Construisons
l'utopie


 Contribution générale présentée par UTOPIA et proposée à la signature des adhérents du Parti socialiste
décembre 2002


 

Introduction

Au lendemain d'un terrible revers électoral,le congrès de mai 2003 à Dijon sera sans doute l'un des plus importants de l'histoire des socialistes depuis le congrès d'Epinay de 1971.

L'enjeu : saurons-nous apporter des réponses à la crise de sens que traversent les socialistes depuis près de 15 ans ?

A nous de réfléchir sur ce qui fonde notre identité, ce qui commande notre engagement collectif et ce qui guide notre action. 

En somme, nous devons nous interroger sur ce que signifie et implique d'être socialiste aujourd'hui. Cette réflexion est primordiale, nous avons fait le choix d'y prendre toute notre part, en toute indépendance.

Refusant d'accepter les inégalités et l'injustice, les socialistes se sont historiquement donnés pour ambition de transformer en profondeur la société. Nous ne devons pas perdre cette ambition.
Notre horizon politique ne peut se limiter à l'échéance d'une mandature. Nous devons définir un véritable projet de société, forcément pensé à long terme, qui implique une rupture avec la logique du capitalisme.
Prisonniers d'un cadre d'action à horizon trop rapproché, trop de socialistes considèrent pour acquis les fondements du capitalisme. La querelle imposée au sein de la famille socialiste, entre les « anciens » et les « modernes » ne doit pas structurer le débat qui s'engage. Les uns comme les autres restent trop attachés au dogme de la richesse productiviste et à l'idéologie du travail, éléments déterminants du fonctionnement du capitalisme.

En refusant cette alternative, nous entendons créer les conditions d'un débat ouvert, seul capable de redonner du sens à notre engagement, de redonner du souffle à notre projet.

Pour cela, nous sommes convaincus qu'il nous faut revenir aux sources mêmes de notre identité socialiste. Profondément humanistes, les socialistes n'ont d'autre dessein que de permettre et d'assurer le bien être collectif.

Parce que nous refusons une société où la compétition et l'individualisme sont devenus la règle, nous préférons mettre en avant le citoyen, comme maillon de la communauté humaine.

Attachés au « bien vivre ensemble », nous devons faire en sorte que l'épanouissement individuel aille de pair avec l'épanouissement collectif. L'objectif de l'approfondissement du lien social doit donc être au cœur de notre projet de société.
C'est l'ambition que nous nous fixons.

Or, notre société ne répond pas à cette double exigence. Les considérations économiques ne trouvent plus de frontières et la « rationalité économique » tend à régir une part toujours plus importante de notre existence.
Face à cela, nous optons de manière radicale pour un développement pluriel de nos sociétés, pour une mise en valeur du monde qui ne se réduise pas à la production et à la consommation.
L'augmentation de la production et de la consommation ne saurait être considérée comme le seul indicateur de richesse pertinent d'une société.

La société n'est pas une entreprise qui aurait simplement à reproduire chaque année un plus gros chiffre d'affaire. Rompons avec la conception d'une richesse dont l'unique indicateur serait le PIB. Substituons à l'objectif de croissance celui de « développement ».
La répartition des biens, des revenus, l'accroissement du niveau d'éducation, la capacité à maîtriser la violence, l'accès et la qualité des services publics, la vitalité de la vie sociale et démocratique, le niveau de respect de l'environnement... sont les vrais indicateurs d'une société « riche ».
De même, face à l'objectif de mondialisation, nous préférons construire ensemble un autre projet de « civilisation », un véritable projet de « développement universel ». Il doit permettre à chaque individu d'intégrer en société, de devenir un sujet autonome disposant des moyens, non seulement d'être indépendant financièrement mais aussi d'exercer son jugement, de participer aux choix communs, d'être éclairé.

Dessiner un projet de société ne nous libérons pas pour autant d'une réalité sociale très difficile. Nous affirmons également l'urgence de fixer comme objectif la disparition de la précarité dans nos sociétés autour de 4 droits : droit à la revalorisation des rémunérations et prioritairement des bas salaires, droit au logement, droit à un revenu minimum tout au long de la vie, droit à une activité reconnue.


