Hollande et Fabius ont le même bilan

Vincent Peillon
Entretien avec Vincent Peillon, député européen, coanimateur du Nouveau Parti socialiste, paru dans le quotidien Le Parisien daté du 3 novembre 2005
Propos recueillis par Philippe Martinat
 

A la Mutualité vous aviez affirmé que si la motion de François hollande gagnait avec 54 % ; ce serait une victoire arithmétique mais une défaite politique pour tous les socialistes...
Je continue de penser qu’il n’y aurait rien de pire pour le PS aujourd’hui que d’être divisé en deux blocs. Nous avons besoin d’une autre orientation politique, d’un projet attractif qui parle aux gens et d’équipes rénovées dans leur composition et dans leurs pratiques. Cela exige un parti rassemblé très au-delà d’une simple majorité arithmétique. L’objectif qui consisterait à couper le parti en deux n’est pas valable pour ce congrès. Pas plus qu’il ne l’était lors du précédent congrès à Dijon où François Hollande a refusé la synthèse que nous lui proposions. Depuis, le parti va cahin-caha dans des divisions de personnes et une absence de propositions politiques qui sont préjudiciables à tous le monde au PS. C’est pour cela que nous répétons depuis juin que nous sommes pour un rassemblement. Mais un rassemblement sans exclusive.

Redoutez-vous le poids dans ce congrès des fédérations des Bouches-du-Rhône et du Pas-de-Calais ?
Je ne trouverais pas sain pour le PS qu’un courant comme le nôtre, qui pèse sur l’ensemble du territoire - si l’on soustrait le Pas-de-Calais et les Bouches-du-Rhône - près de 30 % ne soit pointé qu’à 10 % dans ces deux fédérations.

Que reprochez-vous à la compositions de l’actuelle direction du PS ?
Dans la direction d’un grand parti comme le PS, il est important de brasser les expériences, les âges, les territoires, les couleurs, les professions. Aujourd’hui, à la tête de ce parti, on a l’inverse : une quasi-exclusion des générations en dessous de 50 ans, des femmes, des personnes représentant la diversité de la société. Ce que nous appelons le changement, ce n’est pas changer une ou deux têtes, ce n’est pas afficher une génération contre une autre génération, c’est réduire cet écart incroyable entre la représentation et le représenté.

Votre motion fait beaucoup appel au volontarisme...
En politique, la volonté est déterminante. Pour que ce volontarisme soit efficace, il faut revisiter certains objectifs - c’est ce que nous avons fait sur la mondialisation, sur l’Europe ou la question sociale - mais aussi mettre en œuvre de nouveaux instruments politiques. Il faut, par exemple, que dans le programme de notre candidat à la présidentielle soit proposée la refondation de la démocratie sociale dans les six mois. Sur la mondialisation, nous proposons l’utilisation en Europe de tarifs extérieurs communs, idée que vient de reprendre Lionel Jospin. Le Nouveau Parti Socialiste (NPS) c’est cela : de nouveaux objectifs qui s’adaptent au monde qui a changé, mais aussi de nouveaux instruments pour les atteindre.

Vous dites dans votre motion : “ on ne peut pas raser gratis. ” Comment financez-vous vos projets ?
Prenons l’exemple d’EDF. J’ai lu que François Hollande proposait, pour le rachat éventuel des 15% d’actions vendues au privé, de faire appel à la Caisse des Dépôts et Consignations. Cette proposition n’est pas dans sa motion mais dans la nôtre. Ce que nous ajoutons, c’est que cela suppose de comprendre qu’il faut arrêter le processus de privatisation de la Caisse des Dépôts et qu’il faudra en même temps vendre les participations de la Caisse des Dépôts dans des sociétés du CAC40, qui se montent à 25 milliards d’Euros. Sur chaque réforme, nous essayons d’être précis et de fixer des priorités.

La dynamique interne ne joue-t-elle pas à votre détriment, en faveur de la motion de Laurent Fabius ?
Nous sommes de très loin le premier courant du PS et la seule force réelle de stabilité au PS puisque au sein de la coalition de François hollande, il y a une multitude de présidentiables et d’écuries. Ceux qui ne pensent qu’à la question présidentielle - François Hollande et Laurent Fabius - et cherchent à se mettre en valeur dans un débat qui désespère aujourd’hui les militants et qui nous humilie devant les Français, se disqualifient. Les militants ne veulent pas d’un congrès de personnes mais un congrès d’orientation politique. Trois ans et demi après le congrès de Dijon, il n’y a toujours pas l’ombre d’une espérance. C’est cela qui est à mettre au bilan de ceux qui ont dirigé le parti ensemble depuis 2002.

Lorsque Laurent Fabius critique le bilan de la direction sortante, il devrait en assumer sa part ?
Bien sûr. La responsabilité d’un homme politique c’est d’assumer son bilan. Hollande dirige depuis huit ans. Fabius, qui était numéro deux du PS, l’a dirigé avec lui jusqu’à il y a moins de six mois. Ce sont des faits. A NPS, nous avons fait le pari dans ce congrès d’être utiles à tout le PS. Nous constatons jour après jour l’irresponsabilité des principaux dirigeants qui sont d’abord préoccupés de leur destin individuel plutôt que de notre destin collectif. Nous appelons tous les militants à nous donner assez de force pour être le vecteur du rassemblement et de la rénovation dont notre parti a besoin.

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