Projet de budget 2004
La France va dans le mur

Florence Parly



Entretien avec Florence Parly, ancienne secrétaire d'Etat au budget, paru dans le quotidien L'Yonne Républicaine daté du samedi 27 septembre 2003
Propos recueillis par Gérard Delorme
 

Qu’est-ce qui vous fait dire que le gouvernement persévère dans l’erreur ?
Cela tient en trois mots : confiance, croissance, chômage ! La confiance des Français est en berne (62 % se disent pessimistes). La croissance est cassée. Notre taux de croissance est plus faible que celui de nos voisins européens, alors qu’avec le gouvernement Jospin, il était supérieur à celui de ces mêmes voisins. Ce qui est la preuve que la conjoncture internationale n’exclut pas tout. Et la reprise pronostiquée par le Premier ministre peut aider, mais elle ne suffira pas.
Enfin, le chômage s’accélère parce que la dynamique de l’emploi a été brisée. L’économie française détruit des emplois. Ainsi, au cours du premier semestre, il y a un solde négatif (57 000) entre les emplois créés et les emplois supprimés.

Pourquoi considérez-vous que ce budget est injuste et inefficace ?
A cause de la politique fiscale. Les impôts augmentent pour tout le monde, sauf pour les plus aisés qui bénéficient de la baisse de l’impôt sur le revenu, de la diminution des plus-values immobilières et du relèvement du plafond pour les salariés à domicile. En revanche, la taxe sur le gasoil, la hausse des tarifs publics, celle (à venir) des impôts locaux n’épargnent pas les familles les plus modestes. Le pire, c’est que tous ces cadeaux fiscaux n’ont servi à rien en matière de relance de la consommation ou de l’emploi. La baisse de l’impôt va à l’épargne alors qu’une augmentation significative de la prime pour l’emploi pouvait inciter à consommer d’avantage.

Pour vous, la politique de l’emploi est sacrifiée ?
Le budget de l’emploi ne fait pas partie des réalités du gouvernement. Il y a un véritable démantèlement avec la suppression, entre autres, des emplois-jeunes ou des aides éducateurs. La politique qui consiste à accorder des exonérations de charges aux entreprises conduit à des déficits abyssaux et inutiles, car ces mesures ne servent ni la croissance, ni l’emploi. Il n’y a pas de contrepartie.

La barre des 1 000 milliards d’euros de dette va être franchie en 2004. Qu’en pensez-vous ?
Fabriquer des déficits et de la dette, c’est irresponsable. Cette dette, ce sont des impôts pour demain qui viendront s’ajouter aux mesures de rigueur que l’on ne manquera pas d’annoncer après les élections. C’est une drôle de manière de préparer l’avenir.
La situation de quasi faillite que nous connaissons est aussi une insulte pour nos partenaires européens. L’euro, c’est des droits et des devoirs. C’est comme si l’équipe de France, s’apercevant qu’elle perd un match, demande que l’on change les règles et l’arbitre. La commission européenne a logiquement demandé à la France de revoir sa copie.

Avec l’APA non financée, n’avez-vous pas contribué à accroître ces déficits ?
L’APA n’était pas une dette cachée. Quand nous l’avons mise en place, nous avions dit qu’on légiférerait en 2003 pour revoir les mécanismes de financement.

© Copyright L'Yonne Républicaine


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