Non à la bunkérisation de la direction du PS

Vincent Peillon
Entretien avec Vincent Peillon, député européen, coanimateur du Nouveau Parti socialiste, paru dans le quotidien Libération daté du 2 juin 2005
Propos recueillis par Paul Quinio
 

Que s'est-il passé, selon vous, dimanche ?
Le vote puissant et net en faveur du non dit trois choses : un rejet sans appel de la politique de la droite, favorisé par l'autisme de Jacques Chirac après les cantonales, régionales et européennes de 2004 ; le refus, non pas de l'Europe, mais de la façon dont elle se met elle-même dans l'impasse ; la volonté de rompre au plan national et européen avec les dérives libérales qui sont en train de dissoudre le lien social.

Face à cette situation, que doit faire le PS, dont l'électorat a largement voté non ?
Sans aucun doute se remettre en cause. Le vote de dimanche n'est qu'une amplification des difficultés que nous avons connues le 21 avril 2002. A l'époque, la direction du PS n'a pas pris la mesure de l'événement. Sa seule réponse a été de faire entrer Laurent Fabius à la direction ! Aujourd'hui, à l'autisme de Chirac répond la bunkérisation de la direction du PS. Et les grands conciliabules portent sur la sortie ou non de Laurent Fabius du secrétariat national. C'est une plaisanterie ! Si c'est la seule réponse que nous avons à apporter à ce qui s'est passé dimanche, c'est un peu court. Si le PS veut se figer, faire la tortue romaine et laisser l'impression détestable aux Français que la seule chose qui compte, c'est le leadership de l'un sur l'autre, ça sera sans le NPS. Car si c'est le cas, tout le monde perdra en 2007. Samedi, lors du conseil national, nous poserons d'ailleurs la question à nos « amis » : « Est-ce que vous voulez gagner en 2007 ? » Car si on analyse bien les résultats de dimanche, c'est un formidable socle pour l'emporter, à condition d'apporter des réponses.

Lesquelles ?
Le PS doit absolument arrêter de se replier sur un quarteron majoritaire dont on voit toutes les divisions. François Hollande doit s'efforcer de rassembler tous les socialistes. Il ne peut le faire qu'en acceptant d'entendre ce que dit son électorat. Un double travail est nécessaire, sur la rénovation de nos pratiques politiques d'une part, sur la rénovation de notre projet de l'autre. Le monde, l'Europe, la France ont changé. Face à une mondialisation qui défie l'idée même de régulation économique, il faut choisir son camp. Soit nous restons dans une position mi-chèvre mi-chou, soit nous adoptons une position critique de combat. Nous devons aussi apporter des réponses nouvelles sur la question de la démocratie, qui est exsangue en France. Ce que Chirac nous propose aujourd'hui est le signe que notre système institutionnel est à bout de souffle. Il faut aussi un nouveau pacte social, reposer la question du travail, celle de l'identité nationale...

Quel rôle entend jouer le NPS dans le congrès de « clarification » que tout le monde promet pour l'automne ?
Il faut surtout éviter un congrès de police, de vengeance ou de glaciation. Il faut arrêter de penser que la question essentielle est celle de la candidature présidentielle, alors que nous ne sommes pas rassemblés et que nous n'avons pas de projet.

Hollande peut-il rester premier secrétaire ?
Nous n'avons aucune nouvelle de lui depuis dimanche. Ni les Français d'ailleurs... Ce qui est en jeu, ce n'est pas son poste. C'est sa capacité à rassembler les socialistes et à proposer une orientation politique en cohérence avec les attentes de la gauche. Est-ce qu'il en est capable ? C'est à lui d'apporter la réponse. Pour l'instant, nous ne l'avons pas.

Le NPS peut-il rallier Fabius ?
Le NPS ne se déterminera par rapport à personne. Encore une fois, toutes les combinaisons tactiques sont vouées à l'échec. L'actuelle majorité nous a accusés en 2003 de vouloir casser le PS. Trois ans après, c'est elle qui est en train de le casser. Il est temps qu'elle arrête le concours de bêtises dans lequel elle s'est engagée.

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