Une ville pour tous,
un territoire partagé,
une république sociale

Jean-Yves Mano

 Contribution thématique au congrès national du Mans présentée par Jean-Yves Mano, adjoint au Maire de Paris chargé du Logement (juillet 2005).

 

« Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ;
c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe,
et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains,
aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques
 »
(Jean Jaurès) 1


Le Parti socialiste s’est toujours fixé comme priorité essentielle, au-delà des querelles qui l’animent, le combat contre «  la damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers » (Victor Hugo) 2. Le nouvel enfer, ce n’est plus les autres, ce n’est plus l’ennemi de l’extérieur, c’est la dégradation progressive des conditions de vie quotidienne des Françaises et des Français. C’est également l’abandon de franges entières du territoire à une pauvreté indigne de notre République. Parmi les facteurs de cette dépréciation se place prioritairement la crainte suscitée par les questions liées au logement. L’incapacité de certaines collectivités locales à assurer le droit au logement pour l’ensemble des citoyens a des conséquences graves. Elle renforce jour après jour le ressentiment et le constat que la société se creuse, se scinde. Ce constat pose la question de la sauvegarde de l’unité nationale. Il rend nécessaire la prise de mesures de salut public urgentes.

Il est aujourd’hui convenu dans tout discours politique de céder à la tentante facilité d’évoquer les termes de « mixité sociale » et de « droit au logement ». Or, il est nécessaire de constater le décalage existant entre les promesses du gouvernement en termes de réaménagement urbain et de construction de logements sociaux, et la réalité des chiffres budgétaires et des réalisations concrètes. La mixité sociale et le droit au logement pour chacun ne doivent pas rester à l’état de pieuses volontés ou de concepts théoriques mais s’incarner dans la réalité quotidienne des citoyens. Alors que plus de 7 millions de personnes connaissent une situation sociale proche de la pauvreté, dont un million d'enfants, ce manque crucial, endémique, participe de la précarisation de franges entières de la population française. Sourds aux multiples appels des opposants socialistes, désireux de mettre en place un réel « Plan Marshall » du logement, les dirigeants actuels demeurent convaincus que la main invisible du marché doit, seule, continuer de régenter ce domaine.

Absent de la Constitution qui se réfère dans son préambule à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et au préambule de la Constitution de 1946, le droit à l’habitat est apparu pour la première fois dans un texte législatif de 1982. Cette loi du 22 juin 1982 relative aux « droits et obligations des bailleurs » disposait dans son article 1er que « le droit à l’habitat est un droit fondamental : il s’exerce dans le cadre des lois qui le régissent (…) Ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d’habitation et de sa localisation grâce au maintien et au développement d’un secteur locatif et d’un secteur d’accession à la propriété ouvert à toutes les catégories sociales… »3. Ce sont bien les socialistes français qui ont placé cette idée juste et bonne sur le fronton de leur « vieille maison » !

Se dessine ici la différence viscérale sur laquelle le Parti socialiste, fidèle à sa tradition universaliste et sociale, doit défendre ses positions : le logement doit redevenir l’outil principal, avec le travail, de la cohésion nationale. Il doit être défendu comme le bien le plus cher auquel devrait avoir droit tout citoyen, quels que soient son capital économique, ses croyances ou ses choix personnels. Il s’agit non seulement d’une mission d’intérêt national mais également d’une priorité éthique.

Comment demander à un citoyen de prendre part au débat démocratique, sereinement, de se pencher sur les questions qui fondent son appartenance à la communauté, alors qu’il ne sait comment se loger ou loger les siens ? comment défendre la belle idée républicaine du contrat social sans assurer le minimum de subsistance aux français ? le logement n’est pas un bien de consommation et de spéculation comme les autres, il est avant tout la condition minimale et indispensable d’exercice des droits fondamentaux. Du fait des difficultés économiques rencontrées par les citoyens dans leur vie quotidienne, tant du point de vue de la situation du marché du travail que de celle de l’évolution des prix du foncier et des loyers, le parcours résidentiel est aujourd’hui rompu. Le logement devient l’élément clé des politiques d’intégration dans la cité.

