Christophe
CARESCHE


Gaëtan
GORCE


Arnaud
MONTEBOURG


Christian
PAUL


Vincent
PEILLON


Marisol
TOURAINE


Nous, députés, estimons...


que la limitation du cumul des mandats est la clef du renouveau démocratique. D'autant que l'opinion y est plus que majoritairement favorable.

Appel au partage du pouvoir

Texte paru dans le journal Libération daté du 8 février 1998


Le partage du pouvoir est la condition du renouveau démocratique dans notre pays. La limitation du cumul des mandats en est la clef. Les Français souhaitent des institutions plus efficaces. Ils les désirent plus morales. Ils les souhaitent aussi plus ouvertes. La limitation plus stricte des cumuls offrira au pays une forte bouffée d'oxygène démocratique. Cette réforme doit obéir à quelques motifs incontestables :
  • tout d'abord, à une recherche d'ouverture démocratique. Permettre aujourd'hui à des femmes et à des hommes nouveaux de partager les responsabilités locales et nationales, est un enjeu majeur. A long terme, c'est une pièce maîtresse de la refondation de notre vie publique.
  • ensuite, à la modernisation inachevée de nos institutions. Les féodalités verrouillées à l'occasion de chaque élection sont archaïques. L'instauration d'un véritable système parlementaire passe autant par la emise en cause du statut présidentiel que par l'appropriation réelle par l'Assemblée de ses pouvoirs législatifs et de contrôle.
La décentralisation ne sera achevée que si les collectivités locales deviennent le lieu d'un partage équilibré des responsabilités. Pour être efficace, la démocratie locale ne saurait être durablement confisquée.
Les cumuls excessifs à l'échelon local des mandats, des exécutifs et de diverses fonctions ouvrent la porte à de multiples dérives. La personnalisation du pouvoir, la concentration des décisions en sont des symptômes. Tôt ou tard suivent le fait du prince, l'arbitraire, l'opacité des choix et de l'usage des crédits publics.
Rien n'indique que la limitation du cumul des mandats soit une idée majoritaire au sein des deux Assemblées. Elle est, en revanche hypermajoritaire dans l'opinion. Cette demande de rénovation de la vie publique s'apparente à un appel à la morale civique, qu'il appartient au législateur de relayer.
L'engagement d'agir est un des termes du «pacte républicain», dont la trame guide le gouvernement Jospin. La limitation du cumul des mandats figure au premier rang des choix courageux qui incombent au parti du changement.
Auteurs d'une proposition de loi en ce sens, nous suggérons trois priorités.
  • le non-cumul des fonctions parlementaires et exécutives. Une loi organique doit rendre incompatible le mandat de député, de sénateur ou de représentant au Parlement européen avec l'exercice de toute fonction exécutive locale : président du conseil général ou régional, maire...
  • l'interdiction du cumul de plusieurs exécutifs locaux. Elle est nécessaire au partage du pouvoir entre les communes, les présidents des conseils généraux et régionaux. Ce sont ainsi plusieurs centaines de fonctions qui seront redistribuées, provoquant un appel d'air sans précédent.
  • conformément à la pratique actuelle, un ministre de la République doit quitter toute fonction exécutive dès son entrée au gouvernement. La prochaine révision autorise l'inscription de cette disposition dans les textes constitutionnels.
Quelques pièges sont à éviter. La thèse du mandat unique va à l'encontre de ces objectifs. Le mandat unique aurait, aujourd'hui, pour conséquence d'envoyer à l'Assemblée des « techno-politiques » coupés des expériences que seule procure la connaissance des territoires urbains ou ruraux.
L'indécision des apôtres du « cumul vertueux » est un autre obstacle. Ils invoquent la cohérence nécessaire des approches locales et nationale, la continuité des fonctions. A droite mais aussi à gauche, cette logique a démontré ses limites.
L'obstruction du Sénat n'est pas incontournable. Tout d'abord parce que la Haute Assemblée n'est pas unanime. Ensuite, parce que l'opinion sera pressante. Enfin, parce que la majorité ne manque pas d'arguments. La réforme du mode d'élection des sénateurs n'est pas un tabou.
Jacques Chirac, enfin, évoque la limitation des cumuls tout en prescrivant des placebos. Garant des institutions, il n'échappera pas à un moment de vérité sur ce sujet. Nous attendons de lui, comme du Premier ministre, qu'ils proposent à la France de renouer avec les standards de la démocratie.
par
Christophe Caresche, député (PS) de Paris.
Gaetan Gorce, député (PS) de la Nièvre
Arnaud Montebourg, député (PS) de Saône-et-Loire
Christian Paul, député (PS) de la Nièvre
Vincent Peillon, député (PS) de la Somme
Marisol Touraine, députée (PS) d'Indre et Loire.

Reproduit avec l'aimable autorisation du quotidien
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