homophobie proposé par la droite. C'est mieux, mais elle s'y est inscrite dans la logique répressive qui est la sienne en ce moment. Le combat pour l'évolution des mentalités n'est donc pas fini.

Enfin, il faut avancer sur la question de la parentalité homosexuelle et la reconnaissance du droit à l'adoption. Ce débat, esquivé par le gouvernement Jospin, qui a cherché, à l'époque, à contourner l'obstacle en affirmant haut et fort que le PACS n'était pas l'ouverture vers l'adoption, doit au sein du PS progresser.

Devons-nous traiter cette question sociétale, avec les mêmes lenteurs et les mêmes a priori que nous avons connus à propos de la reconnaissance du couple homosexuel ? Il est urgent de penser ce débat de société qui nous dépasse déjà : le développement de la co-parentalité est une réalité qui ne peut laisser indifférent les socialistes. La Suède, l'Angleterre, les Pays-Bas ont évolué sur cette question, pourquoi pas nous ?

Personne ne peut dire aujourd'hui que des enfants élevés par des couples homosexuel(le)s sont menacés dans leur développement futur et l'histoire de la paternité et de la maternité ne se résume pas aux vieux concepts judéo-chrétiens de l'indispensable complémentarité homme-femme.

Aujourd'hui la société aide les couples hétérosexuels à avoir des enfants quand ils sont confrontés à des problèmes de stérilité, pourquoi n'aiderait-elle pas les homosexuel(le)s à obtenir, de l'État, la solidarité pour casser cette discrimination qui leur refuse le droit d'être père ou mère au prétexte d'une sexualité qui par définition ne leur permet pas d'avoir d'enfant.

Le Parti socialiste doit aujourd'hui, sur ces questions, être audacieux.
Alors camarades, osons !




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