Pierre Mendes-France répétait que « gouverner c’est choisir ». Le Parti socialiste choisit de placer le droit au logement parmi ses priorités fondamentales. Et de donner à la Nation les moyens budgétaires nécessaires à un développement sans précédent, non seulement de la construction sociale, mais également de la batterie d’actions la plus vaste pour permettre à tout citoyen faisant vivre sa ville d’y demeurer, d’y vivre et de s’y épanouir.


Un constat alarmant,
un besoin urgent de réinvestissement public

 
Les travaux menés par les sociologues et les constats dressés par les professionnels locaux de l’action sociale convergent vers un même constat : le territoire de la République, unitaire et solidaire du fait de la Constitution et de la loi, est grevé d’inégalités urbaines fondant non seulement de profondes injustices sociales mais également un fort ressentiment contre les pouvoirs publics et un renforcement des réflexes identitaires de classe ou de groupe.

Ces faits n’ont qu’une seule cause : le désinvestissent progressif des pouvoirs publics de ces territoires, majoritairement urbains et cumulant les stigmates de la souffrance : exclusion, chômage, pauvreté, échec scolaire… A ces éléments s’ajoute un fait qui les renforce : le manque total de réflexion de fond sur l’importance du logement dans ces périmètres. Le mouvement de décentralisation, souhaitable, est en fait le socle d’un renforcement du chacun pour soi local. Et à l’empereur de s’en laver les mains ! Le constat est accablant : 100 000 demandes d’expulsion sont formulées chaque année dont un tiers dans les HLM ; 7 500 aboutissent annuellement dont 1 500 dans les HLM. Soit une augmentation de 73 % depuis 1973 ! 50 000 logements, en moyenne, sont créés chaque année alors même qu’il en faudrait au minimum 80 000. Un déficit de 600 000 logements est recensé en France 4 !

Les sondages montrent que presque un Français sur deux, à raison, estime que les difficultés liées au logement s’aggravent. Cette crise touche prioritairement les plus démunis (près de 3,5 millions de personnes) : 86 500 personnes sans domicile fixe (SDF) sont recensées officiellement, 200 000 personnes sont logées chez des proches, 500 000 vivent en habitat temporaire ou provisoire, 1 300 000 ont un logement dénué de confort, 1 300 000 ménages connaissent un surpeuplement critique.

Enfin, 30 % des personnes accueillies dans des centres d’hébergement d’urgence ont un emploi ou suivent une formation. Au regard de l’évolution conjuguée des prix de l’immobilier et de l’instabilité du marché de l’emploi, les couches intermédiaires de la population française sont également touchées par cette crise.

A ceci s’ajoute une paupérisation massive des habitants des HLM : 21 % ont un niveau de vie inférieur à 7 300 euros par an, la proportion de personnes à bas revenu dans ce parc ne cesse d’augmenter (32,1 % contre 24,3 % dans le secteur privé) ; les chiffres se sont inversés depuis 1998. Enfin, les habitations à très bas loyer disparaissent rapidement. C’est bien à un mouvement de précarisation massive que nous assistons aujourd’hui. Il ne s’agit plus d’une simple fracture sociale mais d’un gouffre social ! Face à cette situation, le Gouvernement a trouvé une solution : la baisse massive des crédits dévolus au logement et la réduction de l’aide publique pour la réalisation de chaque logement social !

A cela s’ajoute la volonté répétée de vendre une bonne partie des logements sociaux : Gilles de Robien proposait la vente annuelle de 40 000 d’entre eux ! De plus, ce même ministre a donné son nom à un niveau de loyers (18 € /m_) pénalisant l’accession locative aux plus pauvres. Enfin, l’Etat ne verse pas aux collectivités locales les sommes qu’il leur doit pour le financement des opérations de logements sociaux.

Le plan Borloo propose sur 5 ans la réhabilitation de 200 000 logements, la construction de 500 000 ainsi que la destruction/reconstruction de 200 000 autres logements. Alors même que le besoin en construction neuve est estimé à 120 000 logements sociaux par an 5, l’année 2003 a vu la réalisation de 35 000 unités neuves, soit l’un des pires chiffres recensés. L’année 2004 a permis de recenser autour de 40 000 logements. Ces chiffres ne sont naturellement pas à la hauteur des enjeux et attestent bien du cynisme du Gouvernement. Ces baisses constantes du budget dévolu au logement rendent impossible la réalisation quinquennale prévue par le plan BORLOO de 500 000 logements sociaux, soit 100 000 par an. L’actuelle logique gouvernementale est relativement simple à saisir : tous les éléments financiers recensés permettent de constater un retrait progressif de l’action publique dans le domaine de la réalisation de logements sociaux. Alors que de profondes logiques de ségrégation sont à l’œuvre 6, la puissance publique ne réagit pas.