Une société libérée
de l'emprise du travail



Repenser notre rapport au travail

    Si nous acceptons l'économie de marché, nous refusons de nous soumettre à la société de marché. Si nous acceptons que le travail soit une dimension de notre vie, nous refusons qu'il la conditionne.

    Né avec le capitalisme, le travail dans sa conception actuelle a acquis une place prépondérante dans notre société, au point que certains ont pu dire que nous vivions dans une société fondée par le travail.

    Cette situation est le résultat du développement du capitalisme, marqué par la soumission de l'ensemble des sphères de la vie aux considérations économiques, aux principes de l'économie de marché.

    Il ne s'agit pas ici de remettre en cause le travail en soi, et de prôner, comme certains, sa « fin ». Ce n'est pas sa « fin » mais sa place qui est en cause.

    Nous devons nous interroger : le travail doit-il être le seul lien social ? Est-il le meilleur lien social ? Nous répondons clairement : non.

    S'interroger sur l'emprise du travail dans la vie des individus pourrait paraître indécent quand beaucoup en sont privés. Il faut néanmoins le faire car ses principes fondateurs sont des principes économiques de rentabilité et d'efficacité qui nient l'homme et son épanouissement.
    Le travail reste aliénant pour beaucoup d'hommes et de femmes. C'est pourquoi il est nécessaire de le remettre à sa juste place et de libérer la société de son empire.
    Dire cela, ce n'est pas dire que nous renonçons à lutter contre le chômage. Au contraire, nous devons affirmer l'objectif du plein-emploi, car la sortie du chômage permet aussi de détendre notre rapport au travail.

    Le chômage n'est-il pas précisément ce moment où l'on prend conscience que « tout s'écroule », que notre vie entière est construite autour de cet unique lien social ?

    Par contre, nous refusons clairement de reconnaître ce que certains appellent la « société du travail » comme idéal de société. Une telle orientation scellerait notre renoncement à définir un nouveau modèle de société, en rupture avec celle que nous connaissons, marquée par la toute puissance de la sphère économique.
    C'est pourquoi nous militons pour la mise en place d'une société fondée sur une pluralité des modes d'accès à la reconnaissance sociale, seule garante de l'épanouissement de tous.
    Cette ambition nous conduit à repenser notre système de protection sociale et à engager une véritable politique en faveur du temps libéré.


Une protection sociale universelle

    Hérité des compromis sociaux de la Libération, le système de protection sociale de notre pays repose sur le travail. Les différentes prestations sont pensées comme autant de revenus de substitution aux revenus du travail.

    Il s'agit d'assurer autrement les 4 grands piliers de notre protection sociale (maladie, famille, vieillesse, chômage) qui peuvent entraîner l'arrêt provisoire ou définitif de l'activité professionnelle.

    Le financement des mécanismes de protection sociale est assuré par le prélèvement, sur les seuls revenus du travail, de cotisations sociales. La solidarité ne s'opère qu'entre les travailleurs, à travers une forme de mutualisation des risques.
    Les droits sociaux doivent être attachés à l'individu et à ses besoins fondamentaux. Ils ne doivent pas être conditionnés à l'exercice d'une activité professionnelle. Ils doivent être ouverts à tous dès la naissance.
    Notre système de protection sociale doit donc être radicalement réformé. Cela doit entraîner une évolution des modalités de financement de notre système de protection sociale.

    Ainsi, nous souhaitons que le financement par l'impôt se substitue au financement par les cotisations sociales. Dans cette optique, la gestion des organismes de protection sociale doit être totalement réorganisée. Nous plaidons pour que celle-ci soit conjointement assumée par le Parlement et un organe représentatif de la société civile, au sens large.

    Dans le domaine de la santé, Le versement de compléments au travers des mutuelles, principe généreux lors de sa mise en place, est aujourd'hui le reflet de l'inégalité des citoyens devant l'accès aux soins.

    Les remboursements doivent prendre en compte l'intégralité des soins requis, et non plus être limités à un quelconque plafond. Nous proposons la suppression du système des complémentaires santé et le remboursement intégral des soins via un régime unique quelle que soit la catégorie sociale ou professionnelle.

