Européennes 2004
L'UMP a voulu
escamoter cette élection

Pierre Moscovici
Entretien avec Pierre Moscovici, tête de liste socialiste dans l'Est, paru dans le quotidien Le Monde daté du 3 juin 2004
Propos recueillis par Isabelle Mandraud


 

Pourquoi cette campagne pour les élections européennes a-t-elle du mal à s'engager ?
Elle commence. Le fait que cette campagne soit très près de l'élection antérieure, qu'il y ait une forte actualité et qu'elle s'opère selon un nouveau mode de scrutin explique qu'elle soit un peu escamotée. Mais je ne suis pas choqué que des sujets politiques apparaissent. L'Europe n'est pas à part, elle n'est pas un ovni. De la même manière qu'il existe des différences entre la droite et la gauche en France, elles opposent la droite et la gauche européennes.

Le sursaut civique des élections régionales peut-il se reproduire selon vous ?
Sur le terrain, je me rends compte que les Français ont repris goût à la démocratie car ils se sont aperçus qu'il n'y a pas de fatalité et que leur voix pesait. C'est vrai que la participation pour les élections européennes de 1999 était très faible. Mais cette fois, je ne serais pas surpris qu'ils viennent voter plus nombreux, même si la droite a joué la dépolitisation. Il n'y a eu aucune campagne d'incitation à s'inscrire sur les listes électorales. Rien, non plus, pour inciter des ressortissants européens à voter alors qu'ils le peuvent.

L'UMP a voulu escamoter cette élection comme les précédentes. Aujourd'hui, dans une sorte de sauve-qui-peut général, elle fait comme si ce scrutin était purement national. Elle se trompe. Il est à la fois européen, national et local.

Le PS semblait ne plus vouloir utiliser ouvertement l'argument du vote-sanction. Lionel Jospin dit le contraire. Qu'avez-vous choisi ?
Il n'y a aucune contradiction. Lionel Jospin a entièrement raison. Il serait absurde de faire comme si l'Europe était " ailleurs ". L'expression du vote-sanction est peut-être un peu passe-partout, mais il s'agit bien de la dernière occasion qu'ont les Français d'exprimer ce qu'ils pensent avant l'élection présidentielle de 2007.

Selon moi, trois paramètres sont importants. L'enjeu, tout d'abord. Quel type de construction européenne voulons-nous ? C'est tout à fait décisif de savoir quel sera le premier groupe politique, car de ce groupe dépendra la désignation de la Commission européenne et donc son orientation politique. Là est le vote utile : pour une Europe sociale contre une Europe libérale. Cette élection intervient aussi deux mois après un autre vote qui n'a pas été écouté. La situation n'est pas saine. Le gouvernement poursuit la même politique, en pire désormais avec la rigueur.

Il faut, enfin, tenir compte du mode de scrutin régionalisé et insister sur le rôle du député européen, montrer en quoi une Europe de gauche peut aussi agir à l'échelle des régions.

Comment fait-on campagne dans une circonscription aussi vaste que la vôtre ?
C'est un peu éprouvant. L'Est couvre 18 départements et environ 8 millions d'habitants. Je me rends dans chacun de ces départements. Les colistiers sont également très mobilisés. En fait, ce mode de scrutin marque plutôt un progrès. C'est tout de même mieux qu'avant, avec les listes nationales qui servaient en réalité de mesure de poids des partis.

Avez-vous, comme d'autres, sollicité le soutien de Lionel Jospin ?
Non, car j'ai fait le choix d'une campagne centrée autour des candidats. Mais il sera toujours le bienvenu.

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