Contre la violence sociale,
le logement et le développement urbain,
des armes pour renforcer la solidarité républicaine

 
La loi SRU 7 disposait l’obligation pour chaque commune, à partir d’une certaine taille, de comprendre 20 % de logements sociaux sur son territoire en 20 ans ou de payer une amende. Est il normal d’offrir à une ville la possibilité de ne pas réaliser de logements sociaux ? Ce dispositif législatif doit être renforcé en profondeur : le mécanisme d’incitation doit être renforcé, et l’amende à payer réévaluée au prorata des ressources municipales.

Les documents d’urbanisme comme les Programmes Locaux de l’Habitat (PLH), les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) ou les Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) doivent être redéfinis, essentiellement dans la partie proposant des axes d’actions pour l’avenir. Les dispositions du Code de l’Urbanisme permettant aux communes de fixer l’obligation de réalisation d’un quota de logements sociaux dans tout nouveau programme neuf, d’instaurer des zones où cette obligation s’appliquera au regard des équilibres locaux 8 ou de grever des parcelles d’une servitude pour la réalisation de logements ou d’équipements publics 9 doivent être systématiquement mobilisées.

Dans cette perspective, avec des règles clairement exposées, les promoteurs immobiliers privés ont évidemment un rôle central à jouer. Acceptant les règles du jeu, ils les intègrent dans leur programme et participent du développement de la Ville, au regard des normes imposées par les collectivités.

Les règles précisant les hauteurs de bâtiments, les gabarits ou les Coefficients d’Occupation des Sols (COS) devront être pensées au regard des nouveaux besoins recensés par les collectivités. Le concept de tours de grande hauteur ne doit pas être assimilé à un relent du passé. Leur réalisation pourra faire l’objet de concours ambitieux faisant émerger de nouveaux architectes de qualité. Il est important que la qualité architecturale soit proposée à tous les types de populations, dans tous les quartiers. De nouveaux modes d’habiter et d’usage existent aujourd’hui ; il est nécessaire de les prendre en compte pour la réalisation des logements.

Les normes de développement durable et de Haute Qualité Environnementale (HQE) sont impératives. Elles fondent l’avenir serein des bâtiments mais surtout de leurs habitants. Leur respect est essentiel à l’idée que le Parti socialiste, soucieux du long terme, se fait du vivre ensemble. Elles ne doivent plus être réservées aux programmations bénéficiant de financements privés. Elles doivent être généralisées à l’ensemble de la production sociale.

L’augmentation du nombre de logements sociaux dans chaque commune, à la lumière des équilibres existants, doit être affirmée comme une priorité absolue. Il importe de rééquilibrer les efforts consentis par les communes. C’est au niveau régional que doivent être anticipées ces mesures. Les frontières municipales doivent être dépassées au profit de bassins d’habitat intercommunaux. A cette fin, la création d’établissements publics fonciers devra être favorisée par des incitations financières conséquentes. Ces structures auront pour mission première le recherche des potentialités foncières disponibles et leur aménagement, en harmonie avec les besoins recensés localement. Elles permettront une position de force pour la négociation avec l’Etat, propriétaires de parcelles et de biens dont la gestion doit revenir aux collectivités locales. La signature de chartes de coopération et de partenariat entre communes doit être encouragée. Cela permet d’accentuer le développement de l’intercommunalité informelle. Ces documents contractuels stipulent les mesures à anticiper pour le développement harmonieux de l’aménagement urbain et foncier. Les programmations au titre du logement et de l’habitat sont concernées au premier chef. Les bailleurs sociaux, professionnels de l’aménagement, doivent être associés plus en amont dans ces démarches.