    De même, le versement et le montant de la retraite ne doivent pas dépendre exclusivement de l'exercice d'une activité professionnelle.


    D'autres éléments tels que l'exercice de fonctions sociales utiles à l'ensemble de la société doivent être pris en compte.

    Enfin, le minimum vieillesse ne peut être inférieur au SMIC.


Une nouvelle politique de réduction du temps de travail
Un nouveau rapport au temps

    Nous devons nous libérer de l'emprise « morale et sociale » du travail.

    Nous devons également combattre son emprise temporelle et réfléchir à la question du temps.

    La réduction du temps de travail peut être un levier de création d'emplois ou de réorganisation du travail au sein de l'entreprise. Elle doit avant tout être un formidable outil de transformation des modes de vie.

    Elle libère du temps que l'on peut consacrer aux autres, à sa famille, à ses amis, à la société, à soi-même. Elle est un facteur d'épanouissement individuel en même temps qu'elle cultive le lien social. A ce titre, nous regrettons que la mise en œuvre des 35 heures n'ait pas été pensée aussi dans cette perspective. Nous ne faisons pas partie de ceux qui crient haro sur les 35 heures. La réduction du temps de travail peut être une chance pour chacun d'entre nous, et pas seulement, pour les salariés les plus aisés. Aussi, nous considérons que l'objectif de temps libéré doit être poursuivi et réaffirmé.
    Pour cela, nous militons pour la mise en place de la semaine de quatre jours et pour une nouvelle diminution de la durée légale, sans perte de salaire et accompagnée d'une revalorisation des bas salaires.
    Nous nous prononçons pour une diminution de la durée légale du travail à 32 heures.

    Dans le même temps, nous devons envisager de nouvelles formes de réduction du temps de travail, conçues sur l'ensemble de la vie. Cela pourrait se traduire par la mise en œuvre d'un crédit-temps. Par ce biais, chaque travailleur se verrait reconnaître le droit de cesser momentanément son activité professionnelle pour mener un projet hors de la sphère du travail. Un tel dispositif permet de repenser la place du temps de travail dans les temps de la vie.

    Le temps libéré ouvre de nombreuses perspectives. Mais si l'on n'y prend pas garde, il peut être un nouveau facteur d'inégalité sociale entre, d'un côté, ceux qui pourraient mettre à profit ce temps libéré et, de l'autre, ceux qui seraient condamnés à le perdre. Le temps libéré ne doit pas être le temps des seules classes supérieures.

    Au contraire, il doit donner à chacun la chance d'accéder à la culture, aux loisirs, aux sports. Il ne s'agit bien évidemment pas de décréter quel est le bon usage du temps libéré. Chacun doit pouvoir user de son temps comme il l'entend. Il n'est pas interdit de ne rien faire.

    Mais cette liberté de choix doit être la même pour tous. Cela suppose des politiques d'accompagnement culturel, d'éducation, de loisirs et de jeunesse véritablement volontaristes.

    Notre conception de la richesse nous amène à remettre en cause le système capitaliste fondé exclusivement sur l'activité de production.

    Il faut repenser le lien social comme un élément fondateur de notre "vivre ensemble". Nous devons promouvoir des liens sociaux renouvelés, diversifiés qui fondent notre idéal de justice et de solidarité.



Des liens sociaux
renforcés et diversifiés...
pour de nouvelles solidarités



Les solidarités dans l'entreprise et le monde du travail

    Tout en proposant des formes alternatives de socialisation qui supposent une diminution de la place du travail, nous avons conscience que celui-ci représente un temps significatif dans la vie des individus.
    Parce que les droits fondamentaux de chaque individu sont supérieurs aux logiques de productivité des entreprises, la défense des salariés doit rester un combat essentiel des socialistes.
     LES DROITS DES SALARIÉS

    Nous voulons réaffirmer la primauté du code du travail et le renforcer en y intégrant notamment un encadrement strict des horaires de travail atypiques (travail de nuit, travail du dimanche…). Par ailleurs, certaines dispositions comme l'amplitude horaire hebdomadaire, le seuil de déclenchement des heures supplémentaires et des repos compensateurs doivent être alignés proportionnellement à la baisse de la durée légale. Nous souhaitons enfin renforcer l'arsenal juridique qui permet d'améliorer la situation des femmes dans l'entreprise.

