Le NPS n'existe plus



Entretien avec Arnaud Montebourg, député de la Saône-et-Loire, paru dans Journal de Saône-et-Loire daté du 29 novembre 2005
Propos recueillis par Jean-Philippe Chapelon


 

Pour commencer, revenons une semaine en arrière. Pourquoi avez-vous refusé de vous associer à la synthèse au Congrès du Mans, alors que vos partenaires du NPS Vincent Peillon et Henri Emmanuelli y souscrivaient ?
Ce fut un choix de conscience très difficile mais que j'assume totalement. Je n'ai pas voulu sacrifier les positions que je porte depuis mon entrée dans la vie publique. Il y avait bien sûr la question de la VIème République qui faisait l'objet d'un refus obstiné de la part des dirigeants socialistes, VIème République sur laquelle je rappelle que j'ai été élu en 2002 dans ma circonscription de la Bresse et du Val-de-Saône.
Il y avait aussi l'ensemble des propositions que nous faisions pour lutter contre les dégâts de la mondialisation en organisant la protection des salariés et des industries attaquées par la concurrence déloyale du commerce mondial.
Il y avait enfin le beau projet d'embryon de République européenne qui avait pour objectif de mettre enfin de la démocratie dans les choix politiques de l'Union. Toutes ces convictions avaient été forgées par le NPS pour répondre à la profonde crise démocratique et sociale qui mine le pays depuis des années.
Les militants nous avaient confié ce mandat. Je n'ai pas voulu, en conscience, les lâcher pour quelques strapontins et miettes de pouvoir.

Ce refus de prendre en compte votre projet de VIème République constitue un échec personnel.
Je constate que les esprits ne sont pas mûrs et que nous avons là perdu sept ans, car le projet de VIème  République ne sera pas porté en 2007 mais en 2012. Toutefois, cette affaire n'est pas finie. L'UDF de François Bayrou s'apprête à défendre le même projet et d'autres partis de gauche ont décidé de porter également cette idée. Je pense que le Parti socialiste a fait preuve d'aveuglement en refusant d'entendre nos propositions.

Vous avez claqué la porte du NPS dont vous êtes le cofondateur, samedi, lors du Conseil national. Vous vous retrouvez donc seul, avec le risque de la marginalisation.
Je n'ai pas claqué la porte. J'ai constaté le décès du NPS. Ses idées ont été soit abandonnées, soit laminées dans la moulinette de la synthèse. La plupart de ses dirigeants ont abandonné le NPS pour rejoindre les positions de François Hollande, et de surcroît, les militants, qui dans leur quasi-totalité ne voulaient pas de synthèse ont été méprisés. Ce sont tous les idéaux que j'ai portés qui ont été furieusement maltraités par le NPS lui-même. On ne peut donc que constater qu'il n'existe plus.

Allez-vous créer un nouveau courant pour poursuivre votre « travail de rénovation ?
Aujourd'hui, les grandes fédérations qui ont apporté leurs voix me déclarent leur fidélité à notre idéal. J'ai reçu en une semaine 1 300 e-mails de soutien et 590 au cours du dernier week-end. Pour entretenir cette espérance, donner espoir qu'il y a dans le PS une flamme qui veut rénover, renouveler les idées et les projets de la Gauche, nous allons reconstruire un courant qui rassemblera tous les militants, les élus, les parlementaires, les premiers fédéraux qui veulent continuer le combat. Ce nouveau courant devrait voir le jour très rapidement. Notre position est de dire que c'est la société qui doit déboucher vers les partis et non les partis qui doivent tout ordonner. Nous ne sommes pas seuls, nous sommes très nombreux mais surtout nous sommes libres.
Nous sommes en train de reconstituer le NPS historique du Congrès de Dijon, moins Peillon et Emmanuelli, c'est-à-dire à peu près 17 % du parti.

Quid des rapports de force établis dans les fédérations ?
Les fédérations devront se positionner entre le Hollandisme et la poursuite de la rénovation. Nous ne sommes pas en opposition à la synthèse mais nous pensons que ce n'était pas rendre service à notre parti que tous les socialistes sacrifient tout ou partie de leurs convictions pour une unité qui n'était qu'artificielle. La véritable unité, celle qui a un sens, ne pourra se faire que lorsque les primaires internes auront désigné un candidat socialiste unique. Nous serons à ce moment tous unis derrière lui.

Justement, qui peut le mieux incarner l'alternance en 2007 ?
Chacun a pour l'instant son opinion. Nous ferons une sorte de banc d'essai, d'appel d'offres lorsque nous connaîtrons avec exactitude qui sont les candidats définitifs. Entre temps, nous apporterons notre pierre au projet, car les idées se transmettent pas delà les appartenances et les non-appartenances. Nous sommes dans le PS et nous serons dans le débat d'idées. Nous y pèserons de tout notre poids.

Votre retour dans l'union issue de la synthèse est donc totalement exclu ?
La synthèse a sacrifié les idées nouvelles pour un profit qui n'existe pas. La VIème République est la seule idée nouvelle que le PS a eu depuis trois ans et c'est la première qu'on liquide. Est-ce la réponse la plus intelligente à donner aux temps turbulents qui se préparent ?

Beaucoup se sont étonnés que vous ayez abandonné la direction de la Fédération de Saône-et-Loire. Votre avenir passe-t-il toujours par la Saône-et-Loire ?
Cette région est celle de mes racines. A chacune des épreuves politiques que j'ai dû affronter, les électeurs de la Bresse et du Val-de-Saône m'ont témoigné une fidélité sans pareille. Dans toutes les épreuves, je leur ai été moi aussi fidèle. Je pense d'ailleurs, dans les moments où il faut trouver le courage de faire face, souvent à beaucoup d'entre eux. Je leur resterai fidèle. Je reprends dans un mois la tournée des communes et des cantons où je rendrai compte de mon mandat.

Votre positionnement vous permet de prendre date pour l'après 2007, en cas d'échec de la Gauche à la Présidentielle.
Non. J'ai fait un choix de conviction qui m'est extrêmement coûteux. Je l'ai fait pour maintenir ces dizaines de milliers de militants ; ces centaines de milliers d'électeurs dans la croyance que le PS n'est pas celui qu'ils croient.
Je pense avoir fait œuvre utile au Parti, à la Gauche et à la France.

Votre ambition est-elle de rassembler à gauche, au-delà du Parti Socialiste ?
Mon objectif est de faire vibrer le PS au contact de la société, de tourner ce Parti vers elle.  

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