La programmation en logements et équipements publics sociaux devra faire l’objet d’une réflexion concertée entre représentants des différentes collectivités territoriales concernées. Afin d’approfondir le mouvement de décentralisation, les conventions de délégation de l’Etat en direction de ces collectivités devront être développées. Dans ce cadre, c’est également la question des modalités d’attribution des logements sociaux qui doit être posée. L’Etat se désengage progressivement de ses responsabilités en déléguant aux collectivités locales ses droits de désignation. Il appartient aux responsables politiques de promouvoir et d’exercer la transparence la plus absolue dans le domaine de l’attribution des logements. Chaque demandeur doit voir sa demande bénéficier du même traitement et de la même attention de la part des élus. Il en va non seulement de la crédibilité des dirigeants politiques mais également du respect de l’éthique républicaine.

Les collectivités publiques ne doivent pas être les seules entités concernées par cet effort national. Les entrepreneurs et les travailleurs doivent voir le fruit de leur contribution versé au pot commun de la solidarité nationale. A cet égard, c’est bien le mode de fonctionnement du 1% patronal qui doit être repensé. Au regard des évolutions que rencontrent le monde du travail et de l’entreprise, et de la crise économique et sociale profonde que connaît notre pays, l’on assiste à un renforcement du stigmate entre celui qui travaille et celui qui ne le peut pas.

Dans ce cadre, le dispositif permettant le prélèvement de 0,45 % sur l’activité des entreprises de plus de dix salariés doit être repensé dans la perspective d’un reversement des fruits de la collecte dans le budget global du logement. Ainsi, les personnes privées d’emploi ou travaillant dans une entreprise de moins de dix salariés ne seraient plus pénalisées.

Au niveau budgétaire, un effort sans précédent doit être consenti, non seulement au niveau de la masse financière et nationale globale consacrée au logement, mais également concernant la répartition des aides. Les aides à la personne ne permettent pas de solvabiliser de façon pérenne les citoyens, leur impact est très largement atténué, voire annulé, du fait de la hausse constante des prix de l’immobilier et des loyers. En revanche, les aides à la pierre permettent une baisse de la charge globale des loyers et une pérennisation du logement. Il importe donc que les aides à la pierre soient développées et distribuées de façon plus forte.

Concernant les aides fiscales allouées, 60 % des investissements privés sont supportés par le budget national, sans que ces mesures n’aient pu faire la preuve de leur pertinence et de leur efficacité face à la crise actuelle de l’immobilier en France. Alors que le budget du logement ne cesse de diminuer, il y a lieu aujourd’hui de mesurer l’impact réel des mesures d’aide fiscale en direction des divers investisseurs. Celles-ci, à l’évidence, n’ont pas permis de régler la grave crise du logement que connaît aujourd’hui notre pays.

Le Parti socialiste réaffirme solennellement le besoin pour la cité de s’enrichir des différences sociales et culturelles portées par chacun de ses habitants. A cette fin, le développement du logement social, selon diverses catégories de financement permettant non seulement de favoriser la mixité sociale localement mais également au sein même des immeubles, doit être mobilisé comme force première. La ville doit se donner les moyens de loger de façon pérenne ceux qui la font vivre, ses éboueurs, ses fonctionnaires, ses médecins et avocats, ses chômeurs et ses exclus du système classique de redistribution économique…

Les familles ne doivent plus être exclues des villes, contraintes par l’augmentation constante des prix. Les collectivités doivent pouvoir leur offrir la possibilité d’y demeurer. Des dispositifs d’aide à l’acquisition doivent être développés. La ville doit se donner prioritairement les moyens d’offrir aux plus fragiles (SDF, femmes victimes de violences, travailleurs migrants, personnes malades, personnes âgées et/ou handicapées, demandeurs d’asile, gens du voyage…) les moyens de vivre un parcours résidentiel de qualité et plein d’espoir. Dans cette perspective, les structures d’accueil de type pensions de familles, maisons-relais, centre d’hébergement d’urgence et résidences sociales devront être prioritairement développées. Celles-ci ne doivent plus être programmées au regard des besoins estimés mais au prorata du nombre d’habitants. Cette modification irait dans le sens d’une meilleure justice sociale et d’une plus grande répartition des obligations de solidarité. C’est également en direction des étudiants et des jeunes travailleurs que l’effort national doit se développer. Le nombre de logements prévus et réalisés pour eux est très largement inférieur à ce que notre pays devrait pouvoir leur offrir pour faciliter leur intégration et leur autonomie.