    Nous devons non seulement conquérir de nouveaux droits mais aussi nous donner les moyens de les faire appliquer Ainsi, nous souhaitons des moyens supplémentaires pour faire appliquer le droit du travail. C'est pour nous un combat essentiel. L'inspection du travail doit aujourd'hui traiter 1,2 million d'entreprises, dont près d'1 million ont moins de 10 salariés, avec seulement 800 inspecteurs. Afin de garantir le droit des salariés, nous proposons, dans un premier temps, que le nombre d'inspecteurs du travail soit doublé, avec un objectif à atteindre, d'un inspecteur pour 500 entreprises.

     L'ORGANISATION DES SALARIÉS DANS L'ENTREPRISE

    Chaque salarié est acteur de la vie de son entreprise et de l'amélioration de ses conditions de travail. Nous reconnaissons la négociation entre les partenaires sociaux comme outil privilégié dans la gestion de l'entreprise.

    Nous tenons donc à réaffirmer la place majeure de l'action syndicale dans la volonté socialiste de voir se développer le progrès social.

    Nous proposons de donner les même garanties à l'ensemble des salariés : Si les comités d'entreprises sont obligatoires dans les entreprises de plus de 50 salariés, il est important de mettre en place une structure départementale et par branche de nature à offrir aux salariés des petites entreprises les mêmes droits que les autres.

    Nous nous prononçons également en faveur de la fin du système privilégiant les 5 syndicats dits représentatifs. Le caractère représentatif d'une organisation syndicale doit se fonder sur sa seule audience électorale.

    De même, un accord de branche ou d'entreprise ne doit être valable que s'il est signé par des syndicats représentant la majorité des salariés.

    Afin de garantir la liberté syndicale, il est nécessaire de donner à ces organisations la possibilité d'assurer leur autonomie financière en leur octroyant un financement public, correspondant à leur représentativité lors des différentes élections.

    Comme dans la sphère politique, nous devons aussi limiter le cumul des mandats. En contrepartie, il faut permettre aux représentants syndicaux un déroulement de carrière équivalent aux autres membres de l'entreprise.

    Nous appelons à l'organisation d'un rendez-vous social unique regroupant les élections à caractère professionnel pour le public et le privé (élections prud'homales, comités d'entreprise, délégués du personnel…).

    Nous devrons aussi renforcer les pouvoirs des comités d'entreprise dans le processus de prise de décision stratégique des entreprises.

    Nous souhaitons enfin encourager la création d'entreprises coopératives (SCOP) dans lesquelles les « salariés-associés » sont maîtres de leur avenir, sur le principe « un homme, une voix ». Le capital est ici considéré comme le moyen de créer et de conserver un outil de travail collectif.

     L'ÉCONOMIE SOLIDAIRE

    L’économie solidaire, c’est l’association du secteur privé au public et associatif pour construire un troisième secteur qui réponde à des besoins émergeants ou non rentables économiquement mais socialement utile.

    En effet, notre société voit de jour en jour ses liens sociaux se déliter et ses espaces publics se restreindre. Que ce soit à l'école, à la campagne, à la ville ou entre les générations, il faut redonner toute sa place à ce qui fonde notre « vivre ensemble ».

    Nous proposons donc de poursuivre massivement l'expérience « nouveaux services, nouveaux emplois » en mettant en place un certain nombre d'outils comme une agence nationale des indicateurs socio-éthiques et une étude permanente de l'INSEE, trimestrielle, sur l'état de l'emploi dans les secteurs associatifs, mutualistes et coopératifs.

    Nous proposons également la création d'une caisse nationale de développement solidaire chargée du financement de projets par des prêts à taux réduits et de l'accompagnement technique avant, pendant la mise ne place du projet et jusqu'à la pérennisation de l'activité.

