Nous ne serons les porteurs d'eau ni de Fabius ni de Hollande


Entretien avec Vincent Peillon, député européen, cofondateur du Nouveau Parti socialiste, paru dans Le Figaro daté du 19 août 2005.
Propos recueillis par Nicolas Barotte


 

L'opposition du PS au gouvernement est-elle assez audible ?
La direction actuelle n'a pas pris la mesure du 21 avril, du sursaut nécessaire, des efforts indispensables. Elle a cru, avec les succès des régionales et des européennes, qu'une hirondelle faisait le printemps. Depuis 2002, le parti n'a ni su proposer ni su s'opposer de façon suffisante et convaincante. Notre démocratie n'a pas intérêt à avoir une opposition aussi faible, surtout lorsque nous sommes face aux plus mauvais gouvernements de la Ve République, et que la crise économique et sociale ronge la cohésion nationale et le civisme en profondeur.

Pourquoi ne pas choisir un allié privilégié parmi les différentes tendances du PS ?
Il n'y a rien de pire pour la gauche, et le PS en particulier, que de continuer à ne s'intéresser qu'à ses querelles internes, en grande partie des querelles de personnes. C'est ce qui arrive lorsqu'on n'accorde pas au débat d'idées l'attention et le respect nécessaires. La démarche du congrès doit être triple. Il faut d'abord regagner le temps perdu depuis le congrès de Dijon et construire un projet sur des bases différentes. Tout est à faire. Ensuite, pour que ce projet soit audible, le PS doit renouveler ses pratiques et ses équipes politiques. Tout bouge autour du PS, sauf lui, cela finit par se voir. Enfin, pour pouvoir agir, il faut savoir se rassembler. Cela suppose ne pas être dans un camp ou dans un autre et se choisir d'autres adversaires privilégiés que ses camarades de parti. Pourquoi choisir entre les vieilles tendances du vieux PS alors que c'est le nouveau PS qu'il faut construire ?

Le débat sur cette question au sein de NPS est-il clos ?
Nous avons eu un grand débat d'orientation politique en juillet. Une question fondamentale a été tranchée : le NPS défendra sa propre vision lors du congrès en déposant sa motion. Ensuite, tous les débats peuvent avoir lieu s'ils se déroulent dans la transparence.

Dans quelle condition pourriez-vous participer à une nouvelle majorité ?
François Hollande assure vouloir dépasser le oui et le non, mais il fait exactement le contraire : il ne rassemble que des gens du oui. Ses appels au rassemblement aujourd'hui sonnent faux et sont peu convaincants. Le NPS avait choisi le non tout en respectant le vote des militants. Et nous avons pris nos responsabilités une fois de plus en refusant de faire une motion du non. Ce n'est pas un appel opportuniste et hypocrite, c'est un acte politique. Claude Bartolone voudrait nous donner des leçons de morale militante, je ne suis pas certain qu'il soit le mieux placé. Pour nous, les choses sont claires : nous ne participerons à une majorité que si tout le monde s'y retrouve avec des équipes renouvelées mais, surtout, sur une autre orientation. Nous disons tout aussi clairement à François Hollande et à ses amis : ne comptez pas sur nous pour venir vous sauver et vous servir de force d'appoint. Nous ne serons les porteurs d'eau ni de Laurent Fabius ni de François Hollande. Les conditions que nous posons sont nécessaires à nos yeux pour gagner la prochaine élection présidentielle. Ceux qui ne veulent pas les remplir devront assumer de préférer leurs querelles à la gagne en 2007.

Vous devrez vous prononcer sur le choix d'un premier secrétaire.
Les motions ne sont même pas encore déposées ! Nous n'accepterons pas que le prochain congrès serve seulement des intérêts personnels. L'élection du premier secrétaire aura lieu après le congrès, après le débat d'idées. Le NPS pourra avoir un candidat. Ses militants en décideront. De la même façon, le NPS pourra avoir son candidat à la désignation pour l'élection présidentielle. Il n'y a pas de chasse gardée.

Et si Arnaud Montebourg voulait être candidat au poste de premier secrétaire ?
Le NPS a ses procédures : le vote des militants. Il faut aborder sereinement et de façon laïque les questions de personnes. Nous savons le faire, en amitié et en efficacité.

Pourriez-vous être candidat ?
Même question, même réponse !

Votre jugement sur Laurent Fabius a-t-il évolué ?
Fabius peut être demain le candidat des socialistes à l'élection présidentielle. Il en a la volonté. Il en a la stature. Notre responsabilité est de ne pas abîmer ceux qui peuvent être demain nos représentants. Mais le congrès du Mans ne doit pas servir de prédésignation pour l'élection présidentielle. C'est pourquoi il convient que nos champions ne s'abîment pas trop eux-mêmes dans des mauvaises querelles d'appareil.

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