L’accent doit être mis prioritairement sur une action ambitieuse contre le logement insalubre et indécent. Celui-ci est le refuge de la plus grande misère, il permet l’exploitation des plus fragiles et des plus démunis et les expose aux dangers sanitaires les plus grands, non seulement le saturnisme mais surtout la mort en cas d’incendie ou d’effondrement. Une action de tout premier ordre doit être anticipée : la résorption programmée de toutes les poches d’insalubrité urbaine e t l’interdiction formelle de louer des logements ne répondant pas à des normes minimales d’hygiène et de confort. Ces mesures posent naturellement la délicate question du relogement préalable des habitants de ces immeubles, pour partie issus de l’immigration sub-saharienne et maghrébine. C’est dans ces immeubles que la République peut perdre son âme si elle n’intervient pas de toute urgence.

La République française est riche de sa diversité sociologique et culturelle. Elle reconnaît à tous ses citoyens, mais également aux étrangers réguliers présents sur son territoire, le droit à la reconnaissance publique. Elle doit également accorder sa protection aux demandeurs d’asile, particulièrement fragilisés. Les missions sociales visant à la décohabitation progressive des familles polygames, à l’accueil des familles nombreuses ou à la réfection des locaux devront être redéfinies. Enfin, les mécanismes juridiques fondant les procédures d’expulsion ou d’évacuation (Loi Vivien, pénalisation des propriétaires et obligation de relogement…) doivent être repensées dans le sens d’une meilleure efficacité de l’action publique et d’une plus grande justice sociale dans leurs répercussions.

Le développement et l’aménagement urbain doivent être entièrement redéfinis. Le principe de la destruction de logements ne peut être considéré que comme la dernière des solutions. Doivent être privilégiées les missions visant à réhabiliter les logements, à favoriser la mixité sociale par la création de nouveaux programmes permettant de diversifier les peuplements et les fonctions, à l’échelle des quartiers.

Les missions de l’Agence Nationale pour le Renouvellement Urbain (ANRU) 10 ou , de l’Agence Nationale pour l’Amélioration de l’Habitat (ANAH) et de la Foncière Logement doivent impérativement faire l’objet d’une meilleure définition, permettant la réalisation progressive d’une réelle mixité sociale dans les territoires les plus fragilisés. Le logement privé est également concerné par ces missions. La paupérisation progressive des copropriétés les plus fragilisées rend nécessaire une action de premier ordre de la part des pouvoirs publics. Les Opérations Programmées d’Amélioration de l’Habitat (OPAH) doivent être renforcées dans leurs objectifs afin de juguler l’effet pervers qu’elles peuvent provoquer, à savoir l’exclusion des populations les plus modestes des quartiers concernés et la hausse des prix. Dans ce but, leurs conventions doivent être améliorées significativement et disposer précisément l’objectif de mixité sociale par le développement du parc locatif conventionné et le maintien de la diversité sociale.

La problématique des ventes à la découpe et des congés pour vente est devenue pour les locataires privés une véritable épée de Damoclès pesant sur leur avenir et leurs projets personnels. La puissance publique doit se saisir de ces questions et proposer les mesures qui permettent d’assurer à ces personnes une meilleure protection juridique. Comme cela se pratique dans l’Etat de New-York, les pouvoirs publics doivent avoir les moyens de vérifier préalablement les conditions de la vente, au regard des ressources des locataires, et d’autoriser ou d’interdire la procédure de vente. Doit être posée comme condition à la validité de la procédure l’assurance que les locataires les plus fragilisés (personnes âgées par exemple) se verront reconnaître le droit au maintien dans les lieux. Enfin, les ressources conférées aux collectivités locales au nom du droit de préemption doivent prendre en compte des objectifs de rachat des immeubles concernés.

C’est dans cette perspective que l’investissement des partenaires financiers les plus importants (Caisse des Dépôts et Consignations, institutionnels, Foncière…) doit être repensé dans ses priorités, majoritairement en direction du maintien des diverses couches de population au sein de la ville mais également du développement maîtrisé du logement social et des équipements publics.