    Enfin, nous envisageons la mise en circulation d'une véritable « monnaie de service » pour favoriser, en fonction des revenus de chacun, l'accès de tous à certains besoins sociaux (aides aux personnes âgées, soutien scolaire…).

    La collectivité doit aussi favoriser le secteur associatif qui est aussi créateur de richesse. Nous proposons la mise ne place d'un système qui favorise l'engagement des citoyens dans les associations et notamment les associations reconnues d'utilité publique.
    Chaque salarié qui s'engagerait dans « l'exécutif » de ces associations bénéficierait automatiquement d'une réduction de son temps de travail, sans possibilité de refus de l'employeur.
    La perte de salaire induite par cette diminution du temps de travail serait prise en charge par la collectivité.


L'accès aux savoirs pour tous

    La formation initiale, comme la formation tout au long de la vie sont des sujets centraux. C'est en effet en donnant les mêmes chances à chacun, au départ et tout au long de la vie, que nous contribuerons à développer la citoyenneté et à réduire les inégalités sociales.

     L'ÉCOLE

    Parce que l'école est un pilier de notre société, parce que c'est elle qui contribue le plus, avec l'éducation parentale, à façonner l'individu, elle doit être aussi au cœur de notre projet de société.

    L'école doit être le lieu d'une formation citoyenne avant d'être celui d'une formation professionnelle. Notre approche de l'école est conforme à l'ensemble de notre projet : elle est humaniste, elle replace l'homme et le lien social au centre des priorités. 
    Nous rejetons l'idée d'une école qui valoriserait le « potentiel économique » de l'individu avant d'éclairer le citoyen.
    Si nous avons réussi le pari que certains appellent la « massification de l'enseignement », nous n'avons pas su lutter contre la reproduction sociale. Pire, ces injustices flagrantes tendent à se renforcer. La proportion d'enfants d'employés et d'ouvriers dans des écoles comme polytechnique, normale supérieure ou l'ENA a été divisée par plus de 2 depuis les années 60. Nous ne pouvons nous satisfaire d'un discours d'autosatisfaction qui met en avant le pourcentage d'une classe d'age au bac. Nous avons échoué dans notre combat contre la reproduction sociale et nous le savons.

    Que dire d'un système qui ouvre certes à tous les portes de l'Université mais laisse subsister un système aussi élitiste que celui des classes préparatoires ?

    Que dire du financement public des écoles privées, abusivement qualifiées de « libres » ?

    L'école de la République doit être l'école de tous.
    Et l'école de tous, c'est d'abord celle qui se donne les moyens de rétablir une égalité des chances qui n'existe pas à la naissance.

    En favorisant la mixité sociale, elle joue pleinement son rôle de socialisation qui fonde notre « vivre ensemble ».

    Repenser le système éducatif pour le remettre au cœur de la société est une tache difficile mais nécessaire. Il a besoin d'une profonde remise en question pour être à même de former les générations de citoyens éclairés qui refonderont le lien social.

    Des mesures peuvent déjà être prises en ce sens :

    Nous proposons de favoriser le soutien des élèves en difficulté et en particulier des élèves issus des classes sociales populaires. Des classes à effectifs (très) réduits pour les lycées des zones défavorisées, des formes de soutien individualisé devront être mises en place...

    Il faudra également faire respecter strictement la carte scolaire pour éviter la formation de ghettos sociaux. L'éducation civique devra être l'axe central des programmes scolaires, en insistant davantage sur un apprentissage à la lecture des médias.


    Nous défendons la revalorisation de l'ensemble des savoirs n'ayant pas « d'utilité économique ». Nous devons réaffirmer, y compris dans les enseignements professionnels, notre attachement à la culture générale car c'est elle qui joue un rôle majeur dans l'insertion et l'ascension sociale.

    Dans un premier temps, nous proposons d'interdire les écoles privées qui ne sont pas sous contrat.

    Nous proposons également la remise en cause du système des classes préparatoires en l'intégrant au monde universitaire. L'objectif des grandes écoles doit être celui d'un recrutement plus diversifié et de multiplier les passerelles et échanges entre les mondes universitaires et celui des grandes écoles.

