Il y a un rejet de ce gouvernement

François Rebsamen



Entretien avec François Rebsamen, maire de Dijon, directeur de la campagne du PS pour les régionales, paru dans le quotidien Le Monde daté du 21 mars 2004
Propos recueillis par Isabelle Mandraud
 

A la veille du premier tour des élections régionales, quel est votre sentiment ?
Pour moi, le fond de scène est dressé : il y a un rejet de ce gouvernement. Il est impopulaire, sa politique est impopulaire. C'est quelque chose que nos candidats ont ressenti très fortement durant toute la campagne. Parallèlement, du côté du PS et de la gauche, nous avons constaté une forte mobilisation des militants et des sympathisants. Notre espoir, c'est que l'idée de l'utilité du vote est en train de marquer des points.

Selon vous, cela signifie que la participation pourrait être plus élevée que ce que prédisent les sondages ?
Pour l'instant, les estimations font plutôt état d'un taux d'abstention supérieur aux précédentes élections régionales, en 1998 - 42,3 % -. Le doute véhiculé sur la participation vient de l'incivisme de ce gouvernement, qui a volontairement coupé les crédits à l'information pour l'organisation de ces élections. Aucune campagne n'a été faite.

En Bourgogne, il projetait aussi d'aligner l'heure de fermeture des bureaux de vote dans les villes sur celle pratiquée dans les zones rurales, ce qui aurait réduit la durée des opérations de vote. Il a fallu que je me batte avec le préfet. Je lui ai dit que pour ma part, à Dijon, je les laisserai ouverts comme d'habitude. Il y a toujours 7 % à 8 % des électeurs, surtout dans les grandes villes, qui viennent voter la dernière heure. Or, le 28 mars, date du second tour, nous passons, en plus à l'heure d'été...

Quelles sont vos craintes pour ce scrutin ?
Il existe une réelle difficulté à faire passer au niveau national nos propositions régionales. Les Français sentent pourtant confusément que si la droite sortait confortée de ce scrutin, le gouvernement aurait alors les mains libres pour agir dans le domaine de la Sécurité sociale, du droit du travail ou bien encore sur le volet financier des lois de décentralisation. Mais l'idée qu'il s'agit d'un vote de protection pour l'avenir, plus encore que d'un vote-sanction, n'a pas été, à mon sens, assez popularisée. Il nous reste dix jours, d'ici au second tour, pour faire passer cette idée assez simple : Jacques Chirac devra tenir compte du jugement qui se sera exprimé.

Quelles sont les conséquences du nouveau mode de scrutin ?
Pour moi, il y a deux élections. Au premier tour, qui servira d'avertissement, la vraie difficulté sera, pour la gauche comme pour la droite, d'opérer très vite les fusions de listes. Une autre campagne commencera alors, qui favorisera la cristallisation des électeurs de gauche et de droite. Le second tour sera le temps du sursaut pour clarifier les choses.

Comment jugerez-vous que le PS et ses alliés remporteront une victoire ou une défaite au niveau national ?
La victoire serait de conserver nos régions - au nombre de huit aujourd'hui - et d'en gagner une, deux, trois ou quatre. La défaite serait de conquérir une ou deux régions mais d'en perdre d'autres. Dans le cas de figure où rien ne se passerait, où la gauche maintiendrait juste ses positions, cela signifierait... qu'il reste beaucoup de travail à faire.

Êtes-vous optimiste pour le résultat en Bourgogne, où vous êtes vice-président du comité de soutien de François Patriat, tête de liste de la gauche ?
J'ai bon espoir. Je crois que toutes les chances sont réunies pour qu'il l'emporte.

Dans certaines régions, la victoire de la gauche peut dépendre de triangulaires avec le FN...
Nous, nous avons eu un comportement exemplaire en 2002. Si le FN parvenait à se maintenir au second tour, je considère que ce serait d'abord un échec personnel du président de la République et du premier ministre, qui avaient promis de réduire son influence. Il faut bien se le demander : en quoi la politique menée depuis deux ans a pu faire baisser le FN ? Elle s'est attachée à défendre les intérêts du noyau dur de la Chiraquie.

Les élections cantonales seront-elles plus difficiles que les régionales pour le PS ?
Il y a plus de sièges de conseillers généraux renouvelables à gauche qu'à droite. Mais je sens une unité de vote. Même si les candidats UMP cachent leur appartenance, l'électeur qui a fait la démarche de venir pour l'élection régionale ne décidera pas deux choses différentes.

Le 21 avril 2002 est très présent dans les discours des socialistes. Vous espérez tourner la page ?
Oui, bien sûr. Il y a une fonction régénérescente à travers ce vote.

© Copyright Le Monde

Page précédente Haut de page

PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]