« Comprendre le réel, viser l’idéal » (Jean Jaurès) :
le logement pour tous, une visée politique socialiste
pour une société plus juste

 
Comprendre le réel nous oblige collectivement à reconnaître que la société française affronte aujourd’hui une situation intenable et porteuse des germes de la dissension nationale pour l’avenir. La crise profonde marquée par l’atonie économique, le creusement préoccupant des inégalités, le chômage persistant et la paupérisation massive de franges entières de sa population oblige la France à anticiper un vaste chantier national digne du « New Deal » de F.D. Roosevelt.
Dans cette perspective, le désinvestissement progressif de l’Etat dans les domaines du logement social et de l’aménagement urbain porte une lourde responsabilité. Viser l’idéal nous permet de définir avec force les axes d’intervention que la Gauche doit affirmer dans son combat contre le cynisme, l’individualisme et le libéralisme sans entraves. Pierre Bourdieu aimait à dire que le monde social lui était supportable tant que sa « faculté d’indignation » demeurait intacte. Le Parti socialiste affirme que sa capacité d’indignation se renforce de jour en jour face à ces inégalités criantes, porteuses de souffrances et de ressentiment.

Le logement pour tous ne doit pas demeurer un concept flou, il doit être la matrice mobilisatrice des interventions publiques à venir. Sans angélisme, cette idée doit être le fer de lance du développement urbain géré par les collectivités publiques, en partenariat avec les professionnels et les associations concernés.

Le Parti socialiste, fidèle à sa tradition, fait de la reconquête des territoires de la République les plus isolés et des populations les plus fragiles un axe majeur de sa politique et de son programme pour les années à venir. Le développement massif du logement social et du réaménagement urbain sera mobilisé comme outil premier de la bataille politique sociale et démocratique à venir. Ces axes d’action doivent devenir les nouveaux piliers de granit de la République, le fondement même de sa philosophie, le ferment qui permet de dresser le nouveau contrat social entre les citoyens
.


1 Jean JAURES, extrait de son Discours à la jeunesse, lycée d’Albi, 1903
2 Victor HUGO : Les Misérables, Tome 1, 2000
3 Avis et rapports du Conseil Economique et Social « Accès au logement : droits et réalités », 2004
4 Rapport de la Fondation Abbé Pierre, janvier 2004
5 Rapport du Conseil Economique et Social, op. cit., 2004.
6 Cf. Eric MAURIN : Le Ghetto français, Enquête sur le Séparatisme social, Seuil, 2004 ; cf. également Stéphane BEAUD et Michel PIALOUX : Violences urbaines, Violence sociale : Genèse des nouvelles Classes dangereuses, Editions Fayard, 2004
7 Loi relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbains (SRU) du 13 décembre 2000, article 55
8 Article L 123-1 du Code de l’Urbanisme
9 Article L 123-2 du Code de l’Urbanisme
10Agence Nationale pour le Renouvellement Urbain (ANRU), créée par la loi du 1er août 2003.


Signataires :

 Patrick Bloche député de Paris, conseiller de Paris, premier secrétaire fédéral  Christophe Caresche député de Paris, adjoint au Maire de Paris chargé de la Prévention, de la Sécurité, de l'Organisation et du Fonctionnement du Conseil de Paris  Jérôme Clerc (Paris 11ème)  Olivier Ferrand délégué national à  l'Europe, adjoint au Maire du 3ème arrondissement de Paris chargé des Finances, du Développement économique, de la communication et de l'Urbanisme  Marie-Pierre de la Gontrie première vice-présidente du conseil régional d'Ile-de-France, adjointe au Maire de Paris chargée de la Démocratie locale et des Relations avec les Associations  Anne Hidalgo vice-présidente du conseil régional d'Ile-de-France, première adjointe au Maire de Paris, chargée de l'Egalité Femme/Homme et du Bureau des Temps  Jean-Yves Mano adjoint au Maire de Paris chargé du Logement  Pierre Moscovici vice-président du Parlement européen, président du mouvement européen  Alain Richard vice-président du Parti socialiste européen, maire de Saint-Ouen l'Aumône (95)  Florence Rognard (Paris 14ème)  Billy Tallec (Paris 16ème)  Marisol Touraine secrétaire nationale à la  Solidarité au Parti socialiste



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