    Nous soutenons aussi la mise en place d'un véritable « contrat d'autonomie » pour garantir aux étudiants un niveau de revenu suffisant.

    La poursuite d'études, au moins jusqu'à 18 ans doit être favorisée
     : « l'envie de travailler » , souvent mise en avant par ceux qui prônent l'insertion professionnelle au plus tôt, n'est-elle pas curieusement inversement proportionnelle au niveau d'étude et de revenus des parents ?

     LA FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE

    La formation initiale est fondamentale. La formation tout au long de la vie l'est tout autant. Elle résonne comme une « seconde chance », offre la possibilité de former de nouveaux projets (professionnels ou pas) ou l'opportunité de se cultiver pour le plaisir.

    Aujourd'hui, paradoxalement, ce sont les plus diplômés qui ont le plus accès à la formation continue. Elle doit faire partie des temps de la vie et être accessible à tous.

    Nous proposons un droit à suspendre son activité professionnelle pour profiter de formations, de toute nature, dans le cadre d'un crédit temps sur la vie. L'individu devra bénéficier d'un revenu de substitution et d'un droit à réintégrer l'entreprise dans des conditions acceptables.


Le temps des femmes : pour une démarche féministe

    En se focalisant sur la croissance et le travail, on oublie que l'activité humaine est plurielle : activités sociales, amoureuses, parentales, politiques et que toutes ces activités sont nécessaires pour un développement humain de nos sociétés.

    Les femmes sont particulièrement touchées par la trop faible reconnaissance de ces temps de la vie. En trente ans, nous sommes passés d'un modèle où les femmes restaient majoritairement à la maison à s'occuper des enfants et des tâches domestiques, à un modèle où les femmes, désormais plus diplômées que les hommes, sont très majoritairement actives, y compris avec des enfants en bas âge.

    Or, la société ne s'est pas adaptée à cette nouvelle situation : ni les pouvoirs publics, locaux et nationaux, ni les entreprises, ni les hommes n'ont suffisamment évolué.

    Le fonctionnement des principales institutions n'a pas été revu, pas plus que le partage des rôles entre les hommes et les femmes.

    Les modes de garde des jeunes enfants et les rythmes scolaires sont restés organisés sur l'idée qu'il y a toujours quelqu'un, la mère, qui vient chercher l'enfant à la sortie de l'école.

    Les femmes ont donc tout simplement ajouté à leur rôle traditionnel, leur vie professionnelle.

    Elles continuent d'effectuer 80 % du travail domestique.
    Nous voulons « déspécialiser les rôles », c'est-à-dire favoriser un rééquilibrage des rôles entre l'homme et la femme en impliquant fortement les pères dans la vie parentale, en leur donnant l'occasion de relativiser leur investissement dans le travail.
    La société doit garantir à chacun un vrai temps : un temps pour les activités parentales (pour les parents mais aussi pour les enfants) et bien entendu du temps pour soi.

    Nous proposons donc d'intégrer dans les accords RTT des considérations d'égalité professionnelle. Il s'agit de porter à 3 mois le congé paternité, de faciliter le recours au temps partiel pour les hommes en limitant pour l'entreprise la possibilité d'en refuser l'accès et le retour au temps plein. Nous proposons un grand programme de construction de crèches pour atteindre l'objectif « d'une place pour chaque enfant » comme c'est aujourd'hui le cas dans certains pays scandinaves.

    Nous veillerons, dans le code du travail à renforcer la législation concernant le délai de prévenance et la flexibilité des horaires.

    Par ailleurs, nous proposons la généralisation des dispositifs de « bureaux des temps » mis en place à Paris ou à Poitiers qui permettent la coordination entre les temps de la vie (vie familiale, culturelle, associative, transport, accès aux services publics…).

    Enfin, la question de la représentation politique des femmes se pose encore de façon cruciale notamment pour l'Assemblée Nationale. Pour que la parité soit effective lors des élections législatives, nous reprenons à notre compte la proposition volontariste qui consiste à diviser par 2 le nombre de circonscriptions et à présenter un « ticket paritaire » qui amènerait mécaniquement à la parité.

