Un sursaut s'impose au PS

Vincent Peillon
Entretien avec Vincent Peillon, coanimateur du Nouveau Parti socialiste, paru dans le quotidien Libération daté du samedi 28 juin 2003
Propos recueillis par Paul Quinio
 

Un mois après le congrès de Dijon, comment va le PS ?
Le parti doit se remettre au travail. Il a eu un peu de retard à l'allumage sur le dossier des retraites et il a été trop confus. Maintenant, il doit reprendre de la vigueur pour fournir aux Français une nouvelle offre politique. Pour notre compte, nous y sommes prêts. Il y a un sursaut qui s'impose. Hollande doit avoir cette ambition et ne pas se contenter de gérer l'appareil comme il l'a fait pour le congrès. Si le PS n'entreprend pas ce travail de fond, il va se marginaliser.

Cette semaine, vous avez revu François Hollande pour la première fois en tête à tête depuis le congrès. Toujours fâchés ?
Nous avons une préoccupation commune, c'est de nous opposer efficacement à la droite. Je crois qu'il est conscient que le pire serait la tentation sectaire à l'égard du NPS comme de Nouveau Monde. La démarche est plutôt de faire en sorte que le parti sorte de ses préoccupations internes pour se remettre en mouvement. Ça ne pourra pas se faire sans nous. Nous avons eu un congrès centré sur les enjeux de pouvoir, qui n'a pas permis d'opérer les clarifications nécessaires. Maintenant que ces luttes internes sont derrière nous, François Hollande doit rassembler tout le monde. Et ne pas oublier que quatre militants sur dix n'ont pas voté pour son texte. C'est indispensable pour s'opposer avec vigueur à la droite. Elle a oublié le 21 avril. Ça nous donne une responsabilité particulière.

Vous étiez porte-parole du PS, vous voilà dans la minorité. C'est difficile à vivre ?
Non. En tout cas, je ne regrette rien. Ni d'avoir été porte-parole, ni d'avoir engagé l'aventure collective du NPS. Nous voulons être une force positive, qui puisse contribuer à aider le parti à apporter des réponses qui tranchent avec le conformisme ambiant actuel. Les grands chantiers sont devant nous. Comment redonner confiance à nos concitoyens dans l'engagement politique dont ils se détournent ? Comment reconquérir les territoires perdus de la République, endiguer la crise d'identité nationale, refaire de l'éducation, de l'émancipation de tous, de la laïcité le coeur de notre projet collectif ? La démocratie sociale vient encore d'être bafouée. Comment éviter les attaques répétées de la droite contre toutes nos garanties sociales sans proposer un nouveau partage des richesses entre les actifs et les inactifs comme entre le capital et le travail ? Il faut retrouver du souffle, redonner une perspective.

Mais sur l'Europe, par exemple, le NPS est accusé de caresser le scepticisme européen dans le sens du poil.
Puisque nous sommes très européens, nous disons que l'Europe telle qu'elle est en train de se construire, non seulement détourne les peuples de son projet, mais pire encore, fait le lit des populismes. De ce point de vue, les résultats de la Convention sur l'avenir de l'Europe sont inquiétants : rien sur les services publics, l'harmonisation fiscale, la coordination des politiques économiques, les politiques sociales, les financements européens... Et si peu sur la démocratie.

La gauche bruisse d'initiatives pour se recomposer. Où se situe le NPS ?
Le plus dangereux serait de créer une division entre gauche gestionnaire et gauche protestataire. Là, c'est un boulevard pour la droite. Le NPS veut discuter avec tout le monde, avec SUD sans rompre avec la CFDT, avec le PRG comme avec l'extrême gauche. L'enjeu n'est pas tant de s'adresser aux appareils qui, à l'extrême gauche comme ailleurs, sont finalement très petits, mais à leur électorat potentiel. Je pense par exemple à cette génération radicalisée de trentenaires que nous avons vue émerger, notamment chez les enseignants, lors du mouvement social.

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