    En tout état de cause, et quel que soit le mode de scrutin ou l'élection, la stricte parité devra être appliquée.



Pour un autre projet de civilisation



Pour une Europe forte et généreuse

    Le modèle européen doit être inspiré des pays les plus progressistes, il doit en reprendre les valeurs fondamentales : démocratie, justice sociale, préservation de l'environnement, solidarité avec les pays les plus pauvres,...
    Le principe doit être de tendre à une harmonisation par le haut des conditions de vie et de travail tout en poursuivant l'élargissement. L'Union doit également évoluer aussi bien dans ses institutions que dans son fonctionnement.

     LA RÉFORME DES INSTITUTIONS

    Pour donner plus de légitimité démocratique aux institutions, il faut réformer les trois organes de l'Union Européenne.

       Le Parlement

      Notre préférence va vers un double mode d'élection des députés européens.

      Après avoir défini des circonscriptions régionales au sein de chaque Etat, il serait procédé à une élection par liste à la proportionnelle, sur la base d'un député pour 1 million d'habitants. Chaque Etat membre disposant toutefois d'un minimum de 2 députés. Ce choix est dicté par deux objectifs : rapprocher les parlementaires européens des citoyens et permettre un débat sur ces questions à l'échelon local.

      A ces députés s'ajouteront 150 parlementaires élus à la proportionnelle sur une liste européenne, sur la base d'une circonscription européenne unique.

      Ce choix vise à favoriser l'émergence d'une opinion publique européenne et à clarifier le débat politique sur l'Union.

       Le Conseil des ministres de l'Union

      Pour son fonctionnement, nous privilégions la double majorité
      . Une mesure sera adoptée si une majorité de pays la vote représentant une majorité de la population européenne.

       La Commission

      Notre choix est celui d'une commission politiquement responsable, cohérente dans sa composition et assumant une politique claire. Dans cette optique, le président de la commission devra être le chef de file de la liste ayant gagné les élections européennes.
      Il sera alors seul responsable du nombre et du choix des commissaires choisis parmi les parlementaires européens. Ce « gouvernement européen » devra bien sûr être accepté par le Parlement européen.


     LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION

       Les compétences

      Nous proposons que soit clairement affirmé que les affaires étrangères sont désormais un domaine exclusif de l'Union.
      Le représentant de l'Union doit être un membre de la commission, placé sous l'autorité politique du Président. Les Etats gardent évidemment la capacité de discuter, au sein du Conseil, de ces questions.
      Concernant la défense, nous sommes favorables à la constitution d'un état major européen autonome mais intégré à l'OTAN.

       Le budget


      Le budget de l'Union ne doit plus être réduit à des tractations entre Etats : l'Union doit disposer de ressources propres. La cohérence budgétaire liée à l'Euro a imposé une maîtrise stricte des déficits publics des Etats, mais l'Union doit avoir la capacité d'emprunter pour financer des investissements à son échelle : grands réseaux, aides aux pays de l'Est ou du Sud, catastrophes,...

       La citoyenneté

      Tout résident sur le territoire européen, quelle que soit sa nationalité, doit bénéficier, sous conditions, des droits afférents à la nationalité européenne et notamment le droit de vote aux élections européennes ou la protection consulaire.

      Enfin, rappelons que les ambitions de l'Europe ne doivent pas s'arrêter à ses frontières.
      Elle doit réaffirmer sa volonté de coopération Nord / Sud et principalement dans son espace naturel : le bassin méditerranéen.


Pour une autre mondialisation

    Notre projet s'inscrit dans un cadre mondialisé. Cela a toujours été l'espace pertinent des socialistes, nous qui percevons l'internationalisme comme l'allié du progrès.

    Réaffirmons que la gestion des affaires de la planète est l'affaire des peuples et non des multinationales.

    Si la mondialisation est aujourd'hui essentiellement entre les mains d'intérêts privés visant le profit à court terme au détriment de l'intérêt général, c'est que parce qu'ils se sont saisis les premiers de son potentiel. Comme nous, les milliers de manifestants et de militants qui s'impliquent pour dénoncer les sommets honteux du tout économie, sont pour une autre mondialisation : un processus de libération de l'homme qui affirme un système de valeur, liberté, droits de l'Homme, démocratie, domaine public, patrimoine commun, et qui y soumet l'économie et les intérêts particuliers des lobbies.
    C'est tout d'abord au politique de reprendre ses droits et les rênes de la scène mondiale. La mondialisation des échanges et des économies pourra alors être vraiment encadrée et régulée par des structures représentatives et démocratiques qui pourront défendre les intérêts des populations.
    Il s'agit alors de repenser et redéfinir les instances et le fonctionnement des organismes internationaux.

    Oui à la marche vers un gouvernement mondial, issu de la légitimité des urnes, qui, fort du principe de subsidiarité, pourrait prendre en charge les questions d'intérêt planétaire au-delà du seul horizon marchand.

    Démocratiser et politiser les instances internationales c'est avant tout l'occasion de sortir de la logique d'une optimisation économique généralisée au service d'un ordre libéral.

    Pour aller dans cette direction, les premiers jalons se trouvent dans une réforme de l'ONU.

    Un FMI ou une banque mondiale sont des outils utiles à l'organisation des échanges. Mais, dans leur forme actuelle opaque et non démocratique, ils ne sont que les instruments désastreux d'un libre-échange aveugle. De plus, ces institutions imposent une logique de réduction des dépenses publiques au mépris de l'intérêt des populations. L'OMC, déconnectée du politique, n'envisage pas la supériorité de véritables biens et domaines publics de l'humanité face aux règles du marché. Patrimoine culturel, patrimoine génétique, l'eau, l'air, l'intérêt général des populations face à une épidémie, voilà des espaces parmi d'autres où les accords économiques et les brevets doivent laisser place à la décision politique et à une propriété collective.

    Nous proposons ainsi que l'ensemble des organismes internationaux soit placé sous la tutelle de l'ONU, dont le rôle politique et les pouvoirs seront renforcés.

    Un système de taxation sélective des mouvements de capitaux permettrait en outre de limiter les investissements spéculatifs et la volatilité des capitaux nuisibles au développement.
    Il faudrait enfin prévoir des mesures de rétorsion commerciale pour éviter le « dumping social » comme le « dumping environnemental », qui ne font qu'enrichir les potentats locaux à la botte des multinationales.

    Nous devons régler le problème de la dette du Tiers-Monde en la soldant totalement et en militant pour que l'ensemble des organismes internationaux annule purement et simplement la dette.

    Par ailleurs, une force internationale opérationnelle sous commandement de l'ONU doit être mise en place. C'est par là le gage d'une capacité réelle de mise en œuvre des décisions sans dépendre systématiquement d'une poignée d'états servant leurs intérêts.


Conclusion

En vous proposant ce texte qui veut délimiter la vision d'un nouveau modèle de société pour demain, et des propositions très concrètes pour aujourd'hui, nous, militantes et militants socialistes, vous invitons, avant tout, à un débat qui se doit d'être ambitieux.

Nous vous proposons un projet solidaire, généreux, profondément collectif. Il marque une rupture claire avec une réalité où l'échange ne serait que financier et l'Homme un consommateur.

Au sein de notre parti et de la gauche, il y a d'autres propositions, d'autres tentatives sincères pour répondre à l'injustice et dessiner une autre société.
Nous les respectons.
Chacun de ces projets est une chance et un levier pour démontrer que l'action politique est bien vivace. Le combat doit être mené contre le conservatisme d'un système dominant qui veut substituer l'économique au politique, l'argent au bulletin de vote.

Pour nous il s'agit du progrès humain : lien social, vie démocratique, maîtrise de son temps, ambition partagée, dignité des individus. Ce sont autant de valeurs qui ne se perçoivent que collectivement et qui s'appuient sur bien plus que des repères de croissance et de production.

C'est pour retrouver le sens de ce développement solidaire et harmonieux pour tous, que nous nous engageons aujourd'hui.

Nous faisons partie de ceux qui ont comme ambition de changer de modèle, de ceux qui ne sauront se satisfaire de rafistolages ou de régulation à la marge.

L'Utopie a un avenir, ensemble réalisons là !

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